key: cord-259235-p0yj9qug authors: de Lamballerie, Xavier title: Diagnostic et traitement des viroses émergentes : comment aller de l’avant ? date: 2016-12-31 journal: Bulletin de l'Académie Nationale de Médecine DOI: 10.1016/s0001-4079(19)30571-0 sha: doc_id: 259235 cord_uid: p0yj9qug SUMMARY Virus emergence episodes follow one another at a steady pace. The medical and scientific community responds to needs as and when they arise but finds difficult to propose a global strategy in the medium and long term. Regarding diagnosis, priority should be given to anticipating the management of re-emerging pathogens, to developing capacities of real-time molecular diagnosis, and to preserving reference expertise and reference biological materials. This effort should also include sero-epidemiological studies aiming at obtaining a more accurate mapping of the circulation of potentially re-emerging pathogens. Regarding therapeutics (with the exception of vaccines which are addressed in another presentation), the expected improvements are the advance implementation of ready-to-use protocol frames for clinical trials and that of an ambitious strategy aiming at gradually covering the taxonomic spectrum of evolutionary virus groups infecting vertebrates. L'émergence des pathologies virales humaines fait référence à des situations assez différentes : (i) l'émergence réelle d'un nouveau pathogène n'ayant jamais été impliqué auparavant en pathologie humaine (un exemple emblématique est fourni par le virus du SARS) [1] ; (ii) l'émergence dans une population donnée d'un pathogène déjà impliqué en pathologie humaine dans un contexte épidémiologique différent (on parle ici plus proprement de pathologie « ré-émergente » et l'arrivée des virus Chikungunya [2] ou Zika [3] dans le Nouveau Monde constituent des exemples récents ayant provoqué des épidémies massives) ; (iii) la découverte d'un nouveau pathogène qui en réalité a déjà circulé chez l'homme mais n'avait jamais été identifié ; dans ce dernier cas la notion d'émergence est abusive (un bon exemple est fourni par la découverte récente du Métapneumovirus humain, qui est en réalité un pathogène humain ancien) [4] . Ces concepts sont retrouvés à l'identique en pathologie vétérinaire, et même pour les virus des plantes. Les virus émergents humains et animaux sont fréquemment associés à une diffusion épidémique contre laquelle les autorités publiques et sanitaires sont désemparées en raison de l'ignorance complète (pour les virus émergents) ou de la méconnaissance (pour les virus ré-émergents) des cycles biologiques et environnementaux, de l'histoire naturelle et des formes cliniques de la maladie, des outils diagnostiques et thérapeutiques. De plus la propagation rapide dans la population est facilitée par l'absence d'immunité naturelle ou vaccinale et de thérapeutiques curatives spécifiques. Les dernières décennies nous ont apporté des concepts simples et robustes concernant les mécanismes d'émergence : (i) Les virus émergents en pathologie humaine sont le plus souvent des virus d'origine animale qui infectent l'homme de manière accidentelle (on parle de « franchissement de la barrière d'espèce ») [5] . Dans Il convient ici de distinguer clairement le cas des émergences de celui des ré-émergences. Dans le cas des agents ré-émergents, il est tout à fait possible de lister les pathogènes dont le risque de ré-émergence est significatif [11] et de se préparer à cette éventualité. Ceci devrait constituer une priorité absolue des autorités de santé, structurée sur 4 items : (i) la qualification de tests diagnostiques standardisés pour chacun des pathogènes listés ; (ii) la préparation de contrôles de qualité pré-qualifiés pour les utilisateurs de ces tests ; (iii) le pré-déploiement dans toutes les régions du monde sous l'égide des agences sanitaires de plans d'approvisionnement en réactifs qualifiés et contrôles de qualité ; (iv) la mise en place et la formation d'un réseau d'utilisateurs potentiels. À l'opposé, il n'y a par nature que peu de moyens d'anticiper la mise en place de tests diagnostiques pour les virus émergents. L'épisode du SARS nous a montré que mobilisée face à l'urgence sanitaire d'une telle situation, la communauté scientifique mondiale pouvait apporter une réponse rapide au problème du diagnostic par la caractérisation génomique du pathogène et la mise en place de tests moléculaires (cf. ci-après) [12] . Une amélioration significative reposerait ici encore sur la mise en place des items (iii) et (iv) évoqués ci-dessus. Le diagnostic direct des infections apporte une information directement utilisable pour la prise en charge médicale des patients et le renseignement de la situation épidémiologique. Il a longtemps été d'une grande difficulté technique, reposant sur l'isolement viral dans des animaux, puis en culture cellulaire, suivi d'une identifica-tion d'une précision variable par des anticorps, une analyse morphologique en microscopie électronique, ou la simple observation d'un effet cytopathique. Cette difficulté a été balayée par la mise au point de techniques d'identification moléculaire. La technique d'amplification génomique par PCR (pour les agents à génome ADN) ou RT-PCR (pour les agents à génome ARN) en temps réel conjugue une haute spécificité, une haute sensibilité et un prix en diminution constante à une standardisation des procédures et une reproductibilité remarquables. Un de ses avantages majeurs réside dans le fait que la maîtrise de la technologie par un opérateur permet l'application