COMPTE-RENDU SATYRIQUE ET BURLESQUE DES SÉANCES DE LA COMMUNE DE PARIS r Il a été tiré 50 exemplaires sur papier vergé. COMPTE-RENDU SATYRIOUE ET BURLESQUE DES SÉANCES DE LA COMMUNE DE PARIS par 3uniti0. LONDRES LIBRAIRIE ÉTRANGÈRE DE W. JEFFS 15, Burlincton-Arcade. PICCADILLY. 1871 AVANT-PROPOS On s'est plaint non sans raison du défaut de publicité des séances de la Commune de Paris. Henri RocJiefort lui-même s'est élevé avec une indignation mêlée de calembour g s contre le mystère de ses délibérations, gui prive le pays de l'èloqicence des citoyens Billoray, Var- lin et Grêlie-r. Il y aura là évidemment une page blanche, une lacune dans l'histoire de nos Parlements célèbres et de nos grandes assemblées. C'est cette lacune que nous allons combler eyi publiant le compte-rendu d'une des plus mémorables séances de l'Hôtel de Ville. Nous devons ce document important au de- vouement d'un de nos correspondants qui a pu pénétrer dans la salle du conseil sous le dé¬ guisement d'un garde national de Belleville. t. Cnmptr-rfnîm «atgrtquf et bnrleaqne DES SÉANCES DE LA COMMUNE Minuit. — La séance ©st ouverte. Le citoyen Lefrmçais. — Yous savez,, ci¬ toyens, que nous n'aurons pas le plaisir de voir ce soir notre honorable président,, le citoyen Assy. ■ Le citoyen Yarlin. Pourquoi çà? Le citoyen Raoul Rigauht. — Je V«Û £ait,in- «arcérer ee matin connue suspect d'intrigues bonapartistes. Le eètoym Vectmrek. — Je tou¬ jours douté car qhaquft qjje j'uH^i^ autre¬ fois au ministère de l'intérieur,,.. Le citoyen Lefmnçam- Cojpaçi^ftt^vou#^- Nliez au minister© de l'intérieur-. . • • Le citoyen WetyumL, m- Quiû'fcW#* - 8 - nistère de l'intérieur, mais savez-vous pour¬ quoi?... Le citoyen Lefrançais. — Dame.... Le citoyen Vermoreh — J'y allais pour as¬ sassiner Bonaparte ! (Mouvement,) Le citoyen Jourde. — Dans ce cas il n'y a rien à dire. Le citoyen Clément. — On ne peut que féli¬ citer le citoyen Yermorel de ses bonnes inten¬ tions. Le citoyen Raoul Rigault. — Je ferai remar¬ quer que Bonaparte ne résidait pas au minis¬ tère del'intér....' Le citoyen Vermorel. — Eh ! qu'importe? Le crime réside partout. — Bonaparte était le crime, je l'aurais trouvé là comme ailleurs. Le citoyen Varlin. — C'est évident ! Le citoyen Raoul Rigault. — Pas tant que çà (A part). Un homme à filer. Le citoyen Lefrançais. — Puisque nous voilà privé de notre .président Assy.... Le citoyen Raoul Rigault. — Qui n'était qu'un sergent de ville déguisé.... Le citoyen Baiick. — Parbleu ! je me rap¬ pelle ses moustaches maintenant. Le citoyen Lefrançais. — Il s'agirait de choi- - 9 — sir un autre president parmi nous. Le citoyen Verdure. — Pas de président ! Le citoyen Billoray. — Non, pas de prési¬ dent ! Le citoyen Leftançais. — Cependant.... Le citoyen Clément. - - Il est évident que le titre de président implique une certaine aris¬ tocratie hiérarchique que nous ne saurions supporter. Le citoyen Billoray. — Parfaitement : il y a des présidents à la cour d'assisses {mouve¬ ment), à la police correctionnelle (second mou¬ vement), au donseil de guerre (troisième mou¬ vement), à l'Assemblée nationale (due! huel) il ne saurait y avoir de président à la Commune libre de Paris. {Bravosprolongés.) Le citoyen DeUsclnze. — Pour en finir avec ces discussions qui nous font perdre un temps précieux, je propose de nommer un délégué à la présidence., Plusieurs voix. — C'est ça, c'est ça, un dé¬ légué. Le citoyen Protot. — Je propose comme dé¬ légué a la présidence le citoyen Delescluze qui vient de résoudre si heureusement la difficulté qui arrêtait nos délibérations. - 10 - Plusieurs voix. — Oui, oui. Le citoyen Raoul Rigault. — J'ai beaucoup connu dans le temps un mouchard qui s'appe¬ lait.... Le citoyen Delescluze. — Oseriez-vous par hasard soupçonner.... Le citoyen Raoul Reg ault. — Je ne soup¬ çonne pas seulement je surveille, puisque je suis