key: cord-1028943-zubav76n authors: Nho, Jessica Tran Van; Pardo, Emmanuel title: Complications cardiaques du Covid-19 en réanimation date: 2020-07-10 journal: Prat Anesth Reanim DOI: 10.1016/j.pratan.2020.07.003 sha: 4ba30f9e49fc395cf1b25a0bfecb9e6ac353f910 doc_id: 1028943 cord_uid: zubav76n Résumé L’infection à SARS-CoV2, responsable de détresse respiratoire aigue grave est déclarée pandémie mondiale par l’OMS à partir du 11 mars 2020. Si les manifestations pulmonaires sont le plus souvent au premier plan, des complications cardiovasculaires ont été observées et associées à un plus mauvais pronostic. L'enzyme ACE2 intrinsèquement impliquée dans la physiologique de la fonction cardiaque et dans le développement de l'hypertension et du diabète a été identifiée comme un récepteur fonctionnel du SARS-CoV-2. Il est difficile préciser les mécanismes des atteintes cardiaques car ils sont probablement multiples : atteinte myocardique directe du SARS-CoV-2 responsable de myocardites virales ; atteinte secondaire à l’état d’inflammation systémique exacerbé avec l’hypoxémie responsable de souffrance myocardique. Par ailleurs, les traitements à l’étude dans cette maladie provoquent des modifications de l’électrocardiogramme avec un allongement du segment QT. Les dosages des marqueurs cardiaques sont nécessaires si une souffrance myocardique est suspectée ainsi qu’une surveillance échographique. Les atteintes cardiaques augmentant la morbidité post hospitalière, la stratification du risque avec l’IRM cardiaque et le suivi prolongé des patients semblent nécessaires. Summary The World Health Organization declared the SARS-CoV-2 infection causing severe acute respiratory distress a global pandemic in March 2020. While respiratory features are commonly at the forefront of the disease, cardiovascular complications have been observed and associated with a poorer prognosis. The ACE2 enzyme intrinsically involved in the physiology of cardiac function and in the development of hypertension and diabetes has been identified as a functional receptor for SARS-CoV-2. It is difficult to highlight the precise mechanisms of cardiac damage because of its possible multiple implications, through direct damage from SARS-CoV-2 responsible for viral myocarditis or indirect damage from the state of exacerbated systemic inflammation associated with hypoxaemia. The treatments of the disease, may also induce adverse effects such as an increase in QT segment duration. Measurements of cardiac biomarkers are required if myocardial damage is suspected and are part of a panel of arguments confronted with clinical features, ultrasonic monitoring and electrocardiogram. As the cardiac disorders increase post-hospital morbidity, risk stratification with cardiac MRI and prolonged follow-up are required. En décembre 2019, la ville de Wuhan est le site d'émergence d'une nouvelle maladie responsable de pneumopathies virales potentiellement mortelles. Cette infection au coronavirus 2 du syndrome respiratoire aigu sévère (SARS-CoV-2), appelée maladie à coronavirus 2019 (COVID-19) est la septième forme de la famille des coronavirus infectant l'espèce humaine (1) . Elle se caractérise par une contagion interhumaine élevée (taux de reproduction supérieur à 2.5) et un taux de mortalité relativement faible d'environ 2%. Comparables à ceux du middle East respiratory syndrome (MERS)-CoV et du SARS-CoV-1, (2) . L'infection a été considérée comme une pandémie mondiale par l'OMS à partir du 11 mars 2020. Le (3) , en 2012 un nouveau coronavirus humain, le MERS-CoV a émergé au Moyen-Orient lui aussi à l'origine d'une pathologie similaire au SRAS (4) . Lors de ces deux dernières épidémies, plusieurs complications cardiaques avaient déjà été rapportées (5) . Si les manifestations pulmonaires sont le plus souvent au premier plan, des complications cardiovasculaires ont été observées et associées à un plus mauvais