à toutes sortes de pathogènes (viraux, bactériens ou parasitaires) sans nécessiter d'expertise microbiologique spécifique préalable. Elle peut de plus apporter si cela est nécessaire des résultats quantitatifs (« charge virale »). Le renforcement des capacités diagnostiques de terrain par la (RT-)PCR en temps réel constitue une priorité bien supérieure à celle de la proposition de techniques nouvelles à des prix inadaptés. Le diagnostic indirect (sérologique) des maladies virales émergentes ou ré-émergentes est particulièrement négligé. Sa place dans le diagnostic médical est certes plus modeste que celle du diagnostic direct, mais ces techniques ne doivent toutefois pas être sous-estimées pour plusieurs raisons. D'abord, le service médical des tests sérologiques peut se révéler important dans des circonstances particulières. C'est le cas par exemple du suivi des femmes enceintes et de leur enfant en zone de circulation du virus Zika [14] . Cela peut être également le cas lorsque le diagnostic ne peut intervenir qu'après la virémie (qui est généralement courte) ; dans ce cas la détection d'IgM pourra orienter le diagnostic. Enfin, il convient de ne pas oublier que la mise en évidence d'une séroconversion IgG (par exemple lors du suivi d'une grossesse) constitue une évidence de l'infection du même niveau que la détection directe du pathogène. Ensuite, la capacité à détecter les anticorps IgG contre un pathogène donné permet la mise en place d'études séro-épidémiologiques dont l'importance est cruciale et négligée. La situation actuelle en termes de cartographie de la circulation des pathogènes potentiellement ré-émergents est navrante. À titre d'exemple, le seul arbovirus dont la circulation avait été prouvée en République du Congo jusqu'à une période récente était le virus de la fièvre jaune, alors qu'une simple étude de séroprévalence a permis de préciser l'importance de la circulation de la dengue, du chikungunya, de la fièvre de la vallée du Rift, de la fièvre de West Nile (Dr. Nanikaly Moyen, données personnelles Un cas particulier de thérapeutique antivirale applicable aux infections émergentes et ré-émergentes est constitué par la sérothérapie au sens large qui inclut l'usage d'immunoglobulines humaines ou animales (ces dernières pouvant être « humanisées ») monoclonales ou polyclonales [19] . Elle a été très largement utilisée, et depuis fort longtemps en contexte épidémique [20] pour les pathogènes bactériens, en particulier -mais non exclusivement-ceux qui produisent des toxines. Son usage en virologie a été proposé pour un très grand nombre de pathogènes viraux (parmi lesquels: virus de l'immunodéficience humaine, cytomégalovirus, virus Ebola, de la grippe, des hépatites A et B, Junin, de la rougeole, des oreillons, parvovirus B19, virus de la polio, de la rage, virus respiratoire syncytial, virus de la rubéole, de la vaccine) [19, 21] . Les usages courants restent néanmoins limités à un petit nombre de pathogènes (virus des hépatites A et B, virus de la rage, virus respiratoire syncytial). Il a été fait avec succès un usage préventif et curatif de sérums humains immuns dans un cadre épidémique pour le virus Junin (arénavirus responsable de la fièvre hémorragique argentine) [22] [23] . L'utilisation d'immunoglobulines humaines antichikungunya a été proposée en particulier pour les nouveaux-nés en cas d'infection dans la dernière semaine de la grossesse [24] . L'utilisation de plasma de patients convalescents a été dès 1999 proposée pour le virus Ebola [25] . Toutefois, une étude récente durant l'épidémie d'Afrique de l'Ouest n'a pas pu mettre en évidence de bénéfice en termes de taux et durée de survie [26] . The severe acute respiratory syndrome Chikungunya in the Americas Zika virus: following the path of dengue and chikungunya? A newly discovered human pneumovirus isolated from young children with respiratory tract disease Catastrophes after crossing species barriers US fails to quantify threat of West Nile virus Yellow fever Transmission cycles, host range, evolution and emergence of arboviral disease RNA replication errors and the evolution of virus pathogenicity and virulence Factors in the emergence of infectious diseases Identification of a novel coronavirus in patients with severe acute respiratory syndrome Temperature and the field stability of a dengue rapid diagnostic test in the tropics Background review for diagnostic test development for Zika virus infection Efficacy of lamivudine on replication of hepatitis B virus in HIV-infected patients Inhibitors of the tick-borne, hemorrhagic feverassociated flaviviruses T-705 (favipiravir) and related compounds: Novel broad-spectrum inhibitors of RNA viral infections T-705), a novel viral RNA polymerase inhibitor Passive immunity in prevention and treatment of infectious diseases The 1932 Macau epidemic of cerebrospinal meningitis: a historical perspective and critical review of the data Therapeutic antibodies in Infectious disease Importance of dose of neutralising antibodies in treatment of Argentine haemorrhagic fever with immune plasma Argentine Hemorrhagic Fever Prophylaxis and therapy for Chikungunya virus infection Treatment of Ebola hemorrhagic fever with blood transfusions from convalescent patients. International Scientific and Technical Committee Evaluation of Convalescent Plasma for Ebola Virus Disease in Guinea Evaluating clinical trial designs for investigational treatments of Ebola virus disease The Ebola clinical trials: a precedent for research ethics in disasters