délégué à la police. Le citoyen lourde. — Il a raison, la réaction prend tant de masques. Qui nous aurait dit, par exemple, que le citoyen Assy.... Le citoyen Beslay. — Mon Dieu si, nous au¬ rions dû y songer. Figurez-vous qu'une fois il m'a appelé monsieur! Le citoyen Raoul Rig ault. - - Et vous ne me l'avez pas dit, malheureux ! mais savez-vous que voilà un acte, qui pourrait vous faire soup¬ çonné de complicité? Le citoyen Félix Pyat. — Je me souviens également qu'en me parlant du faussaire Jules Favre, il a oublier de faire précéder le nom de os»misérable de l'épitliète de. forçat. Le citoyen Raoul Rigault. — Comment, vous aussi, tu quoque, vous gardiez le silence? - 11 — Le citoyen Félix Pyat. —Que voulez-vous, nous sommes si confiants ! Le citoyen Protot.— Citoyens, il est déjà minuit et demi et nous n'avons encore rien fait. Le citoyen Raoul Rigault. — Comiûent rien fait, j'ai découvert trois mouchards parmi nous. Le citoyen Protot, — Acceptez-vous le ci¬ toyen Delescluze comme délégué à la prési¬ dence? Voix nombreuses. — Nous l'acceptons. Le (Moyen Raoul Rigault. — (À part). C'est çà, mon bonhomme, jouis de ton reste, dès de¬ main matin.... Le citoyen Delescluze. — Citoyens, vous sa¬ vez que je suis* l'homme aux résolutions promptes et radicales. Par conséquent, procé¬ dons de suite à nos travaux. Une voix. — Je demande la parole pour une question préalable. Le citoyen Delescluze. — Votre nom, d'a¬ bord? — Le citoyen Loiseau. Le citoyen Delescluze. — Loiseau? — Oui, Loiseau, délégué à la commission du travail, de l'industrie et de l'échange. — 12 - Le citoyen Delescluze. — Bon, bon. Vous comprenez, on ne connaît pas tout le monde ici. Le citoyen Raoul Regault. — Oh ! pour ça non ! Je parie pour.les trois quarts.... Le citoyen Delescluze. — Eh bien! citoyen Loiseau, que dites-vous? Le citoyen Loiseau. — Je voudrais savoir ce que c'est que la Commune? (Bruyante inter¬ ruption, tumulte, cris nombreux : A la porte! il insulte l'Assemblée!) Le citoyen Delescluze. — J'ai besoin de rap¬ peler à moi tout mon calme de prési 'ent.... Le citoyen BiUoray. — Pas de président! Le citoyen Delescluze. — De délégué à la pré¬ sidence, veux-je dire. Le citoyen Billoray. — A la bonne heure ! Le citoyen Delescluze. — Pour ne pas rele¬ ver comme elle le mérite la question inconve¬ nante,du citoyen Loiseau.... Le citoyen Raoul Rigault. — Loiseau ! Il y avait dans le temps, le n° 77 qui faisait les ca¬ fés de la rive gauche et dont le nom.... Le citoyen Delescluze. — Ceux qui ne com¬ prennent pas ce que c'est que la Commune peuvent se retirer (;mouvement accentué rers la - 13 - porte), ils ne sont pas dignes de figurer ici. (Tout le monde reste.) Le citoyen Raoul Rigault. — Heureusement, que j'ai noté ceux qui ont bougé. Le citoyen Delescluze. — L'incident est vidé ; nous allons entendre les'rapports des délégués aux commissions. COMMISSION EXECUTIVE. Le citoyen Félix Pyat. — La commission dont j'ai l'honneur de faire partie s'est occupée avec un zèle .au-dessus de tout éloge, de mettre à exécution les divers arrêtés rendus par la Commune. L'arrêté sur la suppression des loyers n'a souffert aucune difficulté, et les déménage¬ ments se sont opérés dans le plus grand ordre. Quelques brigands de propriétaires s'étant permis de protester contre une décision aussi /avorables à leurs locataires, nous les avons fait immédiatement incarcérer avec l'intention de les envoyer à Cayenne ou au bagne aussitôt que la liberté de circulation sera complément rétablie. - 14 - Quant aux immeubles de ces gredins, ils seront purement et simplement confisqués au profit de la Commune. (Mouvement d'approba¬ tion.) Une voix. — Je demande qu'on ajoute : — Et de ses membres.. Le citoyen Félix Pyat. — Bien entendu, du reste ceci fera l'objet d'un arrêté spécial.. Le citoyen Bjlloray. — Je vous ferai remar¬ quer une nouvelle infamie des propriétaires contre laquelle il s'agit de sévir sans aucun re¬ tard. Le citoyen Félix Pyat. — Ça ne m'étonne pas, «es gens-là sont capables de tout. Le citoyen Billoray.