VUMAS'S FONTAINE BOOK CARD University Research Library r 12 192 ! JUN 8 1953 APR 13 1955 ,N 3 01959 This book is DUE on the last date stamped below JL ^ OCT 4 ].c - Vous ne sauriez, mon enfant, et pourquoi done ? Parce qu'il y a une de ces conditions que je ne sau- rais tenir. Laquelle? je croyais pourtant avoir fait accommo- dement par notre traite d'alliance. 25 - Vous me donnez les cent mille florins a titre de dot ? -Oui. Et pour epouser un homme que j'aimerai ? Sans doute. - Eh bien ! monsieur, cet argent ne peut etre a moi. 30 Je n'aimerai jamais personne et ne me marierai pas. 92 LA TULIPE NOIRE Et apres ces mots peniblement prononces, Rosa flechit sur ses genoux et faillit s'evanouir de douleur. Cornelius, effraye de la voir si pale et si mourante, 1 allait la prendre dans ses bras, lorsqu'un pas pesant, 5 suivi d'autres bruits sinistres, retentit dans les escaliers accompagne des aboiements du chien. On vient vous chercher ! s'ecria Rosa en se tordant les mains. Mon Dieu ! mon Dieu ! monsieur, n'avez-vous pas encore quelque chose a me dire ? 10 Et elle tomba a genoux, la tete enfoncee dans ses bras, 2 et toute suffoquee de sanglots et de larmes. J'ai a vous dire de cacher precieusement vos trois cai'eux et de les soigner selon les prescriptions que je vous ai dites, 3 et pour I'amour de moi. Adieu, Rosa. 15 Oh ! oui, dit-elle, sans lever la tete, oh ! oui, tout ce que vous avez dit, je le ferai. Excepte de me marier, ajouta-t-elle tout bas, car cela, oh ! cela, je le jure, c'est pour moi chose impossible. Et elle enfonca dans son sein palpitant le cher tresor 20 de Cornelius. Ce bruit qu'avaient entendu 4 Cornelius et Rosa, c'etait celui que faisait le greffier qui revenait chercher le con- damne, suivi de 1'executeur, des soldats destines a fournir la garde de 1'echafaud, et des curieux familiers de la 25 prison. Cornelius, sans faiblesse comme sans fanfaronnade, les recut en amis plutot qu'en persecuteurs, 5 et se laissa imposer telles conditions qu'il plut a ces hommes pour 1'execution de leur office. 30 Puis, d'un coup d'ceil jete sur la place par sa petite fenetre grillee, il apercut 1'echafaud, et a vingt pas de 1'echafaud, le gibet, du bas duquel avaient etc detachees, L'EXECUTION 93 par ordre du stathouder, les reliques outragees des deux freres de Witt. Quand il lui fallut descendre pour suivre les gardes, Cornelius chercha des yeux le regard angelique de Rosa, mais il ne vit derriere les epees et les hallebardes qu'un 5 corps etendu pres d'un bane de bois et un visage livide a demi voile par de longs cheveux. Mais, en tombant inanimee, Rosa, pour obeir encore a son ami, avait appuye sa main sur son corset de velours, et meme dans 1'oubli de toute vie, continuait instinctive- 10 ment a recueillir le depot precieux que lui avait confie . Cornelius. Et en quittant le cachot, le jeune homme put entrevoir dans les doigts crispes de Rosa la feuille jaunatre de cette Bible sur laquelle Cornelius de Witt avait si peni- 15 blement et si douloureusement ecrit les quelques lignes qui eussent infailliblement, si Cornelius les avait lues, sauve un homme et une tulipe. XII L'EXECUTION Cornelius n'avait pas trois cents pas a faire hors de la prison pour arriver au pied de son echafaud. 20 On comprend que plus le trajet etait court de la porte de la prison au pied de 1'echafaud, plus il etait encombre de curieux. Aussi, a peine Cornelius apparut-il qu'un hurlement immense se prolongea dans la rue, s'etendit sur toute la 25 surface de la place. Au milieu de ces menaces, de ces hurlements et de ces 94 LA TULIPE NOIRE vociferations, pour ne pas les entendre sans doute, Corne- lius s'etait absorbe en lui-meme. A quoi pensait ce juste qui allait mourir ? Ce n'etait ni a ses ennemis, ni a ses juges, ni a ses bour- 5 reaux. C'etait aux belles tulipes qu'il verrait du haut du ciel. L'affaire d'un coup d'epee, disait le philosophic, et mon beau reve commencera. Van Baerle monta resolument les degres de son echafaucl. 10 II y monta orgueilleux, quoi qu'il en cut, 1 d'etre I'ami de cet illustre Jean et le filleul de ce noble Corneille que les marauds amasses pour le voir avaient dechiquetes et brules trois jours auparavant. II s'agenouilla, fit sa priere, et remarqua non sans 15 eprouver une vive joie qu'en posant sa tete sur le billot et en gardant ses yeux ouverts, il verrait jusqu'au dernier moment la fenetre grillee du Buytenhoff. Enfin 1'heure de faire ce terrible mouvement arriva: Cornelius posa son menton sur le bloc humide et froid. 2:. Mais a ce moment malgre lui ses yeux 2 se fermerent pour soutenir plus resolument 1'horrible avalanche qui allait tomber sur sa tete et engloutir sa vie. Un eclair vint luire sur le plancher de 1'echafaud: le bourreau levait son epee. 25 Van Baerle dit adieu a la grande tulipe noire, certain de se reveiller en disant bonjour a Dieu dans un monde fait d'une autre lumiere et d'une autre couleur. Trois fois il sentit le vent froid de 1'epee 3 passer sur son col frissonnant. 30 Mais, 6 surprise ! v II ne sentit ni douleur ni secousse. II ne vit aucun changement de nuances. L'EXECUTION 95 Puis tout a coup, sans qu'il sut par qui, van Baerle se sentit relever par des mains assez douces l et se retrouva bientot sur ses pieds quelque peu chancelant. II rouvrit les yeux. Quelqu'un lisait quelque chose pres de lui, sur un grand 5 parchemin scelle d'un grand sceau de cire rouge. Et le meme soleil, jaune et pale comme il convient a un soleil hollandais, luisait au ciel, et la meme fenetre grillee le regardait du haut du Buytenhoff, et les memes marauds, non plus hurlants mais ebahis, le regardaient 10 du has de la place. A force d'ouvrir les yeux, de regarder, d'ecouter, van Baerle commenca de 2 comprertdre ceci. C'est que monseigneur Guillaume prince d'Orange, craignant sans doute la justice celeste, 3 avait pris en 15 pitie son caractere et les semblants de son innocence. En consequence, Son Altesse lui avait fait grace de la vie. Voila pourquoi 1'epee, qui s'etait levee avec ce reflet sinistre, avait voltige trois fois, mais ne s'etait point abattue sur sa tete et avait laisse intactes les vertebres. 20 Voila pourquoi il n'y avait eu ni douleur ni secousse. Cornelius espera bien que la grace etait complete et qu'on allait le rendre a la liberte et a ses plates-bandes de Dordrecht. Mais Cornelius se trompait, il y avait un post-scriptum a la lettre, et le plus important de cette 25 lettre etait renferme dans le post-scriptum. Par ce post-scriptum, Guillaume, stathouder de Hol- lande, condamnait 4 Cornelius van Baerle a une prison perpetuelle. II etait trop peu coupable 5 pour la mort, mais il etait 30 trop coupable pour la liberte. Cornelius 6 ecouta done le post-scriptum, puis, apres la 96 LA TULIPE NOIRE premiere contrariete soulevee par la deception que le post-scriptum apportait, Bah ! pensa-t-il, tout n'est pas perdu. La reclusion perpetuelle a du bon. II y a Rosa dans la reclusion perpe- 5 tuelle. II y a encore aussi mes trois caieux de la tulipe noire. Mais Cornelius oubliait que les Sept Provinces peuvent avoir sept prisons, une par province, et que le pain du prisonnier est moins cher ailleurs qu'a la Haye, qui est une capitale. 10 Son Altesse Guillaume, qui n'avait point, a ce qu'il parait, les moyens de nourrir van Baerle a la Haye, 1'en- voyait faire sa prison perpetuelle l dans la forteresse de Loewestein, bien pres de Dordrecht, helas ! mais pourtant bien loin. 15 Ah ! s'ecria Cornelius, que ce pays est humide et nuageux ! et que le terrain est mauvais pour les tulipes ! Et puis Rosa, Rosa qui ne sera pas a Loewestein, mur- mura-t-il en laissant tomber sur la poitrine sa tete 2 qu'il avait bien manque de laisser tomber plus bas. XIII CE QUI SE PASSAIT PENDANT CE TEMPS-LA DANS L'AME D'UN SPECTATEUR 20 Tandis que Cornelius reflechissait de la sorte, un car- rosse s'etait approche de 1'echafaud. Ce carrosse etait pour le prisonnier. On Tinvita a y monter; il obeit. Parmi tous ces spectateurs que 1'execution de van 25 Baerle avait attires sur le Buytenhoff, et que la facon dont la chose avait tourne desappointait quelque peu, le plus CE QUI SE PASSAIT DANS I/AME D'UN SPECTATEUR 97 desappointe certainement etait certain bourgeois vetu proprement et qui depuis le matin avait si bien joue des pieds et des mains qu'il en etait arrive a n'etre separe de 1'echafaud que par la rangee de soldats qui entouraient I'instrument du supplice. 5 [Personne n'avait ete plus avide de voir couler le sang perfide du coupable Cornelius que le bourgeois en ques- tion. ~\ Et quand le bourreau avait amene l son condamne sur 1'echafaud, le bourgeois, monte sur une borne de la 10 fontaine pour mieux voir et etre mieux vu, avait fait au bourreau un geste qui signifiait: C'est convenu, n'est-ce pas ? Geste auquel le bourreau avait repondu par un autre geste qui voulait dire: 15 Soyez done tranquille. Ce bourgeois etait mynheer Isaac Boxtel, qui depuis 1'arrestation de Cornelius etait, comme nous 1'avons vu, venu a la Haye pour essay er de s'approprier les trois ca'ieux de la tulipe noire. 20 Boxtel avait d'abord essaye de mettre Gryphus dans ses interets, mais celui-ci tenait du bouledogue pour la fidelite, la defiance et les coups de crocs. Aussi, aux premieres propositions que Boxtel avait faites a Gryphus, de soustraire ies ca'ieux que 2 devait cacher, 25 sinon dans sa poitrine, du moins dans quelque coin de son cachot, Cornelius van Baerle, Gryphus n'ayait repondu que par une expulsion accompagnee des caresses du chien de 1'escalier. Boxtel ne s'etait pas decourage pour un fond de culotte 30 reste aux dents du molosse. 3 II etait revenu a la charge; mais cette fois, Gryphus etait dans son lit, fievreux et le 98 LA TULEPE NOIRE bras casse. II n'avait done pas meme admis le petition- naire, qui s'etait retourne vers Rosa, offrant a la jeune fille, en echange des trois cai'eux, une coiffure d'or pur. Ce a quoi la noble jeune fille, quoique ignorant encore la 5 valeur du vol qu'on lui proposait de faire, et qli'on lui offrait de si bien payer, avait renvoye le tentateur au bourreau, non seulement le dernier juge, mais encore le dernier heritier du condamne. Ce renvoi fit naitre une idee dans 1'esprit de Boxtel. 10 Sur ces entrefaites, le jugement avait ete prononce; jugement expeditif, comme on voit. Isaac n'avait done le temps de corrompre personne. II s'arreta en conse- quence a 1'idee que lui avait suggeree Rosa; il alia trouver l le bourreau. 15 Isaac ne doutait pas que Cornelius ne mourut avec ses tulipes sur le coeur. 2 En effet, Boxtel ne pouvait deviner deux choses: Rosa, c'est-a-dire 1'amour; Guillaume, c'est-a-dire la clemence. 20 Moins Rosa et moins Guillaume, les calculs de 1'en- vieux etaient exacts. Moins Guillaume, Cornelius mourait. 3 Moins Rosa, Cornelius mourait, ses caieux sur son coeur. 4 25 Mynher Boxtel alia done trouver le bourreau, se donna a cet homme comme un grand ami du condamne, et moins les bijoux d'or et d'argent qu'il laissait a 1'execu- teur, il acheta toute la defroque du futur mort pour la somme un peu exorbitante de cent florins. 30 Mais qu'etait-ce qu'une somme 5 de cent florins pour un homme a peu pres sur d'acheter pour cette somme le prix de la societe de Harlem ? CE QUI SE PASSAIT DANS I/AME D'UN SPECTATEUR 99 Le bourreau, de son cote, n'avait rien ou presque rien a faire pour gagner ses cent florins. II devait seulement, 1'execution finie, laisser mynher Boxtel monter sur 1'echa- faud avec ses valets pour recueillir les restes inanimes de son ami. 5 Aussi le bourreau acquiesca-t-il a la proposition. II n'y avait mis qu'une seule condition, c'est l qu'il serait paye d'avance. Boxtel paya d'avance et attendit. Qu'on juge apres cela si Boxtel etait emu, s'il surveil- ic lait gardes, greffier, executeur, si les mouvements de van Baerle Pinquietaient. Nous n'entreprendrons pas de decrire 1'effet produit sur ce digne mortel par I'empechement apporte a 1'execution de la sentence. La rage du tigre, de la hyene et du 15 serpent eclata dans ses yeux, dans son cri, dans son geste. Ainsi done, Cornelius vivrait, Cornelius irait a Loe- westein; la, dans sa prison, il emporterait les ca'ieux, et . peut-etre se trouverait-il un jardin ou il arriverait a faire 20 fleurir la tulipe noire. Boxtel, panic, tomba de sa borne sur quelques oran- gistes mecontents comme lui de la tournure que venait de prendre 1'affaire. Lesquels, 2 pensant que les cris pousses par mynher Isaac etaient des cris de joie, le bourrerent 25 de coups de poing. Mais que pouvaient ajouter quelques coups de poing a la douleur que ressentait Boxtel ! II voulut 3 alors courir apres le carrosse qui emportait Cornelius avec ses caieux. Mais dans son empressement, 30 il ne vit pas un pave, trebucha, perdit son centre de gra- vite, roula a dix pas et ne se releva que foule, meurtri, et 100 LA TULIPE NOIRE lorsque toute la fangeuse populace de la Haye lui cut passe sur le dos. On aurait pu croire que c'etait assez comme cela pour Boxtel. On se serait trompe. XIV LES PIGEONS *DE DORDRECHT 5 C'etait deja certes un grand honneur pour Cornelius van Baerle que 1 d'etre enferme justement dans cette meme prison qui avait recu le savant M. Grotius. 2 La chambre est historique. Nous ne peTdrons done pas notre temps a en consigner ici les details, sauf une 10 alcove qui avait ete pratiquee pour madame Grotius. C'etait une chambre de prison comme les autres, plus elevee peut-etre; aussi, par la fenetre grillee, avait-on une charmante vue. Le pauvre prisonnier aimait deux choses dont la pensee 15 seulement, cette libre voyageuse, pouvait desormais lui fournir la possession factice. Une fleur et une femme, 1'une et 1'autre a jamais per- dues pour lui. II se trompait par bonheur, le bon van Baerle ! 20 Un matin, a sa fenetre, tandis qu'il humait 1'air frais qui montait du Wahal et qu'il admirait dans le lointain, derriere une foret de cheminees, les moulins de Dordrecht sa patrie, il vit des pigeons accourir en foule de ce point de Phorizon et se percher tout frissonnant 3 au soleil sur 25 les pignons aigus de Loewestein. Ces pigeons, se dit van Baerle, viennent de Dordrecht et par consequent ils y peuvent 4 retourner. Quelqu'un qui attacherait un mot a 1'aile de ces pigeons courrait 5 LES PIGEONS DE DORDRECHT IOI la chance de faire passer de ses l nouvelles a Dordrecht, ou on le pleure. Puis, apres un moment de reverie, Ce quelqu'un-la, ajouta van Baerle, ce sera moi. On est patient quand on a vingt-huit ans 2 et qu'on 3 est 5 condamne a une prison perpetuelle, c'est-a-dire a quelque chose comme vingt-deux ou vingt-trois mille jours de prison. Van Baerle se fit un piege a pigeons. II tenta ces volatiles par toutes les ressources de sa cuisine et au bout d'un mois de tentations infructueuses, il prit une femelle. 10 II mit deux autres mois a prendre un male; puis il les enferma ensemble, et vers le commencement de 1'annee 1673, ayant obtenu des ceufs, il lacha la femelle, qui, con- fiante dans le male qui les couvait a sa place, s'en alia toute joyeuse a Dordrecht avec son billet sous son aile. 15 Elle revint le soir. Elle avait conserve le billet. Elle le garda ainsi quinze jours, au grand desappointement d'abord, puis ensuite au grand desespoir de van Baerle. Le seizieme jour enfin elle revint a vide. Or,' van Baerle adressait ce billet a sa nourrice, la vieille 20 Frisonne, et suppliait les ames charitables qui le trou- veraient de le lui faire remettre le plus surement et le plus promptement possible. Dans cette lettre, adressee a sa nourrice, il y avait un petit billet adresse a Rosa. Dieu permit que la nourrice 25 de van Baerle recut cette lettre. Et voici comment: En quittant Dordrecht pour la Haye et la Haye pour Gorcum, mynher Isaac Boxtel avait abandonne non seule- ment sa maison, non seulement son domestique, non seule- ment son observatoire, non seulement ses telescopes, mais 30 encore ses pigeons. Le domestique, qu'on avait laisse sans gages, commenca 102 LA TULIPE NOIRE par manger 1 le peu d'economies qu'il avait, puis ensuite il se mit a manger les pigeons. Ce que voyant les pigeons, 2 ils emigrerent du toit d'Isaac Boxtel sur le toit de Cornelius van Baerle. 5 La nourrice etait un bon cceur qui avait besoin d'aimer quelque chose. Elle se prit de bonne amide pour les pigeons qui etaient venus lui demander 1'hospitalite, et quand le domestique d'Isaac reclama pour les manger les douze ou quinze derniers comme il avait mange les douze 10 ou quinze premiers, elle offrit de les lui racheter, moyen- nant six sous de Hollande la piece. C 'etait le double de ce que valaient les pigeons; aussi le domestique accepta-t-il avec une grande joie. La nourrice se trouva done legitime proprietaire des 15 pigeons de Penvieux. C'etaient ces pigeons meles a d'autres qui, dans leur peregrination, visitaient la Haye, Loewenstein, 3 Rotter- dam, allant chercher sans doute du ble d'une autre nature, du chenevis d'un autre gout. 20 Le hasard, ou plutot Dieu, avait fait que Cornelius van Baerle avait pris justement un de ces pigeons-la. II en resulte que si 1'envieux n'eut pas quitte Dordrecht pour suivre son rival a la Haye d'abord, puis ensuite a Gorcum ou a Loewestein, c'eut ete entre 4 ses mains et 25 non entre celles de la nourrice que fut tombe le billet ecrit par van Baerle. Le billet tomba done dans les mains de la nourrice de van Baerle. Aussi vers les premiers jours de fevrier, comme les 30 premieres heures du soir descendaient du del laissant derriere elles les etoiles naissantes, Cornelius entendit dans l'escalier de la tourelle une voix qui le fit tressaillir. CORNELIUS LACHE LA FEMEIXE LES PIGEONS DE DORDRECHT 103 II porta la main a son coeur et ecouta. C'etait la voix douce et harmonieuse de Rosa. Avouons-le, Cornelius ne fut pas si etourdi de surprise, si extravagant de joie qu'il 1'eut etc sans 1'histoire l du pigeon. Le pigeon lui avait en echange de sa lettre rap- 5 porte 1'espoir sous son aile vide, et il s'attendait chaque jour, car il connaissait Rosa, a avoir, si le billet lui avait etc remis, des nouvelles de son amour et de ses cai'eux. H se leva, pretant 1'oreille, inclinant le corps du cote de la porte. 10 Oui, c'etaient bien les accents qui 1'avaient emu si doucement a la Haye. Mais maintenant Rosa, qui avait fait le voyage de la Haye a Loewestein; Rosa qui avait reussi, Cornelius ne savait comment, a penetrer dans la prison; Rosa 15 parviendrait-elle aussi heureusement a penetrer jusqu'au prisonnier. Tandis que Cornelius, a ce propos, echafaudait pensee sur pensee, desirs sur inquietudes, le guichet place a la porte de sa cellule s'ouvrit, et Rosa brillante de joie, de 20 parure, belle surtout du chagrin qui avait pali ses joues depuis cinq mois, Rosa colla sa figure au grillage de Cor- nelius en lui disant: Oh monsieur ! monsieur, me voici. Cornelius etendit les bras, regarda le ciel et poussa un 25 cri de joie. Oh ! Rosa, Rosa ! cria-t-il. Silence ! parlons bas, mon pere me suit, dit la jeune fille. -Votre pere? 30 Oui, il est la dans la cour au bas de Pescalier, il recoit les instructions du gouverneur, il va monter. IO4 LA TULIPE NOIRE Les instructions du gouverneur ? . . . Ecoutez, je vais tacher de tout vous dire en deux mots: Le stathouder a une maison de campagne a une lieue de Leyde, une grande laiterie, pas autre chose: c'est 5 ma tante, sa nourrice, qui a la direction de tous les ani- maux qui sont renfermes dans cette metairie. Des que j'ai recu x votre lettre, votre lettre que je n'ai pas pu lire, helas ! mais que votre nourrice m'a lue, j'ai couru chez ma tante, la je suis restee jusqu'a ce que le prince vint a la 10 laiterie, et quand il y vint, 2 je lui demandai 3 que mon pere troquat ses fonctions de premier porte-clefs de la prison de la Haye contre les fonctions de geolier a la for- teresse de Loewestein. II ne se doutait pas de mon but; s'il 1'eut connu, peut-etre eut-il refuse; au contraire, il 15 accorda. De sorte que vous voila. Comme vous voyez. De sorte que je vous verrai tous les jours ? Le plus souvent que je pourrai. 20 O Rosa ! ma belle madone Rosa ! dit Cornelius, vous m'aimez done un peu? - Un peu . . . dit-elle, oh ! vous n'etes pas assez exi- geant, monsieur Cornelius. Cornelius lui tendit passionnement les mains, mais leurs 25 doigts seuls purent se toucher a travers le grillage. - Voici mon pere ! dit la jeune fille. Et Rosa quitta vivement la porte et s'elanca vers le vieux Gryphus qui apparaissait au haut de Pescalier. LE GUICHET 105 XV LE GUICHET Gryphus etait suivi du molosse. II lui faisait faire sa ronde pour qu'a 1'occasion il recon- nut les prisonniers. Monsieur, dit Gryphus en levant sa lanterne pour tacher de projeter un peu de lumiere autour de lui, vous 5 voyez en moi votre nouveau geolier. Je suis chef des porte-clefs et j'ai les chambres sous ma surveillance. Je ne suis pas mediant, mais je suis inflexible pour tout ce qui concerne la discipline. Mais je vous connais parfaitement, mon cher mon- 10 sieur Gryphus, dit le prisonnier en entrant dans le cercle de lumiere que projetait la lanterne. -Tiens, tiens, c'est vous, monsieur van Baerle, dit Gryphus; ah ! c'est vous; tiens, tiens, tiens, comme on se rencontre ! 15 Oui, et c'est avec un grand plaisir, mon cher mon- sieur Gryphus, que je vois que votre bras va a merveille, puisque c'est de' ce bras que vous tenez une lanterne. Gryphus fronca le sourcil. -Voyez ce que c'est, dit-il, en politique on fait tou- 20 jours des fautes. Son Altesse vous a laisse la vie, je ne 1'aurais pas fait, moi. Bah ! demanda Cornelius, et pourquoi cela ? - Parce que vous etes homme a conspirer de nouveau; vous autres savants, vous avez commerce avec le diable. 25 Oh ! les savants, les savants ! s'ecria Gryphus; les savants ! j'aimerais mieux avoir dix militaires a garder qu'un seul savant. Mais je commence par vous dire que 106 LA TULIPE NOIRE ca ne vous sera pas facile, a vous, de conspirer. D'abord pas de livres, pas de papier, pas de grimoire. 1 C'est avec des livres que M. Grotius s'est sauve. -Je vous assure, maitre Gryphus, reprit van Baerle, 5 que peut-etre j'ai eu un instant 1'idee de me sauver, mais que bien certainement je ne 1'ai plus. C'est bien ! c'est bien ! dit Gryphus, veillez sur vous, j'en ferai autant. Q'est egal, c'est egal, Son Altesse a fait une lourde faute. 10 En ne me faisant pas couper la tete ? . . . Merci, merci, maitre Gryphus. Sans doute. Voyez si MM. de Witt ne se tiennent pas bien tranquilles maintenant. C'est affreux ce que vous dites la, 2 monsieur Gry- 15 phus, dit van Baerle en se detournant pour cacher son degout. Vous oubliez que 1'un 3 de ces malheureux est mon ami, et 1'autre . . . 1'autre mon second 4 pere. Oui, mais je me souviens que 1'un et 1'autre sont des conspirateurs. Et puis c'est par philanthropic que je 20 parle. Ah ! vraiment ! Expliquez done un peu 5 cela, cher monsieur Gryphus, je ne comprends pas bien. Oui. Si vous etiez reste sur le billot de maitre Har- bruck . . . 25 - Eh bien ? Eh bien, vous ne souffririez plus. Tandis qu'ici je ne vous cache pas que je vais vous rendre la vie tres dure. - Merci de la promesse, maitre Gryphus. Et tandis que le prisonnier souriait ironiquement au 30 vieux geolier, Rosa, derriere la porte, lui repondait par un sourire plein d'angelique consolation. Gryphus alia vers la fenetre. LE GUICHET 107 II faisait encore- assez jour pour qu'on vit sans le distin- guer un horizon immense qui se perdait dans une brume grisatre. Quelle vue a-t-on d'ici ? demanda le geolier. Mais fort belle, dit Cornelius en regardant Rosa. 5 Oui, oui, trop de vue, trop de vue. En ce moment les deux pigeons, effarouches par la vue et surtout par la voix de cet inconnu, sortirent de leur nid, et disparurent tout effares dans le brouillard. Oh ! oh ! qu'est-ce que cela ? demanda le geolier. 10 Mes pigeons, repondit Cornelius. Mes pigeons ! s'ecria le geolier, mes pigeons ! Est-ce qu'un prispnnier a quelque chose a lui ? * Alors, dit Cornelius, les pigeons que le bon Dieu m'a pretes? 15 -Voila deja une contravention, repliqua Gryphus, 2 des pigeons ! Ah ! jeune homme, jeune homme, je vous previens d'une chose, c'est que, pas plus tard que demain, ces oiseaux bouilliront 3 dans ma marmite. II faudrait d'abord que vous les tinssiez, 4 maitre 20 Gryphus, dit van Baerle. Vous ne voulez pas que ce soit mes pigeons: il sont encore bien moins les votres, je vous jure, qu'ils ne sont les miens. Ce qui est differe n'est pas perdu, 5 maugrea le geo- lier, et pas plus tard que demain, je leur tordrai le cou. 6 25 Et, tout en faisant cette mechante 7 promesse a Corne- lius, Gryphus se pencha en dehors pour examiner la struc- ture du nid. Ce qui donna le temps a van Baerle de courir a la porte et de serrer la main de Rosa, qui lui dit: A neuf heures ce soir. 30 Gryphus, tout occupe du desir de prendre des le len- demain les pigeons, comme il avait promis de le 8 faire, 108 LA TULIPE NOIRE ne vit rien, n'entendit rien, et comme il avait l ferme la fenetre, il prit sa fille par le bras, sortit, donna un double tour a la serrure, poussa les verrous, et alia faire les memes promesses a un autre prisonnier. 5 A peine eut-il disparu, que Cornelius s'approcha de la porte pour ecouter le bruit decroissant des pas, puis, lorsqu'il se fut eteint, il courut a la fenetre et demolit de fond en comble le nid des pigeons. II aimait mieux les chasser a tout jamais de sa presence 10 que d'exposer a la mort les gentils messagers auxquels il devait le bonheur d'avoir revu Rosa. Rosa avait dit: A neuf heures, attendez-moi. La derniere note de bronze vibrait encore dans Pair lorsque Cornelius entendit dans 1'escalier le pas leger et 15 la robe onduleuse de la belle Frisonne, et bientot le gril- lage de la porte sur laquelle fixait ardemment les yeux Cornelius 2 s'eclaira. Le guichet venait de s'ouvrir en dehors. Me voici, dit Rosa encore tout essoufflee d'avoir 20 gravi 1'escalier, me voici ! Oh ! bonne Rosa ! Vous etes done content de me voir ? Vous le demandez ! Mais comment avez-vous fait pour 3 venir? dites. 25 Ecoutez, mon pere s'endort chaque soir presque aussitot qu'il a soupe; alors, je le couche un peu etourdi par le genievre; n'en dites rien a personne, car, grace a ce sommeil, je pourrai chaque soir venir causer une heure avec vous. 30 Oh ! je vous remercie, Rosa, chere Rosa. Et Cornelius avanca, en-disant ces mots, son visage si pres du guichet que Rosa retira le sien. LE GUICHET IOO, Je vous ai rapporte vos cai'eux de tulipe, dit-elle. Le coeur de Cornelius bondit. II n'avait point ose de- mander encore a Rosa ce qu'elle avait fait du precieux , tresor * qu'il lui avait confie. Ah ! vous les avez done conserves ! 5 Ne me les avie^-vous done pas donnes comme une chose qui vous etait chere ! Oui, mais seulement parce que je vous les avais donnes, il me semble qu'ils etaient a vous. Us etaient a moi apres votre mort et 2 vous etes 10 vivant, par bonheur. Ah ! comme j'ai beni 3 Son Altesse. Si Dieu accorde au prince Guillaume toutes les felicites que je lui ai souhaitees, certes le roi Guillaume sera non seulement rhomme le plus heureux de son royaume, mais de toute la terre. Vous etiez vivant, dis-je, et tout en 15 gardant la Bible de votre parrain Corneille, j'etais re- solue de vous rapporter vos caieux; seulement je ne savais comment faire. 