pronostic (6) . Les atteintes cardiovasculaires rapportées en cas d'infection à COVID-19 regroupent des lésions myocardiques, des syndromes coronariens aigus, des troubles du rythme, des complications thromboemboliques veineuses et des insuffisances cardiaques (2) . L'impact du virus sur le système cardio-vasculaire est double : d'une part l'infection est plus intense si l'hôte possède préalablement des comorbidités cardiovasculaires (2) ; d'autre part, le virus peut lui même être la cause directe de lésions myocardiques et vasculaires (7) . J o u r n a l P r e -p r o o f Plusieurs études confirment des observations antérieures suggérant que les maladies cardiovasculaires sous-jacentes sont des facteurs de risque indépendants de décès à l'hôpital chez les patients hospitalisés atteints de COVID-19. En effet une équipe américaine a montré que sur les 8910 patients atteints de Covid-19 hospitalisés à la Brigham and Women's Hospital Heart and Vascular Center un total de 515 sont décédés à l'hôpital (5,8%) avec entre autre comme facteurs de surmortalité indépendants : la maladie coronarienne (rapport de cotes, 2,70; IC 95%, 2,08 à 3,51), l'insuffisance cardiaque (rapport de cotes, 2,48; IC à 95%, 1,62 à 3,79) et l'arythmie cardiaque (rapport de cotes, 1,95; IC à 95%, 1,33 à 2,86) (9) . Dans une études de cohorte de 191 patients menée par Zhou et coll., 23 % des patients atteint de COVID-19 avaient une insuffisance cardiaque en rapport surtout avec une décompensation d'une dysfonction ventriculaire gauche préexistante, associée à une mortalité importante (10) . IV. Dysfonction cardiaque en réanimation (11) . Les structures moléculaires présentant de grandes similitudes entre les domaines récepteurs du SRAS-CoV1 et du SARS-CoV-2 (12) , cette constatation a pu être étendue au SARS-CoV-2. Dans une étude d'autopsie COVID-19 récente, il était retrouvé une infiltration inflammatoire mononucléaire dans le tissu cardiaque, mais aucun corps d'inclusion virale clair n'a été observé (13) . De plus, la récupération rapide de la structure et de la fonction cardiaques sans diminution significative de la charge virale suggère qu'en dehors de la réplication virale dans le myocarde, la réponse immunitaire (orage cytokinique) joue un rôle prépondérant (14) . La fréquence de l'atteinte cardiaque directe rapportée chez les patients hospitalisés est estimée entre 7 et 17% en fonction des séries, et constitue 59 % des causes de décès relatifs au SARS-COV 2 (2) . Sur une série de 150 cas de COVID-19, 68 décès ont été répertoriés avec 27 cas de myocardites dont 5 dites fulminantes (15) (16) . D'autres auteurs ont décrit des formes fulminantes létales avec des résultats d'autopsie montrant un infiltrat mononucléaire dans le tissu myocardique (13) . b) Atteinte secondaire Le lien entre infection aigüe et syndrome coronarien aigüe a déjà fait l'objet de multiples études dans la littérature. Cette association a pour origine l'état d'inflammation systémique associé à une augmentation du stress biomécanique sur les artères coronaires et la perturbation de l'homéostasie hémodynamique. Peuvent s'y ajouter un environnement prothrombotique secondaire à une activation plaquettaire et une dysfonction endothéliale. Enfin, la présence d'une hypoxémie associée à une hypotension peut être responsable d'une inadéquation entre la demande et les apports myocardiques en oxygène et donc d'une souffrance myocardique (17) . Dans une étude observationnelle prospective publiée en 2012 recueillant les patients souffrant d'une pneumonie communautaire, la fréquence des évènements cardiaques était de 27% chez les patients hospitalisés (18) . Plus récemment, une association forte était mise en évidence entre la survenue d'infection pulmonaire virale, particulièrement grippale, et la survenue de syndromes coronariens aigus (19) . Les patients atteints par le COVID-19 s'intègrent Les lésions myocardiques