key: cord-0007679-fl14to1o authors: Seguin, P.; Launey, Y.; Nesseler, N.; Malledant, Y. title: Faut-il contrôler la fièvre dans les infections sévères ? date: 2016-03-11 journal: Reanimation DOI: 10.1007/s13546-015-1168-x sha: 3b4020e025421d93dbb1aaf0d6844a351238d952 doc_id: 7679 cord_uid: fl14to1o Temperature control during severe sepsis is currently used in intensive care and involves 66% and 70% of severe sepsis and septic shock, respectively. Nevertheless, the conclusive evidence of the benefit of such a strategy is still lacking.We might wonder, with regards to experimental works and recent noninterventional studies, about the risk of a control strategy on an ongoing infectious process, the patient’s outcome, and the safety of the means implemented to obtain temperature control. On the other hand, it is also demonstrated that fever increases oxygen consumption, which may lead in some clinical situations to tissular ischemia and that fever may be associated with a deleterious focal inflammatory process. Methods to control the temperature include external and/or internal cooling and/or antipyretic medications such as paracetamol and nonsteroidal antiinflammatory drugs. In septic patients, external cooling and paracetamol are the mains means used to control temperature. Despite the uncertainties about the benefit to control or not the temperature, it could be stated that extreme temperature (hypo- or hyperthermia) should be avoided and that the benefit/risk of temperature control must be individually weighted. La fièvre est une réponse physiologique, non spécifique, à une agression infectieuse ou non. Ce symptôme fréquent en réanimation n'a cependant fait l'objet que de rares études épidémiologiques [1] [2] [3] [4] [5] . Son incidence, de 26 à 70 % selon les séries, dépend du seuil de définition retenu, de la typologie des patients étudiés (médicaux, chirurgicaux, traumatologiques), ainsi que de sa durée de prise en compte, parfois limitée aux premières 48 heures d'hospitalisation. Lors des infections les plus graves, la réponse fébrile est observée dans 82 à 88 % des cas [1, 3] . Si son rôle délétère est bien démontré chez les patients cérébrolésés, conduisant alors à des stratégies de contrôle agressives [6, 7] , l'extrapolation aux patients septiques est probablement discutable. Contrôler la température dans ce contexte suppose avoir démontré que le cours évolutif de l'infection ne sera pas exacerbé et/ou le devenir amélioré ou que les thérapeutiques utilisées pour contrôler la température n'induiront pas d'effets délétères. À l'heure actuelle, ces prérequis ne sont pas formellement établis, et il existe des arguments qui laissent à penser qu'un contrôle de la température sans discernement pourrait être nocif. Malgré ces réserves, dans un travail récent réalisé auprès de 139 services de réanimation, il apparaît qu'en pratique courante des stratégies de contrôle de la fièvre lors des états septiques graves et des chocs septiques sont utilisées dans respectivement 66 et 70 % des cas, [8] . Définition et physiopathologie de la fièvre Physiologiquement, la température corporelle normale varie peu, avec une moyenne de 36,8°C (étendue : 35,6 à 38,2°C) et des variations diurnes inférieures à 1°C, la température étant plus basse le matin que le soir [9] . La fièvre doit être différenciée de l'hyperthermie qui reflète un dérèglement des mécanismes périphériques de perte ou de production de chaleur. Le seuil à partir duquel le diagnostic de fièvre en réanimation est posé diffère selon les études (de 38 à 38,5°C), mais les recommandations des sociétés nordaméricaines de réanimation et de pathologie infectieuse ont retenu celui d'une température supérieure ou égale à 38,3°C, hors immunodépression et/ou procédures (suppléances rénale et/ou cardiopulmonaire par exemple) diminuant artificiellement la température [10] . Cette définition pose problème, car elle dépend de la méthode de recueil, la référence étant obtenue par la thermistance du cathéter de Swan-Ganz. Or, si la plupart des patients ne disposent pas d'un tel monitorage, la concordance avec les méthodes de mesures substitutives est loin d'être parfaite [11, 12] , les méthodes invasives (intravasculaire, oesophagienne ou vésicale) étant les plus fiables [10] . A contrario, les méthodes non invasives, quelles qu'elles soient, retrouvent dans environ 20 % des cas des valeurs de températures supérieures à ± 0,5°C par rapport à celles