0r je venais de prendre la resolu- tion d'aller demander au stathouder la plape de geolier de Gorcum pour mon pere, lorsque la nourrice m'apporta 20 votre lettre. Ah ! nous pleurames 4 bien ensemble, je vous en reponds. Mais votre lettre ne fit que m'affermir dans ma resolution. C'est alors que je partis pour Leyde; vous savez le reste. Comment, chere Rosa, reprit Cornelius, vous pen- 25 siez, avant ma lettre recue, a venir me rejoindre? Si j'y pensais ! repondit Rosa, mais je ne pensai qu'a cela ! En verite, dit-elle avec cette coquetterie qui bat dans le cceur de toute jeune fille, en verite, j'ai bien souvent regrette de ne pas savoir lire; mais jamais autant 30 et de la meme facon que lorsque votre nourrice m'apporta votre lettre; j'ai tenu dans ma 8 main cette lettre qui 110 LA TULIPE NOIRE parlait pour les autres et qui, pauvre sotte que j'etais, etait muette pour moi. - Vous avez souvent regrette de ne pas savoir lire ? dit Cornelius, et a quelle occasion? 5 Dame ! fit la jeune fille en riant, pour lire toutes les lettres que Ton m'ecrivait. -Vous receviez des lettres, Rosa? Par centaines. Mais qui vous ecrivait done ? . . . 10 Qui m'ecrivait? Mais d'abord tous les etudiants qui passaient sur le Buytenhoff, tous les omciers qui allaient a la place d'armes, tous les confirms et meme les marchands qui me voyaient a ma petite fenetre. Et tous ces billets, chere Rosa, qu'en faisiez-vous ? 15 Autrefois, repondit Rosa, je me les faisais lire l par quelque amie, *et cela m'amusait beaucoup; mais depuis un certain temps, a quoi bon perdre son temps a ecouter toutes ces sottises, depuis. un certain temps je les brule. 2 20 Depuis un certain temps! s'ecria Cornelius avec un regard trouble tout a la fois par 1'amour et la jbie. Rosa baissa les yeux toute rougissante 3 et s'enfuit. Cornelius, demeure seul, en fut reduit a aspirer le doux parfum des cheveux de Rosa, reste comme un captif 25 entre le treillage. Rosa s'etait enfuie si precipitamment qu'elle avait oublie de rendre a Cornelius les trois caieux de la tulipe noire. MAllRE ET ECOLIERE III XVI MAITRE ET ECOLIERE Le bonhomme Gryphus, on a pu le 1 voir, etait loin de partager la bonne volonte de sa fille pour le filleul de Corneille de Witt. II n'avait que cinq prisonniers a Loewestein; la tache de gardien n'etait done pas difficile a remplir, et la gedle 5 etait une sorte de sinecure donnee a son age. Mais dans son zele, le digne geolier avait grandi de toute la puissance de son imagination la tache qui lui etait imposee. Pour lui Cornelius avait pris la propor- tion gigantesque d'un criminel de premier ordre. 10 II entrait trois fois par jour dans la chambre de van Baerle, croyant le surprendre en faute, mais Cornelius avait renonce aux correspondances depuis qu'il avait 2 sa correspondante sous la main. II etait meme probable que Cornelius, eut-il 3 obtenu sa liberte entiere et permission 15 complete de se retirer partout ou il eut 4 voulu, le domicile de la prison avec Rosa et ses cai'eux lui eut 5 paru prefera- ble a tout autre domicile sans ses cai'eux et sans Rosa. C'est qu'en effet chaque soir a neuf heures Rosa avait promis de venir causer avec le cher prisonnier, et des 20 le premier soir, Rosa, nous 1'avons vu, avait tenu parole. Le lendemain, elle monta comme la veille, avec le meme mystere et les memes precautions. Pour entrer du premier coup dans une conversation qui put 6 occuper serieusement van Baerle, elle commenca par lui tendre 25 a travers le grillage ses trois ca'ieux toujours enveloppes dans le meme papier. Mais, au grand etonnement de Rosa, van Baerle re- poussa sa 7 blanche main 8 du bout de ses 9 doigts. 112 LA TULIPE NOIRE Le jeune homme avait reflechi. Ecoutez-moi, dit-il, nous risquerions trop, je crois, de mettre toute notre fortune dans le meme sac. 1 Songez qu'il s'agit, ma chere Rosa, d'accomplir une entreprise 5 que 1'on regarde 2 jusqu'aujourd'hui comme impossible. II s'agit de faire fleurir la grande tulipe noire. Prenons done toutes nos precautions, afin, si nous echouons, de n'avoir rien a nous reprocher. Voici comment j'ai cal- cule que nous parviendrions a notre but. 10 Rosa preta toute son attention a ce qu'allait lui dire le prisonnier. Voici, continua Cornelius, comment j'ai calcule no- tre commune cooperation a cette grande affaire. J'ecoute, dit Rosa. 15 Vous avez bien dans cette forteresse un petit jar- din, a defaut de jardin une cour quelconque, a defaut de cour une terrasse. Nous avons un tres beau jardin, dit Rosa, il s'etend le long du Wahal et est plein de beaux vieux arbres. 20 Pouvez-vous, chere Rosa, m'apporter un peu de la terre de ce jardin afin que j'en juge. Des demain. Vous en prendrez a 1 'ombre et au soleil afin que je juge de ses deux qualites sous les deux conditions de 25 secheresse et d'humidite. Soyez tranquille. La terre choisie par moi et modifiee s'il est besoin, nous ferons trois parts de nos trois cai'eux, vous en pren- drez un que vous planterez le jour que 3 je vous dirai 30 dans la terre choisie par moi; il fleurira certainement si vous le soignez selon mes indications. Je ne m'en eloignerai pas une seconde. MAlTRE ET ECOLIERE 113 Vous m'en donnerez un autre que j'essaierai d'elever ici dans ma chambre, ce qui m'aidera a passer ces longues journees pendant lesquelles je n vous vois pas. J'ai peu d'espoir, je vous 1'avoue, pour celui-la, et, d'avance, je regarde ce malheureux comme sacrifie a mon egoi'sme. 5 Cependant le soleil me visite quelquefois. Je tirerai artificieusement parti de tout, meme de la chaleur et de la cendre de ma pipe. Enfin nous tiendrons, ou plutot vous tiendrez en reserve le troisieme ca'ieu, notre derniere ressource pour le cas ou nos deux premieres experiences 10 auraient manque. 1 De cette maniere, ma chere Rosa, il est impossible que nous n'arrivions pas a gagner les cent mille florins de notre dot et a nous procurer le supreme bonheur de voir reussir notre reuvre. J'ai compris, 2 dit Rosa. Je vous apporterai demain 15 de la terre, vous choisirez la mienne et la votre. Quant a la votre, il me faudra plusieurs voyages, car je ne pour- rai vous en apporter que peu a la fois. Oh ! nous ne sommes pas presses, chere Rosa; nos tulipes ne doivent pas etre enterrees avant un grand mois. 20 Ainsi vous voyez que nous avons tout le temps; seule- ment, pour planter votre ca'ieu, vous suivrez toutes mes instructions, n'est-ce pas? Je vous le promets. Et une fois plante, vous me ferez part de toutes les 25 circonstances qui pourront interesser notre eleve, tels 3 que changements atmospheriques, traces dans les allees, traces sur les plates-bandes. Vous ecouterez la nuit si 4 notre jardin n'est pas frequente par des chats. Deux de ces malheureux animaux m'ont, a Dordrecht, ravage 30 deux plates-bandes. J'ecouterai. 114 L A TULIPE NOIRE Les jours de lune, vous regarderez si des trous du mur ne sortent point des rats. 1 Les rats sont des ron- geurs fort a craindre. Je regarderai, et s'il y a des chats ou des rats . . . 5 Eh bien ! il faudra aviser. Ensuite, continua van Baerle, devenu soupconneux depuis qu'il etait en prison; ensuite, il y a un animal bien plus a. craindre encore que le chat et le rat ! Et quel est cet animal ? 10 C'est 1'homme ! Vous comprenez, chere Rosa, on vole un florin, et Ton 2 risque le bagne pour une pareille misere; a plus forte raison peut-on voler un caieu de tulipe qui vaut cent mille florins. Personne que moi n'entrera 3 dans le jardin. 15 -Vous me le promettez? - Je vous le jure ! Bien, Rosa ! merci, chere Rosa ! oh ! toute joie va done me venir 4 de vous ! Et, comme 1'heure de la retraite etait arrivee, Rosa 20 eloigna la tete et allongea la main. Dans cette jolie main, dont la coquette jeune fille avait un soin tout particulier, etait le caieu. A partir de ce moment, la vie devint douce et remplie pour le prisonnier. 25 Rosa, on 1'a vu, lui avait remis un des caieux. Chaque soir elle lui apportait 5 poignee a poignee la terre de la portion du jardin qu'il avait trouvee la meil- leure et qui en effet etait excellente. Une large cruche que Cornelius avait cassee habilement 30 lui donna un fonds propice, il 1'emplit a moitie et melangea la terre apportee par Rosa d'un peu de boue de riviere qu'il fit secher et qui lui fournit un excellent terreau. MAITRE ET ECOLIERE 11$ Puis, vers le commencement d'avril il y deposa le pre- mier caieu. Dire ce que Cornelius deploya de soins, 1 d'habilete et de ruse pour derober a la surveillance de Gryphus la joie de ses travaux, nous n'y parviendrions pas. Une demi- 5 heure, c'est un siecle de sensations et de pensee 2 pour un prisonnier philosophe. 11 ne se passait point de jour que Rosa ne vint causer avec Cornelius. II y a 3 une chose surtout qui inquietait a cette heure 10 le tulipier presque autant que ses caieux, et sur laquelle il revenait sans cesse. C'etait 4 la dependance ou etait Rosa de son pere. 5 Ainsi la vie de van Baerle le docteur savant, le peintre pittoresque, Phomme superieur, de van Baerle qui le 15 premier avait, selon toute probabilite, decouvert ce chef- d'oeuvre de la creation que Ton appellerait, comme la chose etait arretee d'avance, Rosa Barlcensis, la vie, bien mieux que la vie, le bonheur de cet homme dependait du plus simple caprice d'un autre homme, et cet homme 23 c'etait un etre d'un esprit inferieur, d'une caste infime; cet homme pouvait un beau matin s'ennuyer a Loewestein, trouver que 1'air y etait mauvais, que le genievre n'y etait pas bon, et quitter la forteresse et emmener sa fille, et encore une fois Cornelius et Rosa etaient 6 separes. 25 - Et alors a quoi bon les pigeons voyageurs, disait Cornelius a la jeune fille; puisque, chere Rosa, vous ne saurez ni Ure ce que je vous* ecrirai, ni m'ecrire ce que vous aurez pense. 7 Eh bien, repondait Rosa, qui au fond du cceur crai- 30 gnait la separation autant que Cornelius, nous avons une heure tous les soirs, employons-la bien. Il6 LA TULIPE NOIRE Mais il me semble, reprit Cornelius, que nous ne 1'employons pas mal. Employons-la mieux encore, dit Rosa en souriant. Montrez-moi a lire et a ecrire; je profiterai de vos lecons, 5 croyez-moi, et de cette facon nous ne serons plus jamais separes que par notre volonte a nous-memes. 1 Oh'! alors, s'ecria Cornelius, nous avons 1'eternite devant nous. Quand commencerons-nous ? 10 -Tout de suite. Non, demain. Pourquoi demain? Parce qu'aujourd'hui notre heure est ecoulee et qu'il 2 faut que je vous quitte. 15 Deja ! mais dans quoi lirons-nous ? Oh ! dit Rosa, j'ai un livre, un livre qui, je 1'espere, nous portera bonheur. A demain done ? A demain. 20 Le lendemain Rosa revint avec la Bible de Corneille de Witt. XVII PREMIER CAIEU Le lendemain, avons-nous dit, 3 Rosa revint avec la Bible de Corneille de Witt. ' Alors commenca entre le maitre et 1'ecoliere une de ces 25 scenes charmantes qui font la joie du romancier quand il a le bonheur de les rencontrer sous sa plume. 1 L'intelligence de Rosa se developpait rapidement sous PREMIER CAIEU 117 le contact vivifiant de 1'esprit de Cornelius. Et Rosa, descendue chez elle, repassait seule dans son esprit les lecons de lecture, et en meme temps dans son ame les lecons non avouees de 1'amour. Un soir elle arriva une demi-heure plus tard que de 5 coutume. C'etait un trop grave evenement qu'une l demi-heure de retard pour que Cornelius ne s'informat 2 pas avant toute chose de ce qui 1'avait cause. Oh ! ne me grondez pas, dit la jeune fille, ce n'est 10 point ma faute. Mon pere a renoue connaissance a Loe- westein avec un bonhomme qui etait venu frequemment le solliciter a la Haye pour voir la prison. C'etait un bon diable, ami de la bouteille, et qui racontait de joyeuses histoires, en outre un large payeur qui ne reculait pas 15 devant un ecot. - Vous ne le connaissez pas autrement ? demanda s Cornelius etonne. Non, repondit la jeune fille, c'est depuis quinze jours environ que mon pere s'est affole de ce nouveau 20 venu si assidu a le visiter. Oh ! fit Cornelius en secoiiant la tete avec inquie- tude, car tout nouvel evenement presageait pour lui une catastrophe, quelque espion du genre de ceux que Ton envoie dans les forteresses pour surveiller ensemble pri- 25 sonniers et gardiens. Je ne crois pas, fit Rosa en souriant, si ce brave homme epie quelqu'un, ce n'est pas mon pere. Qui est-ce alors? Moi, par exemple. 30 Vous ? Pourquoi pas ? dit en riant Rosa. Il8 LA TULIPE NOIRE Ah ! c'est vrai, fit Cornelius en soupirant, vous n'aurez pas tou jours en vain des pretendants, Rosa; cet homme peut devenir votre mari. - Je ne dis pas non. S Et sur quoi fondez-vous cette joie ? Dites cette crainte, monsieur Cornelius. Merci, Rosa, car vous avez raison'; cette crainte . . . Je la f onde sur ceci : J'ecoute, dites. 10 Cet homme etait deja venu plusieurs fois au Buyten- hoff, a la Haye; tenez, juste au moment ou vous y futes 1 enferme. Moi sortie, 2 il en sortit a son tour; moi venue 2 ici, il y 3 vint. A la- Haye il prenait pour pretexte qu'il voulait vous voir.. 15 Me voir, moi ? 4 Oh ! pretexte, assurement, car aujourd'hui qu'il .pourrait encore faire valoir la meme raison puisque vous etes redevenu le prisonnier de mon pere, ou plutot que mon pere est redevenu votre geolier, il ne se recommande 20 plus de vous, bien au contraire. Je 1'entendais hier dire a mon pere qu'il ne vous connaissait pas. Continuez, Rosa, je vous prie, que je tache de deviner quel est cet homme et ce qu'il veut. -Vous etes sur, monsieur Cornelius, que nul de vos 25 amis ne se peut interesser 5 a vous ? - Je n'ai pas d'amis, Rosa, je n'avais que ma nourrice, vous la connaissez et elle vous connalt. 6 J'en reviens done a ce que je pensais, d'autant mieux qu'hier, au coucher du soleil, comme j'arrangeais la plate- 30 bande ou je dois planter votre caieu, je vis 7 une ombre qui, par la porte entr'ouverte, se glissait derriere les su- reaux et les trembles. Je n'eus 8 pas 1'air de regarder, PREMIER CAIEU IIQ c'etait notre homme. II se cacha, me vit remuer la terre, et, certes, c'etait bien moi qu'il avait suivie, c'etait bien moi qu'il epiait. Je ne donnai pas un coup de rateau, je ne touchai pas un atome de terre qu'il ne s'en rendit 1 compte. 5 Oh ! oui, oui, c'est un amoureux, dit Cornelius. Est-il jeune, est-il beau? Et il regarda avidement Rosa, attendant impatiem- ment sa reponse. - Jeune, beau ? s'ecria Rosa eclatant de rire. II est 10 hideux de visage, il a le corps youte, il approche de cin- quante ans, et n'ose me regarder en face ni parler haut. Et il s'appelle? - Jacob Gisels. - Je ne le connais pas. 15 - Vous voyez bien, alors, que ce n'est pas pour vous qu'il vient. En tout cas, s'il vous aime, Rosa, ce qui est bien probable, car vous voir c'est vous aimer, vous ne I'aimez pas, vous? 20 Oh ! non certes ! -Vous voulez que je me tranquillise, alors? . - Je vous y engage. Eh bien ! maintenant que vous commencez a savoir lire, Rosa, vous lirez tout ce que je vous ecrirai, n'est-ce 25 pas, sur les tourments de la jalousie et sur ceux de 1'ab- sence ? - Je lirai si vous ecrivez bien gros. Puis, comme la tournure que prenait la conversation commenfait a inquieter Rosa: 30 A propos, dit-elle, comment se porte votre tulipe, a vous ? 2 120 LA TULIPE NOIRE - Rosa, jugez de ma joie: ce matin je la regardais au soleil, apres avoir ecarte doucement la couche de terre qui couvre le ca'ieu, j'ai vu poindre 1'aiguillon de la pre- miere pousse; ah ! Rosa, mon cceur s'est fondu de joie, 5 cet imperceptible bourgeon blanchatre m'a plus emu que la lecture de cet ordre de son altesse, qui me rendait la vie en arretant la hache du bourreau, sur Pechafaud du Buytenhoff. - Vous esperez, alors ? dit Rosa en souriant. 10 Oh ! oui, j'espere ! - Et moi, a mon tour, quand planterai-je J mon caieu ? Au premier jour favorable, je vous le dirai; mais surtout, n'allez point vous faire aider par personne, sur- tout ne confiez votre secret a qui que ce soit au monde; 15 un amateur, voyez-vous, 2 serait capable, rien qu'a 1'in- spection de ce ca'ieu, de reconnaitre sa valeur; et surtout, surtout, ma bien chere Rosa, serrez precieusement le troisieme oignon qui vous reste. II est encore dans le meme papier ou vous 1'avez mis 20 et tel que vous me 1'avez donne, monsieur Cornelius, enfoui tout au fond de mon armoire et sous mes dentelles qui le tiennent au sec sans le charger. Mais, adieu, pau- vre prisonnier. Comment, deja ? 25 II le faut. - Venir si tard et partir si tot ! Mon pere pourrait s'impatienter en ne me voyant pas revenir; 1'amoureux pourrait se douter qu'il a un rival. 30 Et elle ecouta inquiete. 3 Qu'avez-vous done ? demanda van Baerle. II m'a semble entendre . . . PREMIER CAIEU 121 Quoi done ? Quelque chose comme un pas qui craquait dans 1'escalier. - En effet, dit le prisonnier, ce ne peut etre Gryphus, on 1'entend de loin, lui. 1 5 - Non, ce n'est pas mon pere, j'en suis sure, mais . . . Mais . . . Mais ce pourrait etre M. Jacob. Rosa s'elanca dans 1'escalier, et Ton entendit en effet une porte qui 2 se fermait rapidement avant que la jeune 10 fille cut descendu les dix premieres marches. Cornelius demeura fort inquiet, mais ce n'etait pour lui qu'un prelude. Quand la fatalite commence d'accomplir une ceuvre mauvaise, il est rare qu'elle ne previenne pas charitable- 15 ment sa victime, comme un spadassin fait a son adver- saire pour lui donner le loisir de se mettre en garde. Le lendemain se passa sans que rien de marquant cut lieu. Gryphus fit ses trois visites. II ne decouvrit rien. Quand il entendait venir son geolier, van Baerle, a 1'aide 20 d'une mecanique qu'il avait inventee, et qui ressemblait a celles a 1'aide desquelles on monte et descend les sacs de ble dans les fermes, van Baerle avait imagine de des- " cendre sa cruche au-dessous de I'entablement de tuiles d'abord, et ensuite de pierres qui regnait au-dessous de sa 25 fenetre. Quant aux ficelles a 1'aide desquelles le mouve- ment s'operait, notre mecanicien avait trouve un moyen de les cacher avec les mousses qui vegetent sur les tuiles et dans le creux des pierres. Gryphus n'y devinait rien. 30 Ge manege reussit pendant huit jours. 3 Mais un matin que Cornelius, absorbe dans la contem- 122 LA TULIPE NOIRE plation de son ca'ieu, d'ou s'elancait deja un point de vegetation, n'avait pas entendu monter le vieux Gry- phus, il faisait grand vent ce jour-la, et tout craquait dans la tourelle, la porte s'ouvrit tout a coup, et Cor- 5 nelius fut surpris sa cruche entre ses genoux. Gryphus, voyant un objet inconnu, et par consequent defendu, aux mains de son prisonnier, Gryphus fondit sur cet objet avec plus de rapidite que ne fait le faucon sur sa proie. 10 Le hasard ou cette adresse fatale que le mauvais esprit accorde parfois aux etres malfaisants, fit que sa grosse main calleuse se posa tout d'abord au beau milieu de la cruche, sur la portion de terreau depositaire du precieux oignon, cette main brisee au-dessus du poignet et que 15 Cornelius van Baerle lui avait si bien remise. Qu'avez-vous la ? s'ecria-t-il. Ah ! je vous y prends ! Et il enfonca sa main dans la terre. Moi? Rien, rien ! s'ecria Cornelius tout tremblant. Ah ! je vous y prends ! Une cruche, de la terre ! il y 20 a quelque secret coupable cache la-dessous ! Cher monsieur Gryphus ! supplia van Baerle, inquiet comme la perdrix a qui le moissonneur vient de prendre sa couvee. En effet, Gryphus commencait a creuser la terre avec 25 ses doigts crochus. Monsieur, monsieur ! prenez garde ! dit Cornelius palissant. A quoi ? 1 mordieu ! a quoi ? hurla le geolier. Prenez garde! vous dis-je; vous allez le meurtrir ! 30 Et d'un mouvement rapide, presque desespere, il arra- cha des mains du geolier la cruche, qu'il cacha comme un tresor sous le rempart de ses deux bras. CORNELIUS SE BAT POUR SA TULIPE PREMIER CAIEU 123 Mais Gryphus, entete comme un vieillard, et de plus en plus convaincu qu'il venait de decouvrir une con- spiration centre le prince d'Orange, Gryphus courut sur son prisonnier le baton leve, et voyant 1'impassible reso- lution du captif a proteger son pot de fleurs, il sentit que 5 Cornelius tremblait bien moins pour sa tete que pour sa cruche. II chercha done a la lui arracher de vive force. Ah ! disait le geolier furieux, vous voyez bien que vous vous revoltez. 10 - Laissez-moi ma tulipe ! criait l van Baerle. Oui, oui, tulipe, repliquait 2 le vieillard. On connait les ruses de MM. les prisonniers. Mais je vous jure . . . - Lachez, repetait Gryphus en frappant du pied. La- 15 chez, ou j'appelle la garde. Appelez qui vous voudrez, mais vous n'aurez cette pauvre fleur qu'avec ma vie. Gryphus, exaspere, enfonja ses doigts pour la seconde fois dans la terre, et cette fois en tira le ca'ieu tout noir, 20 et tandis que van Bae'rle etait heureux d'avoir sauve le contenant, ne s'imaginant pas que son adversaire possedat le contenu, Gryphus lanca violemment le ca'ieu amolli qui s'ecrasa sur la dalle, et disparut presque aussitot broye, mis en bouillie, sous le large soulier du geolier. 25 Van Bae'rle vit le meurtre, entrevit les debris humides, comprit cette joie feroce de Gryphus et poussa un cri de desespoir. L'idee d'assommer ce mediant homme passa comme un eclair dans le cerveau du tulipier. Le feu et le sang tout 30 ensemble lui monterent au front, 1'aveuglerent, et il leva de ses deux mains la cruche lourde de toute 1'inutile terre 124 LA TULIPE NOIRE i qui y restait. Un instant de plus, et il la laissait l retom- ber sur le crane chauve du vieux Gryphus. Un cri 1'arreta, un cri plein de larmes et d'angoisses, le cri que poussa derriere le grillage du guichet la pauvre 5 Rosa, pale, tremblante, les bras leves au del, et placee entre son pere et son ami. Cornelius abandonna la cruche qui se brisa en mille pieces avec un fracas epouvantable. Et alors Gryphus comprit le danger qu'il venait de 10 courir et s'emporta a de terribles menaces. Oh ! il faut, lui dit Cornelius, que vous soyez un homme bien lache et bien manant pour arracher a un pauvre prisonnier sa seule consolation, un oignon de tulipe. 15 Fi ! mon pere, ajouta Rosa, c'est un crime que vous venez de commettre. Ah ! c'est vous, peronnelle, s'ecria en se retournant vers sa fille le vieillard bouillant de colere, melez-vous de ce qui vous regarde, et surtout descendez au plus vite. 20 Malheureux ! malheureux ! continuait Cornelius au desespoir. Apres tout, ce n'est qu'une tulipe, ajouta Gryphus un peu honteux. On vous en donnera tant que vous voudrez des tulipes, 2 j'en ai trois cents dans mon grenier. 25 Au diable vos tulipes ! s'ecria Cornelius. Elles vous valent et vous les valez. 3 Oh ! cent milliards de millions ! si je les avais je les donnerais pour celle que vous avez ecrasee la. Ah ! fit Gryphus triomphant. Vous voyez bien que 30 ce n'est pas a la tulipe que vous teniez. Vous voyez bien qu'il y avait dans ce faux oignon quelques sorcelleries, un moyen de correspondance peut-e"tre avec les enne- L'AMOUREUX DE ROSA 125 mis de Son Altesse, qui vous a fait grace. Je le disais bien, qu'on avait eu tort de ne pas vous couper le cou. Mon pere ! mon pere ! s'ecriait Rosa. Eh bien ! tant mieux ! tant mieux ! repetait Gryphus en s'animant, je 1'ai detruit, je 1'ai detruit. II en sera de 5 meme chaque fois que vous recommencerez ! Ah ! je vous avais prevenu, mon bel ami, que je vous rendrais la vie dure. Maudit ! maudit ! hurla Cornelius tout a son deses- poir 1 en retournant avec ses doigts tremblants les der- 10 niers vestiges du ca'ieu, cadavre de tant de joies et de tant d'esperances. Nous planterons 1'autre demain, cher monsieur Cor- nelius, dit a voix basse Rosa, 2 qui comprenait 1'immense douleur du tulipier et qui jeta, coeur saint, cette douce 15 parole comme une goutte de baume sur la blessure sai- gnante de Cornelius. XVIII L'AMOUREUX DE ROSA Rosa avait a peine jete ces paroles de consolation a Cornelius que 1'on entendit dans 1'escalier une voix qui demandait a Gryphus des nouvelles de ce qui se passait. 20 Mon pere, dit Rosa, entendez-vous ? -Quoi? M. Jacob vous appelle. II est inquiet. On a fait tant de bruit, fit Gryphus. N'eut-on pas dit qu'il m'assassinait, ce savant ! Ah ! que de mal on a 25 toujours avec les savants ! Puis, indiquant du doigt 1'escalier a Rosa: Marchez devant, mademoiselle ! dit-il. 126 LA TULIPE NOIRE Et, fermant la porte: Je vous rejoins, ami Jacob, acheva-t-il. Et Gryphus sortit emmenant Rosa.et laissant dans sa solitude et dans sa douleur amere x le pauvre Cornelius 5 qui murmurait: Oh ! c'est toi qui m'as assassine, vieux bourreau. Je n'y 2 survivrai pas ! Et en effet le pauvre prisonnier fut tombe malade sans ce contre-poids que la Providence avait mis a sa vie et 10 que Ton appelait Rosa. Le soir la jeune fille revint. Son premier mot fut pour annoncer a Cornelius que desormais son pere ne s'opposait plus a ce qu'il 3 cultivat des fleurs. 15 Et comment savez-vous cela? dit d'un air dolent le prisonnier a la jeune fille. - Je le sais parce qu'il 1'a dit. Pour me tromper peut-etre ? Non, il se repent. 20 Oh ! oui, mais trop tard. Ce repentir ne lui est pas venu de lui-meme. Et comment lui est-il done venu ? Si vous saviez combien son ami le gronde ! Ah ! M. Jacob, il ne vous quitte done pas, M. Jacob ? 25 - En tout cas il nous quitte le moins qu'il peut. Et elle sourit de telle facon que ce petit nuage de jalousie qui avait obscurci le front de Cornelius se dissipa. Comment cela s'est-il fait ? demanda le prisonnier. 30 Eh bien, interroge par son ami, mon pere a souper a raconte 1'histoire de la tulipe ou plutot du caiieu, et le bel exploit qu'il avait fait en 1'ecrasant. L'AMOUREUX DE ROSA 127 Cornelius poussa un soupir qui pouvait passer pour un gemissement. Si vous eussiez 1 vu en ce moment maitre Jacob ! con- tinua Rosa. En verite j'ai cru qu'il allait mettre le feu a la forteresse, qu'il voulait etrangler mon pere. Vous 5 avez fait cela, s'ecria-t-il, vous avez ecrase le caiieu ? ' Sans doute, fit mon pere. C'est infame ! continua-t-il, c'est odieux ! c'est un crime que vous avez commis la ! hurla Jacob. Mon pere resta stupefait. 10 Est-ce que vous aussi vous 2 etes f ou ? demanda-t-il a son ami. Oh ! digne homme que 3 ce Jacob, murmura Corne- lius; c'est un honnete cceur, une ame d'elite. Le fait est qu'il est impossible de traiter un homme 15 plus durement qu'il n'a traite mon pere, ajouta Rosa; c'etait de sa part un veritable desespoir; il repetait sans cesse: Ecrase, le caieu ecrase; oh! mon Dieu, mon Dieu, ecrase ! . . Puis, se tournant vers moi: 20 - Mais ce n'etait pas le seul qu'il cut ? demanda-t-il. II a demande cela ? fit Cornelius, dressant 1'oreille. - Vous croyez que ce n'etait pas le seul ? dit mon pere. Bon, 1'on cherchera les autres. - Vous chercherez les autres, s'ecria Jacob en prenant 25 mon pere au collet; mais aussi tot il le lacha. Puis, se tournant vers moi: Et qu'a dit le pauvre jeune homme ? demanda-t-il. Je ne savais que 4 repondre, vous m'aviez bien recom- mande de ne jamais laisser soupconner l'int,eret que vous 30 portiez a ce ca'ieu. Heureusement mon pere me tira d'embarras. 128 LA TULIPE NOIRE Ce qu'il a dit ? . . . il s'est mis a ecumer. Je 1'interrompis. Comment n'aurait-il l pas etc furieux, lui dis-je, vous avez etc si injuste et si brutal ! 5 Ah c.a ! mais etes-vous fou ? s'ecria mon pere a son tour, le beau malheur d'ecraser un oignon de tulipe; on en a 2 des centaines pour un florin au marche de Gorcum. Mais peut-etre moins precieux que celui-ci, eus-je le malheur de repondre. 10 Et a ces mots, lui, Jacob ? demanda Cornelius. A ces mots, je dois le dire, il me sembla que son ceil lancait un eclair. Oui, fit Cornelius, mais ce ne fut pas tout; il dit quelque chose? 15 Ainsi, belle Rosa, dit-il d'une voix mielleuse, vous croyez cet oignon precieux ? Je vis que j'avais fait une faute. Que sais-je, moi? repondis-je negligemment, est-ce que je me connais en tulipes ? Je sais seulement, helas ! 20 que pour le prisonnier tout passe-temps a son prix. Ce pauvre M. van Baerle s'amusait de cet oignon. Eh bien ! je dis qu'il y a de la cruaute a lui enlever cet amusement. Mais d'abord, fit mon pere, comment s'etait-il pro- cure cet oignon ? Voila ce qu'il serait bon de savoir, ce 3 25 me semble. Je detournai les yeux pour eviter le regard de mon pere. Mais je rencontrai les yeux de Jacob. On eut dit qu'il voulait poursuivre ma pensee jusqu'a*u fond de mon cceur. 