key: cord-0982953-b5w0jb7a authors: Renault-Tessier, Evelyne; Carton, Matthieu; Meng, Marie-France; Milder, Maud; Angellier, Elisabeth; Bouleuc, Carole; Mino, Jean-Christophe title: Expérience des soins et de la vie quotidienne pendant le confinement sanitaire national chez des patients suivis et traités en centre de lutte contre le cancer : l’enquête BaroCov date: 2021-04-10 journal: Bull Cancer DOI: 10.1016/j.bulcan.2021.01.008 sha: da7ffe1eaebfc592955f8300afe7ac62edf2a312 doc_id: 982953 cord_uid: b5w0jb7a Confinement within the framework of Covid 19 required organizations in cancer centers, in particular with postponing certain treatments. We interviewed 6080 patients who had a scheduled appointment during this period. 2478 patients gave their opinion regarding access and organization of care, teleconsultation, their concerns and their reasons for satisfaction. While 83 % of them say they are satisfied with the organization of care, 25 % of respondents say they have given up care that they consider essential in 1/3 of cases. The concern related to the follow-up of the cancerous disease takes precedence over that of being infected with the Sars-cov-2 virus, unlike the general population, and relationships with their loved ones are spontaneously cited as a reason for satisfaction. This method captures the experience of patients, despite certain limitations. Such an approach could be used to set up a specific system during normal periods. La crise sanitaire liée à l'épidémie de la CoVid 19 et le confinement ont été une épreuve pour l'ensemble de la population française recelant de nombreux enjeux éthiques dont la diminution des libertés et les risques liés à la vulnérabilité [1] . Les personnes malades chroniques ont été considérées à la fois comme particulièrement vulnérables à la CoVid avec les risques de forme grave, et comme risquant de pâtir de la réorganisation de l'activité hospitalière liée à l'épidémie, par la limitation de l'accès à l'hôpital et aux consultations de cabinet de ville. Le centre de lutte contre le cancer de l'Institut Curie (sites Paris et Saint-Cloud), a rapidement mis en place une cellule de crise transversale avec les décideurs et l'ensemble des responsables d'équipe pour décider, notamment du report des consultations et des interventions reportables selon des critères médicaux. Cette cellule s'est réunie de manière hebdomadaire, afin d'ajuster les décisions en fonction des remontées des professionnels, mais sans participation des patients eux-mêmes. De manière générale, dans un contexte de crise les décisions de réorganisation du système de soins sont centralisées, guidées par le principe de précaution et de réponse à l'urgence. Comme le souligne Alexandre Berkesse, professeur de santé publique, les patients partenaires ou représentant d'usagers « ne sont ni mobilisés pour participer à la gestion organisationnelle de la crise, ni mobilisés dans le soin » alors que « la mobilisation de ces savoirs questionne et améliore les pratiques de soin et de gestion du soin » [2] . Outre-Atlantique, le Centre d'excellence sur le partenariat avec les patients et le public (CEPPP) de Québec plaide pour la mise en place de système participatif des patients et aspire à ce que la démocratie sanitaire en temps de crise ne soit pas « en quarantaine » [3] . À défaut de pouvoir les associer aux décisions d'organisation dans le contexte d'urgence sanitaire, nous avons voulu mieux connaître le vécu des patients face à cette réorganisation. Les patients ont-ils pâti des reports ? Quel était leur avis sur le suivi de leur soin tant à l'hôpital qu'en proximité ? Quels étaient leurs préoccupations, et leurs motifs de satisfaction pendant le confinement ? C'est l'objectif de l'enquête BaroCov de le savoir. L'ensemble des patients majeurs, suivis à l'Institut Curie, sur le site de Paris et de Saint-Cloud, et répondant aux critères suivants ont été sollicités pour participer à cette étude : avoir eu au moins un rendez-vous ambulatoire programmé (consultation ou hôpital de jour) sur la période du 15 mars au 15 avril, soit lors du premier mois de la période de confinement ; avoir une adresse e-mail renseignée dans leur dossier. Au total, 6 080 patients répondaient à ces critères. L'enquête a été autorisée par le Comité de revue institutionnel de la recherche interne. C'est une enquête totalement anonyme, respectant le droit d'information et d'accès. Les patients sélectionnés ont reçu un mail les invitant à compléter un questionnaire en ligne. Ce questionnaire (Annexe 1), anonyme, a été défini avec la participation d'une patiente partenaire et d'un représentant des usagers et implémenté sur Redcap®. Les informations