fournies par un cathéter de Swan-Ganz [13] . Par le biais de différentes voies d'activation, la fièvre est secondaire à un dérèglement du centre de régulation thermique situé sur la face antérieure de l'hypothalamus [14] . On distingue plusieurs voies d'activation du « thermostat » thalamique (Fig. 1) . La plus classique, la voie humorale, est médiée par des pyrogènes endogènes et surtout exogènes. Ces derniers sont des substances étrangères à l'organisme (bactéries, virus, parasites, toxines…), qui vont stimuler les cellules de l'hôte (essentiellement polynucléaires neutrophiles, macrophages, monocytes) et conduire à la production des pyrogènes endogènes. Il s'agit de cytokines (interleukine-1β [IL-1β], tumor necrosis factor [TNF-α], interleukine-6 [IL-6] et interférons), relais indispensables pour pénétrer les centres nerveux et déclencher les mécanismes conduisant à la fièvre. La barrière hématoencéphalique, classiquement étanche, est néanmoins constituée d'organes circumventriculaires, véritables « fenêtres » ouvertes sur la circulation sanguine. L'organe vasculaire de la lame terminale est l'une d'entre elles, située en regard de l'aire préoptique de l'hypothalamus. C'est à ce niveau que les pyrogènes endogènes vont stimuler la production de prostaglandines (PG), notamment la PGE 2 , à l'origine d'une activation de l'aire préoptique. À partir de l'hypothalamus, la fièvre apparaît, sous l'action combinée des systèmes nerveux sympathiques par inhibition des processus de perte de chaleur (vasoconstriction cutanée) et stimulation de la production de chaleur (tissu adipeux brun) et somatique, à l'origine de contractions musculaires responsables des frissons (Fig. 1) . D'autres voies, impliquées dans le pic précoce de fièvre, sont reconnues. Elles sont humorales, dépendantes respectivement des productions périphérique de PGE 2 et centrale de céramide à partir de l'IL1-β. Enfin, une voie neuronale est décrite, indépendante de la production de cytokines, liée à la stimulation des cellules de Küpffer par le lipopolysaccharide (LPS) et à la transmission au centre hypothalamique par le nerf vague (Fig. 1 ). Si beaucoup d'études expérimentales suggèrent que la fièvre est bénéfique pour l'hôte, il faut souligner l'absence de données cliniques solides, notamment lors des états septiques graves. Néanmoins, certains faits acquis méritent d'être rappelés. La croissance de la plupart des agents pathogènes chez l'homme est optimale pour des températures entre 35 et 37°C. Ainsi, dans un modèle de méningite expérimentale à pneumocoque, la vitesse de croissance bactérienne était plus rapide lorsque la réponse fébrile était artificiellement bloquée [15] . In vitro, la croissance intraérythrocytaire de Plasmodium falciparum était inhibée en cas d'exposition à une température de 41°C, alors qu'elle augmentait à la température de 37°C [16] . L'étude de 342 souches bactériennes révélait qu'à 41,5°C, les concentrations minimales inhibitrices étaient dans 17,1 % des cas au moins quatre fois plus basses qu'à une température de 35°C [17] . La lutte contre un processus infectieux conduit à une réponse immunitaire hautement coordonnée, et les mêmes cytokines sont impliquées à la fois dans les réponses fébriles et immunitaires. Dans ce contexte, la fièvre (≈ 39,5°C) stimule les immunités innée et adaptative (Tableau 1) [18] . Par ailleurs, la fièvre influence par elle-même l'amplitude et la cinétique de la réponse inflammatoire [19, 20] . Dans un modèle de sepsis expérimental chez la souris, la fièvre (39,5-40,0°C) amplifiait précocement la réponse inflammatoire avec des taux plasmatiques de TNF-α et d'IL-6 respectivement multipliés par 4,1 et par 2,7, comparé aux animaux maintenus à une température de 37°C [19] . Parallèlement, l'expression de protéine de choc thermique (HSP : heat shock protein) HSP-72 au niveau rénal et hépatique augmentait pour des températures supérieures à 39,5°C [19] . Or, ces protéines de choc thermique jouent un rôle clé dans la protection de l'endothélium et l'atténuation des défaillances d'organes [21] . Dans un modèle de péritonite stercorale, les animaux fébriles (température > 39°C) avaient un taux d'HSP-70 significativement plus élevé et une survie plus prolongée que ceux spontanément hypothermes ou dont la température était maintenue artificiellement entre 36 et 37°C par du paracétamol et un refroidissement externe [22] . Indirectement, la même équipe montrait que le réchauffement