— Une foule de malheu¬ reux locataires ont bien pu déménager sans payer de loyers, grâce â l'arrêté libéral de la" Commune ; mais lorsqu'ils se présentent pour emménager dans un autre local, les concierges des maisons s'y refusent obstinément {Mouve¬ ment d'horreur.) Le citoyen Jules Vallès. — Oh ! ces concier¬ ges! Le citoyen Billoray. — Il importe de faire cesser au plus tôt un pareil abus, qui est une - 15 - atteinte directe à la liberté du logement. (As¬ sentiment.) Le citoyen Félix Pyat. — Il y a un moyen bien simple, c'est de condamner à vingt ans de travaux forcés le propriétaire dont le con¬ cierge aura refusé délaisser prendre un appar¬ tement. Le citoyen Varlin. — Pourquoi ces demi-me¬ sures? Vous n'avez qu'à condamner à mort le propriétaire et son concierge ; c'est beaucoup plus radical, et vous évitez à la Commune les frais de voyage des comdamnés et la dépense de leur entretien à Cayenne ou à Brest. Le citoyen Félix Pyat. — Comme la con¬ damnation à mort pourrait entraîner des pertes de. temps, ne serait-il pas plus simple de les fusiller sans jugement? Le citoyen Beslay. — Avec d'autant plus de raison que les propriétaires ne méritent aucun ménagement, puisque la propriété c'est le vol. Le citoyen Protot.— C'est évident ; ces gens- là sont toujours en flagrant délit. Le citoyen Delescluze. — Il sera bon qu'on nous présente sur ces divers projets un travail complet dont nous nous occuperons dès de- - 16 - main. — Je prie le citoyen Félix Pyat de con¬ tinuer. Le citoyen Félix Pyat. — Après l'arrêté sur les loyers dont nous n'avons eu qu'à surveiller l'exécution, les intéressés s'étant eux-mêmes chargés de son application immédiate, nous avons dù nous occuj er de la loi sur les étages,' qui intéresse à un si haut point la sécurité et la vie des honnêtes gens. Là comme toujours, l'activité la plus grande*1 a été déployée, et depuis hier matin nous dé¬ tenons dans les prisons quinze cent quarante bandits arrêtés sans coup férir. Au nombre de ces scélérats se trouvent le sieur Darboy, archevêque de Paris, et tous les calotins qu'on a pu découvrir. Par conséquent les garanties ne nous màn- quent pas et il suffira d'un signe pour faire pas¬ ser tous ces brigands par les armes. Le citoyen Balick.—Je demande à faire une observation..— L'arrêté porte que pour un ré¬ publicain fusillé, on fusillera trois étages. Le citoyen Félix Pyat. — Parfaitement. Le citoyen Batick. — Ce chiffre de trois me paraît tout à fait insuffisant. - 17 - Le citoyen Félix Pyat. — Mais on peut l'augmenter. Le citoyen Babick. — Sans doute. Il est évi¬ dent, en effet, que trois curés ne représentent pas la valeur d'un patriote de Belleville. Il faut au moins en mettre six, et encore nous aurons du déchet. (Assentiment.) Le citoyen Delescluze. — Cette observation aurait dû être faite au moment où la mesure a été discutée. Aujourd'hui c'est trop tard ; le chiffre trois a été adopté et vous ne pouvez y revenir sans paraître des brouillons aux yeux de l'Europe. Je le regrette d'autant plus que le chiffre six me paraît bien plus équitable : c'est toujours par de pareilles incuries et de sem¬ blables faiblesses qu'on perd les révolutions. Le citoyen Félix Pyat. — Il y aurait un moyen, ce serait de nous rattraper sur les sus- ( pects. Le citoyen Raoul Rigault. — Les suspects, tenez voici la liste.... Le citoyen Delescluze. — Attendez, nous y arriverons.... Le citoyen Félix Pyat. — Il ne me reste plus qu'a parler de l'arrêté sur le recrutement des citoyens de dix-sept à quarante ans, qui con- i. - 18 - cerne plus spécialement la commission mili¬ taire. Le recrutement présente, paraît-il, quelques difficultés : un eertain*nombre de citoyens cherchent à se