30 Un mouvement d'humeur dispense souvent d'une re- ponse. Je haussai les epaules, tournai le dos et m'avancai vers la porte. L AMOUREUX DE ROSA 129 . Mais je fus arretee par un mot que j'entendis, si has qu'il fut prononce. Jacob disait 1 a mon pere: Ce n'est pas chose difficile que 2 de s'en assurer, parbleu. 5 C'est de le fouiller, et s'il a les autres caieux nous les trouverons. Oui, ordinairement, il y en a trois. II y en a trois ! s'ecria Cornelius. II a dit que j'avais trois caieux ! 10 - Vous comprenez, le mot m'a frappee comme' vous. Je me retournai. Us etaient si occupes tous deux qu'ils ne virent pas mon mouvement. Mais, dit mon pere, il ne les a peut-etre pas sur lui, 15 ses oignons. Alors faites-le descendre sous un pretexte quelcon- que, pendant ce temps je fouillerai sa chambre. Oh ! oh ! fit Cornelius. Mais c'est un scelerat que votre M. Jacob. 20 J'en ai peur. 3 Dites-moi, Rosa, continua Cornelius tout pensif. -Quoi? Ne m'avez-vous pas raconte que le jour ou vous aviez prepare votre plate-bande, cet homme vous avait 25 suivie ? -Oui. Qu'il s'etait glisse comme une ombre derriere les sureaux ? Sans doute. 30 Qu'il n'avait pas perdu un de vos coups de rateau ? Pas un. 130 LA TULIPE NOIRE - Rosa ... fit Cornelius palissant. - Eh bien ! Ce n'etait pas vous qu'il suivait. Qui suivait-il done? 5 Ce' n'est pas de vous qu'il est amoureux. - De qui done, alors ? C'etait mon ca'ieu qu'il suivait; c'etait de ma tulipe qu'il etait amoureux. Ah ! par exemple ! cela pourrait bien etre, s'ecria 10 Rosa. Voulez-vous vous en assurer ? Et de quelle f aeon ? Oh ! c'est chose bien facile. - Dites. 15 Allez demain au jardin; tachez, comme la premiere fois, que Jacob sache que vous y allez; tachez, comme la premiere fois, qu'il vous suive; faites semblant d'enterrer le caieu, sortez du jardin, mais regardez a travers la porte, et vous verrez ce qu'il fera. 20 - Bien ! mais apres ? Apres ! comme il agira, nous agirons. Ah ! dit Rosa en poussant un soupir, vous aimez bien vos oignons, M. Cornelius. Le fait est, dit le prisonnier avec un soupir, que 25 depuis que votre pere a ecrase ce malheureux ca'ieu, il me semble qu'une portion de ma vie s'est paralysee. - Voyons ! dit Rosa, voulez-vous essayer autre chose encore ? -Quoi? 30 - Voulez-vous accepter la proposition de mon pere ? Quelle proposition ? II vous a offert des oignons de tulipes par centaines. L'AMOUREUX DE ROSA 131 C'est vrai. Acceptez-en deux ou trois, et au milieu 'de ces deux ou trois oignons, vous pourrez clever le troisieme caieu. Oui, ce serait bien, dit Cornelius le sourcil fronce, si votre pere etait seul; mais cet autre, ce Jacob, qui nous 5 epie . . . Ah! c'est vrai; cependant, reflechissez ! vous vous privez la, je le vois, d'une grande distraction. Et elle prononca ces paroles avec un sourire qui n'etait pas entierement exempt d 'ironic. 10 En effet, Cornelius reflechit un instant, il etait facile de voir qu'il luttait centre un grand desir. Eh bien, non ! s'ecria-t-il avec un stoi'cisme tout an- tique, non ! ce serait une faiblesse, ce serait une folie, ce serait une lachete ! Si je livrais ainsi a toutes les mauvai- 15 ses chances de la colere et de 1'envie la derniere ressource qui nous reste, je serais un homme indigne de pardon. Non ! Rosa, non'! demain nous prendrons une resolution a 1'endroit de votre tulipe; vous la cultiverez selon mes instructions; et quant au troisieme caieu, Cornelius 20 soupira profondement, quant au troiseme, gardez-le dans votre armoire-! gardez-le comme 1'avare garde sa premiere ou sa derniere piece d'or; gardez-le, Rosa ! quelque chose me dit que la est notre salut, que la est notre richesse ! gardez-le ! et si le feu du ciel tombait sur 25 Loevestein, jurez-moi, Rosa, qu'au lieu de vos bagues, qu'au lieu de vos bijoux, qu'au lieu de ce beau casque d'or qui encadre si bien votre visage, jurez-moi, Rosa, que vous emporterez ce dernier ca'ieu qui renferme ma tulipe noire. Soyez tranquille, monsieur Cornelius, dit Rosa avec 30 un doux melange de tristesse et de solennite; soyez tran- quille, vos desirs sont des ordres pour moi. 132 LA TULIPE NOIRE Et meme, continua le jeune homme s'enfievrant de plus en plus; si vous vous aperceviez que vous eles suivie, que vos demarches sont epiees, que vos conversa- tions eveillent les soupcons de'votre pere ou de cet affreux 5 Jacob que je deteste; eh bien ! Rosa, sacrifiez-moi tout de suite, moi qui ne vis plus que par vous, qui n'ai plus que vous au monde, sacrifiez-moi, ne me voyez plus. Rosa sentit son coeur se serrer dans sa poitrine; des larmes jaillirent jusqu'a ses yeux. 10 Helas ! dit-elle. ^ Quoi ? demanda Cornelius. Je vois une chose. 1 , Que voyez- vous ? Je vois, dit la jeune fille eclatant en sanglots; je 15 vois que vous aimez tant les tulipes, qu'il n'y a plus place dans votre coeur pour une autre affection. Et elle s'enfuit. Cornelius passa ce soir-la et apres le depart de la jeune fille une des plus mauvaises nuits qu'il cut jamais passees. 20 Rosa etait courroucee centre lui, et elle avait raison. Elle ne reviendrait plus voir le prisonnier peut-etre, et il n'aurait plus de nouvelles, ni de Rosa ni de ses tulipes. Maintenant, comment allons-nous expliquer ce bizarre caractere aux tulipiers parfaits tels qu'il en existe encore 25 en ce monde ? Nous 1'avouons a la honte de notre heros et de 1'horti- culture, de ses deux amours, celui que Cornelius se sentit le plus enclin a regretter, ce fut 1'amour de Rosa, et lors- que vers trois heurs du matin il s'endormit harasse de 30 fatigue, harcele de craintes, bourrele de remords, la grande tulipe noire ceda le premier rang, dans les reves, aux yeux bleus si doux de la Frisonne blonde. FEMME ET FLEUR 133 XIX FEMME ET FLEUR Mais la pauvre Rosa, enfermee dans sa chambre, ne pouvait savoir a qui ou a quoi revait Cornelius. II en resultait que, d'apres ce qu'il lui avait dit, Rosa etait bien plus encline a croire qu'il revait a sa tulipe qu'a elle, 1 et cependant Rosa se trompait. 5 Mais comme personne n'etait la pour dire a Rosa qu'elle se trompait, Rosa ne revait pas, elle pleurait. Cornelius etait savant, Cornelius etait riche, ou du moins 1'avait ete avant la confiscation de ses biens. Cor- nelius pouvait done trouver Rosa bonne pour une dis- 10 traction, mais, a coup sur, quand il s'agirait d'engager son cceur, .ce serait plutot a une tulipe, c'est-a-dire a la plus noble et a la plus fiere des fleurs qu'il 1'engagerait, qu'a Rosa, humble fille d'un geolier. Aussi Rosa avait-elle pris une resolution pendant cette 15 nuit terrible, pejidant cette nuit d'insomnie qu'elle avait * passee. Cette resolution, c'etait 2 de ne plus revenir au guichet. Mais comme elle savait 1'ardent desir qu'avait Corne- lius d'avoir des nouvelles de sa tulipe, comme elle voulait 20 bien ne pas s'exposer, elle, a revoir un homme pour lequel elle sentait sa pitie s'accroitre a ce point qu'apres avoir passe par la sympathie, cette pitie s'acheminait tout droit et a grands pas vers 1'amour. mais comme elle ne voulait pas desesperer cet homme, elle resolut de poursuivre-seule 25 les lecons de lecture et d'ecriture commencees, et heureu- sement elle etait a ce point de son apprentissage qu'un maitre ne lui cut plus ete necessaire si ce maitre ne se fut appele Cornelius. 134 LA TULIPE NOIRE Rosa se mit done a lire avec acharnement dans la Bible du pauvre Corneille de Witt, sur la seconde feuille de laquelle, devenue la premiere depuis que 1'autre etait dechiree, sur la seconde feuille de laquelle etait ecrit le 5 testament de Cornelius van Baerle. Ah ! murmurait-elle en relisant ce testament qu'elle n'achevait jamais sans qu'une larme, perle d'amour, ne roulat de ses yeux limpides sur ses joues palies, ah ! dans ce temps, j'ai pourtant cru un instant qu'il m'aimait. 10 Pauvre Rosa ! elle se trompait. Jamais I'amour du prisonnier n'avait etc reel qu'arrive au moment ou nous sommes parvenus, puisque, nous 1'avons dit avec embar- ras, dans la lutte entre la grande tulipe noire et Rosa, c'etait la grande tulipe noire qui avait succombe. 15 Mais Rosa, nous le repetons, ignorait la defaite de la grande tulipe noire. Aussi, sa lecture finie, operation dans laquelle Rosa avait fait de grands progres, Rosa prenait-elle la plume et se mettait-elle avec un acharnement non moms louable 20 a 1'oeuvre bien autrement difficile de 1'ecriture. Mais enfin, comme Rosa ecrivait deja presque lisible- ment le jour ou Cornelius avait si imprudemment laisse parler son cceur, Rosa ne desespera point de faire des progres assez rapides pour donner dans huit jours au 25 plus tard des nouvelles de sa tulipe au prisonnier. Elle n'avait pas oublie un mot des recommandations que lui avait faites Cornelius. Lui, de son cote, se reveilla plus amoureux que jamais. La tulipe etait bien encore lumineuse et vivante dans sa 30 pensee, mais enfin il ne la voyait plus comme un tresor auquel il dut 1 tout sacrifier, meme Rosa, mais comme une fleur precieuse, une merveilleuse combinaison de la FEMME ET FLEUR 13 nature et de Tart que Dieu lui accordait pour le corsage de sa maitresse. 1 Cependant toute la journee une inquietude vague le poursuivait. C'etait la crainte que Rosa ne vint point ce soir-la comme d'habitude. Et au fur et a mesure que 5 la nuit s'avancait, la preoccupation devenait plus vive et plus presente. De la chambre de Cornelius on entendait sonner les heures a Phorloge de la forteresse. Sept heures, huit heures, puis neuf heures sonnerent. 10 Puis tout rentra dans le silence. Cornelius appuya la main sur son coeur pour -en etouffer les battements, et ecouta. Le bruit du pas de Rosa, le froissement de sa robe aux marches de 1'escalier, lui etaient si familiers que, des le 15 premier degre monte par elle, il disait: Ah ! voila Rosa qui vient. 2 Ce soir-la aucun bruit ne troubla le silence du corridor; 1'horloge marqua neuf heures un quart. Puis, sur deux sons differents, neuf heures et demie; puis neuf heures 20 trois quarts; puis enfin dix heures. C'etait 1'heure a laquelle Rosa quittait d'habitude Cor- nelius. L'heure etait sonnee et Rosa n'etait pas encore venue. Ainsi done, ses pressentiments ne 1'avaient pas trompe: 25 Rosa irritee se tenait dans sa chambre et 1'abandonnait. Oh ! j'ai bien merite ce qui m'arrive, disait Corne- Jius. Oh ! elle ne viendra pas, et elle f era bien de ne pas venir; a sa place, certes, j'en ferais autant. Et malgre cela, Cornelius ecoutait, attendait et espe- 30 rait toujours. II ecouta et attendit ainsi jusqu'a minuit, mais a 136 LA TULIPE NOIRE minuit il cessa d'esperer et, tout habille. alia se Jeter sur son lit. La nuit fut longue et triste, puis le jour vint; mais le jour n'apportait aucune esperance au prisonnier. 5 A huit heures du matin, sa porte s'ouvrit; mais Cor- nelius ne detourna meme pas la tete, il avait entendu le pas pesant de Gryphus dans le corridor, mais il avait par- faitement senti que ce pas s'approchait seul. II ne regarda meme pas du cote du geolier. 10 Et cependant il eut bien voulu 1'interroger pour lui demander des nouvelles de Rosa. A la secfonde visite de Gryphus, Cornelius, centre tous ses antecedents, avait demande au vieux geolier, et cela de sa voix la plus douce, des nouvelles de sa sante ; mais Gryphus, 15 laconique comme un Spartiate, s'etait borne a repondre: Ca va bien. A la troisieme visite, Cornelius varia la forme de 1'inter- rogation. Personne n'est malade a Loevestein ? demanda-t-il. 20 Personne ! repondit plus laconiquement encore que la premiere fois Gryphus, en fermant la porte au nez de son prisonnier. Gryphus, mal habitue a de pareilles gracieusetes de la part de Cornelius, y avait vu de la part de son prisonnier 25 un commencement de tentative de corruption. Cornelius se retrouva seul; il etait sept heures du soir; alors se renouvelerent a un degre plus intense que la veille les angoisses que nous avons essaye de decrire. Mais, comme la veille, les heures s'ecoulerent sans 30 amener la douce vision qui eclairait, a travers le guichet, le cachot du pauvre Cornelius, et qui, en se retirant, y lais- sait de la lumiere pour tout le temps de son absence. FEMME ET FLEUR 137 Van Baerle pas'sa la nuit dans un veritable desespoir. Le lendemain, Gryphus lui parut plus laid, plus brutal, plus desesperant encore que d'habitude. Le soir vint et le desespoir tourna en melancolie; cette melancolie etait d'autant plus sombre que, malgre van 5 Baerle, les souvenirs de sa pauvre tulipe se melaient a la douleur qu'il eprouvait. On en l etait arrive juste a cette epoque du mois d'avril que les jardiniers les plus experts indiquent comme le point precis de la plantation des tulipes; il avait dit a Rosa: Je vous indiquerai le 10 jour ou vous devez mettre le caiieu en terre. Ce jour, il devait, le lendemain, le fixer a la soiree suivante. Le temps etait bon, 1'atmosphere, quoique encore un peu humide, commenfait a etre temperee par ces pales rayons du soleil d'avril, qui venant les premiers semblent si doux, 15 malgre leur paleur. Si Rosa allait laisser passer le temps de la plantation; si a la douleur de ne pas voir la jeune fille se joignait celle de voir avorter le ca'ieu, pour avoir etc plante trop tard, ou meme pour n'avoir pas etc plante du tout ! 20 De ces deux douleurs reunies, il y avait certes de quoi perdre le boire et le manger. 2 Ce fut ce qui arriva le quatrieme jour. C 'etait pi tie que de voir Cornelius, muet de douleur et pale d'inanition, se pencher en dehors de la fenetre grillee. 25 Le soir, Gryphus emporta le dejeuner et le diner de Cornelius; a peine celui-ci y avait-il touche. Le lendemain, il n'y toucha pas du tout, et Gryphus descendit les comestibles destines a ces deux repas par- faitement intacts. 30 Cornelius ne s'etait pas leve de la journee. Bon, dit Gryphus en descendant apres la derniere 138 LA TULIPE NOIRE visite; bon, je crois que nous allons etre debarrasse du savant. Rosa tressaillit. Bah I.fit Jacob, et comment cela ? 5 II ne boit plus, il ne mange plus, il ne se leve plus, dit Gryphus. Comme M. Grotius, il sortira d'ici dans un coffre, seulement ce coffre sera une biere. Rosa devint pale comme la mort. Oh ! murmura-t-elle, je comprends: il est inquiet de 10 sa tulipe. Et se levant tout oppressee, elle rentra dans sa cham- bre, ou elle prit une plume et du papier, et pendant toute la nuit s'exerca a tracer des lettres. Le lendemain, en se levant pour se trainer jusqu'a la 15 fenetre, Cornelius apercut un papier qu'on avait glisse sous la porte. II s'elanca sur ce papier, 1'ouvrit, et lut, d'une ecriture qu'il cut peine a reconnait're pour celle de Rosa, tant elle s'etait amelioree pendant cette absence de sept 20 jours: Soyez tranquille, votre tulipe se porte bien. Cornelius avait du papier et un crayon que lui avait apportes Rosa. II comprit que la jeune fille attendait une reponse, mais que cette reponse elle ne la l viendrait 25 chercher que la nuit. En consequence il ecrivit sur un papier pareil a celui qu'il avait recu: Ce n'est point 1'inquietude que me cause ma tulipe qui me rend malade; c'est le chagrin que j'eprouve de ne pas vous voir. 30 Puis Gryphus sorti, 2 puis le soir venu, il glissa le papier sous la porte et ecouta. CE QUI S'ETAIT PASSE PENDANT CES HUIT JOURS 139 Mais, avec quelque soin qu'il pretat Pbreille, il n'enten- dit ni le pas 1 ni le froissement de sa robe. II n'entendit qu'une voix faible comme un souffle, et douce comme une caresse, qui lui jetait par le guichet ces deux mots: 5 A demain. Demain, c'etait le huitieme jour. Pendant huit jours Cornelius et Rosa ne s'etaient point vus. XX CE QUI S'ETAIT PASSE PENDANT CES HUIT JOURS Le lendemain en eflfet, a 1'heure habituelle, van Baerle entendit gratter a son guichet comme avait 1'habitude de 10 le faire Rosa dans les bons jours de leur amitie. Rosa, qui 1'attendait sa lampe a la main, ne put retenir un mouvement quand elle vit le prisonnier si triste et si pale. - Vous etes souffrant, monsieur Cornelius ? demanda- 1*5 t-elle. Oui, mademoiselle, repondit Cornelius, souffrant d'es- prit et de corps. 2 Pai vu, monsieur, que vous ne mangiez plus, dit Rosa; mon pere m'a dit que vous ne vous leviez plus; 20 alors je vous ai ecrit pour vous tranquilliser sur le sort du precieux objet de vos inquietudes. Et moi, dit Cornelius, je vous ai repondu. Je croyais, vous voyant revenir, chere Rosa, que vous aviez recu ma lettre. 25 En effet, j'ai non seulement recu, mais lu votre billet. C'est pour cela 3 que je suis venue pour voir s'il n'y aurait pas quelque moyen de vous rendre a la sante. 140 LA TULIPE NOIRE Me rendre a la sante ! s'ecria Cornelius, mais vous avez done quelque bonne nouvelle a m'apprendre ? Et en parlant ainsi, le jeune homme attachait sur Rosa des yeux brillants d'espoir. 5 Soit qu'elle ne comprit pas ce regard, soit qu'elle ne voulut pas le comprendre, la jeune fille repondit grave- ment: - J'ai seulement a vous parler de votre tulipe, qui est, je le sais, la plus grave preoccupation que vous ayez. 10 Rosa prononca ce peu de mots avec un accent glace qui fit tressaillir Cornelius. Le zele tulipier ne comprenait pas tout ce que cachait, sous le voile de I'indifTerence, la pauvre enfant toujours aux prises avec sa rivale, la tulipe noire. 15 Ah ! murmura Cornelius, encore, encore ! Rosa, ne vous ai-je pas dit, mon Dieu ! que je ne songeais qu'a Vous, que c'etait vous seule que je regrettais. Rosa sourit melancoliquement. Ah ! dit-elle, c'est que votre tulipe a couru un si 20 grand danger. Cornelius tressaillit malgre lui, et se laissa prendre au piege, si e'en etait un. - Un si grand danger ! s'ecria-t-il tout tremblant, mon Dieu ! et lequel ? 25 Rosa le regarda avec une douce compassion, elle sentait que ce qu'elle voulait etait au-dessus des forces de cet homme, et qu'il fallait accepter celui-la avec sa faiblesse. Oui, dit-elle, vous aviez devine juste, le pretendant, Pamoureux, le Jacob x ne venait point pour moi. 30 Et pour qui venalt-il done ? demanda Cornelius avec anxiete. II venait pour la tulipe. CE QUI S'ETAIT PASSE PENDANT CES HUIT JOURS 141 Oh ! fit Cornelius palissant a cette nouvelle. Rosa continua: Du moment ou cet homme, qui m'avait suivie au jardin et que j'avais reconnu pour Jacob, vous inquietait, il m'inquietait bien plus encore. Je fis done ce que vous 5 aviez dit, le lendemain du jour ou je vous ai vu pour la derniere fois. Le lendemain de ce malheureux jour, con- tinua Rosa, je descendis done au jardin, et m'avancai vers la plate-bande ou je devais planter la tulipe, tout en regardant derriere moi si, 1 cette fois comme 1'autre, j'etais 10 suivie. Eh bien ? demanda Cornelius. Eh bien ! la meme ombre se glissa entre la porte et la muraille, et disparut encore derriere les sureaux. - Vous fites semblant de ne pas la voir, n'est-ce pas ? 15 demanda Cornelius se rappelant dans tous ses details le conseil qu'il avait donne a Rosa. Oui, et je m'inclinai sur la plate-bande que je creusai avec une beche comme si je plantais le ca'ieu. Et lui . . . lui . . . pendant ce temps ? 20 - Je voyais briller ses yeux ardents comme ceux d'un tigre a travers les branches des arbres. - Voyez-vous ? voyez-vous ? dit Cornelius. Puis, ce semblant d'operation acheve, je me retirai. II attendit un instant sans doute pour s'assurer que je 25 ne reviendrais pas, puis il sortit a pas de loup 2 de sa cachette, s'approcha de la plafe-bande par un long detour, puis arrive enfin a son but, c'est-a-dire en face de 1'endroit ou la terre etait fraichement remuee, il s'arreta d'un air indifferent, regarda de tous cotes, et croyant qu'il etait 30 bien seul, il se precipita sur la plate-bande, enfonca ses deux mains dans la terre molle, en enleva une portion 142 . LA TULIPE NOIRE f qu'il brisa doucement entre ses mains pour voir si le caieu s'y trouvait, recommenca trois fois le meme manege, et chaque fois avec une action plus ardente, jusqu'a ce qu'enfin, commencant a comprendre qu'il pouvait etre dupe S de quelque supercherie, il calma 1 1'agitation qui le devorait, prit le rateau, egalisa le terrain pour le laisser a son depart dans le meme etat ou il se trouvait avant qu'il ne 1'eut fouille, et tout honteux, tout penaud, il reprit le chemin de la porte affectant 1'air innocent d'un promeneur ordinaire. 10 Oh ! le miserable, murmura Cornelius essuyant les gouttes de sueur qui ruisselaient sur son front. Oh ! le miserable, je 1'avais devine. 2 Mais, le caieu, Rosa, qu'en avez-vous fait ? Helas ! il est deja un peu tard pour le planter. 15 Le caieu, il est depuis six jours en terre. Ou cela ? comment cela ? s'ecria Cornelius. Oh ! mon Dieu, quelle imprudence ! Ou est-il ? Dans quelle terre est-il ? Est-il bien ou mal expose ? Ne risque-t-il pas de nous etre vole par cet affreux Jacob ? 20 II ne risque pas de nous etre vole, a moins que Jacob ne force la porte de ma chambre. Ah ! je respire. II est dans un bon pot de gres, juste de la largeur de la cruche ou vous aviez enterre le votre. II est dans 25 un terrain compose de trois quarts de terre ordinaire prise au meilleur endroit du jardin, et d'un quart de terre de rue. 3 Oh ! j'ai entendu dire si souvent a vous 4 et a cet infame Jacob, comme vous 1'appelez, dans quelle terre doit pousser la tulipe, que je sais cela comme le premier 30 jardiriier de Harlem ! Ah ! maintenant, reste Pexposition. 5 A quelle ex- position est-il, Rosa ? CE QUI S ETAIT PASSE PENDANT CES HUIT JOURS 143 Maintenant il a le soleil toute la journee, les jours ou il y a du soleil. Mais quand il sera sorti l de terre, quand le soleil sera plus chaud, je ferai comme vous faisiez ici, cher monsieur Cornelius. Je 1'exposerai sur ma fene- tre au levant de huit heures du matin a onze heures, et 5 sur ma fenetre du couchant depuis trois heures de 1'apres- midi jusqu'a cinq. Oh ! c'est cela, c'est cela ! s'ecria Cornelius, et vous etes un jardinier parfait, ma belle Rosa. Mais j'y pense, la culture de ma tulipe va vous prendre tout votre temps. 10 Oui, c'est vrai, dit Rosa; mais qu'importe, votre tulipe, et c'est ma fille. Je lui donne le temps que je donnerais a mon enfant, si j'etais mere. II n'y a qu'en devenant sa mere, ajouta Rosa en souriant, que je puis cesser de devenir sa rivale. 15 Bonne et chere Rosa ! murmura Cornelius. Ainsi, il y a deja six jours que le ca'ieu est en terre ? Six jours, oui, monsieur Cornelius, reprit la jeune fille. Et il ne parait pas encore ? 20 Non, mais je crois que demain il paraitra. Demain soit, 2 vous me donnerez de ses nouvelles en me donnant des votres, n'est-ce pas, Rosa ? Je m'in- quiete bien de la fille, comme vous disiez tout a 1'heure; mais je m'interesse bien autrement a la mere. 25 Demain, dit Rosa en regardant Cornelius de cote, demain, je ne sais si je pourrai. Eh ! mon Dieu ! dit Cornelius, pourquoi done ne pourriez-vous pas demain ? Monsieur Cornelius, j'ai mille choses a faire. 30 - Tandis que moi je n'en ai qu'une, murmura Cornelius. Oui, repondit Rosa, a aimer votre tulipe. 144 .LA TULIPE NOIRE A vous aimer, Rosa. Comme par megarde, elle approcha sa joue fraiche, si proche du grillage que Cornelius put la toucher de ses levres. 5 Rosa poussa un petit cri plein d'amour et disparut. XXI LE SECOND CAIEU La nuit fut bonne et la journee du lendemain meilleure encore. Midi sonna et 1'on entendit dans 1'escalier, non seule- ment le pas de Gryphus, mais les pas de trois ou quatre 10 soldats montant avec lui. La porte s'ouvrit, Gryphus entra, iritroduisit les hommes et referma la porte derriere eux. La ! maintenant, cherchons. On chercha dans les poches de Cornelius, entre sa 15 veste et son gilet, entre son gilet et sa chemise, entre sa chemise et sa chair; on ne trouva rien. On chercha dans les draps, dans les matelas, dans la paillasse du lit, on ne trouva rien. Ce fut alors que Cornelius se felicita de ne point avoir 20 accepte le troisieme caieu. Rosa vint a neuf heures. De quoi parlerent les deux jeunes gens ce soir-la ? Us parlerent de tout, excepte de la tulipe noire. Puis a dix heures, comme d'habitude, ils se quitterent. 25 Cornelius etait heureux, aussi completement heureux que peut 1'etre un tulipier a qui on n'a point parle de sa tulipe. LE SECOND CAIEU 145 II trouvait Rosa jolie comme tous les amours de la terre; il la trouvait bonne, gracieuse, charmante. Mais pourquoi Rosa defendait-elle qu'on parlat tulipe ? C'etait un grand defaut qu'avait la l Rosa. Cornelius se dit, en soupirant, que la femme n'etait 2 5 point parfaite. Ah ! si Rosa cut parle tulipe, Cornelius cut prefere Rosa a la reine Semiramis, a la reine Cleopatre, a la reine Eli- sabeth, a la reine Anne d'Autriche, c'est-a-dire aux plus grandes ou aux plus belles reines du monde. 10 Mais Rosa avait defendu sous peine de ne plus revenir, Rosa avait defendu qu'avant trois jours on causat tulipe. C'etait soixante-douze heures donnees a 1'amant, c'est vrai; mais c'etait soixante-douze heures retranchees a 15 1'horticulteur. II est vrai que sur ces soixante-douze heures, trente-six etaient deja passees. Les trente-six autres passeraient bien vite, dix-huit a attendre, dix-huit au souvenir. 20 Rosa revint a la meme heure; Cornelius supporta heroiiquement sa penitence. Le lendemain soir, apres les premieres paroles echan- gees, 3 apres les premieres caresses faites, elle regarda Cornelius a travers le grillage, et dans la nuit, avec ce 25 regard qu'on sent quand on ne le voit pas: - Eh bien ! dit-elle, elle a leve ! 4 Elle a leve ! quoi ? qui ? demanda Cornelius n'osant croire que Rosa abregeat d'elle-meme la duree de son epreuve. 30 La tulipe, dit Rosa. Comment, s'ecria Cornelius, vous permettez done ? 146 LA TULIPE NOIRE Eh oui ! dit Roa du ton d'une mere tendre qui permet une joie a son enfant. Leve bien droit ? 1 demanda-t-il. - Droit comme un fuseau de Frise, dit Rosa. 5 Et elle est bien haute ? Haute de deux pouces au moins. Oh ! Rosa, ayez-en bien soin, et vous verrez comme elle va grandir vite. Je ne la perds pas de vue. De mon lit je la vois; en 10 m'eveillant c'est le premier objet que je regarde, 2 en m'endormant le dernier objet que je perds de vue. Le jour je m'assieds et je travaille pres d'elle, car depuis qu'elle est 3 dans ma chambre je ne quitte 4 plus ma chambre. 15 Vous avez raisoh, Rosa, c'est votre dot, vous savez ? Oui, et grace a elle je pourrai epouser un jeune homme de vingt-six ou vingt-huit 5 ans que j'aimerai. - Taisez-vous, mechante. 20 Ce soir-la Cornelius fut le plus heureux des hommes. A partir de ce moment, chaque jour amena un progres dans la tulipe et dans 1'amour des deux jeunes gens. Une fois c'etait les feuilles qui s'etaient ouvertes, 1'autre fois c'etait la fleur elle-meme qui s'etait nouee. 25 A cette nouvelle la joie de Cornelius fut grande, et ses questions se succederent avec une rapidite qui temoi- gnait de leur importance. Nouee, s'ecria Cornelius, elle est nouee ! Elle est nouee, repeta Rosa. 30 Cornelius chancela de joie et fut force de se retenir au guichet. Ah mon Dieu ! exclama-t-il. LE SECOND CAIEU 147 Puis revenant a Rosa: L'ovale est-il regulier, le cylindre est-il plein, les pointes sont-elles bien vertes ? -L'ovale a pres d'un pouce et s'effile comme une aiguille, le cylindre gonfle ses flancs, les pointes sont 5 pretes a s'entr'ouvrir. Cette nuit-la Cornelius dormit peu, c'etait un moment supreme que celui ou les pointes s'entr'ouvriraient. Deux jours apres Rosa annoncait qu'elles etaient entr'ouvertes. 10 Entr'ouvertes, Rosa, s'ecria Cornelius, 1'involucrum est entr'ouvert ! mais alors on voit done, on peut done distinguer deja ? Et le prisonnier s'arreta haletant. Oui, repondit Rosa, oui 1'on peut distinguer un filet 15 de couleur differente, mince comme un cheveu. Et la couleur ? fit Cornelius en tremblant. Ah ! repondit Rosa, c'est bien fonce. - Brun ? Oh ! plus fonce. 