aigues décrites chez certains malades admis pour pneumopathie hypoxémiante dans le cadre du COVID 19 sont définies par une augmentation de la troponine associée à une atteinte myocardique (20) . Des différences significatives entre les taux de troponinémie initiaux ont été observées entre les patients guéris et les patients décédés (21) . Dans une série de 341 patients, l'élévation de la troponine était plus importante dans les formes graves du COVID-19 et s'associait à un pronostic péjoratif (6) . Des troubles du rythme ont été décrits dans une cohorte de 138 patients admis pour pneumonie à COVID-19 dans la province de Hubei. En effet 16,4 % des patients avaient des palpitations avec des anomalies du rythme à l'ECG (24) . Cette prévalence élevée pouvait être expliquée par les troubles métaboliques, l'hypoxie, le stress neurohormonal et l'inflammatoire dans le contexte du SDRA. Cependant, il faut toujours penser à une myocardite devant une arythmie maligne avec lésion myocardique aiguë (25) . Les troubles du rythme les plus fréquemment retrouvés sont les fibrillations auriculaires, qui est aussi l'arythmie la plus courante chez le sujet âgé (26) . sans précision sur le mécanisme. (29) . Cette précédente étude a entre autre révélé qu'il y avait une corrélation significative entre l'anomalie de l'ECG et le niveau de PCT (p = 0,004) et le nombre de lymphocytes (p = 0,041) mais n'a montré aucune corrélation entre le niveau de troponine I et les niveaux de cytokines ou de lymphocytes (29) . En plus des symptômes les plus fréquents, comme la fatigue, la dyspnée, et la toux, la maladie peut également se manifester par une insuffisance cardiaque décompensée ou par des arythmies (13) . La poussée d'insuffisance cardiaque aigüe sur une cardiopathie préalable pose un problème de diagnostic initial en raison de la difficulté à estimer la part de l'état antérieur. En Italie, plusieurs patients non hospitalisés présentant des symptômes bénins ont été retrouvés décédés à leur domicile durant la quarantaine (6) . Une étude française a pointé une forte augmentation du nombre d'arrêts cardiaques extra-hospitaliers durant le pic de la pandémie comparé aux années précédentes, sans toutefois pouvoir établir un lien direct avec la pathogénie du virus (30) . Ainsi du fait de sa gravité, la myocardite et les autres atteintes cardiaques à SRAS-CoV-2 doivent être identifiées malgré une incidence relativement faible (4,8%). Pour ce faire, il a été proposé d'évaluer les biomarqueurs myocardiques chez tous les patients atteints de COVID-19 avec comme objectifs de stratifier le risque et d'identifier la nécessité d'une intervention rapide (6) . Cependant l'élévation du taux de troponine est fréquente et non spécifique de l'atteinte myocardique chez les patients infectés par le COVID-19 (l'insuffisance rénale peut être une des causes), il est donc plus prudent de ne doser la troponine que si le diagnostic d'infarctus (SCA à l'ECG) ou de Dans les cas de choc cardiogénique ou mixte, une TDM thoracique et/ou une échographie cardiaque, associées au dosage du peptide natriurétique, permet de clarifier le diagnostic (31) . Une élévation de BNP isolée ne doit pas faire démarrer un traitement de l'insuffisance cardiaque dans un contexte d'infection COVID. Dans certaines situations une assistance circulatoire est devenue nécessaire (ECMO veino-veineuse ou veino-artérielle), avec des résultats malheureusement décevants (32) . Une observation publiée dans l'European Heart Journal a montré l'efficacité de l'association corticoïdesimmunoglobulines dans le traitement de la myocardite fulminante à coronavirus (26) (33) . Concernant les troubles du rythme, Les extrasystoles ventriculaires (ESV) et l'amplitude des QRS sont à surveiller sur les électrocardiogrammes, les myocardites fulminantes entraînant une diminution très rapide de l'amplitude du QRS. Il semblerait que l'utilisation