soustraire à l'honneur de dé¬ fendre leur patrie contre les gardes chiourmes des forçats de Versailles, mais il suffira de quelques exemples pour raincre ces résistances honteuses. Le Moyen Ranc. — Il me semble que nous parions beauaoup de fusillades pour un gou¬ vernement qui a aboli la peine de mort. Le citoyen Félix Pyat. — Oui, sans doute, la peine de mort contre nous ! Le citoyen Delesclme. —- Le citoyen Banc ne paraît pas s» faire une idée bien nette des situations et des nécessités qu'elles entraînent. Le Moyen Fane. — Parfaitement si, mais il faut prendre garde de débuter précisément par ce que nous reprochions.... Le Moyen Raoul RigauU. — Tiens, tiens, encore un ! avec sa figure de curé, j'aurais dû me douter.... Le Moyen Ttidon. — Voici un aide de camp du général Bergeret. Le Moyen Leloscluze. •— Quoi de nouveau ? - 19 - L'aide de camp. — Citoyens, tout va bien.— L'armée de Versailles est en pleine déroute. Bergeret « lui-même » est aux avant-postes. ( Applaudissements i) Le citoyen Delescluze. — Le rapport de la commission des finances est-il prêt? Le citoyen Beslay. — Voici : il sera très- court. Nous n'avons rien en caisse. (Stupeur générale.) / Le citoyen Delescluze. — Comment rien en caisse I C'est là une situation anormale qui ne saurait durer. Le citoyen Beslay. — Sans doute, mais le moyen d'en sortir? Le citoyen Delescluze. — N'avez-vous pas les réquisitions? Le citoyen Beslay. — Cette ressource est épuisée ; les administrations publiques ont livré tout leur numéraire et les réquisitions particu¬ lières ne produisent qu'un chiffre tout à fait in¬ suffisant pour parer aux dépanses générales. Le citoyen Fèliz Pyat. — Caia vient de ce que les riches enfouissent leur or pour affamer le peuple ! Le citoyen Jowde. Dans cette situation nous n'avons qu'une chose à faire : émettre des _ 20 ~ bons communaux qu'on sera tenu d-qpcepter sous peine de fusillade. Le citoyen Félix Pyat — Tout simplement. Le citoyen Delescluze. — Présentez-nous un projet d'arrêté dans ce sens. COMMISSION DE SÛRETÉ GÉNÉRALE. Le citoyen Raoul Rigault. — Voilà mon af¬ faire. Les deux mesures qui depuis quelques jours ont fait l'objet constant de nos préoccu¬ pations sont l'arrestation des suspects et la suppression des journaux. Le citoyen Ranc. — Je croyais que la liberté de la presse.... Le citoyen Delescluze. — Décidément, ci¬ toyen Ranc, vous dévoyez complètement. Le citoyen Raoul Rigault. — Pour les sus¬ pects, voici ma manière de procéder : je me promène duns les rues et sur les boulevards, j'entre dans les cafés. Aussitôt que je vois une figure qui me déplaît, je me dis : voilà un mou¬ chard et je le fais empoigner. Le citoyen Félix Pyat. — Bravo ! Le citoyen Raoul Rigault. — Ce systèmeM - 21 - a l'avantage de simplifier notre besogne et de ne pas m'assujettir à des délais d'instructions aussi inutiles que ridicules. Le citoyen Verdure. — Quel,est le nombre d'arrestations que vous pouvez avoir fait par jour de cette façon? Le citoyen Raoul Rigault. — Environ quinze cents ; en se pressant un peu on pourrait ar¬ river à deux mille, mais je préfère ne pas y mettre de précipitation. Le citoyen Delescluze. — Cette modération fait l'éloge de votre humanité : il faut prendre garde pourtant de ne pas s'abandonner à des •faiblesses dangereuses. Le citoyen Raoul Rigault. — Soyez tran¬ quilles. Quant aux journaux, j'agis avec la même simplicité. J'envoie vingt cinq hommes chez l'impripieur, je lui défends de continuer la publication des feuilles réactionnaires, et, pour plus de sûreté, je m'assure de la personne des rédacteurs. Au besoin, on pourrait les fusiller. Le citoyen Félix Pyat. — A propos de jour¬ nalistes, je me permets de signaler à votre sur¬ veillance le citoyen Henri Roehefort. " Le citoyen Ranc. — Pourtant Henri Roche- fort.... - 22 - Le citoyen Félix Pyat. — Depuis quelques temps, le citoyen Henri