20 - Plus fonce, bonne Rosa, plus fonce ! merci. Fonce comme 1'ebene, fonce comme . . . Fonce comme 1'encre avec laquelle je vous ai ecrit. Cornelius poussa un cri de joie folle. Puis s'arretant tout a coup: 25 Oh ! dit-il en joignant les mains, oh ! il n'y a pas d'ange qui puisse vous etre compare, Rosa. - Vraiment ! dit Rosa, souriant a cette exaltation. Rosa, vous avez tant travaille, Rosa, vous avez tant fait pour moi; Rosa, ma tulipe va fleurir, et ma tulipe 30 fleurira noire, Rosa, Rosa, vous etes ce que Dieu a cree de plus parfait sur la terre ! Mais, dites-moi, Rosa, 148 LA TULIPE NOIRE si la tulipe en est a ce point, dans deux ou trois jours au plus tard elle va fleurir. Demain ou apres-demain, oui. Oh ! et je ne la verrai pas, s'ecria Cornelius, en se 5 renversant en arriere, et je ne la baiserai pas comme une merveille de Dieu qu'on l doit adorer. Dame ! je la cueillerai si vous voulez, dit Rosa. Ah ! non ! non ! Sit6t qu'elle sera ouverte, mettez-la bien a 1'ombre, Rosa, et a 1'instant meme, a 1'instant, 10 envoyez a Harlem prevenir le president de la societe d'horticulture que la grande tulipe noire est fleurie. C'est loin, je le sais bien, Harlem, mais avec de 1'argent vous trouverez un messager. Avez-vous de 1'argent, Rosa ? Rosa sourit. 15 Oh oui ! dit-elle. Assez ? demanda Cornelius. J'ai trois cents florins. Qh ! si vous avez trois cents florins, ce n'est point un messager qu'il vous faut envoyer, 2 c'est vous-meme, 20 vous-meme, Rosa, qui devez aller a Harlem. Mais pendant ce temps, la fleur . . . Oh ! la fleur, vous 1'emporterez, vous comprenez bien qu'il ne faut pas vous separer d'elle un instant. Mais en ne me separant point d'elle, je me separe de 25 vous, monsieur Cornelius, dit Rosa attristee. Ah ! c'est vrai, ma douce, ma chere Rosa. Mon Dieu ! que les hommes sont mediants, que leur ai-je done fait et pourquoi m'ont-ils prive de la liberte ! Vous avez rai- son, Rosa, je ne pourrais vivre sans vous. Eh bien, vous 30 enverrez quelqu'un a Harlem, voila; ma f oi ! le miracle est assez grand pour que le president se derange; il viendra lui-mme a Lcevestein chercher la tulipe. EPANOUISSEMENT 149 Puis, s'arretant tout a coup et d'une voix tremblante: - Rosa ! murmura Cornelius, Rosa ! si elle allait ne pas l etre noire. - Dame ! vous le saurez demain ou apres-demain soir. Attendre jusqu'au soir, pour savoir cela, Rosa ! je 5 mourrai d'impatience. Ne pourrions-nous convenir d'un signal ? - Je ferai mieux. Que f erez-vous ? Si c'est la nuit qu'elle s'entr'ouvre, je viendrai, je 10 viendrai vous le dire moi-meme. Si c'est le jour, je passerai devant la porte et vous glisserai un billet, soit dessous 2 la porte, soit par le guichet, entre la premiere et la deuxieme inspection de mon pere. Oh ! Rosa, c'est cela ! un mot de vous m'annonc.ant 15 cette nouvelle, c'est-a-dire un double bonheur. - Voila dix heures, dit Rosa, il faut que je vous quitte. Oui ! oui ! dit Cornelius, oui ! allez, Rosa, allez ! Rosa se retira presque triste. Cornelius 1'avait presque renvoyee. 20 II est vrai que c'etait pour veiller sur la tulipe noire. XXII EPANOUISSEMENT La nuit s'ecoula bien douce mais en meme temps bien agitee pour Cornelius. A chaque instant il lui semblait que la douce voix de Rosa Pappelait; il s'eveillait en sur- saut, il allait a la porte, il approchait son visage du gui- 25 chet: le guichet etait solitaire, le corridor etait vide. Le jour vint sans nouvelles. La tulipe n'etait pas fleurie encore. 150 LA TULIPE NOIRE La journee passa comme la nuit. La nuit vint et avec la nuit Rosa joyeuse, Rosa legere comme un oiseau. Eh bien ? demanda Cornelius. 5 Eh bien ! tout va a merveille. Cette nuit sans faute votfe tulipe fleurira. Et fleurira noire ? Noire comme du jais. Sans une seule tache d'une autre couleur ? 10 Sans une seule tache. Bonte du del ! Rosa, j'ai passe la nuit a rever, a vous d'abord . . . Rosa fit un petit signe d'incredulite. Puis a ce que nous devions faire. 15 Eh bien ? Eh bien ! voila ce que j'ai decide. La tulipe fleurie, 1 quand il sera bien constate qu'elle est noire et parfaite- ment noire, il vous faut trouver un messager. Si ce n'est que cela, j'ai un messager tout trouve. 20 Un messager sur ? Un messager dont je reponds, un de mes amoureux. Ce n'est pas Jacob ? j'espere. Non, soyez tranquille. C'est le batelier de Lceves- tein, un garcon alerte, de 2 vingt-cinq a vingt-six ans. 25 - Diable ! Soyez tranquille, dit Rosa en riant, il n'a pas encore 1'age, puisque vous-meme vous avez fixe 1'age de vingt- six a vingt-huit ans. Enfin, vous croyez pouvoir compter sur ce jeune 30 homme ? Comme sur moi. Eh bien, Rosa, en 3 dix heures, ce garcon peut etre EPANOUISSEMENT 151 a Harlem, vous me donnerez un crayon et du papier, mieux encore serait une plume et de 1'encre, et j'ecrirai, ou phi tot vous ecrirez, vous; moi, pauvre prisonnier, peut- etre verrait-on, comme voit votre pere, une conspiration la-dessous. Vous ecrirez au president de la Societe d'hor- 5 ticulture, et, j'en suis certain, le president viendra. Mais s'il tarde ? Supposez qu'il tarde un jour, deux jours meme; la tulipe serait encore dans toute sa splendeur. La tulipe vue par le president, le proces-verb'al dresse par lui, tout 10 est dit, vous gardez un double du proces-verbal, Rosa, et vous lui confiez la tulipe. Oh ! surtout, Rosa, avant que ne la voie le president, 1 ne la laissez voir a personne. 2 La tulipe noire, bon Dieu ! si quelqu'un voyait la tulipe noire, on la volerait ! . . . 15 -Oh! Ne m'avez-vous pas dit vous-meme ce que vous craignez a 1'endroit de votre amoureux Jacob? On vole bien un florin, pourquoi n'en volerait-on pas cent mille ? - Je veillerai, allez, soyez tranquille. 20 Si pendant que vous etes ici elle allait s'ouvrir ? La capricieuse en est bien capable, dit Rosa. Si vous la trouviez ouverte en rentrant ? Eh bien ? Ah ! Rosa, du moment ou elle sera ouverte, rappe- 25 lez-vous qu'il n'y aura pas un moment a perdre pour prevenir le president. Je retourne aupres de la tulipe, monsieur van Baerle, et aussitot ouverte, 3 vous etes prevenu; aussitot vous prevenu, le messager part. 30 Rosa, Rosa, je ne sais plus a quelle merveille du ciel ou de la terre vous comparer. 152 LA TULIPE NOIRE Comparez-moi a la tulipe noire, monsieur Corne- lius, et je serai bien flattee, je vous jure; disons-nous done au revoir, monsieur Cornelius. Rosa s'enfuit. 5 Cornelius resta I'ame suspendue a ses levres, le visage colle au guichet. Cornelius etouffait de joie et de bonheur. II ouvrit sa fentre et contempla longtemps, avec un coeur gonfle de joie, 1'azur sans nuages du ciel, la lune qui argentait le 10 double fleuve, ruisselant par dela les collines. II se rem- plit les poumons d'air genereux et pur, 1'esprit de douces idees, 1'ame de reconnaissance et d'admiration religieuse. H regardait le ciel, il ecoutait la terre. En ce moment, une etoile s'enflamma au midi, traversa 15 tout 1'espace qui separait 1'horizon de la forteresse et vint s'abattre sur Lcewestein. Cornelius tressaillit. Ah ! dit-il, voila Dieu qui envoie une ame a ma fleur. 20 Et comme s'il cut devine juste, presque au meme mo- ment, le prisonnier entendit dans le corridor des pas legers, comme ceux d'une sylphide, le froissement d'une robe qui semblait un battement d'ailes et une voix bien connue qui disait: 25 Cornelius, mon ami, mon ami bien aime et bien heureux, venez, venez vite. Cornelius ne fit qu'un bond de la croisee au guichet; cette fois encore ses levres rencontrerent les levres mur- murantes de Rosa, qui lui dit dans un baiser: 30 Elle est ouverte, elle est noire, la voila. Comment, la voila ! s'ecria Cornelius detachant ses levres des levres de la jeune fille. EPANOUISSEMENT 153 Oui, oui, il faut bien risquer un petit danger pour dormer une grande joie, la voila, tenez. Et, d'une main, elle leva a la hauteur du guichet une petite lanterne sourde, qu'elle venait de faire lumineuse; tandis qu'a la meme hauteur, elle levait 1 de 1'autre la 5 miraculeuse tulipe. Cornelius jeta un cri et pensa 2 s'evanouir. Oh ! murmura-t-il, mon Dieu ! mon Dieu ! vous me recompensez de mon innocence et de ma captivite, puis- que vous avez fait pousser ces deux fleurs au guichet de 10 ma prison. Embrassez-la, dit Rosa, comme je 1'ai embrassee tout a 1'heure. La tulipe etait belle, splendide, magnifique, sa tige avait plus de dix-huit pouces de hauteur, elle s'elancait 15 du sein de quatre feuilles vertes, lisses, droites comme des fers de lance, sa fleur tout entiere etait noire et bril- lante comme du jais. - Rosa, dit Cornelius tout haletant, Rosa, plus un instant a perdre, il faut ecrire la lettre. 20 Elle est ecrite, mon bien aime Cornelius, dit Rosa. En verite ! - Pendant que la tulipe s'ouvrait, j'ecrivais, moi, car je ne voulais pas qu'un seul instant fut perdu. Voyez la , lettre, et dites-moi si vous la trouvez bien. 25 Cornelius prit la lettre et lut, sur une ecriture qui avait encore fait de grands progres depuis le petit mot qu'il avait recu de Rosa: Monsieur le president, La tulipe noire va s'ouvrir dans dix minutes peut- 30 etre. Aussitot ouverte, je vous enverrai un messager 154 LA TULIPE NOIRE pour vous prier de venir vous-meme en personne la cher- cher dans la forteresse de Loevestein. Je suis la fille du geolier Gryphus, presque aussi prisonniere que les prison- niers de mon pere. Je ne pourrai done vous porter cette 5 merveille. C'est pourquoi j'ose vous supplier de la venir prendre vous-meme. Mon desir est qu'elle s'appelle Rosa Barlaensis. Elle vient de s'ouvrir; elle est parfaitement noire . . . Venez, monsieur le president, venez. 10 J'ai 1'honneur d'etre votre humble servante. ROSA GRYPHUS. C'est cela, c'est cela, chere Rosa. Cette lettre est a merveille. Je ne 1'eusse l point ecrite avec cette sim- plicite. Au congres vous donnerez tous les renseignements 15 qui vous seront demandes. On saura comment la tulipe a etc creee, a combien de soins, de veilles, de craintes, elle a donne lieu ; mais, pour le moment, Rosa, pas un instant a perdre . . . Le messager ! le messager ! Comment s'appelle le president ? 20 Donnez, 2 que je mette 3 1'adresse. Oh ! il est bien connu. C'est mynheer van Herysen, 4 le bourgmestre de Harlem . . . Donnez, Rosa, donnez. Et d'une main tremblante, Cornelius ecrivit sur la lettre: 25 A mynheer Peters van Herysen, bourgmestre et pre- sident de la Societe horticole de Harlem. Et maintenant, allez, Rosa, allez, dit Cornelius; et mettons-nous sous la garde de Dieu, qui jusqu'ici nous a si bien gardes. LENVIEUX 155 XXIII L'ENVIEUX En effet, les pauvres jeunes gens avaient grand besoin d'etre gardes par la protection directe du Seigneur. Jamais ils n'avaient etc si pres du desespoir que dans ce moment meme ou ils croyaient etre certains de leur bonheur. 5 Nous ne douterons point de 1'intelligence de notre lecteur a ce point de douter qu'il n'ait reconnu dans Jacob notre ancien ami, ou plutot notre ancien ennemi, Isaac Boxtel. Le lecteur a done devine que Boxtel avait suivi du 10 .Buytenhoff a Lcevestein 1'objet de son amour et 1'objet de sa haine: La tulipe noire et Cornelius van Baerle. Ce que tout autre qu'un tulipier et qu'un tulipier envieux n'eut jamais pu decouvrir, c'est-a-dire 1'existence 15 des cai'eux et les ambitions du prisonnier, 1'envie 1'avait fait, sinon decouvrir, du moins deviner a Boxtel. Nous 1'avons vu, plus heureux sous le nom de Jacob que sous le nom d'Isaac, faire amide avec Gryphus, dont il arrosa la reconnaissance et 1'hospitalite pendant quel- 20 ques mois, avec le meilleur genievre 1 que Ton cut jamais fabrique du Texel a Anvers. II endormit ses defiances; car, nous 1'avons vu, le vieux Gryphus etait defiant; il endormit ses defiances, disons- nous, en le flattant d'une alliance avec Rosa. 25 II caressa en outre ses instincts de geolier, apres avoir flatte son orgueil de pere. II caressa ses instincts de geo- lier en lui peignant sous les plus sombres couleurs le 156 LA TULIPE NOIRE savant prisonnier que Gryphus tenait sous ses verroux, et qui, au dire du faux Jacob, avait passe un pacte avec Satan pour nuire a Son Altesse le prince d'Orange. II avait d'abord aussi bien reussi pres de Rosa, non pas 5 en lui inspirant des sentiments sympathiques, Rosa avait toujours fort peu aime mynheer Jacob, mais en lui par- lant mariage et passion folle, il avait d'abord eteint tous les soupcons qu'elle cut pu avoir. Nous avons vu comment son imprudence a suivre Rosa 10 dans l le jardin 1'avait denonce aux yeux de la jeune fille et comment les craintes instinctives de Cornelius avaient mis les deux jeunes gens en garde centre lui. Ce qui avait surtout inspire des inquietudes au prison- nier, notre lecteur doit se rappeler cela, c'est cette grande 15 colere dans laquelle Jacob etait entre centre Gryphus, a propos du ca'ieu ecrase. En ce moment, cette rage etait d'autant plus grande, que Boxtel soupconnait bien Cornelius d'avoir un second ca'ieu, mais n'en n'etait rien moins que sur. 20 Ce f ut alors qu'il epia Rosa et la suivit non seulement au 2 jardin, mais encore dans les corridors. Seulement, comme cette fois il la suivait dans la nuit et nu-pieds, il ne fut ni vu ni entendu. Excepte cette fois ou Rosa crut avoir vu passer quelque 25 chose comme une ombre dans 1'escalier. Mais il etait deja trop tard, Boxtel avait appris, de la bouche meme du prisonnier, 1'existence du second ca'ieu. t II vit Rosa transporter un grand pot de faience de la cuisine de son pere dans sa chambre. 30 II vit* Rosa laver, a grande eau, ses belles mains pleines de la terre qu'elle avait petrie pour preparer a la tulipe le meilleur lit possible. L'ENVIEUX 157 Enfin, il loua, dans un grenier, une petite chambre juste en face de la fenetre de Rosa; assez eloignee pour qu'on ne put pas le reconnaitre a 1'oeil nu, mais assez proche pour qu'a 1'aide de son telescope il put suivre tout ce qui se passait a Loevestein dans la chambre de la 5 jeune fille, comme il avait suivi a Dordrecht tout ce qui se passait dans le sechoir de Cornelius. II n'etait pas installe depuis trois jours dans son grenier, qu'il n'avait plus aucun doute, Des le matin au soleil levant, le pot de faience etait 10 sur la fenetre, et pareille a ces charmantes femmes de Mieris et de Metzu, Rosa apparaissait a cette fenetre encadree par les premiers rameaux verdissants de la vigne vierge et du chevre-feuille. Rosa regardait le pot de faience d'un ceil qui denoncait 15 a Boxtel la valeur reelle de 1'objet renferme dans le pot. Ce que renfermait le pot, c'etait done le deuxieme caieu, c'est-a-dire la supreme esperance du prisonnier. Quand la lance de la fleur sortit de terre, Boxtel fut convaincu tout a fait; elle n'etait pas haute d'un pouce 20 que, 1 grace a son telescope, 1'envieux n'avait plus de doutes. Cornelius possedait deux ca'ieux, et le second caieu etait confie a 1'amour et aux soins de Rosa. Car, on le pense bien, 2 1'amour des deux jeunes gens 25 n'avait point echappe a Boxtel. C'etait done ce second caieu qu'il fallait trouver moyen d'enlever aux soins de Rosa et a 1'amour de Cornelius. Seulement, ce n'etait pas chose facile. Rosa veillait sa tulipe comme une mere veillerait son 30 enfant; mieux que cela, comme une colombe couve ses ceufs. 158 LA TULIPE NOIRE Rosa ne quittait pas la chambre de la journee; l il y avait plus, 2 chose etrange, 3 Rosa ne quittait plus sa chambre le soir. Pendant sept jours Boxtel epia inutilement Rosa, Rosa 5 ne sortit point 4 de sa chambre. C'etait pendant les sept jours de brouille qui rendirent Cornelius si malheureux, en lui enlevant a la fois toute nouvelle de Rosa et de sa tulipe. Rosa allait-elle bouder eternellement Cornelius? Cela 10 ut rendu le vol bien autrement difficile que ne 1'avait cru d'abord mynheer Isaac. Nous disons le vol, car Isaac s'etait tout simplement arrete a ce projet de voler la tulipe. Mais, p^ur que Box- tel put voler la tulipe, il fallait que Rosa sortit de sa 15 chambre. Aussi, fut-ce avec une veritable joie que Jacob ou Isaac, comme on voudra, vit reprendre les rendez-vous accou- tumes du soir. II commenca par profiter de 1 'absence de Rosa pour 20 etudier sa porte. La porte fermait bien et a double tour, au moyen d'une serrure simple, mais dont Rosa seule avait la clef. Boxtel reunit toutes les clefs qu'il put trouver, et pen- dant que Rosa et Cornelius passaient au guichet une de 25 leurs heures fortunees, il les essaya toutes. Deux entrerent dans la serrure, une des deux fit le pre- mier tour et ne s'arreta qu'au second. II n'y avait done que peu de chose a faire a cette clef. Boxtel 1'enduisit d'une legere couche de cire et renou- 30 vela Pexperience. L'obstacle que la clef avait rencontre au second tour avait laisse son empreinte sur la cire. L'ENVIEUX 159 Boxtel n'eut qu'a suivre cette empreinte avec le mor- dant d'une lime a la lame etroite comme celle d'un couteau. Avec deux autres jours de travail, Boxtel mena sa clef a la perfection. 5 La porte de Rosa s'ouvrit sans bruit, sans efforts, et Boxtel se trouva dans la chambre de la jeune fille, seul a seul avec la tulipe. Ainsi tous les soirs, pendant cette douce heure que les jeunes gens passaient au guichet de la prison, Boxtel 10 entrait 1 dans la chambre de la jeune fille pour suivre les progres que faisait la tulipe noire dans sa floraison. Le soir ou nous sommes arrives, il allait en trer comme les autres soirs; mais, nous 1'avons vu, les jeunes gens n'avaient echange que quelques paroles, et Cornelius 15 avait renvoye Rosa pour veiller sur la tulipe. En voyant Rosa rentrer dans sa chambre, dix minutes apres en etre sortie, Boxtel comprit que la tulipe avait fleuri ou allait fleurir. C'etait done pendant cette nuit-la que la grande partie 20 allait se jouer; aussi Boxtel se presenta-t-il chez Gry- phus avec une provision de genievre double de coutume. C'est-a-dire avec une bouteille dans chaque poche. Gryphus gris, Boxtel etait maltre de la maison a peu pres. 25 A onze heures, Gryphus etait ivre mort. A deux heures du matin, Boxtel vit sortir Rosa de sa chambre, mais visiblement elle tenait dans ses bras un objet qu'elle por- tait avec precaution. Get objet, c'etait sans aucun doute la tulipe noire qui 30 venait de fleurir. Mais qu'allait-elle en faire ? l6o LA TULIPE NOIRE Allait-elle a 1'instant meme partir pour Harlem avec elle? II n'etait pas possible qu'une jeune fille entreprit seule, de nuit, un pareil voyage. 5 Allait-elle seulement montrer la tulipe a Cornelius? C 'etait probable. II suivit Rosa pieds nus et sur la pointe du pied. II la vit s'approcher du guichet. II I'entendit appeler Cornelius. 10 A la lueur de la lanterne sourde, il vit la tulipe ouverte, noire comrne la nuit dans laquelle il etait cache. II entendit tout le projet arrete entre Cornelius et Rosa d'envoyer un messager a Harlem. II vit les levres des deux jeunes gens se toucher, puis il 15 entendit Cornelius renvoyer Rosa. II vit Rosa eteindre la lanterne sourde et reprendre le chemin de sa chambre. II la vit rentrer dans sa chambre. Puis il la vit, dix minutes apres, sortir de sa chambre et 20 en ferrrier avec soin la porte a double clef. Pourquoi fermait-elle cette porte avec tant de soin? C'est que derriere cette porte elle enfermait la tulipe noire. Boxtel, qui voyait tout cela cache sur le palier de 25 1'etage superieur a la chambre de Rosa, descendit une marche de son etage a lui, lorsque Rosa descendait * une marche du sien. De sorte que, lorsque Rosa touchait la derniere marche de 1'escalier, de son pied leger, Boxtel, d'une main plus 30 legere encore, touchait la serrure de la chambre de Rosa avec sa main. Et dans cette main, on doit le comprendre, etait la OU LA TULIPE NOIRE CHANGE DE MAiTRE l6l fausse clef 1 qui ouvrait la porte de Rosa ni plus ni moins facilement que la vraie. Voila pourquoi nous avons dit au commencement de ce chapitre que les pauvres jeunes gens avaient bien bespin d'etre gardes par la protection directe du 5 Seigneur. XXIV OU LA TULIPE NOIRE CHANGE DE MAlTRE Cornelius etait reste a 1'endroit ou 1'avait laisse Rosa, cherchant presque inutilement en lui la force de porter le double fardeau de son bonheur. Une demi-heure s'ecoula. 10 Deja les premiers rayons du jour entraient," bleuatres et frais, a travers les barreaux de la fenetre dans la pri- son de Cornelius, lorsqu'il tressaillit tout a coup a des pas qui montaient 1'escalier et a des cris qui se rappro- chaient de lui. 15 Presqu'au meme moment, son visage se trouva en face du visage pale et decompose de Rosa. II recula palissant lui-meme d'effroi. , Cornelius ! Cornelius ! s'ecria celle-ci haletante. Quoi done ? mon Dieu ! demanda le prisonnier. 20 Cornelius ! la tulipe . . . - Eh bien ? Comment vous dire cela ? - Dites, dites, Rosa. On nous 1'a prise, on nous 1'a voice. 25 On nous 1'a prise, on nous 1'a voice ! s'ecria Cornelius. Oui, dit Rosa en s'appuyant contre la porte pour ne pas tomber. Oui, prise, voice. 1 62 LA TULIPE NOIRE Et, malgre elle, les jambes lui manquant, elle glissa et tomba sur ses genoux. Mais comment cela ? demanda Cornelius. Dites-moi, expliquez-moi . . . 5 Oh ! il n'y a pas de ma faute, mon ami. Pauvre Rosa ! elle n'osait plus dire: Mon bien aime. - Vous 1'avez laissee seule ! dit Cornelius avec un accent lamentable. Un seul instant, pour aller prevenir notre messager 10 qui demeure a cinquante pas a peine, sur le bord du Wahal. Et pendant ce temps, malgre mes recommandations, vous avez laisse la clef a la porte, malheureuse enfant ! Non, non, non, et voila ce qui me passe, la clef ne 15 m'a point quittee, je 1'ai constamment tenue dans ma main, la serrant comme si j'eusse l euipeur qu'elle ne m'echappat. Mais alors, comment cela se fait-il ? Le sais-je, moi-meme ? j'avais donne la lettre a mon 23 messager; mon messager etait parti devant moi; 2 je reatre, la porte etait fermee, chaque chose etait a sa place dans ma chambre, excepte la tulipe, qui avait disparu. II faut que quelqu'un se soit procure une clef de ma chambre, ou en ait fait faire une fausse. 3 25 Elle suffoqua, les larmes lui coupaient la parole. Cornelius, immobile, les traits alteres, ecoutait presque sans comprendre, murmurant seulement: - Voice, voice, voice ! je suis perdu. Oh ! monsieur Cornelius, grace ! grace ! criait Rosa r 30 j'en mourrai. A cette menace de Rosa, Cornelius saisit les grilles du guichet, et les etreignant avec fureur: OU LA TULIPE NOIRE CHANGE DE MAITRE 163 Rosa, s'ecria-t-il, on nous a voles, c'est vrai, mais faut-il nous laisser abattre pour cela ? Non, le malheur est grand, mais reparable peut-etre, Rosa; nous con- naissons le voleur. - Helas ! comment voulez-vous que je vous disc 5 positivement ? Oh ! je vous le dis, moi, c'est cet infame Jacob. Le laisserons-nous porter a Harlem le fruit de nos travaux, le fruit de nos veilles, 1'enfant de notre amour ? Rosa, il faut le poursuivre, il faut le rejoindre. 10 Mais comment faire tout cela, mon ami, sans decou- vrir a mon pere que nous etions d'intelligence ? Comment moi, une femme si peu libre, si peu habile, comment par- viendrai-je a ce but, que vou3-meme n'atteindriez peut- etre pas ? 15 Rosa, Rosa, ouvrez-moi cette porte, et vous verrez si je ne 1'atteins pas. Vous verrez si je ne decouvre pas le voleur, vous verrez si je ne lui fais pas avouer son crime. Vous verrez si je ne lui fais pas crier grace ! Helas ! dit Rosa eclatant en sanglots, puis-je vous 20 ouvrir ? Ai-je les clefs sur moi ? Si je les avais, ne seriez- vous pas libre depuis longtemps ? -Votre pere les a, votre infame pere, le bourreau qui m'a deja ecrase le premier ca'ieu de ma tulipe. Oh le miserable, le miserable ! il est complice de Jacob. 25 Plus bas, plus bas, au nom du ciel. Oh ! si vous ne m'ouvrez pas, Rosa, s'ecria Corne- lius au paroxysme de la rage, j'enfonce l ce grillage et je massacre tout ce que je trouve dans la prison. Mon ami, par pitie ! 30 Je vous dis, Rosa, que je vais demolir le cachot pierre a pierre. 164 LA TULIPE NOIRE Et 1'infortune, de ses deux mains, dont la colere decu- plait les forces, ebranlait la porte a grand bruit, 1 peu soucieux des eclats de sa voix qui s'en allait tonner au fond de la spirale sonore de Pescalier. 5 Rosa, epouvantee, essayait bien inutilement de calmer cette furieuse tempete. - Je vous dis que je tuerai 1'infame Gryphus, hurlait van B aerie; je vous dis que je ver serai son sang, comme il a verse celui de ma tulipe noire. 10 Le malheureux commencait a devenir fou. Eh bien, oui, disait Rosa palpitante, oui, oui, mais calmez-vous, oui, je lui prendrai ses clefs, oui je vous ouvrirai, oui, mais calmez-vous, mon Cornelius. Elle n'acheva point, un hurlement pousse devant 2 elle 15 interrompit sa phrase. Mon pere ! s'ecria Rosa. Gryphus ! rugit van Baerle, ah ! scelerat ! Le vieux Gryphus, au milieu de tout ce bruit, etait monte sans que 1'on put 1'entendre. 20 II saisit rudement sa fille par le poignet. Ah ! vous me prendrez mes clefs, dit-il d'une voix etouffee par la colere. Ah ! cet infame ! ce monstre ! ce conspirateur a pendre 3 est votre Cornelius. Ah ! 1'on a des connivences avec les prisonniers d'Etat. C'est bon. 4 25 Rosa frappa dans ses deux mains avec desespoir. Oh! continua Gryphus passant de 1'accent fievreux de la colere a la froide ironie du vainqueur, ah ! monsieur Piunocent tulipier, ah ! monsieur le doux savant, ah ! vous me massacrerez, ah ! vous boirez mon sang ! Tres bien ! 30 rien que cela! Et de complicite avec ma fille! mais je suis done dans un antre de brigands, je suis done dans une caverne de voleurs ! Ah ! monsieur le gouverneur saura 5 OU LA TULIPE NOIRE CHANGE DE MAlxRE 165 tout ce matin, et S. A. 1 le stathouder saura tout demain. Nous connaissons la loi: Quiconque se rebellera dans la prison, article 6. Nous aliens vous donner une seconde edition du Buytenhoff, monsieur le savant, et la bonne edition 2 celle-la. Oui, oui, rongez vos poings comme un 5 ours en cage, et vous, la belle, mangez des yeux votre Cornelius. Je vous avertis, mes agneaux, que vous n'aurez plus cette felicite de conspirer ensemble. Ca, qu'on des- cende, fille denaturee. Et vous, monsieur le savant, au revoir; soyez tranquille, au revoir ! 10 Rosa, folle de terreur et de desespoir, envoya un baiser a son ami; puis, sans doute illuminee d'une pensee sou- dame, elle se lanca dans 1'escalier en disant: - Tout n'est pas perdu encore, compte sur moi, mon Cornelius. 15 Son pere la suivit en hurlant. Quant au pauvre tulipier, il lacha peu a peu les grilles que retenaient ses doigts convulsifs; sa tete s'alourdit, ses yeux oscillerent dans leurs orbites, et il tomba lourde- ment sur le carreau de sa chambre en murmurant: 20 - Voice ! on me 1'a volee ! Pendant ce temps, Boxtel sorti 3 du chateau par la porte qu'avait ouverte Rosa elle-meme, Boxtel, la tulipe noire enveloppee dans un large manteau, Boxtel s'etait jete dans une carriole qui 1'attendait a Gorcum et dis- 25 paraissait, sans avoir, on le pense bien, averti 1'ami 4 Gryphus de son depart precipite. II marchait doucement, on ne fait pas impunement courir la poste a une tulipe noire. 5 Mais Boxtel, craignant de ne pas arriver assez tot, fit 30 fabriquer a Delft une boite garnie tout autour de belle mousse fraiche, dans laquelle il encaissa sa tulipe; la 1 66 LA TULIPE NOIRE fleur s'y trouvait si mollement accoudee de tous les cotes avec de Pair par en haut, que la carriole put prendre le galop sans prejudice possible. II arriva le lendemain matin a Harlem, harasse mais 5 triomphant, changea sa tulipe de pot, afin de faire dispa- raitre toute trace de vol, brisa le pot de faience dont il jeta les tessons dans un canal, ecrivit au president de la societe horticole une lettre dans laquelle il lui annoncait qu'il venait d'arriver a Harlem avec une tulipe parfaite- 10 ment noire, s'installa dans une bonne hotellerie avec sa fleur intacte. Et la attendit. 