key: cord-1047044-xou1109w authors: Berezné, Alice; Bono, Wafaa; Guillevin, Loïc; Mouthon, Luc title: Orientation diagnostique devant une lymphopénie date: 2006-05-31 journal: La Presse Médicale DOI: 10.1016/s0755-4982(06)74709-1 sha: 4b13e88a09951784fe4bd6aa72a79d64149236e9 doc_id: 1047044 cord_uid: xou1109w Points essentiels Une lymphopénie est définie par un nombre de lymphocytes circulants < 1 500/mm3 chez l’adulte et 4 500/mm3 chez l’enfant avant 8 mois. Nous proposons de classer les lymphopénies en fonction de leur mécanisme supposé • les insuffisances de production, qui regroupent les déficits immunitaires primitifs ou secondaires à une dénutrition et/ou une carence en zinc • les excès de catabolisme comprenant la radiothérapie, la chimiothérapie, les traitements immunosuppresseurs, l’infection VIH et le lupus érythémateux systémique • les modifications de la répartition des lymphocytes, qui comprennent principalement l’hypersplénisme, certaines infections virales, le choc septique, les brûlures étendues, les granulomatoses et la corticothérapie • les autres causes de lymphopénie, dont le mécanisme est encore mal compris : ethnie (Éthiopiens), insuffisance rénale, lymphome, tumeur solide, lymphopénie CD4 idiopathique. Key points Lymphopenia is defined as a peripheral lymphocyte count lower than 1500/mm3 in adults and 4500/mm3 in children younger than eight months of age. We propose a classification of lymphopenia according to the mechanism involved • lymphocyte production defects, including primary immune deficiencies and immune deficiencies secondary to malnutrition or zinc deprivation • excess catabolism, due to causes including radiotherapy, chemotherapy, immunosuppressive therapy, HIV infection, and systemic lupus erythematosus • abnormal lymphocyte trapping, including mainly splenomegaly, certain viral infections, septic shock, extended burns, systemic granulomatosis, and corticosteroids • other causes of lymphocytopenia, with mechanisms that remain poorly understood: ethnicity (Ethiopians), lymphoma, renal insufficiency, and idiopathic CD4 lymphocytopenia. Une lymphopénie est définie par un nombre de lymphocytes circulants < 1 500/mm 3 chez l'adulte et 4 500/mm 3 chez l'enfant avant 8 mois. Nous proposons de classer les lymphopénies en fonction de leur mécanisme supposé : • les insuffisances de production, qui regroupent les déficits immunitaires primitifs ou secondaires à une dénutrition et/ou une carence en zinc ; • les excès de catabolisme comprenant la radiothérapie, la chimiothérapie, les traitements immunosuppresseurs, l'infection VIH et le lupus érythémateux systémique ; • les modifications de la répartition des lymphocytes, qui comprennent principalement l'hypersplénisme, certaines infections virales, le choc septique, les brûlures étendues, les granulomatoses et la corticothérapie ; • les autres causes de lymphopénie, dont le mécanisme est encore mal compris : ethnie (Éthiopiens), insuffisance rénale, lymphome, tumeur solide, lymphopénie CD4 idiopathique. en ligne sur/ on line on www.masson.fr/revues/pm Les lymphocytes sont des acteurs essentiels de la réponse immune adaptative. Ils sont produits dans les organes lymphoïdes primaires à raison de 10 9 /j : le thymus pour les lymphocytes T (LT) et le foie foetal et la moelle osseuse pour les lymphocytes B (LB). Une partie des lymphocytes circule dans le sang, tandis que l'autre migre vers les organes lymphoïdes secondaires (rate, ganglions lymphatiques, amygdales, tissus lymphoïdes associés aux muqueuses). Une troisième population de lymphocytes, les cellules "Natural Killer" ou cellules tueuses (NK), est dépourvue de récepteur à l'antigène. La quantité de lymphocytes circulants doit être interprétée en fonction de l'âge : ils sont compris entre 1 500 et 4 000/mm 3 chez l'adulte alors qu'ils peuvent atteindre 6 000/mm 3 chez l'enfant et 11 000/mm 3 chez le nouveau-né. Une lymphopénie est définie par un nombre de lymphocytes sanguins < 1 500/mm 3 chez l'adulte et 4 500/mm 3 chez l'enfant avant 8 mois. On peut caractériser les différentes