Rochefort se permet de ne pas approuver complètement tous les actes de la Commune, et il a osé publier sur mon "compte un article venimeux qui me démontre clairement ses relations avec Versailles, Le citoyen Vermorel. — J'appuie complète¬ ment la motion du citoyen Félix Pyat. Il y a longtemps que Henri Rochefort m'est suspect. Le citoyen Raoul Rigault. — Il est établi du reste qu'à l'âge de quatorze ans et demi il a reçu un porte-crayon du duc d'Orléans. Le citoyen Félix Pyat. — II me paraît abso¬ lument indispensable de s'assurer de la per¬ sonne du citoyen Henri Rochefort et de sup¬ primer son journal. Le citoyen Rctoul Rigault. — Nous y avise¬ rons. Le citoyen Lefrançais. — Un second aide de camp! L'aide de camp. — Tout va Wen. L'armée de Versailles est en pleine déroute. Le général Cluseret lui-même est aux avant-postes. Le citoyen Billoray. — Et Bergeret lui- même? - 23 - L'aide de camp. —Bergeret lui-même vient d'être destitué. Le citoyen Delesclme. — Bon, continuons. COMMISSION DES RELATIONS EXTÉRIEURES. Le citoyen Paschal Grousset. — Depuis huit jours j'ai envoyé à toutes les puissances de l'Europe la notification de la constitution de la Commune de Paris. Personne n'a répondu. Le citoyen Delescluze. — C'est une adhésion. Qui ne dit rien consent. Plusieurs voix. — Parfaitement. COMMISSION DE L'ENSEJGNEMENT. Le citoyen Jules Vallès. — Il est incontes¬ table que la façon dont l'-instruction de la jeu¬ nesse a été dirigée jusqu'à présent est la cause première de l'abrutissement et de l'avachisse¬ ment de notre génération. Si vous voulez lui infuser un sang nouveau, lui donner une virilité qui lui manque, il est indispensable d'apporter dans l'enseignement des réformes radicales et importantes. Par conséquent nous proposons : - 24 - 1° La suppression des études classiques ; 2° L'abandon complet du vieil Homère et de ses vieux casques, du tendre Yirgile et de ses Dindons chlorotiques. 3° L'auto-da-fé des œuvres de Corneille, de Racine, de Molière, etc., qui ne contituent que de plates imitations des auteurs invalides, en- kylosës et édentës dont je viens de vous parler. 4° Suppression de l'étude de l'orthographe, qui n'est après toutqu'nne aristocratie de lan¬ gue, incompatible avec les vrais principes ré¬ publicains. Le citoyen Ranc. — Et vous remplacez tout cela.... Le citoyen Jules Vallès {fièrement). — Par la lecture du Cri du Peuple, dix centimes le numéro, chez tous les libraires. Le citoyen 'Chardon. — Un troisième aide de camp. . • L'aide de camp. — Citoyens, tout va bien. L'armée de Versailles est en pleine déroute. Le général Cluseret lui-même... tiens le voilà. Le citoyen Cluseret. - Citoyens, nos opéra¬ tions militaires m rchent admirablement. Si j'ai abandonné Courbevoie et le pont de Neuilly, c'est par suite de combinaisons stra- - 25 — tégiques dont vous reconnaîtrez bientôt la pro¬ fondeur. Maintenant il est une chose que je viens de¬ mander, à votre patriotisme et a votre cou¬ rage, c'est de venir vous mettre à la tête de nos bataillons fédérés. Précédés par vous, ils ^seront invincibles et je réponds de la victoire.. Le citoyen Félix Pyat. — C'est une folie. La vie des membres de la Commune est inviolable. Du reste je demande un congé de huit-jours. Le citoyen Delescluze. — Pour aller.... Le citoyen Félix Pyat. — En Belgique ! 