1 XXV LE PRESIDENT VAN SYSTENS Rosa, en quittant Cornelius, avait pris son parti. C'etait de lui rendre la tulipe que venait de lui 2 voler 15 Jacob, ou de ne jamais le revoir. La jeune fille rentra chez elle, jeta un dernier regard dans sa chambre, pour voir si elle ne s'etait pas trompee, fit un petit paquet des hardes qui lui etaient necessaires, prit ses trois cents florins d'epargne, c'est-a-dire toute sa 20 fortune, fouilla sous ses dentelles ou etait enfoui le troisieme ca'ieu, le cacha precieusement dans sa poi trine, ferma sa porte a double tour pour retarder de tout le temps qu'il faudrait pour 1'ouvrir le moment ou sa fuite serait connue, descendit 1'escalier, sortit de la prison par la porte qui une 25 heure auparavant avait donne passage a Boxtel, se rendit chez un loueur de chevaux et demanda a louer une carriole. Le loueur de chevaux n'avait qu'une carriole, c'etait justement celle que Boxtel lui avait louee depuis la veille et avec laquelle il courait sur la route de Delft. BOXTEL EMPORTE LA TULIPE NOIRE LE PRESIDENT VAN SYSTENS 167 Nous disons sur la route de Delft, car il fallait faire un enorme detour pour aller de Loevestein a Harlem; a vol d'oiseau la distance n'eut pas ete de moitie. Force fut done a Rosa de prendre un cheval, qui lui fut confie facilement: le loueur de chevaux connaissant 5 Rosa pour la fille du concierge de la forteresse. Rosa avait un espoir, c'etait de rejoindre son messager, bon et brave garcon qu'elle emmenerait avec elle et qui lui servirait a la fois de guide et de soutien. En effet, elle n'avait point fait une lieue qu'elle 1'apercut 10 allongeant le pas sur 1'un des bas cotes l d'une charmante route qui cotoyait la riviere. Elle mit son cheval au trot et le rejoignit. [Ce ne fut qu'a 1'heure du diner, c'est-a-dire a midi, que Gryphus pensa a sa fille. II la fit appeler par un de 15 ses porte-clefs; puis, il resolut de la chercher et de 1'appeler lui-meme .] II commenca par aller droit a sa chambre; mais il cut beau frapper, Rosa ne repondit point. On fit venir le serrurier de la forteresse; le serrurier 20 ouvrit la porte, mais Gryphus ne trouva pas plus Rosa que Rosa n'avait trouve la tulipe. Rosa, en ce moment, venait d'entrer a Rotterdam. Gryphus remonta furieux chez van Baerle, 1'injuria, le menaca. Cornelius, sans meme ecouter ce que disait le 25 geolier, se laissa maltraiter, injurier, menacer. Apres avoir cherche Rosa de tous les cotes, Gryphus chercha Jacob, et comme il ne le trouva pas plus qu'il n.' avait retrouve 2 sa fille, soupconna des ce moment Jacob de 1'avoir enlevee. 30 Cependant, la jeune fille, apres avoir fait une halte de deux heures a Rotterdam, s'etait remise en route. Le 1 68 LA TULIPE NOIRE soir meme elle couchait a Delft, et le lendemain elle arrivait a Harlem, quatre heures apres que Boxtel y etait l arrive lui-meme. Rosa se fit conduire tout d'abord chez le president de 5 la Societe horticole, maitre van Systens. Le president redigeait un rapport au cornite de la societe. Ce rapport etait sur grand papier et de la plus belle ecriture du president. , 10 Rosa se fit annoncer sous son simple nom de Rosa Gryphus, mais ce nom, si sonore qu'il Jut, etait inconnu du president, car Rosa fut refusee. Mais Rosa ne se rebuta point. 'Annoncez a M. le president, dit-elle, que je viens 15 lui parler pour la tulipe noire. Grace a ces mots, elle penetra jusque dans le bureau du president van Systens, qu'elle trouva galamment en chemin pour venir a sa rencontre. C'etait un bon petit homme au corps grele, represen- 20 tant assez exactement la tige d'une fleur, dont la tete for- mait le calice, deux bras vagues et pendants simulaient la double feuille oblongue de la tulipe, un certain balance- ment qui lui etait habituel completait sa ressemblance avec cette fleur lorsqu'elle s'incline sous le souffle du 25 vent. Nous avons dit qu'il s'appelait M. van Systens. 2 Mademoiselle, s'ecria-t-il, vous venez, dites-vous, de la part de la tulipe noire ? Pour M. le president de la Societe horticole, la Tidipa 30 nigra etait une puissance de premier ordre, qui pouvait bien, en sa qualite de reine des tulipes, envoyer des ambassadeurs. LE PRESIDENT VAN SYSTENS 169 Oui, monsieur, repondit Rosa, je viens du moins pour vous parler d'elle. Elle se porte bien? fit van Systens avec un sourire de tendre veneration. Helas ! monsieur, je ne sais, dit Rosa. 5 Comment ! lui serait-il l done arrive quelque malheur ? -Un bien grand; oui, monsieur, non pas a elle, mais a moi. Lequel ? On me 1'a voice. 10 On vous a vole a tulipe noire ? Oui, monsieur. Savez-vous qui ? Oh ! je m en doute, mais je n'ose encore accuser. Mais la chose sera facile a verifier. 15 Comment cela ? Depuis qu'on vous 1'a volee, le voleur ne saurait etre loin. Pourquoi ne peut-il etre loin ? - Mais parce que je 1'ai vue il n'y a pas deux heures. 20 -Vous avez vu la tulipe noire? s'ecria Rosa en se precipitant vers M. van Systens. Comme je vous vois, mademoiselle. Mais ou cela ? Chez votre maitre, apparemment. 25 Chez mon maitre ? Oui. N'etes-vous pas au service de M. Isaac Boxtel ? -Moi? Sans doute, vous. Mais pour qui done me prenez-vous, monsieur ? 30 Mais,, pour qui me prenez-vous, vous-meme ? Monsieur, je vous prends, je 1'espere, pour ce que 1 70 LA TULIPE NOTRE vous etes, c'est-a-dire pour 1'honorable M. van Systens, bourgmestre de Harlem et president de la Societe horticole. Et vous venez me dire ? S - Je viens vous dire, monsieur, que Ton m'a vole ma tulipe. - Votre tulipe alors est celle de M. Boxtel. Alors, vous vous expliquez mal, mon enfant; ce n'est pas a vous, mais a M. Boxtel qu'on a vole la tulipe. 10 - Je vous repete, monsieur, que je ne sais pas ce que c'est que M. Boxtel et que voila la premiere fois que j'entends prononcer ce nom. \ -Vous ne savez pas ce que c'est que M. Boxtel, et vous aviez aussi une tulipe noire? 15 Mais, il y en a done une autre? demanda Rosa, toute frissonnante. - II y a celle de M. Boxtel, oui. Comment est-elle ? Noire, pardieu. 20 Sans tache ? Sans une seule tache, sans le moindre point. - Et vous avez cette tulipe, elle est deposee ici ? Non, mais elle y sera deposee, car, je dois en faire 1'exhibition au comite avant que le prix ne soit decerne. 25 Monsieur, s'ecria Rosa, ce Boxtel, cet Isaac Boxtel, qui se dit proprietaire de la tulipe noire . . . Et qui 1'est l en effet. Monsieur, n'est-ce point un homme maigre ? -Oui. 30 Chauve ? -Oui. Ayant 1'ceil hagard ? LE PRESIDENT VAN SYSTENS 171 - Je crois que oui. Inquiet, voute, jambes torses ? En verite, vous faites le portrait, trait pour trait, de M. Boxtel. Monsieur, la tulipe est-elle dans un pot de faience 5 bleue et blanche a fleurs jaunatres qui representent une corbeille sur trois faces du pot. Ah ! quant a cela, j'en suis moins sur, j'ai plus regarde rhomme que le pot. Monsieur, c'est ma tulipe, c'est celle qui m'a ete 10 voice; monsieur, c'est mon bien; monsieur, je viens le reclamer ici devant vous, a vous. Oh ! oh ! fit M. van Systens en regardant Rosa. Qiioi ! vous venez reclamer ici la tulipe de M. Boxtel ? Tudieu ! vous etes une hardie commere. 15 Monsieur, dit Rosa un peu troublee de cette apos- trophe, je ne dis pas que je vienne reclamer la tulipe de M. Boxtel, je dis que je viens reclamer la mienne. La votre ? Oui; celle que j'ai plan tee, elevee moi-meme. 20 Eh bien, allez trouver M. Boxtel a I'hotellerie du Cygne-Blanc, vous vous arrangerez avec lui; quant a moi, comme le proces me parait aussi difficile a juger que celui qui fut porte devant le feu roi Salomon, et que je n'ai pas la prevention d'avoir sa sagesse, je me contenterai 25 de faire mon rapport, de constater 1'existence de la tulipe noire et d'ordonnancer les cent mille florins a son inven- teur. Adieu, mon enfant. Oh ! monsieur ! monsieur ! insista Rosa. Seulement, mon enfant, continua van Systens, 30 comme vous etes jolie, comme vous etes jeune, comme vous n'etes pas encore tout a fait pervertie, recevez mon 172 LA TULIPE NOIRE conseil: Soyez prudente en cette affaire, car nous avons un tribunal et une prison a Harlem; de plus, nous som- mes extremement chatouilleux sur 1'honneur des tulipes. Allez, mon enfant, allez. M. Isaac Boxtel, hotel du S Cygne-Blanc. Et M. van Systens, reprenant sa belle plume, continua son rapport interrompu. XXVI UN MEMBRE DE LA SOCIETE HORTICOLE Rosa, eperdue, presque folle de joie et de crainte, a 1'idee que la tulipe noire etait retrouvee, prit le chemin 10 de 1'hotellerie du Cygne-Blanc, suivie toujours de son batelier, robuste enfant de la Frise, capable de devorer a lui seul dix Boxtel. Pendant la route, le batelier avait ete mis au courant, il ne reculait pas devant la lutte, au cas oil une lutte 15 s'engagerait; seulement, ce cas echeant, 1 il avait ordrc de menager la tulipe. Mais arrivee dans le Grote-Markt, Rosa s'arreta tout a coup, une pensee subite venait de la saisir. Mon Dieu ! murmura-t-elle, j'ai fait une faute 20 enorme, j'ai perdu peut-etre et Cornelius et la tulipe et moi ! 2 J'ai donne 1'eveil, j'ai donne des soupcons. Je ne suis qu'une femme, ces hommes peuvent se liguer centre moi, et alors je suis perdue. 25 Oh ! moi perdue, ce ne serait rien, mais Cornelius, mais la tulipe ! Elle se recueillit un moment. Si je vais chez ce Boxtel et que 3 je ne le connaisse UN MEMBRE DE LA SOCIETE HORTICOLE 173 pas, si ce Boxtel n'est pas mon Jacob, si c'est un autre amateur qui, lui aussi, a decouvert la tulipe noire, ou bien si ma tulipe a ete voice par un autre que celui que je soupfonne, ou a deja passe dans d'autres mains, si je ne reconnais pas l'homme, mais seulement ma tulipe, com- 5 ment prouver que la tulipe est a moi ? D'un autre cote, si je reconnais ce Boxtel pour le faux Jacob, qui sait ce qu'il adviendra ? Tandis que nous con- testerons ensemble, la tulipe mourra ! Oh ! inspirez-moi, sainte Vierge ! il s'agit du sort de ma vie, il s'agit du 10 pauvre prisonnier qui expire peut-etre en ce moment. Cette priere faite, Rosa attendit pieusement Pinspira- tion qu'elle demandait au ciel. Cependant 1 un grand bruit bourdonnait a 1'extremite du Grote-Markt. Les gens couraient, les portes s'ou- 15 vraient; Rosa, seule, etait insensible a tout ce mouvement de la population. II faut, murmura-t-elle, retourner chez le president. Retournons, dit le batelier. Us prirent la petite rue de la Faille qui les mena droit 20 au logis de M. van Systens, lequel, de sa plus belle ecri- ture et avec sa meilleure plume, continuait de travailler a son rapport. Partout, sur son passage, Rosa n'entendait parler que de la tulipe noire et du prix de cent mille florins; la nou- 25 velle courait deja la ville. Rosa n'eut pas peu de peine a penetrer de nouveau chez M. van Systens; mais quand il reconnut Rosa, dont il avait, dans son esprit, fait une folle, ou pis que cela, la colere le prit et il voulut la renvoyer. 30 Mais Rosa joignit les mains, et avec cet accent d'hon- nete verite qui penetre les cceurs: 174 LA TULIPE NOIRE Monsieur, dit-elle, au nom du ciel ! ne me repoussez pas; ecoutez, au contraire, ce que je vais vous dire, et si vous ne pouvez me faire rendre justice, du moins vous n'aurez pas a vous reprocher un jour, en face de Dieu, 5 d'avoir etc complice d'une mauvaise action. Van Systens trepignait d'impatience; c'etait la seconde fois que Rosa le derangeait l au milieu d'une redaction a laquelle il mettait son double amour-propre de bourgue- mestre 2 et de president de la Societe horticole. 10 Mais mon rapport ! s'ecria-t-il, mon rapport sur la tulipe noire ! Monsieur, continua Rosa avec la fermete de Tinno- cence et de la verite, monsieur, votre rapport sur la tulipe noire reposera, si vous ne m'ecoutez, sur des faits 15 criminels ou sur des faits faux. Je vous en supplie, mon- sieur, faites venir ici, devant vous et devant moi, ce mon- sieur Boxtel, que je soutiens, moi, etre M. Jacob, et je jure Dieu de lui laisser la propriete de sa tulipe si je ne reconnais pas et la tulipe et son proprietaire. 20 Pardieu ! la belle avance, dit van Systens. Que voulez-vous dire ? Je vous demande ce que cela prouvera quand vous les aurez reconnus? Mais enfin, dit Rosa desesperee, vous etes honnete 2j homme, monsieur. Eh bien, si 3 non seulement vous alliez donner le prix a un homme pour une ceuvre qu'il n'a pas faite, mais encore pour une ceuvre voice. Peut-etre 1'accent de Rosa avait-il amene une certaine conviction dans le cceur de van Systens et allait-il repon- 30 dre plus doucement a la pauvre fille, quand un grand bruit se fit entendre dans la rue. Des acclamations bruyantes ebranlerent la maison. UN MEMBRE DE LA SOCIETE HORTICOLE 175 M. van Systens preta 1'oreille a ces acclamations, qui pour Rosa n'avaient point etc un bruit d'abord, et main- tenant n'etaient qu'un bruit ordinaire. Qu'est-ce que cela? s'ecria le bourgmestre, qu'est- ce cela ? x serait-il possible et ai-je bien entendu ? 5 Et il se precipita vers son antichambre, sans plus se preoccuper de Rosa qu'il laissa dans son cabinet. A peine arrive dans son antichambre, M. van Systens poussa un grand cri en apercevant le spectacle de son escalier envahi jusqu'au vestibule. 10 Accompagne, ou plutot suivi de la hiultitude, un jeune homme vetu simplement d'un habit de petit velours violet brode d'argent montait avec une noble lenteur les degres de pierre, eclatants de blancheur et de proprete. Derriere lui marchaient deux omciers, 1'un de la ma- 15 rine, 1'autre de la cavalerie. Van Systens, se faisant faire place au milieu des domes- tiques effares, vint s'incliner, se prosterner presque devant le nouvel arrivant qui causait toute cette rumeur. Monseigneur, s'ecria-t-il, monseigneur, Votre Al- 20 tesse chez moi ! honneur eclatant a jamais pour mon humble maison. Cher monsieur van Systens, dit Guillaume d'Orange avec une serenite qui, chez lui, remplacait le sourire, je suis un vrai Hollandais, moi, j'aime 1'eau, la biere et les 25 fleurs, quelquefois meme ce fromage dont les Francais estiment le gout; parmi les fleurs, celles que je prefere sont naturellement les tulipes. J'ai oui dire 2 a Leyde que la ville de Harlem possedait enfin la tulipe noire, et, apres m'etre assure que la chose etait vraie, quoique 30 incroyable, je viens en demander des nouvelles au pre- sident de la Societe d' horticulture. 176 LA TULIPE NOIRE Oh ! monseigneur, monseigneur, dit van Systens ravi, quelle gloire pour la societe si ses travaux agreent a Votre Altesse. Vous avez la fleur ici? dit le prince qui sans doute 5 se repentait deja d'avoir trop parle. Helas, non, monseigneur, je ne 1'ai pas ici. - Et ou est-elle ? Chez son proprietaire. Quel est ce proprietaire ? 10 - Un brave tulipier de Dordrecht. -De Dordrecht? -Oui. Et qui s'appelle ? - Boxtel. 15 Illoge? Au Cygne-Blanc; je vais le mander, et si, en atten- dant, Votre Altesse veut me faire 1'honneur d'entrer au salon, il s'empressera, sachant que monseigneur est ici, d'apporter sa tulipe a monseigneur. 20 C'est bien, mandez-le. Oui, Votre Altesse. Seulement . . . -Quoi? Oh ! rien d'important, monseigneur. -Tout est important dans ce monde, monsieur van 25 Systens. Eh bien, monseigneur, une difficulte s'elevait. -Quelle? Cette tulipe est deja. revendiquee par des usurpateurs. II est vrai qu'elle vaut cent mille florins. 30 En verite ? Oui, monseigneur, par des usurpateurs, par des faussaires. UN MEMBRE DE LA SOCIETE HORTICOLE 177 C'est un crime cela, monsieur van Systens. Oui, Votre Altesse. Et, avez-vous les preuves de ce crime ? Non, monseigneur, la coupable . . . La coupable, monsieur ... 5 - Je veux dire, celle qui reclame la tulipe, monseigneur, est la, dans la chambre a cote. La ! Qu'en pensez-vous, monsieur van Systens ? - Je pense, monseigneur, que Fappat des cent mille florins 1'aura tentee. 1 10 - Et elle reclame la tulipe ? Oui, monseigneur. Et que dit-elle de son cote, comme preuve ? - J'allais 1'interroger quand Votre Altesse est entree. - Ecoutons-la, monsieur van Systens, ecoutons-la; je 15 suis le premier magistral du pays, j'entendrai la cause et ferai justice. , -Voila mon roi Salomon trouve, dit van Systens en s'inclinant et en montrant le chemin au prince. Celui-ci allait prendre le pas sur 2 son introducteur 3 20 quand, s'arretant soudain: Passez devant, dit-il, et appelez-moi Monsieur. 4 Us entrerent dans le cabinet. Rosa etait toujours a la meme place, appuyee a la fenetre et regardant par les vitres dans le jardin. 25 Ah! ah! une Frisonne, dit le prince en apercevant ie casque d'or et les jupes rouges de Rosa. Celle-ci se retourna au bruit, mais a peine vit-elle le prince, qui s'asseyait 5 dans Tangle le plus obscur de 1'appartement. 30 Toute son attention, on le 6 comprend, etait pour cet important personnage que Ton appelait van Systens, et 178 LA TULIPE NOIRE non pour cet humble etranger qui suivait le maitre de la maison. L 'humble etranger prit un livre dans l la bibliotheque et fit signe a van Systens de commencer 1'interrogatoire. 5 Van Systens, toujours a 1'invitation du jeune homme a 1'habit violet, s'assit a son tour, et tout heureux et tout fier de 1'importance qui lui etait accordee: Ma fille, dit-il, vous me promettez la verite, toute la verite sur cette tulipe ? 10 - Je vous la promets. - Eh bien, parlez done devant monsieur; monsieur est un des membres de la Societe horticole. Monsieur, dit Rosa, que vous dirai-je que je ne vous aie point 2 dit deja ? 15 Eh bien alors.? Alors, j'en reviendrai a la priere que je vous ai adressee. Laquelle ? De faire venir ici M. Boxtel avec sa tulipe; si je 20 ne la reconnais pas pour la mienne, je le dirai franche- ment; mais si je la reconnais, je la reclamerai. Dusse-je 3 aller devant Son Altesse le stathouder lui-meme, mes preuves a la main. - Vous avez done des preuves, la belle enfant ? 25 Dieu, qui sait mon bon droit, m'en fournira. Van Systens echangea un regard avec le prince, qui, depuis les premiers mots de Rosa, semblait essayer de rappeler ses souvenirs, comme si ce n'etait point la premiere fois que cette douce voix frappat ses 30 oreilles. Un officier partit pour aller chercher Boxtel. Van Systens continua 1'interrogatoire. UN MEMBRE DE LA SOCIETE HORTICOLE 179 - Et sur quoi, dit-il, basez-vous cette assertion, que vous etes proprietaire de la tulipe noire ? Mais sur une chose bien simple, c'est que c'est moi qui 1'ai plantee et cultivee dans ma propre chambre. 5 Dans votre chambre, et ou etait votre chambre ? A Lcevestein. - Vous etes de Lcevestein ? - Je suis la fille du geolier de la forteresse. Le prince fit un petit mouvement qui voulait dire: 10 Ah ! c'est cela, je me rappelle maintenant. Et tout en faisant semblant de lire, il regarda Rosa avec plus d'attention encore qu'auparavant. Et vous aimez les fleurs ? continua van Systens. Qui, monsieur. 15 Alors, vous etes une savante fleuriste ? Rosa hesita un instant, puis avec un accent tire du plus profond de son cceur: Messieurs, je parle a de"s gens d'honneur, dit-elle. L'accent etait si vrai, que van Systens et le prince 20 repondirent tous deux l en meme temps par un mouvement de tete afnrmatif. Eh bien, non ! ce n'est pas moi qui suis une savante fleuriste, non ! moi je ne suis qu'une pauvre fille du peuple, une pauvre paysanne de la Frise, qui, il y a trois mois 25 encore, ne savait ni lire ni ecrire. Non ! la tulipe noire n'a pas etc trouvee par moi-meme. Et par qui a-t-elle ete trouvee ? Par un pauvre prisonnier de Lcevestein. Par un prisonnier de Lcevestein ? dit le prince. 30 Au son de cette voix, ce fut Rosa qui tressaillit a son tour. l8o LA TULIPE NOIRE Par un prisonnier d'Etat alors, continua le prince, car a Lcevestein, il n'y a que des prisonniers d'Etat. Et il se remit a lire, ou du moins fit semblant de se remettre a lire. 5 Oui, murmura Rosa tremblante, oui, par un prison- nier d'Etat. Van Systens palit en entendant prononcer un pareil aveu devant un pareil temoin. Continuez, dit froidement Guillaume au president 10 de la Societe horticole. Oh ! monsieur, dit Rosa en s'adressant a celui qu'elle croyait son veritable juge, c'est que je vais m'accuser bien gravement. - En effet, dit van Systens, les prisonniers d'Etat 15 doivent etre au secret a Lcevestein. Helas ! monsieur. Et, d'apres ce que vous dites, il semblerait que vous auriez profite de votre position comme fille du geolier et que vous auriez communique avec lui pour cultiver des fleurs ? 20 Oui, monsieur, murmura Rosa eperdue; oui, je suis forcee de 1'avouer, je le voyais tous les jours. Malheureuse ! s'ecria M. van Systens. Le prince leva la tete en observant 1'effroi de Rosa et la paleur du president. 25 Cela, dit-il de sa voix nette et fermement accentuee, cela ne regarde pas les membres de la Societe horticole; ils ont a juger la tulipe noire et ne connaissent pas des delits politiques. Continuez, jeune fille, continuez. Rosa, rassuree par cette espece d'encouragement que 30 lui avait donne 1'inconnu, raconta tout ce qui s'etait passe depuis trois mois, 1 tout ce qu'elle avait fait, tout ce qu'elle avait souffert. LE TROISIEME CAIEU l8l Tout cela etait dit avec un accent de verite qui laissait le prince impassible, en apparence du moins, mais qui ne laissait pas de faire 1 son eflfet sur M. van Systens. Mais, dit le prince, il n'y a pas longtemps que vous connaissez ce prisonnier ? 5 Rosa ouvrit ses grands yeux et regarda 1'inconnu, qui s'enfonca dans 1'ombre, comme s'il eut voulu fuir ce regard. Pourquoi cela, monsieur ? demanda-t-elle. -Parce qu'il n'y a que quatre mois que le geolier Gryphus et sa fille sont a Lcevestein. 10 C'est vrai, monsieur. Et a moins que vous n'ayez sollicite le changement de votre pere pour suivre quelque prisonnier qui aurait ete transporte 2 de la Haye a Lcevestein . . . Monsieur ! fit Rosa en rougissant. 15 Achevez, dit Guillaume. Je 1'avoue, j'avais connu le prisonnier a la Haye. Heureux prisonnier ! dit en souriant Guillaume. En ce moment I'officier qui avait ete envoye pres de Boxtel rentra et annonca au prince que celui qu'il etait 20 alle querir 3 le suivait avec sa tulipe. XXVII LE TROISIEME CAIEU L'annonce du retour de Boxtel etait a peine faite, que Boxtel entra en personne dans le salon de M. van Sys- tens, suivi de deux hommes portant dans une caisse le precieux fardeau, qui fut depose sur une table. 25 Le prince, prevenu, quitta le cabinet, passa dans le salon, admira et se tut, et revint silencieusement prendre sa place dans Tangle obscur ou lui-meme avait place son fauteuil. 1 82 LA TULIPE NOIRE Rosa, palpitante, pale, pleine de terreur, attendait qu'on 1'invitat a aller voir a son tour. Elle entendit la voix de Boxtel. C'est lui! s'ecria-t-elle. 5 Le prince lui fit signe d'aller regarder dans le salon par la porte entr'ouverte. C'est ma tulipe, s'ecria Rosa, c'est elle, je la recon- nais. O mon pauvre Cornelius ! Et elle fondit en larmes. 10 Le prince se leva, alia jusqu'a la porte, ou il demeura un instant dans la lumiere. Les yeux de Rosa s'arreterent sur lui. Plus que jamais elle etait certaine que ce n'etait pas la premiere fois qu'elle voyait cet etranger. 15 Monsieur Boxtel, dit le prince, entrez done ici. Boxtel accourut avec empressement et se trouva face a face avec Guillaume d'Orange. Son Altesse ! s'ecria-t-il en reculant. Son Altesse ! repeta Rosa tout etourdie. 20 A cette exclamation partie x a sa gauche, Boxtel se re- tourna et apercut Rosa. A cette vue, tout le corps de 1'envieux frissonna comme au contact d'une pile de Volta. Ah ! murmura le prince se parlant a lui-me'me, il 25 est trouble. Mais Boxtel, par un puissant effort sur lui-meme, s'etait deja remis. Monsieur Boxtel, dit Guillaume, il parait que vous avez trouve le secret de la tulipe noire ? 30 Oui monseigneur, repondit Boxtel d'une voix ou percait un peu de trouble. II est vrai que ce trouble pouvait venir de 1'emo- LE TROISIEME CAIEU 183 tion que le tulipier avait eprouvee en reconnaissant Guillaume. Mais, reprit le prince, void une jeune fille qui pre- tend 1'avoir trouvee aussi. Boxtel sourit de dedain et haussa les epaules. 5 Guillaume suivait tous ses mouvements avec un inte- ret de curiosite remarquable. Ainsi, vous ne connaissez pas cette jeune fille ? dit le prince. Non, monseigneur. . 10 Et vous, jeune fille, connaissez-vous M. Boxtel ? Non, je ne connais pas M. Boxtel, mais je connais M. Jacob. Que voulez-vous dire ? - Je veux dire qu'a Lcevestein, celui qui se fait appeler 15 Isaac Boxtel se faisait appeler M. Jacob. Que dites-vous a cela, monsieur Boxtel ? - Je dis que cette jeune fille ment, monseigneur. - Vous niez avoir jamais etc a Lcevestein ? Boxtel hesita; 1'ceil fixe et imperieusement scrutateur, 1 20 le prince 1'empechait de mentir. - Je ne puis nier avoir etc a Lcevestein, monseigneur, mais je nie avoir vole la tulipe. - Vous me 1'avez voice, et dans ma chambre ! s'ecria Rosa indignee. 25 - Je le nie. Ecoutez, niez- vous m'avoir suivie dans le jardin, le jour ou je preparai la plate-bande ou je devais 1'enfouir ? Niez- vous m'avoir suivie dans le jardin le jour ou j'ai fait semblant de la planter ? Niez-vous ce soir-la vous 30 etre precipite, apres ma sortie, sur 1'endroit ou vous esperiez trouver le ca'ieu ? Niez-vous avoir fouille la terre 1 84 LA TULIPE NOIRE avec vos mains, mais inutilement, Dieu merci ! car ce n'etait qu'une ruse pour reconnaitre vos intentions? Dites, niez-vous tout cela ? Boxtel ne jugea point a propos de repondre a ces diver- 5 ses interrogations. Mais laissant la polemique entamee avec Rosa et se retournant vers le prince: II y a vingt ans, monseigneur, dit-il, que je cultive des tulipes a Dordrecht, j'ai meme acquis dans cet art une certaine reputation: une de mes hybrides porte au 10 catalogue un nom illustre. Je 1'ai dediee au roi de Portu- gal. Maintenant voila la verite. Cette jeune fille savait que j'avais trouve la tulipe noire, et de concert avec un certain amant qu'elle a dans la forteresse de Loevestein, cette jeune fille a forme le projet de me ruiner en s'appro- 15 priant le prix de cent mille florins que je gagnerai, j'espere, grace a votre justice. Oh ! s'ecria Rosa outree de colere. Silence ! dit le prince. Puis, se retournant vers Boxtel: 20 Et quel est, dit-il, ce prisonnier que vous dites etre l Tarnant de cette jeune fille ? Rosa faillit s'evanouir, car le prisonnier etait recom- mande par le prince comme un grand coupable. Rien ne pouvait etre plus agreable a Boxtel que cette 25 question. Quel est ce prisonnier ? repeta-t-il. -Oui. Ce prisonnier, monseigneur, est un homme dont le nom seul prouvera a Votre Altesse combien elle peut avoir 30 de foi en sa probite. Ce prisonnier est un criminel d'Etat, condamne une fois a mort. Et qui s'appelle ? LE TROISIEME CAIEU 185 Rosa cacha sa tete dans ses deux mains avec un mou- vement desespere. Qui s'appelle Cornelius van Baerle, dit Boxtel, et qui est le propre filleul de ce scelerat de Corneille de Witt. Le prince tressaillit. Son ceil calme jeta une flamme, et 5 le froid de la mort s'etendit de nouveau sur son visage immobile. II alia a Rosa et lui fit du doigt signe d'ecarter ses mains de son visage. Rosa obeit, comme cut fait sans voir une femme sou- 10 mise a un pouvoir magnetique. C'est done pour suivre cet homme que vous etes venue me demander a Leyde le changement de votre pere? Rosa baissa la tete et s'affaissa ecrasee en murmurant: 15 Oui, monseigneur. Poursuivez, dit le prince a Boxtel. -Je n'ai plus rien a dire, continua celui-ci, Votre Altesse sait tout. Maintenant, voici ce que je ne voulais pas dire, pour ne pas faire rougir cette fille de son ingrati- 20 tude. Je suis venu a Lcevestein parce que mes affaires m'y appelaient; j'y ai fait connaissance avec le vieux Gryphus, je suis devenu amoureux de sa fille, je 1'ai demandee en mariage, 1 et comme je n'etais pas riche, imprudent que j'etais, je lui ai confie mon esperance de 25 toucher cent mille florins; et pour justifier cette espe- rance, je lui ai montre la tulipe noire. Alors, comme son amant, a Dordrecht, pour faire prendre le change 2 sur les complots qu'il tramait, affectait de cultiver des tulipes, tous deux ont complete ma perte. 