sous-populations lymphocytaires sur la base de l'expression de certaines molécules de surface appelées "cluster de différentiation" (CD). Les LB, caractérisés par leur immunoglobuline (Ig) de surface et par l'expression des molécules CD19, CD20 et CD22, représentent 5 à 10 % du total des lymphocytes circulants. Les LT représentent jusqu'à 80-85 % des lymphocytes totaux et expriment les marqueurs CD2, CD3, CD5 et CD7. Ils se répartissent en 2 sous-classes principales : les LT CD4 + qui ont une fonction d'organisation de la réponse immune et les LT CD8 + qui ont pour majorité une fonction cytotoxique. Les lymphocytes sont éliminés par apoptose dans différents tissus (voies respiratoires, tube digestif, etc.). Par des phénomènes de diapédèse, les lymphocytes peuvent se trouver alternativement dans le sang, la circulation lymphatique ou les tissus (ganglions, rate) en reconnaissant spécifiquement les récepteurs à la surface de certaines cellules endothéliales leur permettant d'adhérer à ces cellules et de pénétrer dans les tissus. Nous avons choisi de classer les différentes causes de lymphopénie en fonction du mécanisme dominant: diminution de production, excès de catabolisme, ou modifications de la recirculation (encadré 1). Cependant, les mécanismes aboutissant à une lymphopénie sont multiples et souvent intriqués. Les lymphopénies par insuffisance de production peuvent être constitutionnelles [1, 2] (encadré 2) ou acquises [3] . [4, 9] . On individualise ensuite les DICS par défaut de différentiation, les LT et éventuellement des cellules NK. Les lymphocytes B y sont normaux ou augmentés. Ce sont les formes les plus fréquentes représentant 50 % de l'ensemble des DICS. On distingue 3 formes: • les formes liées à l'X, caractérisées par des mutations du gène codant pour la chaîne gamma commune (γc) aux récepteurs des interleukines (IL)-2, -4, -7, -9, -15 [10] ; • les formes autosomiques récessives liées à des mutations du gène codant pour la tyrosine kinase JaK 3 (Janus kinase 3) associée à la chaîne γc des récepteurs aux IL-2, -4, -7, -9, -15 [11] ; • une exceptionnelle forme autosomique avec mutation de la chaîne alpha du récepteur de l'IL-7 [5] . Dans les 2 premières formes, il existe un déficit en cellules NK, tandis que dans la troisième forme, les cellules NK sont normales. Ces 3 formes de DICS sont létales à très cours terme en l'absence d'allogreffe de moelle osseuse [12] . Déficit en RAG Déficit en Artémis Déficit en ADA Dysgénésie réticulaire Le déficit en purine nucléotide phosphorylase (PNP) [13] se manifeste par une lymphopénie T progressive sans diminution des LB et des cellules NK. Il entraîne une accumulation cellulaire de d-GTP. Contrairement au déficit en ADA, il ne s'accompagne pas d'anomalie squelettique, mais se caractérise par des manifestations neurologiques (dystonie, cécité corticale) et de fréquents stigmates d'auto-immunité [13] . Le défaut d'expression des molécules du complexe majeur d'histocompatibilité (CMH) de classe I est responsable d'un déficit en LT CD8 + exclusif sans que la lymphopénie T soit profonde. Ce déficit est la conséquence d'une mutation siégeant sur le gène codant pour les protéines TAP1 et TAP2 qui sont les transporteurs associés à l'apprêtement de l'antigène. En l'absence de ces protéines, l'assemblage entre les peptides antigéniques et les molécules de classe I n'est pas possible et en conséquence surviennent des infections des voies aériennes supérieures, quelquefois associées à une vascularite [14] . Une lymphopénie peut, plus rarement, révéler un déficit isolé de l'immunité humorale, les LB étant minoritaires dans le sang périphérique. Une hypogammaglobulinémie doit alors être recherchée. Il s'agit le plus souvent d'une agammaglobulinémie liée à l'X, encore appelée maladie de Bruton, conséquence d'une mutation située sur le gène de la Bruton tyrosine kinase. Cette mutation entraîne un défaut de maturation des LB expliquant l'absence de LB circulants et en conséquence l'absence de développement des organes lymphoïdes secondaires. Enfin, dans certains cas, une