3 La Commune à Bruxelles!!! Non, c'est à s'en tenir les côtes de rire ! Je n'ai jamais éprouvé plus de plaisir qu'à une séance des prolétaires réunis. La salle de la Nouvelle-Cour de Bruxelles était littéralement comble, et ces visages étranges formaient un côté attrayant de la réunion. Ce qui s'est dit, ce qui s'est fait est tellement le propre des imaginations détraquées et en rupture de ban, qu'on se serait crû ou dans un quartier de Belleville ou dans un hospice d'aliénés, moins la camisole de force. Les curieux qui se trouvaient là, donnaient des signes visibles de franche gaîte et sem¬ blaient assister aux chauds débats de Vassem- - 28 - blée comme s'il se fut agi d'une pochade de Labiche, Dumanoir ou Thiboust, tant était pétillante l'action originale. Les spectateurs se tordaient de rire, et j'a¬ voue que, pour ma part, j'étais dans des con¬ vulsions... Voici, du reste, un extrait de cette séance lacrymatoire du 8 mai, le lecteur jugera sans qu'il soit besoin de recourir aux commentaires. Oyez : Le citoyen Pellering. Savez-vous pourquoi l'on n'a jamais fait le portrait du pape précé¬ dent, c'est parce qu'il avait un cancer au nez. {Hilarité). Le citoyen G-règoire. La Commune que nous voulons, c'est le droit pour tous, grands, petits, jeunes et vieux {sic). Elle doit remplacer les Chambres par ementaires où trois, quatre ou cinq bavards, Frère, Dumortier, Rogier et Bara, vieux utopistes, font courber la tête à ceux qui les écoutent. Le citoyen Président. On parle d'instruction obligatoire : c'est chose impraticable ; le père a besoin des bras de l'enfant pour vivre. - 29 - L'enseignement obligatoire ne sera réalisable que quand le pain sera assuré à tous, et il ne le sera que par la Commune. Le citoyen Verbruggen. La Commune existe depuis le commencement du monde... L'orateur s'embrouille et parle de Pierre Bonaparte et de Rochefort. {On rit.) L'orateur s'embrouille encore plus au point de n'être plus compris. Les grèves, dit-il, doivent régénérer le monde en faisant succomber les patrons. (On crie : assez ! assez! et l'orateur conclut par ces mots) : pour avoir nos droits, il faut renverser le Gou¬ vernement. Le citoyen Schoyt. Au milieu des rires, il parle de ceux qui « mangent des beefsteacks et boivent du vin, tandis que lui n'a que des pommes de terre à manger et de l'eau à boire. Il faut un changement à cela, sinon, nous crè¬ verons tous de faim dans nos mansardes. » Un autre citoyen parle de barricades, un autre crie vive la Commune ! Enfin, ^un vigoureux soufflet est appliqué sur la joue de M. le docteur Drugman qui avait 3- — 30 — lancé à un orateur du fond de la salle, le mot : LACHE. Tumulte, plaintes, excuses, etc... Finalement, la séance est levée à, 10 1/4 h., au cri unanime de vive la Commune ! Faut-il en rire ? Hier, la Belgique était menacé par les con¬ voitises de nos bons voisins d1 à-côté ; nos fron¬ tières étaient sur le point d'être dévorqes par Napoléon III et Guillaume. Aujourd'hui, ce sont les manœuvres à l'inté¬ rieur qui menacent l'équilibre du royaume. Depuis peu, il existe, vous ne l'ignorez pas, une société gigantesque, qui s'appelle l'Inter¬ nationale et dont les millions de membres sont dispersés dans presque tous les grands centres de l'Europe. Une ramification de cette société s'est installée à Bruxelles,, naturellement, et ' nous en voyons les beautés dans le genre des idées qu'elle combat au sein de l'Assemblée po¬ pulaire tenue à la Nouvelle Cour de Bruxelles. Ces bonnes gens, qui se qualifient si fièrement de prolétaires, se réunissent chaque semaine en nombre et se livrent a des discussions trans¬ cendantes qui n'ont d'autre but que de faire tomber le Gouvernement pour le remplacer par..,i. la Commune ! ! ! - 32 - Dans la séance populaire du 15 mai der¬ nier, le citoyen Pellering a eu la bonne for¬ tune de divertir l'auditoire. Au moment où une voix lui crie : Gij meet niet mat gij zegt, l'orateur, un Mirabeau de la décadence, déclare franchement que « pour faire revivre l'industrie et le commerce, nous devons être partisans de la Commune. « Au milieu d'inter¬ ruptions, il raconte que « Malthus recomman¬ dait de tuer les enfants qui, dans un ménage, dépassaient le chiffre trois. La société actuelle est bien plus cruelle encore, en faisant mourir un plus grand nombre d'enfants d'une manière indirecte. » Le citoyen Veroehen dit que « la Commune est appelée à faire des lois pour le peuple