interne précoce par hémofiltration continue d'animaux septiques permettant de maintenir une température aux valeurs de base (≈ 38,8°C) améliorait l'hémodynamique systémique et la survie comparativement aux animaux hémofiltrés mais non réchauffés (valeur minimale de température = 36,1°C) [23] . Les études cliniques sont souvent anciennes et méthodologiquement discutables. La survie des patients bactériémiques à bacilles Gram négatifs était significativement meilleure lorsqu'une fièvre était présente le jour de la bactériémie [24] . Lors de péritonites bactériennes spontanées, la survie était plus faible lorsque la température était inférieure à 38°C [25] , et une corrélation positive était retrouvée entre le niveau de température et la survie [26] . Les sujets âgés incapables de développer une fièvre et une hyperleucocytose lors d'une pneumonie communautaire avaient un risque de décès sept fois plus important que les patients fébriles et hyperleucocytaires [27] . Plus récemment, l'impact de la fièvre sur la mortalité de patients septiques a été rapporté [28] [29] [30] [31] [32] . L'étude observationnelle multicentrique française sur les candidémies montrait qu'une température supérieure à 38,2°C était un facteur indépendant de survie [28] . À partir des données rétrospectives recueillies dans 129 services de réanimation australiens et néo-zélandais, les auteurs ont observé l'impact sur la mortalité du niveau de température des premières 24 heures d'hospitalisation [29] . Après ajustement sur la gravité de la maladie, la mortalité était réduite dès que le niveau de température était supérieur ou égal à 37°C, notamment pour des températures entre 39 et 39,4°C [29] . De même, chez 624 patients en sepsis sévère pulmonaire et intra-abdominal, la relation entre mortalité à j+28 et hospitalière et les valeurs de températures les plus pathologiques des premières 24 heures, selon la stratification imposée par le score APACHE II, était rapportée [30] . Seule l'hypothermie (température ≤ 36,5°C) était significativement associée à une surmortalité [30] , relation classique retrouvée dans d'autres études de grande ampleur [31, 32] . Par ailleurs, bien qu'il ne s'agisse pas stricto sensu d'un contrôle de la fièvre, il a été montré chez des patients atteints de méningites graves qu'une hypothermie provoquée entre 32 et 34°C n'améliorait pas le pronostic neurologique à trois mois et s'accompagnait d'une surmortalité [33] . A contrario, dans une étude prospective multicentrique, la mortalité à j+28 des patients septiques n'était pas influencée par la valeur maximale de la température relevée en réanimation, et ce même pour les températures les plus élevées (≥ 39,5°C) [31] . Des arguments cliniques plaident donc en faveur de la fièvre qui ralentit la croissance des micro-organismes pathogènes communément isolés chez l'homme et stimule l'immunité. Cependant, il faut souligner qu'il est difficile, à partir de ces études, de conclure formellement que le meilleur pronostic est uniquement lié à la présence d'une fièvre qui par sa présence (vs normothermie) pourrait raccourcir les délais diagnostiques et thérapeutiques. La fièvre peut être délétère par deux mécanismes distincts. Tout d'abord, elle augmente le métabolisme de base et de ce fait la consommation en oxygène (O 2 ) de nombreux organes, notamment le coeur, le système respiratoire et le cerveau [34] . La période d'installation d'une fièvre avec frissons multiplie par 6 la demande métabolique, et le maintien de la température à un niveau élevé nécessite d'augmenter de 12 % par degré Celsius le métabolisme [35] . Les conséquences peuvent dès lors être néfastes lorsque les capacités à faire face à une demande accrue en O 2 sont altérées et conduire à une ischémie tissulaire. Ainsi, dans un modèle animal d'infarctus du myocarde, l'élévation de la température à 39°C augmentait la taille de l'infarctus [36] . A contrario, la diminution de la température réduit la dépense énergétique et la consommation d'O 2 [37, 38] . Chez 12 patients fébriles avec fièvre résistante au paracétamol, la réduction de la température de 39,4 à 37°C par curarisation et refroidissement externe diminuait respectivement de 18 et 23 % la consommation d'O 2 et le débit cardiaque, avec parallèlement une diminution de 20 % de la production de dioxyde de carbone [37] . Des résultats similaires étaient rapportés avec l'administration d'ibuprofène, anti-inflammatoire non stéroïdien (AINS) chez