lymphopénie peut être observée au cours du déficit immunitaire commun variable. Ce déficit immunitaire humoral est le plus souvent diagnostiqué au cours de la deuxième ou de la troisième décennie, correspond à un groupe hétérogène de déficits dont les mécanismes sont en cours d'identification. Le syndrome de Wiskott-Aldrich est caractérisé par un déficit de l'immunité cellulaire associant une lymphopénie T d'aggravation progressive à un défaut de réponse proliférative en présence d'antigènes et de mitogènes [15] . [4] . Au cours de cette affection on constate une lymphopénie profonde (500 à 1000 lymphocytes/mm 3 ) dans les formes complètes correspondant à une quasi-absence de LT et une augmentation relative des LB à l'origine d'un déficit profond de l'immunité cellulaire. Les dyskératoses congénitales qui regroupent la dyskératose liée à l'X (mutation du gène de la dyskérine) et la dyskératose congénitale autosomique dominante (mutation-délétion du gène d'ARN-télomérase) entraînent une dyskératose associée à une aplasie médullaire ou une dysmyélopoïèse qui peuvent être révélatrices. Les patients ont un déficit de l'immunité humorale. Une lymphopénie peut également être identifiée dans d'autres syndromes polymalformatifs comme le "cartilage-hair hypoplasia" ou l'ataxie-télangiéctasie. Les causes acquises de lymphopénie par insuffisance de production sont plus fréquentes que les causes constitutionnelles. La première cause est la malnutrition qui entraîne une lymphopénie principalement par le biais d'une carence de zinc. Des études menées en Inde chez des enfants dénutris âgés de 1 à 3 ans ont mis en évidence que 15 % d'entre eux étaient lymphopéniques [3] . Chez ces enfants on trouve une déplétion en précurseurs des LB dans la moelle osseuse et des lésions atrophiques au niveau des ganglions lymphatiques. En fonction de la profondeur du déficit en zinc, les symptômes varient, allant d'une lymphopénie associée à des anomalies des tests de prolifération lymphocytaire dans les carences modérées à des lésions cutanées et un retard à la cicatrisation qui peuvent être au premier plan dans les formes sévères. Chez la souris, une carence en zinc s'accompagne d'une élévation du cortisol plasmatique et d'une apoptose accrue des précurseurs des LT et des LB. Ainsi, le zinc est indispensable à la synthèse des éléments cellulaires et à la stabilisation de très nombreuses enzymes nécessaires à la synthèse des protéines et des acides nucléiques. Certaines vitamines pourraient moduler la lymphopoïèse, une carence en vitamine A pouvant entraîner la survenue d'une atrophie thymique, d'une lymphopénie et une diminution des fonctions phagocytaires des macrophages péritonéaux [16] , tandis que la vitamine C semble entraîner une lymphopénie, en particulier dans un contexte de stress chez la souris. En plus de la malnutrition, les autres causes de carence en zinc sont l'intoxication éthylique chronique, les maladies rénales, les brûlures étendues et des pathologies gastro-intestinales [17] . Au cours de l'insuffisance rénale, le mécanisme de la lymphopénie est plurifactoriel, associé entre autres à une carence d'apport en protéines, zinc, pyridoxine. Les patients souffrant d'anorexie mentale ont volontiers une lymphopénie qui prédomine sur les LT CD4 + . Chez les sujets âgés dénutris, l'hyperalimentation peut permettre, en plus de la correction du déficit nutritionnel, la correction de la lymphopénie. Une certain nombre de causes sont à l'origine d'un excès de catabolisme des lymphocytes, parmi lesquelles la corticothérapie, la chimiothérapie, la radiothérapie, les traitements Orientation diagnostique devant une lymphopénie immunosuppresseurs, l'infection par le virus de l'immunodéficience humaine (VIH), le lupus érythémateux systémique (LES). Les lymphopénies constituent un effet secondaire fréquent des traitements médicamenteux, en particulier des traitements anticancéreux alkylants et des immunosuppresseurs. La toxicité de ces traitements prédomine le plus souvent sur les lymphocytes T CD4 + , probablement du fait des