et non contre le peuple (Trépignements) ; à nom¬ mer ses administrateurs, à créer la'police, à organiser l'ordre judiciaire, à supprimer les parasites, les ministres, les représentants, les sénateurs, la royauté qui nous gruge (sic), les armées permanentes, le budget des cultes, etc. Mais voici qui est gentil : Le citoyen Prési¬ dent, voyant que plus personne ne demande la parole, lance quelques attaques saugrenues contre MM. les Journalistes. — 33 - « Yoilà tant d'années, dit-il, qu'il voudrait se trouver en face d'un journaliste qui vienne le contredire et il ne s'en présente jamais : ce sont donc des Uagueurs ? Le citoyen Coulon, dans une improvisation fort embrouillée, explique les doctrines de Maltlius et se ivre à une attaque en règle contre les journalistes qui « segorgent d'orgies et d'or. » (Applaydissements ironiques.) Le citoyen Spier arrive, dit-il, de Paris et critiquera manière dont on entend la liberté dans cette ville. Le citoyen Frappas traite d'enfantillages tout ce que vient de raconter le citoyen Spier. Il i ^le des francs-fileurs, approuve la démoli¬ tion de l'hôtel de M. Thiers et en remercie la Commune (!!!). « M. Thiers qui, après avoir été sans le sou, comme la plupart d'entrje vous, dit l'orateur, s'est trouvé être possesseur d'un hôtel qui a coûté 3 millions etc » Le citoyen Frappas continue à instruire ses frères et ai prend que M. Magne, ministre des finances, a volé douze cent mille livres de rentes à l'État français. Le citoyen Veroehen dit que « comme notre triomphe ne pourra se réaliser que par la - 34 - force, nous sommes obligés de nous y prépa¬ rer. » (sic.) M. le général Guillaume est prévenu, il n'a qu'à bien se tenir 1 C'est du reste le moment où jamais de com¬ pléter l'organisation militaire, afin d'être en mesure de faire face aux éventualités... Les prolétaires se remuent, cela pourrait bien être l'avant-garde du prochain Bruxelles sens-dessus-dessous. a. Que les bons tremblent, que les mauvais se rassurent : on travaille à la révolution sociale. Mais quand ces « bons bougres de Citoyens « auront gravi l'échelle..... gare à la chutq des nez ! Au peuple belge. Quand on a pour voisin un ogre de la Corse, Be'gique, il ne faut pas dormir; Ce que le droit défend on le prend par la force, Et ton destin me fait frémir, Le Rhin échappe aux mains de l'homme de Décembre, Car le prussien est tout puissant, 0 peuples de l'Escaut '■ o peuples de la Sambre t Veillez, le danger est pressant; Votre liberté grande exrjte la colère Du chef des Francs dégénérés ; Nos chambres de laquais voteraient pour lui plaire, Des lois appuyant ses décrèts. Nos soldats avinés, nos généraux rapaces Iront envahir votre sol; De votre liberté disparaîtront les traces, Par l'incendie et par le viol. Puis nos prêtres vendus chanteront la louange Des maîtres de l'assassinat. Et pour fêter César, on verra, chose étrange, Ramper la Chambre et le Sénat. Belgique, asile saint de nos grands patriotes, Refuge de tant d'opprimés, Redoute la fureur des serfs et des ilotes Contre toi par l'empire armés. L'empire veut te fondre à son troupeau d'esclaveS, Car il craint ton invasion. Non point par tes soldats, car ses soudards sont braves, Et poussent à profusion ; - 36 - Mais bien par le venin de tes larges idées Qui font grands les petits pays. Tes institutions dont les franches coudées Rendent les Français ébahis ; Par ta presse qui parle avec une voix pleine, Tes tribunaux indépendants ; * Tes fils s'associant sans trouver une chaîne; Pour leurs grands travaux fécondants. Rassure-toi, Belgique, il est une puissance, Plus forte que les potentats,, C'est le peuple Français, car le peuple commence A comprendre les résultats, Des combats insensés brisant un peuple libre, Pour faire un habit d'arlequin, De la Sprée à la Seine, et du Danube au Tibre, Croulent César et Charles Quint. Partout ou sont des