des patients septiques [39] . Cependant, les frissons, induits notamment par un refroidissement externe, génèrent par eux-mêmes une augmentation de la consommation en O 2 . Une sédation profonde, voire une curarisation sont alors nécessaires [40] . Par ailleurs, la réponse inflammatoire induite par la fièvre pourrait être nocive. Chez le lapin, l'hyperthermie (41°C) provoquée associée à des modalités de ventilation mécanique agressives induisait à h+2 une diminution de la PaO 2 , une altération de la courbe pression-volume et un oedème pulmonaire accru en comparaison avec les groupes d'animaux ventilés à des températures de 33 et 37°C [41] . L'éventuelle exacerbation de la réaction inflammatoire induite par l'hyperthermie émise dans le travail de Rice et al. semble corroborer cette hypothèse [42] . Dans ce modèle de pneumonie, les rats placés dans des enceintes à 24 et 34°C, afin d'obtenir une température corporelle respectivement à 37 et 39,5°C, étaient traités par antibiothérapie [42] . La mortalité des animaux fébriles était deux fois plus élevée, et leurs poumons significativement plus oedémateux et hémorragiques [42] . En complément, l'injection intratrachéale de LPS majorait significativement la réaction inflammatoire alvéolaire et parenchymateuse pulmonaire en situation d'hyperthermie [42] . Des résultats proches étaient retrouvés dans un modèle de sepsis grave par injection intraveineuse de LPS ou d'Escherichia coli ; les rats Tableau 1 Effet de la fièvre sur l'immunité innée et adaptative -Libération médullaire de polynucléaires neutrophiles (facteur de croissance granulocytaire dépendant) -Recrutement de polynucléaires neutrophiles sur le site infecté (effet chimioattractant de l'interleukine 8) -Augmentation de l'activité bactériolytique des polynucléaires neutrophiles au niveau du site infecté -Activité cytotoxique accrue des cellules natural killer -Pouvoir phagocytaire des macrophages et des cellules dendritiques augmenté -Libération de cytokines, monoxyde d'azote et protéines de choc thermique -Expression augmentée des molécules du complexe majeur d'histocompatibilité de classes I et II des cellules dendritiques et expression favorisée du récepteur de chimiokine 7 impliqué dans la migration des cellules dendritiques des lymphatiques afférents vers les ganglions lymphatiques de la zone d'intérêt -Amélioration des capacités des cellules dendritiques à présenter l'antigène aux lymphocytes T spontanément hypothermes avaient une diminution de l'infiltration pulmonaire par les polynucléaires neutrophiles comparés aux animaux fébriles [43] . Enfin, la fièvre aboutit à des contraintes hémodynamiques et ventilatoires. Ainsi, une diminution de la fièvre par hémofiltration continue induisait une baisse de la fréquence cardiaque et du débit cardiaque associée à une augmentation des résistances vasculaires systémiques et de la pression artérielle moyenne, sans altérer la circulation hépatosplanchnique [44, 45] . Par ailleurs, au cours d'un SDRA infectieux sous assistance respiratoire veinoveineuse avec oxygénation extracorporelle, la diminution volontaire de la température améliorait le rapport débit d'assistance circulatoire/débit cardiaque, diminuait le shunt intrapulmonaire et améliorait l'oxygénation [46] . Néanmoins, dans cette observation, la température n'était pas contrôlée puisque abaissée jusqu'à 34°C [46] . Le contrôle de la fièvre, en diminuant la demande métabolique, pourrait réduire l'ischémie tissulaire lorsque les capacités à faire face à une demande accrue en O 2 sont altérées. Par ailleurs, en atténuant la réponse inflammatoire, il pourrait limiter les dommages tissulaires dans certaines localisations infectieuses (poumon/autres sites). Les moyens de contrôle de la fièvre sont-ils anodins ? Le contrôle de la fièvre fait appel à des moyens physiques (refroidissement externe et/ou interne) qui diminuent la température corporelle sans agir sur la production de chaleur et/ou pharmacologiques (essentiellement le paracétamol et/ou des AINS) qui bloquent les processus à l'origine du dérèglement du thermostat hypothalamique et donc la production de chaleur [47] . Le recours au contrôle de la fièvre est fréquent en réanimation chez des patients septiques ou non pour traiter, mais parfois aussi pour prévenir sa survenue [8, 31] . Chez des patients septiques, il a été montré que les moyens les plus utilisés étaient le refroidissement physique et le paracétamol, l'administration