30 La veille de la floraison de la fleur, la tulipe a etc enle- vee de chez moi par cette jeune fille, portee dans sa cham- 1 86 LA TULIPE NOIRE bre, ou j'ai eu le bonheur de la reprendre au moment ou elle avait 1'audace d'expedier un messager pour annoncer a MM. les membres de la Societe d'horticulture qu'elle venait de trouver la grande tulipe noire. 5 Oh ! mon Dieu ! mon Dieu ! 1'infame ! gemit Rosa en larmes, en se jetant aux pieds du stathouder, qui, tout en la croyant coupable, prenait en pitie son horrible angoisse. - Vous avez mal agi, jeune fille, dit-il, et votre amant 10 sera puni pour vous avoir ainsi conseillee. Car vous etes si jeune et vous avez 1'air si honnete, que je veux croire que le mal vient de lui et non de vous. Monseigneur ! monseigneur ! s'ecria Rosa, Cornelius n'est pas coupable. 15 Guillaume fit un mouvement. - Pas coupable de vous avoir conseillee. C'est cela que 1 vous voulez dire, n'est-ce pas ? Je veux dire, monseigneur, que Cornelius n'est pas plus coupable du second crime qu'on lui impute qu'il ne 20 Test du premier. -Du premier, et savez-vous quel a etc ce premier crime ? Savez-vous de quoi il a ete accuse et convaincu ? D 'avoir, comme complice de Corneille de Witt, cache la correspondance du grand pensionnaire et du marquis de 25 Louvois. Eh bien ! monseigneur, il ignorait qu'il fut 2 deten- teur de cette correspondance; il 1'ignorait entierement. Non, non, monseigneur, je le repete, dusse-je encourir votre colere, Cornelius n'est pas plus coupable du premier 30 crime que du second, et du second que du premier. Oh ! si vous connaissiez mon Cornelius, monseigneur ! - Un de Witt ! s'ecria Boxtel. Eh ! monseigneur ne le LE TROISIEME CAIEU 187 connait que trop, puisqu'il lui a deja fait une fois grace de la vie. Silence, dit le prince. Toutes ces choses d'Etat, je 1'ai deja dit, ne sont point du ressort de la Societe horticole de Harlem. 5 Puis, froncant le sburcil: Quant a la tulipe, soyez tranquille, monsieur Boxtel, ajouta-t-il, justice sera faite. Boxtel salua, le cceur plein de joie, et recut les felicita- tions du president. 10 - Vous, jeune fille, continua Guillaume d'Orange, vous avez failli commettre un crime, je ne vous en punirai pas, mais le vrai coupable paiera pour vous deux. Un homme de son nom peut conspirer, trahir meme . . . mais il ne doit pas voler. 15 - Voler ! s'ecria Rosa, voler ! lui, Cornelius, oh ! mon- seigneur, prenez garde; mais il mourrait s'il entendait vos paroles, mais vos paroles le tueraient plus surement que n'eut fait la hache du bourreau sur le Buytenhoff. S'il y a eu un vol, monseigneur, je le jure, c'est cet homme qui 20 1'a commis. Prouvez-le, dit froidement Boxtel. Eh bien, oui. Avec 1'aide de Dieu je le prouverai, dit la Frisonne avec energie. Puis se retournant vers Boxtel: 25 La tulipe etait a vous ? Oui. Combien avait-elle de ca'ieux ? Boxtel hesita un instant, mais il comprit que la jeune fille ne ferait pas cette question si les deux ca'ieux connus 30 existaient seuls. Trois, dit-il. 1 88 LA TULIPE NOIRE Que sont devenus ces ca'ieux? demanda Rosa. Ce qu'ils sont devenus ? . . . Tun a avorte, Pautre a donne la tulipe noire . . . Et le troisieme ? 5 Le troisieme ? Le troisieme, ou est-il ? Le troisieme est chez moi, dit Boxtel tout trouble. Chez vous, ou cela, a Loevestein ou a Dordrecht ? A Dordrecht, dit Boxtel. 10 Vous mentez ! s'ecria Rosa. Monseigneur, ajouta- t-elle en se tournant vers le prince, la veritable histoire de ces trois ca'ieux, je vais vous la dire, moi. Le premier a ete ecrase par mon pere dans la chambre du prisonnier, et cet homme le sait bien, car il esperait s'en emparer, et quand 15 il vit cet espoir decu, il faillit se brouiller avec mon pere qui le lui enlevait. Le second, soigne par moi, a donne ,la tulipe noire, et le troisieme, le dernier, la jeune fille le tira de sa poitrine, le troisieme le voici dans le meme papier qui 1'enveloppait avec les deux autres quand, au moment 20 de monter sur 1'echafaud, Cornelius van Bae'rle me les donna tous trois.- 1 Tenez, monseigneur, tenez. Et Rosa, demaillottant le ca'ieu du papier' qui 1'en- veloppait, le tendit au prince, qui le prit de ses mains et rexamina. 25 Mais, monseigneur, cette jeune fille ne peut-elle pas 1'avoir vole comme la tulipe ? balbutia Boxtel effraye de 1'attention avec laquelle'le prince examinait le cai'eu et surtout de celle avec laquelle Rosa lisait quelques lignes tracees sur le papier reste entre ses mains. 30 Tout a coup, les yeux de la jeune fille s'enflammerent, elle relut haletante ce papier mysterieux, et poussant un cri en tendant le papier au prince: LE TROISIEME CAIEU 189 Oh ! lisez, monseigneur, dit-elle, au nom du ciel, lisez ! Guillaume passa le troisieme ca'ieu au president, prit le papier et lut. A peine Guillaume eut-il jete les yeux sur cette feuille qu'il chancela, sa main trembla comme si elle etait prete 5 a. laisser echapper le papier, ses yeux prirent une ef- frayante expression de douleur et de pitie. Cette feuille, que venait de lui remettre Rosa, etait la page de la bible que Corneille de Witt avait envoyee a Dordrecht, par Craeke, le messager de son frere Jean, 10 pour prier Cornelius de briiler la correspondance du grand pensionnaire avec Louvois. Cette priere, on se le rappelle, etait concue en ces termes: Cher filleul, 15 Brule le dep6t que je t'ai confie, brule-le sans le regarder, sans 1'ouvrir, afin qu'il demeure inconnu a toi-meme: les secrets du genre de celui qu'il contient tuent les depositaires. Brule-le, et tu auras sauve Jean et Corneille. 20 Adieu, et aime-moi. Corneille DE WITT. 20 aout 1672. Cette feuille etait a la fois la preuve de 1'innocence de van Baerle et son titre de propriete aux cai'eux de la tulipe. 25 Rosa et le stathouder echangerent un seul regard. Celui de Rosa voulait dire: Vous voyez bien ! Celui du stathouder signifiait: Silence et attends ! Le prince essuya une goutte de sueur froide qui venait de couler de son front sur sa joue. II plia lentement le 30 papier, laissant son regard plonger avec sa pensee dans 1 90 LA TULIPE NOIRE cet abime sans fond et sans ressource qu'on appelle le repentir et la honte du passe. Bientot relevant la tete avec effort: Allez, monsieur Boxtel, dit-il, justice sera faite, je 5 1'ai promis. Puis au president: -Vous, mon cher monsieur van Systens, ajouta-t-il, gardez ici cette jeune fille et la tulipe. Adieu. Tout le monde s'inclina, et le prince sortit courbe sous 10 1'immense bruit des acclamations populaires. Boxtel s'en retourna au Cygne-Blanc assez tourmente. Ce papier, que Guillaume avait recu des mains de Rosa, avait lu, plie et mis dans sa poche avec tant de soin, ce papier 1'inquietait. XXVIII LA CHANSON DES FLEURS 15 Pendant que s'accomplissaieni les evenements que nous venons de raconter, le malheureux van Baerle, oublie dans la chambre de la forteresse de Loevestein, souffrait de la part de Gryphus tout ce qu'un prisonnier peut souf- frir quand son geolier a pris le parti bien arrete de se 20 transformer en bourreau. Gryphus ne recevant aucune nouvelle de Rosa, aucune nouvelle de Jacob, Gryphus se persuada que tout ce qui lui arrivait etait 1'ceuvre du demon, et que le docteur Cor- nelius van Baerle etait 1'envoye de ce demon sur la terre. 25 II en resulta qu'un beau matin, c'etait le troisieme jour depuis la disparition de Jacob et de Rosa, il en resulta qu'un beau matin il monta a la chambre de Cornelius plus furieux encore que de coutume. LA CHANSON DES FLEURS IQI Celui-ci, les deux coudes appuyes sur la fenetre, la tete appuyee sur ses deux mains, les regards perdus dans 1'horizon brumeux que les moulins de Dordrecht battaient de leurs ailes, aspirait 1'air pour refouler ses larmes et empecher sa philosophic de s'evaporer. 5 [Rosa serait-elle maltraitee? Ou etait-elle? Van Baerle avait eu 1'idee d'ecrire a la Haye; mais avec quoi ecrire? II avait bien songe a une evasion.] Mais plus il y pensait, plus une evasion lui paraissait impos- sible. 10 Comment serait-il possible, se disait Cornelius, que je susse m'enfuir de Loevestein, d'ou s'enfuit jadis M. de Grotius ? Depuis cette evasion, n'a-t-on pas tout prevu ? Les fenetres ne sont-elles pas gardees ? Les portes ne sont- elles pas doubles ou triples? Les postes ne sont-ils pas 15 dix fois plus yigilants? Puis outre les fenetres gardees, les portes doubles, les postes plus vigilants que jamais, n'ai-je pas un argus infaillible? un argus d'autant plus dangereux qu'il a les yeux de la haine? Gryphus ? 20 Enfin n'est-il pas l une circonstance qui me paralyse ? 1'absence de Rosa? je perds la patience depuis que j'ai perdu la joie et la societe de Rosa, et surtout depuis que j'ai perdu mes tulipes. II n'y a pas a en douter, un jour ou 1'autre Gry- 25 phus m'attaquera d'une facon sensible a mon amour- propre, a mon amour ou a ma surete personnelle. Je me sens, depuis ma reclusion, une vigueur etrange, har- gneuse, insupportable. Je sauterai a la gorge de mon vieux scelerat, et je 1'etranglerai ! 30 Cornelius, a ces derniers mots, s'arreta un instant, la bouche contracted, 1'oeil fixe. IQ2 LA TULIPE NOIRE II retournait avidement dans son esprit une pensee qui lui souriait. Eh mais ! continua Cornelius, une fois Gryphus etrangle, pourquoi ne pas lui prendre les clefs ? pourquoi 5 ne pas descendre 1'escalier comme si je venais de com- mettre 1'action la plus vertueuse ? pourquoi ne pas aller trouver Rosa dans sa chambre? pourquoi ne pas lui expliquer le fait et sauter avec elle de sa fenetre dans le Wahal? 10 Je sais certes assez bien nager pour deux. [[Cornelius pensa a etrangler Gryphus, mais cela pour- rait le ramener, lui, Cornelius, a 1'echafaud.^ Point de cela, Cornelius, mon ami; c'est un mauvais moyen ! 15 Mais alors que devenir et comment retrouver Rosa? Telles etaient les reflexions de Cornelius trois jours apres la scene funeste de separation entre Rosa et son pere, juste au moment ou nous avons montre au lecteur Cornelius accoude sur sa fenetre. 20 C'est dans ce moment meme que Gryphus entra. II tenait a la main un enorme baton, ses yeux etince- laient de mauvaises pensees, un mauvais sourire l crispait ses levres, un mauvais balancement agitait son corps, et dans sa tacite personne tout respirait les mauvaises dis- 25 positions. Cornelius 1'entendit entrer, devina que c'etait lui, mais ne se detourna meme pas. Aussi Gryphus, voyant que Cornelius ne bougeait point, se mit a 1'interpeller par un vigoureux: 30 Hum ! hum ! Cornelius chantonna entre ses dents la chanson des fleurs, triste mais charmante chanson: 2 LA CHANSON DES FLEURS 193 Nous sommes les filles du feu secret, Du feu qui circule dans les veines de la terre: Nous sommes les filles de 1'aurore et de la rosee, Nous sommes les filles de Pair, Nous sommes les filles de 1'eau; 5 Mais nous sommes avant tout les filles du ciel. Ah ! sorcier maudit, tu te moques de moi, je pense ! cria Gryphus. Cornelius continua: C'est que le ciel est notre pa trie, 10 Notre veritable patrie, puisque de lui vient notre ame, Puisqu'a lui retourne notre ame, Notre ame, c'est-a-dire notre parfum. Gryphus s'approcha du prisonnier: - Mais tu ne vois done pas que j'ai pris le bon moyen 15 pour te reduire et pour te forcer a m'avouer tes crimes ? Est-ce que vous etes fou, mon cher monsieur Gry- phus ? demanda Cornelius en se retournant. Et, comme, en disant cela, il vit le visage altere, les yeux brillants, la bouche ecumante du vieux geolier, 20 Diable ! dit-il, nous sommes plus que fou, 1 a ce qu'il parait; nous sommes furieux ! Gryphus fit le moulinet avec son baton. Mais, sans se mouvoir: a, maltre Gryphus, dit van Baerle en se croisant 25 les bras, vous paraissez me menacer. Oh ! oui, je te menace ! cria le geolier. - Et de quoi ? - D'abord, regarde ce que je tiens a la main. - Je crois que c'est un baton, dit Cornelius avec calme, 30 et meme un gros baton; mais je ne suppose point que ce soit la ce dont vous me menacez. Ah ! tu ne supposes pas cela ! et pourquoi ? 1 94 LA TULIPE NOIRE - Parce que tout geolier qui frappe un prisonnier s'expose a deux punitions; la premiere, art. IX du regle- ment de Loevestein: Sera chasse tout geolier, 1 inspecteur ou porte-clefs 5 qui portera la main sur un prisonnier d'Etat. 2 La main, fit Gryphus ivre de colere; mais le baton; ah ! le baton, le reglement n'en parle pas. La deuxieme, continua Cornelius, la deuxieme, qui n'est pas inscrite au reglement, mais que 1'on trouve dans 10 1'Evangile, la deuxieme, la voici: Quiconque frappe de Pepee perira par Pepee. 3 Quiconque touche avec le baton sera rosse par le baton. 4 Gryphus, de plus en plus exaspere par le ton calme et 15 sentencieux de Cornelius, brandit son gourdin; mais au moment ou il le levait, Cornelius s'elanca vers lui, le lui arracha des mains et le mit sous son propre bras. Gryphus hurlait de colere. La, la, bonhomme, dit Cornelius, ne vous exposez 20 point a perdre votre place. Ah ! sorcier, je te pincerai autrement, va, 5 rugit Gryphus. A la bonne heure. - Tu vois que ma main est vide ? 25 Oui, je le vois, et meme avec satisfaction. - Tu sais qu'elle ne Pest pas habituellement lorsque le matin je monte Pescalier. Ah ! c'est vrai, vous m'apportez d'habitude la plus mauvaise soupe ou le plus piteux ordinaire que Pon 30 puisse imaginer. Mais ce n'est point un chatiment pour LA CHANSON DES FLEURS IQ5 moi; je ne me nourris que de pain, et le pain plus il est mauvais a ton gout, Gryphus, meilleur il est au mien. - Plus il est meilleur au tien ? -Oui. - Et la raison ? 5 Oh ! elle est bien simple. Dis-la done, alors. - Volontiers, je sais qu'en me dorinant un mauvais l pain tu crois me faire souffrir. Le fait est que je ne te le donne pas pour t'etre 10 agreable, brigand ! - Eh bien ! moi qui suis sorcier, comme tu sais, je change ton mauvais pain en un pain excellent, qui me rejouit plus que des gateaux, et alors j'ai un double plaisir, celui de manger a mon gout d'abord, et ensuite de te faire 15 infiniment enrager. Gryphus hurla de colere. Ah ! tu avoues done que tu es sorcier, dit-il. Parbleu ! si je le suis. 2 Je ne le dis pas devant le monde, parce que cela pourrait me conduire au bucher 20 comme Gaufredy ou Urbain Grandier; mais quand nous ne sommes que nous deux, 3 je n'y vois pas d'inconvenient. Bon, bon, bon, repondit Gryphus, mais si un sorcier fait du pain blanc avec du pain noir, le sorcier ne meurt-il pas de faim s'il n'a pas de pain du tout? 25 Hein ! fit Cornelius. Done, je ne t'apporterai plus de pain du tout, et nous verrons au bout de huit jours. Cornelius palit. -Et cela, continua Gryphus, a partir d'aujourd'hui. 30 Puisque tu es si bon sorcier, voyons, change en pain les meubles de ta chambre; quant a moi, je gagnerai tous 196 LA TULIPE NOIRE les jours les dix-huit sous que Ton me donne pour ta nourriture. Mais c'est un assassinat ! s'ecria Cornelius, emporte par un premier mouvement de terreur bien comprehensi- 5 ble, et qui lui etait inspire par cet horrible genre de mort. Bon ! continua Gryphus le raillant, bon ! puisque tu es sorcier, tu vivras malgre tout. Cornelius reprit son air riant, et haussant les epaules: -Est-ce que tu ne m'as pas vu faire venir ici les 10 pigeons de Dordrecht ? l Eh bien ! dit Gryphus. Eh bien! c'est un joli roti que 2 le pigeon; un homme qui mangerait 3 un pigeon tous les jours ne mour- rait pas de faim, ce 4 me semble ? 6 15 -Et du feu? dit Gryphus. Du feu ! mais tu sais bien que j'ai fait un pacte ivec le diable. Penses-tu que le diable me laissera manquer de feu quand le feu est son element ? 6 - Un homme si robuste qu'il soit ne saurait manger 20 un pigeon tous les jours. II y a eu des paris de faits, 7 et les parieurs ont renonce. Eh bien ! mais, dit Cornelius, quand je serai fatigue de pigeons, je ferai monter les poissons du Wahal et df la Meuse. 25 Gryphus ouvrit de larges yeux 8 effares. J'aime assez le poisson, continua Cornelius; tu ne m'en sers jamais. Eh bien ! je profiterai de ce que ' tu veux me faire mourir de faim pour me regaler de poisson. Gryphus faillit s'evanouir de colere et meme de peur. 30 Mais se ravisant,- Eh bien, dit-il en mettant la main dans sa poche; puisque tu m'y forces. VAN BAERLE REGLE SES COMPTES AVEC GRYPHUS IQ7 Et il en tira un couteau qu'il ouvrit. Ah ! un couteau ! fit Cornelius se mettant en defense avec son baton. xxrx OU VAN BAERLE, AVANT DE QUITTER LOEVESTEIN, REGLE SES COMPTES AVEC GRYPHUS Tous deux demeurerent un instant, Gryphus sur 1'offen- sive, van Bae'rle sur la defensive. 5 Puis, comme la situation pouvait se prolonger indefini- ment, Cornelius s'enquerant des causes de cette recrudes- cence de colere chez son antagoniste: Eh bien, lui demanda-t-il, que voulez-vous encore? Ce que je veux, je vais te le dire, repondit Gryphus. 10 Je veux que tu me rendes ma fille Rosa. - Votre fille ! s'ecria Cornelius. Oui Rosa ! Rosa que tu m'as enlevee par ton art du demon. Voyons, veux-tu me dire ou elle est ? Et 1'attitude de Gryphus devint de plus en plus 15 menafante. Rosa n'est point a Lrevestein ? s'ecria Cornelius. -Tu le sais bien. Veux-tu me rendre Rosa, encore une f ois ? x - Bon, dit Cornelius, c'est un piege que tu me tends. 20 Une derniere fois, veux-tu me dire ou est ma fille? Eh ! devine-le, coquin, si tu ne le sais pas. Attends, attends, gronda Gryphus, pale et les levres agitees par la folie qui commenfait a envahir son cer- 25 veau. Ah ! tu ne veux rien dire ? Eh bien ! je vais te desserrer les dents. 198 LA TULIPE NOIRE II fit un pas vers Cornelius, et lui montrant 1'arme qui brillait dans sa main : -Vois-tu ce couteau, dit-il; eh bien ! j'ai tue avec * plus de cinquante coqs noirs. 2 Je tuerai bien leur maitre, 5 le diable, comme je les ai tues eux, attends, attends ! Mais, gredin, dit Cornelius, tu veux done decide- ment m'assassiner ! Je veux t'ouvrir le cceur, pour voir dedans 3 1'endroit ou tu caches ma fille. 10 Et en disant ces mots avec 1'egarement de la fievre, Gryphus se precipita sur Cornelius, qui n'eut que le temps de se jeter derriere sa table pour eviter le premier coup. Gryphus brandissait 4 son grand couteau en proferant d'horribles menaces. 15 Cornelius previt que s'il etait hors de la portee de la main, il n'etait pas hors de la portee de 1'arme, 1'arme lancee a distance pouvait traverser 1'espace, et venir s'enf oncer dans sa poitrine; il ne perdit done pas de temps, et du baton qu'il avait precieusement conserve, il assena 20 un vigoureux coup sur le poignet qui tenait le couteau. Le couteau tomba par terre, et Cornelius appuya son pied par-dessus. Puis, comme Gryphus paraissait vouloir s'acharner a une lutte que la douleur du coup de baton et la honte 25 d'avoir etc desarme deux fois auraient rendue impitoya- ble, Cornelius prit un grand parti. II roua de coups son geolier avec un sang-froid des plus heroiques, choisissant 1'endroit ou tombait chaque fois le terrible gourdin. 30 Gryphus ne tarda point a demander grace. Mais avant de demander grace, il avait crie, et beau- coup; ses cris avaient ete entendus et avaient mis en VAN BAERLE REGLE SES COMPTES AVEC GRYPHUS 1 99 emoi tous les employes de la maison. Deux porte-clefs, un inspecteur et trois ou quatre gardes, parurent done tout a coup et surprirent Cornelius operant le baton a la main, le couteau sous le pied. 1 A 1'aspect de tous ces temoins du mefait qu'il venait de 5 commettre, Cornelius se sentit perdu sans ressource. En effet, toutes les apparences etaient centre lui. En un tour de main, Cornelius fut desarme, et Gryphus entoure, releve, soutenu, put compter, en rugissant de colere, les meurtrissures qui enflaient ses epaules et son 10 echine. Proces-verbal fut dresse, seance tenante, 2 des violences exercees par le prisonnier sur son gardien; il ne s'agissait de rien moins que d'une tentative d'assassinat, preparee depuis longtemps et accomplie sur le geolier, avec pre- 15 meditation par consequent, et rebellion ouverte. Tandis qu'on instrumentait centre Cornelius, les rensei- gnements donnes par Gryphus rendant sa presence inutile, les deux porte-clefs 1'avaient descendu dans sa geole, moulu de coups et gemissant. 20 Pendant ce temps, les gardes qui s'etaient empares de Cornelius s'occupaient a 1'instruire charitablement des us et coutumes 3 de Lcevestein, qu'il connaissait, du reste, aussi bien qu'eux, lecture lui ayant etc faite du reglement au moment de son entree en prison, et certains articles du 25 reglement lui etaient parfaitement entres dans la memoire. Us lui racontaient en outre comment 1'application de ce reglement avait etc faite a 1'endroit d'un prisonnier nomme Mathias, qui, en 1668, c'est-a-dire cinq ans auparavant, avait commis un acte de rebellion bien 30 autrement anodin que celui que venait de se permettre Cornelius. 4 200 LA TULIPE NOIRE II avait trouve sa soupe trop chaude et 1'avait jetee a la tete du chef des gardiens, qui, a la suite de cette ablu- tion, avait eu le desagrement en s'essuyant le visage de s'enlever une partie de la peau. 1 5 Mathias, dans les douze heures, avait ete extrait de sa chambre; puis conduit a la geole, ou il avait ete inscrit comme sortant de Loevestein; puis mene a 1'esplanade. dont la vue est fort belle et embrasse onze lieues d'etendue. La on lui avait lie les mains; puis bande les yeux, recite 10 trois prieres; puis on 1'avait invite a faire une genuflexion, et les gardes de Lcevestein, au nombre de douze, lui avaient, sur un signe fait par un sergent, loge fort habile- ment chacun une balle de mousquet dans le corps. Ce dont 2 Mathias etait mort incontinent. . 15 Cornelius ecouta avec la plus grande attention ce recit desagreable. Puis, 1'ayant ecoute: Ah ! ah ! dit-il, dans les douze heures, dites-vous ? Oui, la douzieme heure n'etait pas meme encore 20 sonnee, a ce que je crois, dit le narrateur. Merci, dit Cornelius. Le garde n'avait pas termine le sourire gracieux qui servait de ponctuation a son recit qu'un pas sonore reten- tit dans 1'escalier. 25 Des eperons sonnaient 3 aux aretes usees des marches. Les gardes s'ecarterent pour laisser passer un officier. Celui-ci entra dans la chambre de Cornelius au moment ou le scribe de Loevestein verbalisait encore. C'est ici 4 le n n ? demanda-t-il. 30 Oui, capitaine, repondit un sous-officier. Alors c'est ici la chambre du prisonnier Cornelius van Baerle? VAN BAERLE REGLE SES COMPTES AVEC GRYPHUS 2OI Precisement, capitaine. Ou est le prisonnier ? Me voici, monsieur, repondit Cornelius en palissant un peu malgre tout son courage. -Vous etes M. Cornelius van Baerle? demanda-t-il, 5 s'adressant cette fois au prisonnier lui-meme. Oui, monsieur. Alors suivez-moi. Oh ! oh ! dit Cornelius, dont le coeur se soulevait, presse par les premieres angoisses de la mort, comme on 10 va vite en besogne a la forteresse de Lcevestein, et le drole qui m'avait l parle de douze heures ! Hein ! qu'est-ce que je vous ai dit ? fit le garde his- torien 2 a 1'oreille du patient. - Un mensonge. 15 Comment cela ? - Vous m'aviez promis douze heures. Ah ! oui. Mais Ton vous envoie un aide de camp de Son Altesse, un de ses -plus in times meme, M. van Deken. Peste ! on n'a pas fait un pareil honneur au 20 pauvre Mathias. Allons, aliens, fit Cornelius, en renflant sa poitrine avec la plus grande quantite d'air possible; allons, mon- trons a ces gens-la qu'un bourgeois, filleul de Corneille de Witt, peut, sans faire la grimace, 3 contenir autant de 25 balles de mousquet qu'un nomme Mathias. Et il passa fierement devant le greffier qui, interrompu dans ses fonctions, se hasarda de dire a I'ofl&cier: Mais, capitaine van Deken, le proces-verbal n'est pas encore termine. 30 'Ce n'est point la peine de le finir, repondit I'officier. Bon I repliqua le scribe en serrant philosophique- 202 LA TULIPE NOIRE ment ses papiers et sa plume dans un portefeuille use et crasseux. II etait ecrit, 1 pensa le pauvre. Cornelius, que je ne don- nerais mon nom en ce monde ni a un enfant, ni a une 5 fleur, ni a un livre. Et il suivit 1'officier le coeur resolu et la tete haute. Cornelius eut beau regarder a droite, Cornelius eut beau regarder a gauche, il arriva sur 1'esplanade sans avoir apercu Rosa, sans avoir apercu Gryphus. 10 II y avait presque compensation. 2 Cornelius, arrive sur 1'esplanade, chercha bravement des yeux les gardes ses executeurs, et vit en eflfet une dou- zaine de soldats rassembles et causant, chuchotant meme entre eux plutot qu'ils ne causaient, conduite qui parut 15 a Cornelius indigne de la gravite qui preside d'ordinaire a de pareils evenements. Tout a coup Gryphus clopinant, chancelant, s'appuyant sur une bequille, apparut hors de sa geole. II .avait allume pour un dernier regard de haine tout le feu de ses 20 vieux yeux gris de chat. 3 Alors il se mit a vomir centre Cornelius un tel torrent d'abominables imprecations que Cornelius, s'addressant a 1'omcier: Monsieur, dit-il, je ne crois pas qu'il soit bien scant de me laisser ainsi insulter par cet homme, et cela surtout 25 dans un pareil moment. Ecoutez done, dit 1'officier en riant, il est bien naturel que ce brave homme vous en veuille ; 4 il parait que vous 1'avez roue de coups ? Mais monsieur, c'etait a mon corps defendant. 5 30 Bah ! dit le capitaine en imprimant a ses epaules un geste eminemment philosophique; bah ! laissez-le dire. . Que vous importe, a present ? LE SUPPLICE RESERVE A VAN BAERLE 203 Une sueur froide passa sur le front de Cornelius a cette reponse. Le malheureux comprit qu'il n'avait plus de ressources, qu'il n'avait plus d'amis, et se resigna. Soit, 1 murmura-t-il en baissant la tete. Puis, se retournant vers 1'omcier: 5 Aliens, monsieur, demanda-t-il, ou vais-je? L'officier lui montra un carrosse attele de quatre che- vaux, qui lui rappela fort le carrosse qui dans une cir- constance pareille avait deja frappe ses regards au Buytenhoff. 10 Montez la-dedans, dit-il. Ah ! murmura Cornelius, il parait qu'on ne me fera pas les honneurs de 1'esplanade, a moi ! La voiture roula. Ah ! scelerat ! ah! brigand ! hurla Gryphus en mon- 15 trant le poing a sa victime qui lui echappait. 2 Et dire qu'il s'en va sans me rendre ma fille. Si Ton me conduit a Dordrecht, dit Cornelius, je verrai en passant devant ma maison si mes pauvres plates-bandes ont etc bien ravagees. 20 XXX OU L'ON COMMENCE DE SE DOUTER A QUEL SUPPLICE ETAIT RESERVE CORNELIUS VAN BAERLE La voiture roula tout le jour. Elle laissa Dordrecht a gauche, traversa Rotterdam, atteignit Delft. A cinq heures du soir, on avait fait au moins vingt lieues. On passa la nuit en voiture. Le lendemain, au point du jour, Cornelius se trouva au dela de Leyde, ayant la mer 25 du Nord a sa gauche et la mer de Harlem a sa droite. 204 LA TULIPE NOIRE Trois heures apres, il entrait 1 a Harlem. Nous avons vu que Rosa et la tulipe, comme deux soeurs et comme deux orphelines, avaient etc laissees, par le prince Guillaume d'Orange, chez le president 5 van Systens. Rosa ne recut aucune nouvelle du stathouder avant le soir du jour ou elle 1'avait vu en face. . Vers le soir, un omcier entra chez van Systens; il venait de la part de Son Altesse inviter Rosa a se rendre 10 a la maison de ville. La, dans le grand cabinet des deliberations ou elle fut introduite, elle trouva le prince qui ecrivait. 2 II etait seul et avait a ses pieds un grand levrier de Frise qui le regardait fixement. 