capacités régénératives plus faibles des LT CD4 + que des LT CD8 + . La lymphopénie survient précocement et la numération des lymphocytes au cinquième jour après une cure de chimiothérapie semble être un facteur prédictif de la survenue d'une neutropénie fébrile [18] . La fludarabine (et les autres analogues des purines) utilisée dans le traitement des syndromes lymphoprolifératifs de bas grade induit une lymphopénie globale très profonde et de durée prolongée (plusieurs mois ou années), exposant les patients à la survenue d'infections opportunistes. La radiothérapie seule ou associée à une chimiothérapie entraîne une lymphopénie qui peut persister plusieurs mois après la fin du traitement et une fois encore s'exercer majoritairement sur les LT CD4 + . Les Ac (anticorps) monoclonaux entraînent des lymphopénies sélectives : lymphopénie B pour le rituximab (anti-CD20 chimérique), lymphopénie T pour les Ac anti-CD3 et le sérum anti-lymphocytaire, tandis que l'alemtuzumab (Ac anti-CD52) entraîne une lymphopénie globale. L'infection par le VIH se caractérise par une lymphopénie liée à une déplétion sélective en LT CD4 + dans le sang périphérique. Le VIH pénètre dans les LT CD4 + grâce à l'interaction hautement spécifique entre sa protéine de membrane gp120 et la molécule CD4. Plusieurs mécanismes sont à l'origine de cette lymphopénie: un effet cytopathogène du VIH avec production de syncitia expliquant la corrélation entre la virulence du virus et la progression de la lymphopénie [19] et une destruction des LT CD4 + en conséquence de l'action de LT CD8 + cytotoxiques spécifiques du VIH. Au cours de certaines autres infections virales (comme le SARS ou la grippe), un excès de catabolisme lymphocytaire pourrait jouer un rôle. La lymphopénie, qui est un des critères de classification du LES, est l'anomalie de l'hémogramme la plus fréquemment identifiée au cours de cette maladie, présente dans 75 % des cas [20] . Les mécanismes à l'origine de cette lymphopénie sont encore mal compris: excès d'apoptose, Ac anti-lymphocytes d'isotypes IgM et IgG qui pourraient agir par un mécanisme de cytotoxicité cellulaire dépendant des Ac. Ces Ac sont dirigés principalement contre les LT, mais également contre les LB et certaines de leurs cibles ont été identifiées : il s'agit des sphingolipides et des L-sélectines. Certains auteurs ont décrit une corrélation entre l'évolutivité clinique du LES, la lymphopénie et le taux des Ac anti-lymphocytes. De nombreuses pathologies peuvent entraîner une lymphopénie par un phénomène de redistribution, parmi lesquelles les granulomatoses, toutes les causes d'hypersplénisme, certaines infections, la corticothérapie et d'autres causes plus rares. Au cours de la sarcoïdose, qui est une granulomatose systémique, la lymphopénie constitue un marqueur d'activité de la maladie, au même titre que l'enzyme de conversion de l'angiotensine et l'hypersensibilité cutanée retardée [21] . Bien que l'étiologie de la maladie ne soit pas connue, il a été montré que les LT de ces patients exprimaient à leur surface de nombreux marqueurs d'activation et des molécules d'adhésion facilitant leurs interactions avec les macrophages et la formation de granulomes [22] . Ainsi, au cours d'une sarcoïdose on observe une grande quantité de LT CD4 + dans les tissus, contrastant avec la lymphopénie CD4 + sanguine. De façon notable, la lymphopénie CD4 + , même si elle peut être profonde, n'entraîne qu'exceptionnellement la survenue d'infections opportunistes. Une lymphopénie peut également être observée au cours d'une vascularite systémique, la granulomatose de Wegener. Cette lymphopénie, qui peut être présente avant tout traitement, pourrait constituer un marqueur d'activité de la maladie. À la différence de ce qui est observé dans la sarcoïdose, elle se complique de façon non exceptionnelle d'infections opportunistes, en particulier de pneumocystoses pulmonaires [23] . Les maladies inflammatoires cryptogénétiques intestinales (MICI), lorsqu'elles sont sévères, peuvent s'accompagner d'une lymphopénie. Ainsi, dans la maladie de