seule d'AINS associée ou non au paracétamol étant dans ce contexte beaucoup moins fréquente [31, 48] . Si la toxicité hépatique du paracétamol à fortes doses est bien connue [49] , elle peut néanmoins s'observer pour des posologies plus faibles, chez les patients éthyliques chroniques et/ou dénutris du fait d'un stock plus faible en glutathion [50] . Mais même chez le volontaire sain, l'administration de 4 g de paracétamol par jour s'accompagne dans 38 % des cas d'une augmentation par 3 du taux d'alanineaminotransférase par rapport aux valeurs normales [51] . Jusqu'à récemment, peu d'études ont évalué l'effet du paracétamol chez des patients septiques. Suzuki et al., dans une étude rétrospective sur quatre services de réanimation, ont étudié la mortalité hospitalière des patients traités par au moins 1 g de paracétamol [52] . De façon globale, l'administration de paracétamol était associée à une meilleure survie, et l'analyse en sous-groupe des patients infectés à l'admission retrouvait le même bénéfice [52] . Des résultats contradictoires ont été mis en évidence dans l'étude prospective FACE sur 1 425 patients, où les auteurs retrouvaient chez les patients septiques une surmortalité chez les patients ayant reçu du paracétamol [31] . L'étude HEAT, multicentrique randomisée en double insu, est la plus solide méthodologiquement [48] . Elle évaluait chez 700 patients suspects d'infection l'impact de l'administration de paracétamol à la posologie de 4 g par jour sur le nombre de jours vivant en réanimation depuis la randomisation jusqu'à j+28 [48] . Il n'y avait pas de différence significative entre paracétamol et placebo sur le critère de jugement principal, les durées de séjour en réanimation et hospitaliers ou encore la mortalité à j+28 et j+90. Par ailleurs, la survenue d'une dysfonction hépatique conduisant à un arrêt de traitement n'était pas différente d'un groupe à l'autre (paracétamol = 8,1 % vs placebo = 9,9 % ; p = 0,40). Mais il faut souligner que le seuil retenu de température à l'inclusion était faible (≥ 38°C), que la dose médiane cumulée de paracétamol reçue par les patients était seulement de 8 g, soit deux jours de traitement, que l'effet sur la fièvre était certes significatif, mais modeste sous traitement (diminution de 0,29°C de la température moyenne) et que près de 30 % des patients sous placebo avaient reçu du paracétamol une fois le traitement de l'étude délivré [48] . Les effets secondaires parfois graves des AINS sont essentiellement digestifs et rénaux. La toxicité digestive n'est pas totalement prévenue par l'utilisation d'inhibiteur sélectif de la cyclo-oxygénase de type 2, et le risque d'insuffisance rénale aiguë est d'autant plus élevé qu'il existe une maladie rénale, une hypovolémie et/ou d'autres néphrotoxiques [53, 54] . L'administration d'ibuprofène pendant 48 heures à des patients septiques, dont une majorité était en état de choc, réduisait significativement, en comparaison avec le groupe placebo, la température, la consommation en O 2 et le taux de lactate sans effet iatrogène lié au traitement [39] . Malgré ces effets métaboliques, les durées des défaillances d'organes n'étaient pas différentes d'un groupe à l'autre, de même que la survie à j+30. Chez des patients atteints d'un paludisme à Plasmodium falciparum non compliqué, l'ibuprofène administré pendant 72 heures diminuait de façon significative la période fébrile, mais la clairance du parasite était retardée dans le groupe traité vs placebo [55] . Dans ces deux études, les complications, notamment digestives et/ou rénales, n'étaient pas différentes entre traitement et placebo. Dans l'étude FACE, une surmortalité indépendamment liée à la prise d'AINS était rapportée chez les patients septiques [31] . Les méthodes de refroidissement ne sont pas dénuées d'effets secondaires. Néanmoins, appliquées chez les patients les plus graves, il est aisé de s'affranchir des frissons et de l'inconfort que peuvent générer ces méthodes (sédation, curarisation). L'effet rebond à l'arrêt du refroidissement est une complication fréquemment rapportée, notamment après hypothermie thérapeutique [56] . Les méthodes les plus utilisées consistent en la perfusion de solutés glacés à 4°C (30 à 40 ml/kg permettant de diminuer la température de 2 à 4°C) et/ou l'utilisation de packs glacés placés auprès du patient au sein d'un « tunnel », ventilé ou non, constitué d'un drap. L'application directe de glace sur le