d'inhibiteurs de l'ACE et de statines pourrait être associée à un risque plus faible de décès à l'hôpital, mais des biais de confusion et de l'absence d'essai randomisé affaiblissent la portée de cette suggestion. Ainsi prescrire ces traitements dans cet objectif n'est actuellement pas recommandé (9) . L'épidémie liée au COVID-19 est en premier lieu une maladie respiratoire parfois mortelle, mais elle peut se manifester par des signes extra-pulmonaires notamment cardiologiques avec des conséquences à la phase aiguë et à long terme. Les maladies cardiovasculaires préexistantes sont un facteur de risque de gravité. Une connaissance de ces manifestations est essentielle pour une prise en charge interdisciplinaire rapide des cas sévères ainsi, une attention particulière doit être accordée à la protection cardiovasculaire pendant le traitement de la maladie COVID-19. Au décours d'une hospitalisation pour COVID-19, les lésions myocardiques peuvent entraîner une fibrose auriculaire ou ventriculaire, substrat des arythmies cardiaques ultérieures. La résonnance magnétique cardiaque qui permet d'évaluer l'étendue de la cicatrice myocardique, pourrait être un outil puissant pour mieux stratifier le risque d'arythmie chez ces patients lors d'un suivi prolongé (25) . A Novel Coronavirus from Patients with Pneumonia in China Cardiovascular Considerations for Patients, Health Care Workers, and Health Systems During the COVID-19 Pandemic Identification of a Novel Coronavirus in Patients with Severe Acute Respiratory Syndrome Isolation of a novel coronavirus from a man with pneumonia in Saudi Arabia Prevalence of comorbidities in the Middle East respiratory syndrome coronavirus (MERS-CoV): a systematic review and meta-analysis Sanchis-Gomar F. Cardiac troponin I in patients with coronavirus disease 2019 (COVID-19): Evidence from a meta-analysis COVID-19 and the cardiovascular system ACE2: from vasopeptidase to SARS virus receptor Cardiovascular Disease, Drug Therapy, and Mortality in Covid-19 Clinical course and risk factors for mortality of adult inpatients with COVID-19 in Wuhan, China: a retrospective cohort study SARS-coronavirus modulation of myocardial ACE2 expression and inflammation in patients with SARS Genomic characterisation and epidemiology of 2019 novel coronavirus: implications for virus origins and receptor binding 420-2. 14. Channappanavar R, Perlman S. Pathogenic human coronavirus infections: causes and consequences of cytokine storm and immunopathology Clinical predictors of mortality due to COVID-19 based on an analysis of data of 150 patients from Wuhan, China Clinical features of patients infected with 2019 novel coronavirus in Wuhan, China. The Lancet Role of acute infection in triggering acute coronary syndromes Cardiac Complications in Patients With Community-Acquired Pneumonia Acute Myocardial Infarction after Laboratory-Confirmed Influenza Infection | NEJM Clinical course and outcomes of critically ill patients with SARS-CoV-2 pneumonia in Wuhan, China: a single-centered, retrospective, observational study Clinical Characteristics of 138 Hospitalized Patients With 2019 Novel Coronavirus-Infected Pneumonia in Wuhan, China Cardiac Involvement in a Patient With Coronavirus Disease 2019 (COVID-19) Clinical characteristics of novel coronavirus cases in tertiary hospitals in Hubei Province SARS-CoV-2: a potential novel etiology of fulminant myocarditis Cardiac and arrhythmic complications in patients with COVID-19 Cardiotoxicity of antimalarial drugs COVID-19 Myocarditis and Severity Factors: An Adult Cohort Study | medRxiv a population-based, observational study. Lancet Public Health Acute respiratory distress syndrome: the Berlin Definition Preparing for the Most Critically Ill Patients With COVID-19: The Potential Role of Extracorporeal Membrane Oxygenation Coronavirus fulminant myocarditis saved with glucocorticoid and human immunoglobulin