15 Guillaume continua d'ecrire un instant encore; puis, levant les yeux et voyant Rosa debout pres de la porte : -Venez, mademoiselle, dit-il sans quitter ce qu'il ecrivait. Rosa fit quelques pas vers la table. 20 Monseigneur, dit-elle en s'arretant. C'est bien, fit le prince. Asseyez-vous. Pendant ce temps, le levrier etait alle au-devant de Rosa et 1'avait examinee et caressee. Ah! ah ! fit Guillaume a son chien. On voit bien que 25 c'est une compatriote; tu la reconnais. Puis, se retournant vers Rosa et fixant sur elle son regard scrutateur et voile en mme temps: - Voyons, ma fille, 3 dit-il. Le prince avait vingt-trois ans a peine, Rosa en avait 30 dix-huit ou vingt; il eut mieux dit en disant ma sceur. Monseigneur, balbutia-t-elle. Vous avez un pere a Lcevestein ? LE SUPPLICE RESERVE A VAN BAERLE 2O$ Oui, monseigneur. - Vous ne 1'aimez pas ? -Je ne 1'aime pas, du moins, monseigneur, comme une fille devrait aimer. C'est mal de ne pas aimer son pere, mon enfant, 5 mais c'est bien de ne pas mentir a son prince. Rosa baissa les yeux. - Et pour quelle raison n'aimez-vous point votre pere ? Mon pere est mediant. De quelle facon se manifeste sa mechancete ? 10 Mon pere maltraite les prisonniers. - Tous ? - Tous. Mais ne lui reprochez-vous pas de maltraiter parti- culierement quelqu'un ? 15 Mon pere maltraite particulierement M. van Baerle, qui . . . Qui est votre amant. Rosa fit un pas en arriere. Que j'aime, monseigneur, repondit-elle avec fierte. 20 Depuis longtemps ? demanda le prince. Depuis le jour ou je 1'ai vu. Et vous 1'avez vu ? Le lendemain ou furent si terriblement mis a mort M. le grand pensionnaire Jean et son frere Corneille. 25 Les levres du prince se serrerent, son front se plissa, ses paupieres se baisserent de maniere a cacher un instant ses yeux. Au bout d'un instant de silence, il reprit: Mais que vous sert-il d'aimer un homme destiny a vivre et a mourir en prison ? 30 Cela me servira, monseigneur, s'il vit et meurt en prison, a 1'aider a vivre et a mourir. 206 LA TULIPE NOIRE Et vous accepteriez cette position d'etre la femme d'un prisonnier? Je serais la plus fiere et la plus heureuse des creatures humaines etant la femme de M. van Baerle; 5 mais . . . Mais quoi ? - Je n'ose dire, monseigneur. II y a un sentiment d'esperance dans votre accent ; qu'esperez-vous ? 10 Elle leva ses beaux yeux sur Guillaume, ses yeux lim- pides et d'une intelligence si penetrante qu'ils allerent chercher la clemence endormie au fond de ce coeur som- bre d'un sommeil qui ressemblait a la mort. Ah ! je comprends. 15 Rosa sourit en joignant les mains. - Vous esperez en moi, dit le prince. Oui, monseigneur. -Hum! Le prince cacheta la lettre qu'il venait d'ecrire et ap- 20 pela un de ses officiers. Monsieur van Deken, dit-il, portez a Lcevestein le message que voici; vous prendrez lecture des ordres que je donne au gouverneur, et en ce qui vous regarde vous les executerez. 25 L'officier salua, et 1'on entendit retentir sous la voute sonore de la maison le galop d'un cheval. - Ma fille, poursuivit le prince, c'est dimanche la fete x de la tulipe, et dimanche c'est apres-demain. Faites- vous belle avec les cinq cents florins que voici ; 2 car je 30 veux que ce jour-la soit une grande fete pour vous. Comment Votre Altesse veut-elle que je sois vetue ? murmura Rosa. HARLEM 207 Prenez le costume des epousees frisonnes, dit Guil- laume, il vous siera fort bien. XXXI HARLEM Harlem, ou nous sommes entres il y a trois jours avec Rosa et ou nous venons de rentrer a la suite du prison- nier, est une jolie ville, qui s'enorgueillit a bon droit 5 d'etre une des plus ombragees de la Hollande. Tandis que d'autres mettaient leur amour-propre a briller par les arsenaux et par les chantiers, par les maga- sins et par les bazars, Harlem mettait toute sa gloire a primer toutes les villes des Etats par ses beaux ormes 10 touffus, par ses peupliers elances, et surtout par ses pro- menades ombreuses, au-dessus desquelles s'arrondissaient 1 en voute le chene, le tilleul et le marronnier. Harlem, voyant que Ley de sa voisine, et Amsterdam sa reine, prenaient, 1'une, le chemin de devenir une ville 15 de science, et 1'autre celui de devenir une ville de com- merce, Harlem avait voulu etre une ville agricole ou plutot horticole. Harlem devint folle 2 des fleurs, et, entre autres fleurs, des tulipes. 20 Harlem proposa des prix en 1'honneur 3 des tulipes, et nous arrivons ainsi, fort naturellement comme on voit, a parler de celui que la ville proposait, le 15 mai 1673, en 1'honneur de la grande tulipe noire sans tache et sans defaut, qui devait rapporter cent mille florins a son 25 inventeur. Harlem s'etait done mise triplement en joie, car elle 208 LA TULIPE NOIRE avait a feter une triple solennite: la tulipe noire avait ete decouverte, puis le prince Guillaume d'Orange assis- tait a la ceremonie, en vrai Hollandais qu'il etait. Enfin, il etait de 1'honneur des Etats de montrer aux Francais, 5 a la suite d'une guerre aussi desastreuse que 1'avait e"te celle de 1672, que le plancher de la republique batave etait solide a ce point qu'on y put 1 danser avec accom- pagnement du canon des flottes. La societe horticole de Harlem s'etait montree digne 10 d'elle 2 en donnant cent mille florins d'un 3 oignon de tulipe. La ville n'avait pas voulu rester en arriere, et elle avait vote une somme pareille, qui avait ete remise aux mains de ses notables pour feter ce prix national. En tete des notables et du comite horticole, brillait 15 M. van Systens, pare de ses plus riches habits. On voyait derriere ce comite les corps savants de la ville, les magistrats, les militaires, les nobles et les rustres. Le peuple, meme chez MM. les republicans des Sept Provinces, n'avait point son rang dans cet ordre de 20 marche; il faisait la haie. On voyait, au centre du cortege pacifique et parfume, la tulipe noire, portee sur une civiere couverte de velours blanc frange d'or. II etait convenu que le prince stathouder distribuerait 25 certainement lui-meme le prix de cent mille florins, ce qui interessait tout le monde en general, et qu'il pronon- cerait peut-etre un discours, ce qui interessait en particu- lier ses amis et ses ennemis. Enfin ce grand jour tant attendu du ^dimanche^] 15 30 mai 1673 etait done arrive, et Harlem tout entiere, ren- forcee de ses environs, s'etait rangee le long des beaux arbres du bois avec la resolution bien arretee de n'applau- HARLEM 209 dir cette fois ni les conquerants de la guerre, ni ceux de la science, mais tout simplement ceux de la nature, qui venaient de forcer cette inepuisable mere a Penfantement, jusqu'alors cru impossible, de la tulipe noire. Tous les yeux cherchaient apres 1'heroine de la fete, 5 qui etait la tulipe noire, le heros de la fete qui, tout naturellement, etait 1'auteur de cette tulipe. Ce triomphateur rayonnant, enivre, ce heros du jour, c'est Isaac Boxtel, qui voit marcher en avant de lui, 1 a sa droite, sur un cotissin de velours, la tulipe noire, sa 10 pretendue 2 fille, a sa gauche, dans une vaste bourse, les cent mille florins en belle monnaie d'or reluisante. Encore un quart d'heure au reste et le prince arrivera, le cortege fera halte au dernier reposoir, la tulipe etant placee sur son trone, le prince, qui cede le pas a cette 15 rivale dans 1'adoration publique, prendra un velin magnin- quement enlumine, 3 sur lequel est ecrit le nom de 1'auteur, et il proclamera a haute et intelligible voix qu'il a ete decouvert 4 une merveille; que la Hollande, par 1'inter- mediaire de lui Boxtel, a force la nature a produire une 20 fleur noire, et que cette fleur s'appellera desormais Tulipa nigra Boxtellea. De temps en temps cependant Boxtel quitte pour un moment des yeux la tulipe et la bourse et regarde timide- ment dans la foule, car dans cette foule il redoute 25 pardessus tout d'apercevoir la pale figure de la belle Frisonne. Mais il n'apercut point Rosa. II en resulta que la joie de Boxtel ne fut pas troublee. 30 Le cortege s'arreta au centre d'un rond-point 5 dont les arbres magnifiques etaient decores de guirlandes et 210 LA TULIPE NOIRE d'inscriptions; le cortege s'arreta au son d'une 1 musique bruyante, et les jeunes filles de Harlem parurent pour escorter la tulipe jusqu'au siege eleve qu'elle devait occu- per sur 1'estrade, a cote du fauteuil d'or de Son Altesse le 5 stathouder. Et la tulipe orgueilleuse, hissee sur son ' piedestal, domina bientot 1'assemblee, qui battit des mains et fit retentir les echos de Harlem d'un immense applau- dissement. XXXII UNE DERNIERE PRIERE 10 En ce moment solennel et comme ces applaudissements se faisaient entendre, un carrosse. passait sur la route qui borde le bois, et suivait lentement son chemin a cause des enfants refoules hors de 1'avenue d'arbres par Fem- pressement des hommes et des femmes. 15 Ce carrosse, poudreux, fatigue, criant sur ses essieux, renfermait le malheureux van Baerle. Cette foule, ce bruit, ce miroitement de toutes les splendeurs humaines et naturelles, eblouirent le prison- nier comme un eclair qui serait entre 2 dans son cachot. 20 Qu'est-ce cela, je vous prie, monsieur le lieutenant ? demanda-t-il a 1'omcier charge de 1'escorter. Comme vous pouvez le 3 voir, monsieur, repliqua celui-ci, c'est une fete. % Ah ! une fete ! dit Cornelius de ce ton lugubrement 25 indifferent d'un homme a qui nulle joie de ce monde n'appartient plus depuis longtemps. Puis, apres un instant de silence et comme la voiture avait roule quelques pas, UNE DERNIERE PRIERE 211 La fete patronale de Harlem? demanda-t-il, car je vois bien des fleurs. C'est en eflfet une fete ou les fleurs jouent le princi- pal role, monsieur. Et de quelles fleurs celebre-t-on la fete aujourd'hui, 5 monsieur ? Celle des tulipes. Celle des tulipes ! s'ecria van Baerle ; c'est la fete des tulipes, aujourd'hui? Oui, monsieur; mais puisque ce spectacle vous est .10 desagreable, marchons. Et 1'ofncier s'appreta a donner 1'ordre de continuer la route. Mais Cornelius 1'arreta, un doute douloureux venait de traverser sa pensee. 15 Monsieur, demanda-t-il d'une voix tremblante, se- rait-ce done aujourd'hui que Ton donne le prix ? Le prix de la tulipe noire, oui. Les joues de Cornelius s'empourprerent, un frisson courut par tout son corps, la sueur perla son front. 20 Puis, reflechissant que, lui et sa tulipe absents, 1 la fete avorterait sans doute, faute d'un homme et d'une fleur a couronner: Helas ! dit-il, tous ces braves gens seront aussi malheureux que moi, car ils ne verront pas cette grande 25 solennite a laquelle ils sont convies, ou du moins ils la verront incomplete. Que voulez-vous dire ? monsieur. Je veux dire que jamais, dit Cornelius en se rejetant au fond de la voiture, excepte par quelqu'un 30 que je connais, la tulipe noire ne sera trouvee. Alors, monsieur, dit 1'omcier, ce quelqu'un que vous 212 LA TULIPE NOIRE connaissez Pa trouvee; car ce que tout Harlem * contem- ple en ce moment, c'est la fleur que vous regardez comme introuvable. La tulipe noire ! s'ecria van Baerle en jetant la moi- 5 tie de son corps par la portiere. Ou cela ? ou cela ? La-bas, sur le trone, voyez-vous ? Je vois ! Allons, monsieur, dit Pofficier, maintenant il faut partir. 10 Oh ! par pitie, par grace, monsieur, dit van Baerle, .oh! ne m'emmenez pas! laissez-moi regarder encore! Comment, ce que je vois la-bas est la tulipe noire, bien noire . . . est-ce possible ? oh ! monsieur, 1'avez-vous vue ? elle doit avoir des taches, elle doit etre imparfaite, elle 15 est peut-etre teinte en noir seulement; oh! si j'etais la, je saurais bien le dire, moi, monsieur; laissez-moi descen- dre, laissez-moi la voir de pres, je vous prie. Etes-vous fou, monsieur ? le puis-je ? Je vous en supplie. 20 Mais vous oubliez que vous etes prisonnier ? Je suis prisonnier, il est vrai, mais je suis un homme d'honneur; et sur mon honneur, monsieur, je ne me sauverai pas; je ne tenterai pas de fuir; laissez-moi seule- ment regarder la fleur ! 25 Mais mes ordres, monsieur ? Et Pofficier fit un nouveau mouvement pour ordonner au soldat de se remettre en route. Cornelius Parreta encore. Oh ! soyez patient, soyez genereux, toute ma vie 30 repose sur un mouvement de votre pitie. Helas ! ma vie, monsieur, elle ne sera probablement pas longue main- tenant. Ah ! vous ne savez pas, monsieur, ce que je souffre; UNE DERNIERE PRIERE 213 si c'etait ma tulipe a moi, si c'etait celle que Ton a voice a Rosa. Oh ! il faut que je sorte, monsieur, il faut que j'aille la voir, vous me tuerez 1 apres si vous voulez, mais je la verrai, je la verrai. - Taisez-vous, malheureux, et rentrez vite dans votre 5 carrosse, car voici 1'escorte de Son Altesse le stathouder qui croise la votre, et si le prince remarquait un scandale, entendait un bruit, ce serait fait de vous et de moi. Van Baerle, encore plus effraye pour son compagnon que pour lui-meme, se rejeta dans le carrosse, mais il ne 10 put y tenir une demi-minute, et les vingt premiers cava- liers etaient a peine passes qu'il 2 se remit a la portiere, en gesticulant et en suppliant le stathouder juste" au moment ou celui-ci passait. Guillaume, impassible et simple comme d'ordinaire, se 15 rendait a la place pour accomplir son devoir de presi- dent. II avait a la main son rouleau de velin, qui etait, dans cette journee de fete, devenu son baton de com- mandement. Voyant cet homme qui gesticulait et qui suppliait, 20 reconnaissant aussi peut-etre 1'officier qui accompagnait cet homme, le prince stathouder donna 1'ordre d'arreter. Qu'est-ce cela? demanda le prince a 1'officier, qui, au premier ordre du stathouder, avait saute en bas de la voiture, et qui 3 s'approchait respectueusement de lui. 25 Monseigneur, dit-il, c'est le prisonnier d'Etat que, par votre ordre, j'ai etc chercher a Loevestein, et que je vous amene a Harlem, comme Votre Altesse 1'a 4 desire. Que veut-il ? II demande avec instance qu'on lui permette d'arre- 30 ter 5 un instant ici. Pour voir la tulipe noire, monseigneur, cria van 214 LA TULIPE NOIRE Baerle, en joignant les mains, et apres, quand je 1'aurai vue, quand j'aurai su ce que je dois savoir, je mourrai, s'il le faut, mais en mourant je benirai Votre Altesse misericordieuse. 5 C'etait, en effet, un curieux spectacle que celui de ces deux hommes, chacun a la portiere de son carrosse, en- toure de leurs gardes; Tun tout-puissant, 1'autre misera- ble; 1'un pres de monter sur son trone, 1'autre se croyant pres de monter sur son echafaud. 10 Guillaume avait regarde froidement Cornelius et en- tendu sa vehemente priere. Alors, s'adressant a 1'ofncier, Get homme, dit-il, est le prisonnier rebelle qui a voulu tuer son geolier a Loevestein? 15 Cornelius poussa un soupir et baissa la tete. Sa douce et honnete figure rougit et palit a la fois. II n'essaya point de lutter, il n'essaya point de se defendre. - Permettez au prisonnier de descendre, dit le stathou- der, et qu'il aille voir la tulipe noire, bien digne d'etre 20 vue au moms une fois. Oh ! fit Cornelius pres de s'evanouir de joie et chancelant sur le marche-pied du carrosse, oh ! mon- seigneur ! Cette permission donnee, le prince continua sa route 25 dans le bois au milieu des acclamations les plus enthou- siastes. II parvint bientot a son estrade, et le canon tonna dans les profondeurs de 1'horizon. CONCLUSION 215 CONCLUSION Van Baerle, conduit par quatre gardes qui se frayaient un chemin dans la foule, perca obliquement vers la tu- lipe noire, que devoraient ses regards de plus en plus rapproches. Ilia vit enfin, la fleur unique; il la vit derriere les jeunes 5 filles qui formaient une garde d'honneur a cette reine de noblesse et de purete. Et cependant, plus il s'assurait par ses propres yeux de la perfection de la fleur, plus son co2ur etait dechire. II cherchait tout autour de lui pour adresser une question, une seule. Mais partout des visa- 10 ges inconnus; partout 1'attention s'adressant au trdne sur lequel venait de s'asseoir le stathouder. Guillaume, qui attirait x 1'attention generate, se leva, promena un tranquille regard sur la foule enivree, et son ceil percant s'arreta tour a tour sur les trois extremites 15 d'un triangle forme en face de lui par trois interets et par trois drames bien differents. A 1'un 2 des angles, Boxtel, fremissant d'impatience et devorant de toute son attention le prince, les florins, la tulipe noire et 1'assemblee; 20 A 1'autre, Cornelius haletant, muet, n'ayant de regard, de vie, de coeur, d'amour, que pour la tulipe noire, sa fille; Enfin, au troisieme, debout sur un gradin parmi les vierges de Harlem, une belle Frisonne vetue de fine laine 25 rouge 3 brodee d'argent et couverte de dentelles tombant a flots de son casque d'or; Rosa enfin, qui s'appuyait, defaillante et 1'ceil noye, au bras d'un des officiers de Guillaume. 2l6 LA TTJLIPE NOIRE Le prince alors, voyant tous ses auditeurs disposes, deroula lentement le velin, et, d'une voix calme, nette, - Vous savez, dit-il, dans quel but vous avez etc reunis ici. Un prix de cent mille florins a etc promis a 5 celui qui trouverait 1 la tulipe noire. La tulipe noire! et cette merveille de la Hollande est la exposee a vos yeux; la tulipe noire a etc trouvee, et cela dans toutes les con- ditions exigees par le programme de la Societe horticole de Harlem. L'histoire de sa naissance et le nom de son 10 auteur seront inscrits-au livre d'honneur de la ville. Faites approcher la personne qui est proprietaire de la tulipe noire. Et en prononcant ces paroles, le prince, pour juger de 1'effet qu'elles produiraient, promena son clair regard sur 15 les trois extremites du triangle. II vit Boxtel s'elancer de son gradin. II vit Cornelius faire un mouvement involontaire. II vit enfin 1'ofncier charge de veiller sur Rosa la con- duire, ou plutot la pousser devant son trone. 20 Un double cri partit a la fois a la droite et a la gauche du prince. Boxtel foudroye, Cornelius epe'rdu, avaient tous deux crie : Rosa ! Rosa ! Cette tulipe est bien a vous, n'est-ce pas, jeune fille ? 25 dit le prince. Oui, monseigneur ! balbutia Rosa, qu'un murmure universel venait de saluer en sa touchante beaute. Oh ! murmura Cornelius, elle mentait done, lors- qu'elle disait qu'on lui avait vole cette fleur. Oh ! voila 30 done pourquoi elle avait quitte Loevestein ! oh ! oublie, trahi, par elle, par elle que je croyais ma meilleure amie ! Oh ! gemit Boxtel de son cote, je suis perdu. CONCLUSION 217 Cette tulipe, poursuivit le prince, portera 1 done le nom de son inventeur, et sera inscrite au Catalogue des fleurs sous le titre de Tulipa 2 nigra Rosa Jfarlcensis, a cause du nom de van Baerle, qui sera desormais le nom de femme de cette jeune fille. $ Et en me'me temps, Guillaume prit la main de Rosa et la mit dans la main d'un homme qui venait de s'elancer, pale, etourdi, ecrase de joie, au pied du trone, en saluant tour a tour son prince, sa fiancee et Dieu qui, du fond du ciel azure, regardait en souriant le spectacle de deux 10 cceurs heureux. 3 En meme temps aussi tombait aux pieds du president van Systens un autre homme frappe d'une emotion bien differente. Boxtel, aneanti sous la ruine de ses esperances, venait 15 de s'evanouir. On le releva, on interrogea son pouls et son cceur; il etait mort. Cornelius recula epouvante: dans son voleur, dans son faux Jacob, 4 il venait de reconnaitre le vrai Isaac Boxtel, 20 son voisin, que, dans la purete de son ame, il n'avait jamais soupc. onne un seul instant d'une si mechante action. Ce fut, au reste, un grand bonheur pour Boxtel que Dieu lui cut envoye si a propos cette attaque d'apoplexie foudroyante, qu'elle 1'empecha de voir plus longtemps 25 des choses si douloureuses pour son orgueil et son avarice. Puis, au son des trompettes, la procession reprit sa marche sans qu'il y eut rien de change dans son cere- monial, sinon que Boxtel etait mort et que Cornelius et Rosa, triomphants, marchaient cote a cdte et la main 30 de 1'un dans la main de 1'autre. 6 Quand on fut rentre a Thotel de ville, le prince mon- 2l8 LA TULIPE NOIRE trant du doigt a Cornelius la bourse aux 1 cent mille florins d'or: On ne sait trop, dit-il, par qui est gagne cet argent, si c'est par vous ou si c'est par Rosa; car si vous avez 5 trouve la tulipe noire, elle 1'a elevee et fait 2 fleurir; aussi ne I'offrira-t-elle pas comme dot, ce serait injuste. D'ailleurs, c'est le don de la ville de Harlem a la tulipe. Cornelius attendait pour savoir ou voulait en venir le 10 prince. Celui-ci continua: Je donne a Rosa cent mille florins, qu'elle aura bien gagnes et qu'elle pourra vous offrir; ils sont le prix de son amour, de son courage et de son honnetete. Quant a vous, monsieur, grace a Rosa encore, qui a 15 apporte la preuve de votre innocence, et en disant ces mots, le prince tendit a Cornelius le fameux feuillet de la Bible sur lequel etait ecrite la lettre de Corneille de Witt, et qui avait send a envelopper le troisieme caieu; quant a vous, 1'on s'est apercu que vous aviez ete emprisonne 20 pour un crime que vous n'aviez pas commis. C'est vous dire, non seulement que vous etes libre, mais encore que les biens d'un homme innocent ne peuvent etre confisques. Vos biens vous sont done rendus. 25 Monsieur van Baerle, vous etes le filleul de M. Cor- neille de Witt et 1'ami de M. Jean. Restez digne du nom que vous a confie 1'un sur les fonts de bapteme, et de 1'amitie que 1'autre vous avait vouee. Conservez la tradi- tion de leurs merites a tous deux, 3 car ces MM. de Witt, 30 mal juges, mal punis, dans un moment d'erreur populaire, etaient deux grands citoyens dont la Hollande est fiere aujourd'hui. JE DONNE A ROSA CENT M1LLE FLORINS CONCLUSION 2IQ Le prince, apres ces deux mots qu'il prononca d'une voix emue, centre son habitude, donna ses deux mains a baiser aux deux epoux, qui s'agenouillerent a ses cotes. Puis, poussant un soupir: Helas ! dit-il, vous etes bien heureux vous, qui peut- 5 etre revant la vraie gloire de la Hollande et surtout son vrai bonheur, ne cherchez a lui conquerir que de nouvelles^ couleurs de tulipes. Et jetant un regard du cote de la France, 1 comme s'il cut vu de nouveaux nuages s'amonceler de ce cote-la, il 10 remonta dans son carrosse et partit. De son cote, Cornelius, le meme jour, partit pour Dor- drecht avec Rosa. Ceux qui, grace a 1'expose que nous avons fait, con- naissent le caractere du vieux Gryphus, comprendront 15 qu'il se reconcilia dimcilement avec son gendre; mais il finit par se rendre, pour n'etre pas moins genereux, disait- il, que Son Altesse le stathouder. Devenu gardien de tulipes, apres avoir etc geolier d'hommes, il fut 2 le plus rude geolier de fleurs qu'on cut 20 encore rencontre dans les Flandres. Aussi fallait il le voir, surveillant les papillons dangereux, tuant les mulcts et chassant les abeilles trop affamees. Comme il avait appris 1'histoire de Boxtel et qu'il etait furieux d'avoir etc la dupe du faux Jacob, ce fut lui 25 qui demolit 1'observatoire eleve jadis par 1'envieux der- riere le sycomore; car 1'enclos de Boxtel, vendu a 1'encan, s'enclava dans les plates-bandes de Cornelius, qui s'arron- dit de facon a defier tous les telescopes de Dordrecht. Rosa, de plus en plus belle, devint de plus en plus 30 savante, et au bout de deux ans de mariage, elle savait si 220 LA TULIPE NOIRE bien lire et ecrire qu'elle put se charger seule de 1'edu- cation de deux beaux enfants. II va sans dire que 1'un etant un garcon et 1'autre une fille, le premier recut le nom de Cornelius, et la seconde, 5 celui de Rosa. Van Baerle resta fidele a Rosa comme a ses tulipes; toute sa vie, il s'occupa du bonheur de sa femme et de la culture des fleurs, culture grace a laquelle il trouva un grand nombre de varietes qui sont inscrites au catalogue 10 hollandais. Les deux principaux ornements de son salon etaient dans deux grands cadres d'or, ces deux feuillets de la Bible de Corneille de Witt; sur Tun, on se le rappelle, son par- rain lui avait ecrit de bruler la correspondance du marquis 15 de Louvois. Sur 1'autre, il avait legue a Rosa le ca'ieu de la tulipe noire, a la condition qu'avec sa dot de cent mille florins elle epouserait un beau garcon de vingt-six a vingt-huit ans, qui 1'aimerait l et qu'elle aimerait. 20 Condition qui avait etc scrupuleusement remplie, quoi- que Cornelius ne fut point mort, 2 et justement parce qu'il n'etait point mort. Enfin, pour combattre les envieux a venir, dont la Providence n'aurait peut-etre pas eu le loisir de le de- 25 barrasser comme elle avait fait 3 de mynheer Isaac Boxtel, il ecrivit au-dessus de sa porte ce vers que Grotius avait grave, le jour de sa fuite, sur le mur de sa prison: On a quelquefois assez souffert pour avoir le droit de ne jamais dire: Je suis trop heureux. EXERCISES NOTE. Whenever any of the questions in French, in any of these Exercises, can be answered with a simple Oui, Madame, Non, Mademoi- selle, or the like, the pupil should utilize the forms in the question itself to give a less laconic answer. Futhermore, the typical question Qui etait roi de France a cette epoque ? (Exercise I, 6) can of course be converted into A cette epoque, etc. Based on page 1, line 1, to page 3, line 31. A . Repotidez aux questions suivantes: i . Dans quel pays se passe notre histoire? 2. En quelle annee commence-t-elle ? 3. De quoi les citoyens etaient-ils armes? 4. Qu'est-ce que c'etait que le Buytenhoff? 5. Qui etait Corneille de Witt? 6. Qui etait roi de France a cette epoque ? 7. De qui Guillaume d'Orange etait-il le petit-fils? 8. Quel age avait-il en 1672? 9. Qui avait fait son education? 10. Guillaume d'Orange avait-il adopte les idees de son precepteur? B. Traduisez en franqais: i. The Hague is the capital of Holland. 2. In August, 1672, many citizens were running towards a formidable prison. 3. In that prison Corneille de Witt, who had been accused of assassination, was languishing. 4. William of Orange did not talk much; he was a silent man. 5. The influence of Louis XIV was very great in Europe. 6. William of Orange was the grandson of Charles I of Eng- land. 7. He was then 22 years old. 8. Jean de Witt had educated him with the idea of making him a good citizen. 9. Jean de Witt had bowed to the will of his fellow citizens. 10. Corneille refused to sign the paper that reestablished the Stadtholdership. 222 EXERCISES II Based on page 10, line 12, to page 12, line 26. A. Repondez aux questions suivantes: i. Ou etait etendu Corneille de Witt ? 2. Dans quel etat se trouvait-il ? 3. Que dit Jean a son frere en entrant dans la prison? 4. Que re- pondit Corneille? 5. Dans quel but Jean etait-il alle voir son frere? 6. Pourquoi les pistoliers de Tilly etaient-ils pres de la prison? 7. Quels etaient les sentiments des Hollandais pour les freres de Witt? B. Remplacez les noms en italiques par un pronom per- sonnel: La chambre de Jean etait petite. Les dameurs s'ele- vaient centre les deux freres. Le bruit parvint jusqu'au prisonnier. C. Conjuguez au present et a Vimparfait de I'indicatif: arriver a la porte, retenir en prison, regarder par la fenetre. D. Traduisez en franqais: i. Jean had come to the door of the prison. 2. Corneille was lying on a bed. 3. His wrists and fingers were broken. 4. He was suffering terribly because the preliminary torture had been applied to him. 5. The door opened and Jean entered. 6. The prisoner extended his arms to his brother. 7. His hands were wrapped in linen. Ill Based on page 18, line 1, to page 19, line 16. A. Repondez aux questions suivantes: i. Pourquoi Jean de Witt pressait-il le depart de son frere Corneille? 2. Qu'est-ce qu'une deputation de bourgeois alia demander a la maison de ville? 3. Decrivez 1'etranger qui alia du Buytenhoff a la maison de ville. 