patient, susceptible d'entraîner des lésions cutanées, est à éviter. Des dispositifs de refroidissement intravasculaire, ainsi que des matelas et couvertures réfrigérants sont disponibles. Ces derniers permettent un ajustement précis de la température cible et la maîtrise du réchauffement. Quelle que soit la technique utilisée, un monitorage continu de la température est indispensable. Très peu d'études cliniques ont évalué l'impact de ces techniques de refroidissement chez les patients septiques. Dans l'étude FACE, l'utilisation d'une méthode de refroidissement externe et interne dans le but de prévenir ou de traiter la fièvre chez des patients septiques n'avait pas d'effet sur la mortalité à j+28 en analyse multivariée [31] . L'étude randomisée de Schortgen et al. étudiait chez 200 patients en état de choc septique, à majorité d'origine respiratoire et dont la température était supérieure à 38,3°C, l'effet d'un refroidissement externe appliqué pendant 48 heures avec un objectif cible de température entre 36,5 et 37°C vs absence de traitement sur le besoin en catécholamines (adrénaline et/ou noradrénaline) [57] . Les auteurs montraient que les patients bénéficiant d'un refroidissement externe avaient des posologies de catécholamines (adrénaline et/ou noradrénaline) réduites de plus de 50 % dès la 12 e heure de traitement et une mortalité réduite à j+14 [57] . Par ailleurs, dans un travail complémentaire, les auteurs montraient que le temps passé en dessous d'une température inférieure à 38,4°C était indépendamment associé à une meilleure survie à j+14 [58] . Cependant, les effets sur la réduction des posologies de vasopresseurs n'étaient pas retrouvés à la 48 e heure de traitement, et la mortalité à plus long terme n'était pas différente d'un groupe à l'autre. L'absence d'effet sur la mortalité à distance pourrait être liée à des complications tardives du refroidissement, notamment infectieuses. Il a été ainsi montré que le contrôle de la fièvre avec un objectif de normothermie augmentait le risque de pneumonies acquises sous ventilation mécanique [59] . Il existe encore beaucoup d'incertitudes quant au bénéfice d'un contrôle systématique de la fièvre chez des patients en sepsis graves. Néanmoins, certaines règles peuvent être proposées : • une température supérieure à 40-40,5°C doit probablement être contrôlée, particulièrement lorsque la situation clinique est marquée par un déséquilibre entre les apports et la consommation d'O 2 (coronaropathie, phase de sevrage de la ventilation mécanique…) ; • le refroidissement physique est probablement la méthode la plus sûre pour contrôler la température en l'absence de frissons ; • il ne faut pas induire d'hypothermie, qui est délétère et génère ses propres complications (hypovolémie, troubles hydroélectrolytiques, hyperglycémie, troubles de la coagulation sanguine, infections, ralentissement du métabolisme de nombreux médicaments, dont les antibiotiques). Les auteurs déclarent ne pas avoir de lien d'intérêt. A prospective study of fever in the intensive care unit Occurrence and outcome of fever in critically ill adults Body temperature alterations in the critically ill Hyperthermia in the forty-eight hours after cardiopulmonary bypass Risk factors and outcomes for prolonged versus brief fever: a prospective cohort study Induced hypothermia and fever control for prevention and treatment of neurological injuries Fever and therapeutic normothermia in severe brain injury: an update Diagnosis and management of temperature abnormality in ICUs: a EUROBACT investigators' survey A critical appraisal of 98.6 degrees F, the upper limit of the normal body temperature, and other legacies of Carl Reinhold August Wunderlich Guidelines for evaluation of new fever in critically ill adult patients: 2008 update from the American College of Critical Care Medicine and the Infectious Diseases Society of America Tympanic temperature measurements: are they reliable in the critically ill? A clinical study of measures of agreement Temperature measurement in intensive care patients: comparison of urinary bladder, oesophageal, rectal, axillary, and inguinal methods versus pulmonary artery core method Noninvasive measurement of body temperature in critically ill patients Nuanced roles of cytokines in three major human brain disorders Influence of body temperature on bacterial growth rates in experimental pneumococcal meningitis in rabbits Febrile temperatures can synchronize