recueillies portaient sur le sexe, la tranche d'âge (18-40 ans, 41-65 ans et plus de 65 ans), le département de résidence actuelle et, sur les deux dernières semaines uniquement, la préoccupation et la satisfaction principales, le suivi de la maladie, l'expérience de la téléconsultation, le renoncement aux soins, l'automédication et l'infection par le SARS COV 2. Le choix d'un questionnaire électronique adressé par e-mail a été privilégié pour la rapidité d'accès aux patients, alors majoritairement confinés à leur domicile. Les réponses aux deux questions sur la préoccupation et la satisfaction principales étaient en champ texte libre. Une analyse qualitative spécifique a été menée pour ces deux questions ouvertes. Douze items principaux de préoccupation et huit items principaux de satisfaction ont été identifiés après l'analyse qualitative de 200 réponses à chacune de ces questions. Toutes les réponses ont ensuite été codées, à deux reprises, selon ces items en ajoutant un item « autre réponse », pour permettre leur analyse quantitative. Le questionnaire a été adressé le 7 mai 2020 avec une relance le 11 mai 2020. and organization of care, teleconsultation, their concerns and their reasons for satisfaction. While 83 % of them say they are satisfied with the organization of care, 25 % of respondents say they have given up care that they consider essential in 1/3 of cases. The concern related to the follow-up of the cancerous disease takes precedence over that of being infected with the Sarscov-2 virus, unlike the general population, and relationships with their loved ones are spontaneously cited as a reason for satisfaction. This method captures the experience of patients, despite certain limitations. Such an approach could be used to set up a specific system during normal periods. Nous avons opté pour un modèle de baromètre au sens où nous avons renouvelé le sondage toutes les deux semaines pendant quatre mois, afin de suivre les évolutions durant le déconfinement. Dans cet article nous n'étudierons que le premier questionnaire, l'ensemble de l'analyse de l'évolution faisant l'objet d'un travail complémentaire. Les variables, toutes qualitatives, ont été décrites par les effectifs de chaque modalité de réponse et par leur pourcentage calculé sur l'ensemble des réponses fournies (exclusion des non-réponses). Le test de Chi 2 ou le test exact de Fisher ont été utilisés pour comparer les répartitions entre deux groupes de patients. Le seuil de significativité a été fixé à cinq pour cent. Alors que les deux tiers des patients se disaient en cours de traitement pour leur cancer, la préoccupation principale lors du confinement se centre logiquement sur leur état de santé et l'évolution de la maladie. Le suivi de leur maladie est considéré excellent ou correct avec aucun renoncement à des actes de santé pour trois patients sur quatre. Les préoccupations semblent modifiées par les personnes qui sont infectées par le SARS-CoV-2, mais l'échantillon est faible et les tests de comparaison sont donc non significatifs. Avis sur le suivi de la maladie pendant les deux semaines précédant l'enquête Le suivi de la maladie dans les deux dernières semaines, c'est-àdire pendant le confinement, était jugé excellent par 41,7 % des répondants et correct par 41,3 % des patients. Huit pour cent des personnes considèrent avoir eu un mauvais ou très mauvais suivi, sans différence selon le sexe, l'âge ou le fait d'être en cours de traitement. Pendant ces deux semaines, les répondants déclaraient avoir consulté un médecin de l'Institut Curie dans 43,1 % des cas, un professionnel de santé de l'Institut Curie dans 23,7 % des cas, un médecin généraliste dans 29,2 % des cas et un professionnel de santé de ville dans 17,7 % des cas. Au total, 59,5 % des personnes avaient consulté au moins un professionnel médecin et 40 % aucun, 25,4 % des personnes n'avaient consulté aucun professionnel ou dispositif et 37,2 % en avaient consulté au moins deux. Seuls deux patients (0,1 %) déclaraient avoir appelé une hotline et 2,5 % à avoir consulté un forum internet de patients. Près de 15 % des patients déclaraient avoir eu recours à l'automédication. Population source Région [9] , 75 % de ceux ayant expérimenté la télé-consultation pendant le confinement sont prêts à renouveler l'expérience. La maladie cancéreuse comme préoccupation La quasi-totalité des répondants (environ 95 %) citent spontanément des préoccupations liées à soi, et à son quotidien et non pas des préoccupations générales comme la situation du pays ou la manière dont le gouvernement a pu gérer cette crise. Ainsi plus de deux tiers (68 %) des personnes interrogées citent de manière spontanée une