fers les révoltes éclatent, Et la misère s'établit. En vain de dominer tous les tyrans se flattent, Le néant sort de tout cenflit. Les peuples désormais doivent être leurs maîtres, Arriére intrus et conquérants ! ' Car vos droits sont des vols commis par vos ancêtres Petits peuples, montrez-vous grands ! Peuples, la liberté fera le tour du monde, Contre tous maintenez vos droits, L'avenir est à vous et c'est en vain que gronde, Le bronze fondu par les rois. Le bronze à fait son temps et c'est à la pensée, C'est aux outils à tout fonder. Laissez rugir les rois cette horde insensée, Marchez sans jamais rien céder. Aug. Làf... 12 mars 1869. Méphlsto. Vie satyrique, anecdotîque, militaire, poli¬ tique et galante du prince-comte de Bismark. 1871, in-8°. V. «mould. De la Constitution du parti révolution¬ naire en France, d'après Gambetta, in-16. L'Aspic, par Stout. 3 brochures, in-16. Pamphlet. L'homme de Prusse ouGuillaume et Bismark dévoilés, par Timon III. Brux., 1871, in-8", br. France et Allemagne. Vengeance!!! par Timon III. Brux., in-8°, br. Paris sous le bas-Empire, ou Paris actuel, par Lam- , bert. Anecdotes scandaleuses, etc., in-8°. Les aides de camp du 2 Décembre Canrobert, Espi- nasse, de Cotte, in-8°. Discours de V. Hugo et de Bancel, sur la tombe des proscrits français, br. in-8°. Le 13 juin, par Ledru-Rollin, etc., etc.,in-S°. Ce que coûte l'empire,ses finances,ses traitements, etc., fn-8°. Les s Maréchaux i Saint-Arnaud, Magnan,Castel!anne, in-8°. L'Histrion français, ou le représentant de l'ordre et de la morale, in-18. Le procès de la Montijo •, (détruit partout en France, par ordre du Gouvernement impérial) in-18, suivi de la Généalogie épicière de l'Impératrice Eugénie, in-18. Le chassepot, in-16. Pamphlet curieux. Bachclcry. La Révolution, in-16 (avec le procès), suivi de l'Assassin impérial. Napoléon (le prince). Conduite de la guerre d'Orient, 2 vol. in-8°. Pamphlet. Klapka. La guerre d'Orient, in-8°. Pamphlet. L. Labarre. Vertus et gloires de l'Empire. Pamphlet, in-12. La ligne des neutres 5 pamphlet contre Napoléon III et la conduite de la guerre, in-18. H. (tochefort. La Lanterne. Le père Duchêne, pamphlet, p5r Gustave Maroteau. L'Homme de Sedan, par le comte Alfred de la Gué- ronnière, vo). in-8". Ch. «ran. L'Italie contemporaine. 2 forts vol. in-12. c\l\.(4.Ô¥ 395^ P amp Mets interdits en France sous le gouvernement de Badinguet QUI SE TROUVENT CHEZ LE MÊME ÉDITEUR: Victor Hnso. Les Châtiments, in-S®, iS71. Nouv. édit. augixi. du double, av. toutes les pièces interdites; fig. idem. Napoléon-le-Petit. in-8°, 1871. Nouv. édition, augm. de la Xouvelle Caprée, de VApothéose matri¬ monial et de la Vie d'un illustre sénateur ! ligure, idem. Le Christ au Vatican. — La Voix de Guer- nesey. 2 broch. in—1G. idem. L'attentat du2Décembre, avec Notesext:ilif'..m-80. Idem. L'organographie de Badinguet, d'après Gail et Spurzheim, in-8°. idem. La servilité de la magistrature impériale, iu-8® ■fi. nsnsen. Histoire Satyrique du mariage de César avec la belle Eugénie de Gusman, in-3°. idem. Prostitutions et débauches de la famille Bona¬ parte, de Létitia à Badinguet. in-8°. Idem. Les amours de l'impératrice Eugénie, etc., vol. in-8°. Scbœlelier. Les amours de Napoléon III ou le lupanar Elvséen dévoilé, in-8", figure. Ces documents secrets du cabinet de Badinguet, in-S" Frédéric il. Les matinées du roi de Prusse, in-18. Madame César, par un ex-élève de tiaint-Cyr. In-8°, br. Pamphlet satyrique. Pierre silex. La chronique bonapartiste scandaleuse. ln-18. vignettes. N. Bruneaux. Vie de M. le baron de Pmiapoil, sénateur de l'Empire, etc., etc. In-8°, br. Chronique sc«n«ialeiise de la Magistrature française contemporaine, fort. vol. in-12. I.es Mémoires de SSadingnct, par E. Ramier, in-16. P. vésinler. Le mariage de l'Espagnole, fort vol. in-12. Lemoisne. Les prouesses de Badinguet, in-16.