the growth of Plasmodium falciparum in vitro Effects of temperature on antimicrobial susceptibility of bacteria Fever and the thermal regulation of immunity: the immune system feels the heat Exposure to febrile temperature upregulates expression of pyrogenic cytokines in endotoxin-challenged mice Febrile-range temperature modifies early systemic tumor necrosis factor alpha expression in mice challenged with bacterial endotoxin Protective functions of intracellular heat-shock protein (HSP) 70-expression in patients with severe sepsis Fever control in septic shock: beneficial or harmful? Blood warming during hemofiltration can improve hemodynamics and outcome in ovine septic shock Factors affecting mortality of Gram-negative rod bacteremia Spontaneous bacterial peritonitis. A review of 28 cases with emphasis on improved survival and factors influencing prognosis Spontaneous bacterial peritonitis Community-acquired pneumonia in the elderly: association of mortality with lack of fever and leukocytosis Epidemiology, management, and risk factors for death of invasive Candida infections in critical care: a multicenter, prospective, observational study in France Early peak temperature and mortality in critically ill patients with or without infection The impact of body temperature abnormalities on the disease severity and outcome in patients with severe sepsis: an analysis from a multicenter, prospective survey of severe sepsis Association of body temperature and antipyretic treatments with mortality of critically ill patients with and without sepsis: multi-centered prospective observational study Early temperature and mortality in critically ill patients with acute neurological diseases: trauma and stroke differ from infection Induced hypothermia in severe bacterial meningitis: a randomized clinical trial Fever effects and treatment in critical care: literature review Fever, hyperthermia and the heat shock response Effect of temperature on myocardial infarction in swine Effect of cooling on oxygen consumption in febrile critically ill patients Metabolic effects of i.v. propacetamol, metamizol or external cooling in critically ill febrile sedated patients The effects of ibuprofen on the physiology and survival of patients with sepsis. The Ibuprofen in Sepsis Study Group External cooling in the management of fever Effect of core body temperature on ventilator-induced lung injury Febrile-range hyperthermia augments neutrophil accumulation and enhances lung injury in experimental Gram-negative bacterial pneumonia Naturally occurring hypothermia is more advantageous than fever in severe forms of lipopolysaccharide-and Escherichia coli-induced systemic inflammation Effects of continuous venovenous haemofiltration-induced cooling on global haemodynamics, splanchnic oxygen and energy balance in critically ill patients Effects of continuous haemofiltration vs intermittent haemodialysis on systemic haemodynamics and splanchnic regional perfusion in septic shock patients: a prospective, randomized clinical trial Improving blood oxygenation during venovenous ECMO for ARDS Clinical review: fever in septic ICU patients -friend or foe? Acetaminophen for Fever in Critically Ill Patients with Suspected Infection Acetaminophen poisoning: an update for the intensivist Severe hepatotoxicity after therapeutic doses of acetaminophen Aminotransferase elevations in healthy adults receiving 4 grams of acetaminophen daily: a randomized controlled trial Paracetamol therapy and outcome of critically ill patients: a multicenter retrospective observational study Adverse effects of nonsteroidal antiinflammatory drugs: an update of gastrointestinal, cardiovascular and renal complications Nonsteroidal antiinflammatory drug-related injury to the gastrointestinal tract: clinical picture, pathogenesis, and prevention Intravenous ibuprofen (IV-ibuprofen) controls fever effectively in adults with acute uncomplicated Plasmodium falciparum malaria but prolongs parasitemia Efficacy of and tolerance to mild induced hypothermia after out-of-hospital cardiac arrest using an endovascular cooling system Fever control using external cooling in septic shock: a randomized controlled trial Respective impact of lowering body temperature and heart rate on mortality in septic shock: mediation analysis of a randomized trial Effect of a fever control protocol-based strategy on ventilator-associated pneumonia in severely brain-injured patients