Crohn, près d'un tiers des patients qui subissent une intervention chirurgicale sont lymphopéniques avant l'intervention, et une lymphopénie profonde est corrélée à un mauvais pronostic [24] . La lymphopénie pourrait être la conséquence d'un excès de TNF(Tumor necrosis factor)α et d'endotoxines et/ou pertes digestives. En dehors du cadre des MICI, une lymphopénie peut être la conséquence de pertes au niveau du tube digestif ou des séreuses, comme dans les chylothorax traumatiques ou les lymphangiectasies intestinales primitives [25] . Au cours des entéropathies exsudatives, une lymphopénie est fréquemment observée, dont le mécanisme est probablement multifactoriel, pour partie secondaire à une dénutrition. Une lymphopénie parfois profonde peut être observée dans un grand nombre d'infections virales ou bactériennes. Au cours des infections à paramyxovirus comme la rougeole et au cours des infections à cytomégalovirus (CMV), une lymphopénie est en règle associée à un plus mauvais pronostic [26] . Une lympho-ménie peut également être observée au cours des infections à virus respiratoire syncitial (VRS), à virus West-Nile ou à coronavirus, responsable du SARS [27] . La lymphopénie pourrait être la conséquence d'un excès d'apoptose lymphocytaire et/ou d'une élévation du cortisol plasmatique. La rougeole est associée à une immunodépression marquée et à une susceptibilité accrue à la survenue d'infections secondaires dans les pays en voie de développement. Au cours de cette maladie, la lymphopénie est la conséquence de phénomènes de redistribution, d'activation lymphocytaire et d'un excès d'apoptose. Lors des infections bactériennes sévères, en particulier à mycobactérie, on peut observer une lymphopénie, parfois profonde, par redistribution [28] . En situation d'infection, la réponse au stress est associée à une production accrue de cortisol qui entraîne une démargination des polynucléaires neutrophiles et une diminution des lymphocytes circulants par augmentation de leur diapédèse. Dans les chocs toxi-infectieux, des lymphopénies profondes sont décrites et leur profondeur semble corrélée avec le taux de cortisol circulant. Dans cette situation, la profondeur de la lymphopénie à l'admission est corrélée positivement avec le taux de mortalité [29] . Le mécanisme de la lymphopénie semble être une redistribution du sang périphérique et de la rate vers les tissus lymphatiques. L'apparition d'une lymphopénie après l'administration de corticoïdes survient très précocement et est maximale dans les 4 heures suivant la prise, pour se corriger dans les 24 heures. Les mécanismes mis en jeu sont complexes et comportent notamment des phénomènes de redistribution des lymphocytes du secteur intravasculaire vers le secteur extravasculaire, en particulier vers les organes lymphoïdes [30] . Cette lymphopénie, si elle intéresse également les LB, prédomine sur les LT et plus particulièrement les lymphocytes T CD4 + . Un nombre important d'autres pathologies peuvent s'accompagner d'une lymphopénie, sans que le mécanisme causal soit clairement identifié. Les patients insuffisants rénaux chroniques, en particulier dialysés, ont fréquemment une lymphopénie. Cette lymphopénie s'inscrit dans un contexte plus large d'anergie tuberculinique et des réponses vaccinales médiocres. Chez ces patients, les altérations importantes de l'immunité à médiation cellulaire contrastent avec une activation importante des LT. La lymphopénie est probablement la conséquence d'un excès d'apoptose des LT et des LB par diminution d'expression de la molécule BcL2 [31] et/ou par excès d'expression de la molécule Fas [32] . De plus, une famille de lipoprotéines immunorégulatrices (et peut-être d'autres toxines endogènes) est impliquée dans la dysfonction immunitaire au cours de l'insuffisance rénale. Au cours des glomérulonéphrites, un déficit dans d'autres constituants comme les acides gras, les phosphates pourrait perturber la réponse immune. Des facteurs génétiques pourraient également jouer un rôle dans la survenue d'une lymphopénie. Ainsi, les Éthiopiens