thématique liée à la santé comme préoccupation principale au moment de l'enquête. La préoccupation liée au cancer est massive (45,5 % des réponses). Alors que pour la population générale, la peur à l'égard de l'épidémie était la plus importante suivie par des préoccupations socioéconomiques. (onze références données DAtaCoV). Dans l'enquête qualitative canadienne les « patients partenaires » habitués à être sollicités par le système de santé, déclarent aussi comme préoccupation première non pas leur maladie mais bien le fait de ne pas être infecté [8] . De même dans une enquête néerlandaise [10] , 47 % des 5302 patients atteints d'un cancer se déclaraient être très préoccupés d'être infectés. Les patients sous traitement étaient plus souvent préoccupés que les patients sous surveillance (54 % contre 40 %, p < 0,05). Après la santé, des thématiques de la vie quotidienne sont ensuite citées spontanément comme préoccupation principale (pour environ un cinquième des personnes). Enfin une part minime des répondants de BarocoV (4,3 %) cite le climat social ou bien s'inquiètent pour leurs proches à cause de la crise économique. Vivre chez soi comme satisfaction principale L'intérêt de l'enquête BaroCov est de mettre en évidence le fait que malgré les préoccupations liées à la santé, la période du confinement et l'atteinte par une grave maladie peuvent laisser aussi place à des appréciations positives et à des satisfactions importantes. C'est l'intérêt de l'avoir demandé de manière ouverte, sans imposer d'idées préconçues. Ainsi pour deux tiers des personnes (65,7 %), cette période est l'occasion de mettre en exergue une vie recentrée sur la maison, le travail apparaissant finalement peu comme source d'appréciation dans les réponses spontanées (2,8 %) . Le confinement permet ainsi de se centrer sur des choses essentielles : les relations avec les proches, la qualité de vie, pouvoir vivre à son rythme et prendre son temps, profiter de la nature. Ceci peut s'expliquer en sachant que plus de 90 % des répondants ont plus de 40 ans (et donc pour une majorité pas/ plus d'enfants scolarisés en petites classes) et qu'ils n'ont souvent pas/plus d'activités professionnelles du fait de la maladie (arrêt de travail) ou de l'âge (31,1 % ayant plus de 65 ans). Enfin presque 15 % des personnes (13,5 %) citent aussi spontanément la maladie mais ici comme satisfaction (une évolution favorable et pouvoir être soignés). Cette étude donne un aperçu, au moment même du confinement, des préoccupations des patients suivis en cancérologie. Nous y voyons l'intérêt de pouvoir les interroger avec des questions ouvertes, permettant d'ouvrir d'autres champs que celui de la seule satisfaction des soins. Plus largement, avoir testé une telle approche pourrait servir à la mise en place en période normale d'un dispositif spécifique d'observation de l'expérience des patients en vue d'une amélioration des soins. Déclaration de liens d'intérêts : Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d'intérêts. Le matériel complémentaire accompagnant la version en ligne de cet article est disponible sur https://doi.org/10.1016/j.bulcan.2021.01.008. Enjeux éthiques lors du dé-confinement : Responsabilité, solidarité et confiance | Comité Consultatif National d'Ethique Comment lutter contre les tendances à la dépolitisation des décisions de santé en contexte de crise? Citoyen à temps plein « [WEBINAIRE] COVID-19 -Le rôle du partenariat de soins en cas d'urgence sanitaire ou de crise Vincent Dumez et Alexandre Berkesse parlent de la mobilisation des patients partenaires dans le contexte de la COVID-19 Comparatif des résultats avant/ pendant le confinement Expérience des soins et de la vie quotidienne pendant le confinement sanitaire national chez des patients suivis et traités en centre de lutte contre le cancer : l'enquête BaroCov Coronavirus: un tiers des Français ont peur de retourner chez le médecin Disponible sur Patients With Cancer and COVID-19: A WhatsApp Messenger-Based Survey of Patients' Queries, Needs, Fears, and Actions Taken COVID-19 Pandemic Early Effects on Cancer Patients and Survivors American Cancer Society Cancer Action Network Region LP. Les Franciliens et le Covid-19 Institut Paris Region Impact of the coronavirus disease 2019 pandemic on cancer treatment: the patients' perspective Expérience des soins et de la vie quotidienne pendant le confinement sanitaire national chez des patients suivis et traités en centre de lutte contre le cancer : l'enquête BaroCov tome xx > Expérience des soins et de la vie quotidienne pendant le confinement sanitaire national chez des patients suivis et traités en centre de lutte contre le cancer : l'enquête BaroCov