séronégatifs pour le VIH auraient-ils plus fréquemment que les autres ethnies une lymphopénie T CD4 + en l'absence de toute symptomatologie clinique [33] . Les lymphopénies survenant au cours des lymphomes ne sont pas de mécanisme clair. Une lymphopénie est un facteur de risque indépendant de mauvais pronostic au même titre que l'existence d'un envahissement médullaire au cours du lymphome de Hodgkin [34] . La mise en évidence d'une lymphopénie avant l'instauration de la chimiothérapie est un critère de mauvais pronostic dans le cancer du sein ou dans des cancers métastatiques [35] . De plus l'identification d'une lymphopénie < 700/mm 3 5 jours après le début de la chimiothérapie est un facteur de risque de survenue d'une neutropénie fébrile [18] . La lymphopénie CD4 idiopathique est définie par une lymphopénie T CD4 + < 300/mm 3 ou < 20 % du total des lymphocytes à plus d'une occasion en l'absence d'infection VIH-1 ou 2, HTLV-1 (Human T-cell leukemia virus) ou -2, de déficit immunitaire constitutionnel ou de traitement pouvant être à l'origine d'une baisse des LT CD4 + . C'est après avoir éliminé l'ensemble des autres causes de lymphopénie CD4 + que l'on évoque le diagnostic de lymphopénie CD4 idiopathique. D'autres facteurs comme l'intoxication éthylique aiguë (en l'absence de splénomégalie, de cirrhose, d'infection ou de carence en folates) ou l'exercice peuvent entraîner une lymphopénie. Enfin, on peut observer la normalisation de la lymphopénie après plusieurs semaines sans qu'aucune cause soit retrouvée. On peut évoquer des fluctuations interindividuelles du sujet sain. Une lymphopénie peut être découverte fortuitement ou de façon orientée par un contexte clinique. Lorsqu'elle est de découverte fortuite, c'est la profondeur de la lymphopénie qui va permettre d'envisager soit un simple contrôle à distance, en règle schématiquement entre 1200 et 1500/mm 3 Le recours à certains examens complémentaires simples et de réalisation courante permet de progresser rapidement dans le diagnostic étiologique de la lymphopénie (encadré 3). L'analyse du reste de l'hémogramme permet de différencier les lymphopénies isolées des bicytopénies ou des pancytopénies. La créatinine est dosée pour rechercher une insuffisance rénale, la protéine C-réactive pour rechercher un syndrome inflammatoire. Une électrophorèse des protides sériques recherche une hypoalbuminémie (syndrome inflammatoire ou dénutrition), une hypogammaglobulinémie évocatrice d'un syndrome lymphoprolifératif ou d'un déficit immunitaire constitutionnel ou une hypergammaglobulinémie qui orienterait vers une infection VIH, un LES, une sarcoïdose ou certains lymphomes comme la lymphadénopathie angio-immunoblastique. Une augmentation des LDH (lactate déshydrogénase), oriente vers un lymphome; une augmentation de l'activité de l'enzyme de conversion de l'angiotensine, une élévation de la calcémie orientent plutôt vers le diagnostic de sarcoïdose, même si ces anomalies ne sont pas spécifiques. Des Ac anti-nucléaires et éventuellement anti-ADN sont demandés en cas de suspicion de LES. Un phénotypage lymphocytaire T, B et NK permet de préciser le caractère global ou sélectif de la lymphopénie et d'orienter vers un déficit de l'immunité cellulaire, de l'immunité humorale ou les 2 le cas échéant. Enfin, une infection virale chronique, en particulier HIV1-2 et HTLV1-2 doit être recherchée par la pratique de sérologies. Ensuite seulement viennent les examens plus complexes ou plus invasifs visant à confirmer un diagnostic. Les mécanismes et les étiologies pouvant être à l'origine d'une lymphopénie sont multiples et intriqués. Plutôt que de se précipiter sur des examens complémentaires complexes et coûteux, il faut intégrer la lymphopénie dans le contexte clinique et biologique qui à lui seul fournit le plus souvent l'explication. C'est seulement ensuite, en l'absence d'étiologie évidente, qu'une sérologie VIH, un phénotypage lymphocytaire et des examens immunologiques orientés permettent de faire un diagnostic étiologique. 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