4. Dans quelle direction rhomme au visage pale fixa-t-il les yeux? 5. Quelle question fit-il a son com- pagnon ? EXERCISES 223 B. ' Relisez le texte de la ligne 13 a la ligne 18 de la page 18 en employant les verbes au present indicatif. C. Traduisez en franqais: i. The howling of the mob was becoming more and more frightful. 2. Jean de Witt was determined to hasten the departure of his brother. 3. On arriving on Hoogstreet Place, where did the young man push his companion? 4. The king and the queen appeared on the balcony of their palace. IV Based on page 29, line 9, to page 32, line 6. A. Repondez aux questions suivantes: i. Que faisait le jeune homme avec son mouchoir? 2. Par quoi etait fermee la fenetre du cachot de Corneille? 3. Pourquoi les .derniers arrives ne pouvaient-ils entrer dans la prison? 4. Corneille etait-il encore dans la prison? 5. Que criait le peuple en voyant que Corneille s'etait evade ? 6. Pourquoi Jean de Witt fut-il reconnu? 7. Par qui fut-il reconnu? B. Quel est le pluriel des mots suivants: chapeau, bras, furieux, visage, cheval, soupcon, voix. C. Remplacez chaque tiret par de ou du, le, la, de 1', de la, des suivant le texte: bras, officier, jeune homme, ombre, deputes, prison. D. Traduisez en franqais: i. The young man was lean- ing on the officer's arm. 2. The shop was closed. 3. You are right, then* order was a death warrant (= an order of death). 4. The furious mob had a grudge against Corneille. 5. Cor- neille had left the jail ten minutes before; he must have es- caped. 6. This good news cannot be true. V Based on page 39, line 20, to page 41, line 30. A. Repondez aux questions suivantes: i. Ou Guillaume d'Orange galopait-il? 2. Qui etait Craeke? 3. Pour qui 224 EXERCISES etait-il charge d'une mission? 4. Comment monsieur van B aerie le pere avait-il fait fortune? 5. Pourquoi les conseils donnes a Cornelius van B aerie par son pere etaient-ils sages? 6. Comment savez-vous que Cornelius aimait peu 1'argent? 7. Que fit-il pour etre heureux ? 8. Quelle distraction choisit-il enfin? B. Conjuguez au present et a Vimparfait de I'indicatif: mettre, suivre, mener, reconnaitre, apercevoir, partir. C. Remplacez Vinfinitif par le passe defini et le futur: Je manger. II boire. Nous depenser. Vous vivre. Us travailler. D. Traduisez en franqais: i. A fortune of four hun- dred thousand florins is a very large fortune in Holland. 2. Cornelius' father had amassed his fortune in trading with India. 3. Cornelius had also an income of ten thousand florins. 4. Cornelius loved his father much more than his money. 5. He began to study entomology, and finally chose to cultivate tulips. VI Based on page 46, line 26, to page 50, line 30. A . Repondez aux questions suivantes: i . Qui reussit a clever les plus belles tulipes? 2. Pourquoi van Baerle ne soupconnait-il pas la haine de Boxtel? 3. Que faisait Boxtel tandis que van Baerle agenouille sur le gazon examinait ses tulipes ? 4. Qu'est-ce que Boxtel a achete pour voir les tulipes de van Baerle? 5. Quelle passion Boxtel eprouvait-il centre van Baerle? 6. Que medita-t-il de faire contre van Baerle? 7. Pourquoi ne mit-il pas son projet a execution? 8. Quels degats les chats firent-ils dans les plates-bandes de Cornelius ? 9. Decrivez 1'etat des plates-bandes de Cornelius apres le depart des chats. B. Quels sont les adiierbes formes des adjectifs suivants? parfait, entier, malheureux, rapide, secret, vrai. EXERCISES 225 C. Remplacez I'intparfait par le present, le passe" d&fini et le futur: II partait. Nous perdions. Vous alliez. J'obtenais. Vous disparaissiez. Us soupconnaient. D. Traduisez en franqais: i. Holland's tulip-growers were the most famous in the world. 2. Van Baerle's flower- beds were covered with marvelous flowers. 3. Boxtel followed with his eyes each of his neighbor's gestures. 4. With a tele- scope you can follow your enemy's motions. 5. Boxtel ad- mired van Baerle's tulips, but he could not conquer his envy. 6. Boxtel did not throw stones and sticks into the flower-beds of his enemy, because he knew he would be discovered. VII Based on page 53, line 6, to page 55, line 17. A. Repondez aux questions suivantes: i. Quand Corneille arriva-t-il chez son filleul Cornelius van Baerle? 2. De quoi remercia-t-il son neveu? 3. Par quoi 1'attention de Boxtel fut-elle eveillee? 4. Pourquoi son telescope ne lui etait-il pas utile a cette epoque de 1'annee ? 5. Ou Cornelius passait-il 1'hiver? 6. Ou Cornelius conduisit-il son parrain? 7. Que faisait Boxtel pendant que van Baerle et son parrain etaient dans le sechoir? 8. Que vit-il? 9. Cornelius de Witt, que tendit-il a van Baerle ? 10. Quelles reflexions fit alors Boxtel ? B. Remplacez chaque tiret par un adjectif demonstratif: - affaires, horticulteur, maison, atelier, serres, - foule curieuse, telescope. C. Remplacez chaque tiret par le verbe auxiliaire necessaire pour former le passe indefini: Corneille arrive chez son fil- leul. La nuit tombee. Corneille visite toute la maison. Tout ce bruit eveille 1'attention de Boxtel. II s' installe le telescope a 1'oeil. D. Traduisez en franqais: i. The night was falling when Corneille arrived at Cornelius's. 2. Corneille asked Cornelius 226 EXERCISES to send his servants away. 3. They remained alone for a few moments. 4. An old woman was the only person who en- tered the drying-room. 5. The envious man was directing his telescope towards the drying- room. 6. Cornelius under- stood what his godfather told him. 7. The sealed white pack- age was carefully deposited in a closet. 8. Boxtel thought that those papers were very important. 9. He had the idea that they were political papers. VIII Based on page 65, line 1, to page 68, line 27. A . Repondez aux questions suivantes: i . Pourquoi Boxtel pensait-il qu'il pourrait faire arreter van Baerle en meme temps que Corneille de Witt? 2. Quel prix la Societe d'horticulture de Harlem avait-elle propose pour la creation d'une tulipe noire? 3. Cornelius avait-il garde le secret sur la presque certitude de son succes? 4. Que pourrait faire Boxtel si van Baerle etait arrete? 5. Que fit le soir meme due 19 aout le principal magistral de la ville ? 6. A quelle heure van Baerle fut-il arrete? 7. Dans quels termes le valet de Boxtel lui annonca-t-il 1'arrestation de Cornelius ? 8. Qu'attendait Box- tel pour se lever? B. Remplacez I'infinitif par le present ou le plus-gue-par- fait et employez la forme interrogative: Cette nuit-la, Boxtel enjamber la muraille. Boxtel avoir le prix de cent mille florins. II ne penser qu'a la grande tulipe noire. Le resultat satisfaire sa vengeance et sa cupidite. II dresser une denonciation anonyme. C. Remplacez chaque tiret par un pronom: Le magistral convoqua ses collegues et il parla. II avait la denonciation et communiqua. Boxtel avait son telescope mais ne braqua pas sur le cabinet de van Baerle. EXERCISES 227 D. Traduisez en fran$ais: i. Boxtel knew what had just occurred at van Baerle's. 2. With his telescope he had seen everything. 3. It was with an anonymous letter that Boxtel denounced his enemy. 4. At nine o'clock Boxtel's valet en- tered his master's room. 5. He said to his master that van Baerle was accused of high treason. 6. Boxtel must have been very ill not to have risen when he heard the news. 7. He had two aims in denouncing van Baerle. 8. When night had come, he rose. IX Based on page 72, line 15, to page 74, line 19. A. Repondez aux questions suivantes: i. A quelle heure van Baerle arriva-t-il a la prison du Buytenhoff ? 2. Comment s'appelait son geolier ? 3. Dans quelle chambre fut-il enferme ? 4. Que vit van Baerle et qu'est-ce qu'il entendit sur la route qu'il dut parcourir pour arriver a sa cellule? 5. Quel geste Gryphus fit-il en introduisant le prisonnier dans son cachot? 6. Que fit Cornelius lorsqu'il fut reste seul? 7. Que fit Cor- nelius quand le jour arriva? 8. Pourquoi poussa-t-il un cri d'horreur? g. Qui ouvrit la porte en entendant ce cri? B. Conjuguez au present et a Vimparfait du subjonctif les verbes qui suivent: recevoir, voir, venir, faire, prendre, conduire. C. Traduisez en franqais: i. Gryphus the jailer was an enemy of the brothers de Witt. 2. The young girl that van Baerle saw was Gryphus's daughter. 3. She carried a lamp in her right hand. 4. Cornelius entered his cell and Gryphus showed him his bed. 5. Van Baerle did not sleep during the whole night. 6. At daybreak he approached his window that opened on the Buytenhoff. 7. The gallows stood at the end of the place. 8. The bodies of the two brothers de Witt were still hanging on the gallows. 9. They had been torn to pieces. 10. The people thought that the two brothers were enemies of the nation and friends of the French king. 228 EXERCISES Based on page 76, line 1, to page 78, line 10. A . Repondez aux questions suivantes: i . Qu'arriva-t-il a Gryphus le meme soir? 2. Que comprit Gryphus lorsqu'il voulut se relever? 3. Cornelius aurait-il pu alors s'echapper ? 4. A quoi songea-t-il au lieu de songer a sa liberte? 5. Qui entra alors dans le cachot de van B aerie? 6. Que pensa la jeune fille en voyant son pere etendu a terre? 7. Que pensait faire van Baerle en secourant Gryphus? 8. Pourquoi Gryphus n'entendit-il pas la conversation de la jeune fille et de Cor- nelius ? 9. Gryphus crut-il d'abord a la charite de van Baerle ? 10. Quel ordre donna-t-il ensuite a sa fille? B. Remplacez chaque tiret par ce qui ou ce que suivant le texte: Ne bougez pas, je sais c'est. Gryphus ne savait pas d'abord, c'est qu'il avait le bras casse. - ne vint pas a 1'idee de Cornelius ce fut de profiler de cet incident. Je ne comprends pas se passe. - vous me dites est sans importance. C. Remplacez Vinfinitif par le conditionnel dans les propo- sitions principales et par Vimparfait de Vindicdtif dans les pro- positions subordonnees commenqant par si: Si vous glisser vous tomber. Si nous wuloir nous pouvoir nous echapper. Si la jeune fille penser a van Baerle elle ne le dire pas. S'il secourir Gryphus il pouvoir lui remettre le bras. D. Traduisez en franqais: i. Do not open the. door. 2. He did not break his wrist, he broke his arm. 3. When that man feels a pain he does not utter any cry. 4. The jailer's daughter thought that a fight had taken place be- tween her father and Cornelius. 5. Van Baerle was a good Christian who helped his fellow men. 6. Van Baerle was not only a tulip-grower, he was also a physician. 7. He could very well set Gryphus's arm. 8. To do that he must have EXERCISES 229 strips of linen and two narrow pieces of board, g. First of all Gryphus thought of saving his money. 10. Then he told his daughter to help him to get up. XI Based on page 81, line 25, to page 86, line 18. A. Repondez aux questions suivantes: i. Quand les juges vinrent-ils interroger van Baerle? 2. Que leur raconta Cor- nelius? 3. Que dit-il a ses juges a propos du depot qu'il avait recu? 4. Que leur dit-il de ses occupations ? 5. Dans quelles circonstances le serviteur de de Witt avait-il remis une lettre a van Baerle? 6. Comment Cornelius se defendit-il? 7. A quoi fut-il condamne? 8. Qui vint lui lire 1'arret dans sa prison? 9. Quels sentiments Rosa eprouva-t-elle en ecoutant cette lecture? 10. Cornelius etait-il aussi emu que la jeune fille? B. Remplacez chaque tiret par un adjectif interrogate/ on par un pronom interrogatif, suivant le sens: vint le lendemain au Buytenhoff ? Sur interrogerent-ils van Baerle? De correspondance etail-il question ? Par cette correspondance avait-elle etc confiee a van Baerle? confidence Cornelius fit-il a ses juges? C. Traduisez en franqais: i . The judges did not believe that Cornelius spoke the truth. 2. They did not under- stand his indifference to politics. 3. Jean de Witt's servant could not be found. 4. Cornelius did not know what the package contained. 5. While the judges examined Cornelius's case, he had been sent back to jail. 6. Rosa was very sad when she heard van Baerle's sentence; he was only astonished. 7. The execution was to take place within two hours. 230 EXERCISES XII Based on page 93, line 19, to page 96, line 6. A. Repondez aux questions suivantes: i. Quels etaient les curieux qui voulaient voir 1'execution de Cornelius? 2. A quoi pensait Cornelius en marchant vers 1'echafaud? 3. De quoi cependant etait-il orgueilleux? 4. Que remarqua-t-il pendant qu'il faisait sa priere? 5. A qui dit-il adieu au mo- ment ou le bourreau levait son epee? 6. Par qui se sentit-il relever? 7. Que vit-il en rouvrant les yeux? 8. Que finit-il par comprendre ? 9. La grace de Cornelius etait-elle complete ? 10. Comment se consola-t-il d'etre condamne a la prison perpetuelle ? B. Remplacez chaque tiret par ce, il ou elle selon le texte: Voyez 1'echafaud, est a trois cents pas d'ici. - a quoi pensait Cornelius n'etait ni a ses juges ni a ses bourreaux. La tulipe noire ! - - la verrait du ciel quand fleurirait sur la terre. C. Traduisez en fran^ais: i. Inquisitive people were crowding the way from the prison to the scaffold. 2. Cor- nelius did not hear their threats and howling. 3. He was about to die and he was thinking only of tulips. 4. His beauti- ful dream would soon begin. 5. When the executioner raised his sword, his eyes closed in spite of himself. 6. When gentle hands lifted him he staggered. 7. But he would not be given his liberty. 8. Yet Rosa and his tulip bulbs would console him in his life imprisonment. . XIII Based on page 96, line 20, to page 100, line 2. A . Repondez aux questions suivantes: i . Apres etre descendu de 1'echafaud, ou Cornelius fut-il invite a monter? 2. Pourquoi Boxtel fut-U desappointe? 3. Van Baerle avait-il EXERCISES 231 laisse ses caieux chez lui au moment de son attestation ? 4. Com- ment Gryphus avait-il recu Boxtel lorsque celui-ci avait voulu le mettre dans ses interets? 5. Que lui avait repondu Rosa? 6. Le bourreau avait-il accepte la proposition de Boxtel? 7. Pourquoi les plans de Boxtel n'eurent-ils pas de succes? 8. Qu'arriva-t-il a Boxtel lorsqu'il entendit la lecture de la grace de van Bae'rle ? 9. Que voulut-il faire alors ? 10. Pour- quoi ne put-il courir apres le carrosse qui emportait van Bae'rle ? B. Remplacez la forme affirmative par la forme negative: Montez dans le carrosse. Obeissez-lui. Invitez-nous a aller chez votre ami. Donnez-lui les cent florins. Acceptez-les. Payez-le d'avance. C. Traduisez en franqais: i . Boxtel thought that van Bae'rle had hidden the tulip bulbs in his cell. 2. Rosa sent Boxtel to the executioner. 3. Boxtel bought of the execu- tioner the clothing of the condemned man. 4. When Boxtel fell, he was beaten by some of the spectators. 5. The blows that he received did not add anything to his grief. 6. The carriage that carried away van Bae'rle carried away also the tulip bulbs. 7. In running, Boxtel stumbled and fell on the pavement. XIV Based on page 100, line 6, to page 103, line 24. A. Repondez aux questions suivantes: i. Qu'est-ce que van Bae'rle admirait un matin de sa fenetre? 2. Quelle est Tidee qui lui vint en voyant des pigeons se percher sur les pignons de Lcevestein? .3. Combien de temps lui fallut-il pour prendre un pigeon? 4. Quand lacha-t-il la femelle? 5. Comment la nourrice de van Bae'rle devint-elle proprietaire des pigeons de Boxtel? 6. Quelle voix Cornelius entendit- il dans 1'escalier, dans les premiers jours de fevrier 1673? 7. Pourquoi van Bae'rle ne fut-il pas tres surpris de 1'arrivee de Rosa? 8. Comment Cornelius put-il la voir? 232 EXERCISES B. Remplacez le present de I'indicatif par le plus-que- parfait: Les pigeons emigrent du toit de Boxtel sur celui de van Baerle. Cette femme se prend d'amitie pour les pigeons. Je vous of re de vous acheter vos livres. Van Baerle prend un des pigeons de sa nourrice. En fevrier il entend la voix de Rosa. C. Traduisez en franqais: i . I like to breathe the cool morning air. 2. Have you seen the mills of Dordrecht? 3. The pigeons that van Baerle saw had come from Dordrecht. 4. They could go back there. 5. In January, 1673, Cornelius let go one of his pigeons. 6. His nurse found the note that the pigeon had under its wing. 7. In 1673, pigeons were worth six sous apiece in Holland. XV Based on page 106, line 14, to page 108, line 8. A. Repondez aux questions suivantes: i. Que disait Gryphus pour expliquer sa haine contre les freres de Witt? 2. Quelles etaient ses intentions envers van Baerle? 3. Pen- dant que Gryphus parlait, que faisait Rosa pour consoler van Baerle? 4. Pourquoi les pigeons de van Baerle sortirent-ils de leur nid? 5. Gryphus, que voulait-il faire des pigeons de van Baerle? 6. Que fit Cornelius apres le depart de Gryphus ? B. Traduisez en franqais: i. From this window the view is beautiful. 2. The pigeons were frightened by Gryphus. 3. You are a prisoner; those pigeons are not yours. 4. They are still less yours, answered van Baerle. 5. Rosa was at the cell door and Cornelius ran to her. 6. Come to see me at ten o'clock. 7. I cannot come at ten o'clock, but I shall come at half past nine. 8. I did not hear, I did not see anything. 9. Lock the door and push the bolts. 10. The pigeons' nest was completely demolished. EXERCISES 233 XVI % Based on page 111, line 14, to page 114, line 25. A. Repondez aux questions suivantes: i. Cornelius de- sirait-il beaucoup obtenir sa liberte? 2. Quand Rosa venait- elle causer avec lui? 3. Quand presenta-t-elle a van Baerle ses trois caieux? 4. Pourquoi Cornelius refusa-t-il de les accepter tous les trois? 5. Que pria-t-il Rosa de lui apporter? 6. Comment les trois caieux seront-ils divises entre Rosa et van Baerle? 7. Centre quels animaux Rosa devrait-elle proteger ses tulipes? 8. Que fit Rosa avant de partir? B. Remplacez V indie atif present par le fulur: Je vous ecoute, dit Rosa. Nous risquons trop de laisser les trois caieux au meme endroit. II s'agit de produire la tulipe noire. Cor- nelius parle et Rosa lui prete toute son attention. C. Traduisez en franqais: i. I shall select the earth in which you will plant one of the bulbs. 2. This earth must not be too dry or too damp. 3. I shall also plant a bulb in my prison. 4. We shall not plant the last bulb, it will be our reserve. 5. I believe that we shall win the hundred thousand florins. 6. Rosa will not be able to bring to van Baerle in one trip the earth he asked for. 7. It is a great temptation to steal a tulip bulb that may be worth one hundred thousand florins. XVII Based on page 116, line 22, to page 121, line 3. A. Repondez aux questions suivantes: i. Dans quel livre Rosa lisait-elle? 2. Pourquoi Rosa arriva-t-elle un soir une demi-heure en retard? 3. Ou Rosa avait-elle vu cet homme auparavant? 4. Pourquoi Rosa pensait-elle que cet homme etait amoureux d'elle? 5. Quel portrait Rosa fit-elle de cet homme a Cornelius? 6. Pourquoi Cornelius esperait-il que 234 EXERCISES sa tulipe reussirait? 7. Ou le serrait-elle precieusement ? 8. Pourquoi Rosa ecouta-t-elle inquiete? *B. Remplacez I'infinitif par le present du subjonctif: II faut que je vous dire quelque chose. Je crains qu'il ne sawlr ou est le ca'ieu. II est impossible que vous ne connaltre pas cet homme. C. Traduisez en franqais: i. Gryphus used very often to scold his daughter. 2. Rosa did not fear her father's new friend; she said that he was a good fellow. 3. Gryphus liked him because he was willing to pay his share when he and Gryphus were drinking. 4. When the newcomer followed Rosa into the garden, she thought he had done so in order to spy upon her. 5. He had indeed entered the garden to see what Rosa was doing. 6. That man was about fifty years old, whereas Rosa was very young. 7. At that time Rosa had not as yet planted the third bulb. XVIII Based on page 126, line 8, to page 131, line 29. A. Repondez aux questions suivantes: i. Pourquoi Cor- nelius ne tomba-t-il pas malade apres la destruction de son ca'ieu? 2. Quelle nouvelle la jeune fille annonca-t-eile le soir a van Bae'rle? 3. Pourquoi Gryphus se repentait-il d'avoir ecrase le ca'ieu? 4. Que pensa Gryphus en voyant 1'indigna- tion de son ami lorsqu'il lui annonca qu'il avait ecrase le ca'ieu ? 5. Quelle question fit alors 1'ami de Gryphus? 6. Que dit Gryphus a propos de 1 'existence possible d'autres cai'eux? 7. Quand 1'ceil de Jacob Gisels lanca-t-il un eclair? 8. Jacob Gisels que demanda-t-il a Gryphus de faire au cas ou Cor- nelius n'aurait pas les cai'eux sur lui? 9. Que devait faire Rosa le lendemain pour s'assurer si c'etait d'elle ou du ca'ieu que Jacob Gisels etait amoureux? 10. Cornelius, que decida- t-il de faire du troisieme ca'ieu apres que Rosa aurait plante le sien ? EXERCISES 235 B. Traduisez en franqais: i. In his grief, the consolation that God gave to Cornelius was Rosa. 2. Gryphus could not understand why Jacob Gisels was furious. 3. The reason was that Gryphus had crushed van Baerle's tulip bulb. 4. The jailer thought that both Cornelius and Gisels were insane. 5. Rosa listened attentively when she heard Jacob ask if there was more than one bulb. 6. Jacob's eyes flashed when Rosa said that other tulip bulbs might be less precious than the one that had been crushed. 7. Jacob said that if Gryphus would search Cornelius he would find out whether Cornelius had other bulbs. 8. Rosa had told Cornelius that Jac'ob had followed her into the garden. 9. Cornelius tells Rosa to go again to the garden to see whether Jacob will again follow her. XIX Based on page 133, line 15, to page 139, line 8. .4.' Repondez aux questions suivantes: i. Quelle resolu- tion Rosa prit-elle la nuit suivante? 2. Pourquoi prit-elle cette resolution ? 3. Pourquoi la seconde feuille de la Bible de Corneille de Witt etait-elle devenue la premiere ? 4. Pourquoi Rosa desirait-elle apprendre a ecrire lisiblement? 5. Quelles reflexions Cornelius fit-il quand il fut certain que Rosa ne viendrait pas? 6. Que fit Cornelius lorsque Gryphus entra dans sa prison a huit heures du matin? 7. Combien de jours Rosa fut-elle sans aller voir Cornelius? B. Remplacez VinfinUif par le passe indefini dans les phrases qui suivent: Je revenir de voyage. Je aller a Dordrecht. Rosa apprendre a ecrire. C. Traduisez en franqais: i. Rosa's sympathy for Cor- nelius was rapidly becoming love. 2. Rosa was mistaken when she thought that Cornelius did not love her. 3. The great black tulip had succumbed in the struggle. 4. For Rosa, writing was much more difficult than reading. 5. She could 236 EXERCISES not yet write legibly, but she was making rapid progress. 6. The second night, Cornelius did not sleep at all. 7. The fourth day, Cornelius ate neither his breakfast nor his din- ner. 8. Gryphus thought that he would soon get rid of his prisoner. 9. When Rosa came to Cornelius's door she said only one word: " To-morrow." XX Based on page 139, line 15, to page 143, line 25. A . Repondez aux questions sui-oantes: Quelle question Rosa fit-elle, le lendemain, a van Baerle? 2. Rosa pensait-elle vraiment que la plus grave preoccupation de Cornelius etait sa tulipe? 3. Qu'arriva-t-il a Cornelius lorsque Rosa lui dit que sa tulipe avait couru un grand danger? 4. Que fit Jacob lorsque Rosa alia au jardin? 5. Que fit Rosa au jar- din? 6. Apres le depart de Rosa du jardin que fit Jacob? 7. Ou et quand Rosa avait-elle plante le ca'ieu ? 8. Comment la jeune fille exposera-t-elle^au soleil le pot qui contient le caieu? 9. Quand pense-t-elle que la tulipe commencera a paraitre ? B. Remplacez I'infinitif par le futur dans les phrases sui- vantes: Je vous voir demain. II revenir la semaine prochaine. Nous nous lever demain a sept heures. Us recevoir bientot ma lettre. C. Recitez le passe indefini des verbes qui suivent: se lever, se coucher, se promener. D. Traduisez en franqais: i. The most precious thing that Cornelius had was not his tulip, but Rosa. 2. Jacob buried his hands in the ground to try to find the tulip bulb. 3. Not finding it, he returned to the house disappointed and abashed. 4. Rosa had lost no time; she had planted the bulb six days before. 5. Nobody could steal it; it was in Rosa's room. 6. Rosa knew very well in what kind of EXERCISES 237 ground tulips must grow. 7. Cornelius thought that Rosa was a perfect gardener. 8. Cornelius asked Rosa to tell him the next day if the tulip had begun to appear. XXI Based on page 144, line 21, to page 146, line 14. A. Faites les questions aux reponses qui suivent: i. A neuf heures. 2. II trouvait Rosa charmante. 3. Cornelius se dit que la femme n'est pas parfaite. 4. A toutes les reines du monde. 5. Elle avait defendu qu'avant trois jours on causat tulipe. 6. Trente-six heures etaient deja passees. 7. Cornelius supporta heroiquement sa penitence. 8. Le lendemain soir, Rosa dit a Cornelius: Elle a leve. 9. Elle a leve droit comme un fuseau. B. Remplacez I'infinitif par I'imparfait du subjonctif: Le tulipier avait defendu qu'on toucher sa tulipe. II faudrait, pour que Rosa etre parfaite, qu'elle permettre qu'on parler tulipe. C. Traduisez en franqais: i. Rosa was happy when she talked about tulips. 2. For seventy-two hours Rosa had forbidden Cornelius to speak of the black tulip. 3. It was for van Bae'rle a cruel ordeal. 4. Rosa, however, decided to shorten van Baerle's punishment. 5. On the evening of the second day, she announced to him that the tulip was growing. 6. It was already two inches high. 7. Rosa did not lose sight of it. 8. She could see it from her bed. XXII Based on page 150, line 5, to page 154, line 29. A. Faites les questions aux reponses qui suivent: i. Elle fleurira cette nuit sans faute, dit Rosa. 2. Noire comme du jais. 3. Quand la tulipe aura fleuri parfaitement noire, il vous faudra un messager. 4. C'est le batelier de Loevestein, un 238 EXERCISES jeune garcon alerte. 5. II ne lui faudra que dix heures pour aller a Harlem. 6. Rosa, il faudra que vous ecriviez au Presi- dent de la Societe d'horticulture. 7. La tulipe noire sera dans toute sa splendeur pendant trois ou quatre jours. 8. Je ne crains pas qu'on la vole, Cornelius, je veillerai sur elle. B. Traduisez en franqais: i. When the tulip blooms, a messenger will leave for Harlem. 2. The black tulip will be the marvel of the world. 3. Cornelius believed that his tulip had a soul. 4. Cornelius told Rosa to write the letter to the President of the Society of Horticulture without losing a minute. 5. In her letter Rosa asked the President to come to Lcevestein to see the tulip. 6. The tulip would be called Rosa Barlcmsis. 7. Rosa's letter was very simple. 8. Cor- nelius wrote the President's address, for Rosa did not know it. XXIII Based on page 165, line 6, to page 161, line 2. A. Faites les questions aux reponses suivantes: i. Jacob Gisels n'etait autre qu' Isaac Boxtel. 2. C'est 1'envie qui avait fait deviner a Boxtel 1'existence des caieux. 3. C'est en flattant Gryphus d'une alliance avec Rosa que Boxtel endormit les defiances du geolier. 4. Par son imprudence a suivre Rosa dans le jardin. 5. II croyait que Cornelius avait plus d'un cai'eu, mais il n'en etait pas sur. 6. Parce qu'il avait epie tout ce qu'avait fait Rosa. 7. D'une petite chambre qu'il avait louee juste en face de la fenetre de Rosa. 8. Trois jours apres son installation, il n'avait plus aucun doute. - B. Traduisez en franqais: i. With one of his keys Boxtel could enter Rosa's room. 2. After drinking a bottle of gin, Gryphus was dead drunk. 3. He could not spy upon Boxtel, who was now the master of the house. 4. In order not to be heard, Boxtel walked barefooted and on tiptoe. 5. Rosa called Cornelius and by the light of a dark-lantern she showed EXERCISES 239 him the black tulip. 6. Rosa had carefully closed her door to protect the tulip. 7. But Boxtel had a key that could open Rosa's lock. 8. When Rosa came out of her room, Boxtel followed her from step to step^ 9. Two minutes later Boxtel opened Rosa's room. XXIV Based on page 161, line 7, to page 166, line 12. A . Faites les questions aux repenses suivantes: i . Cor- nelius! s'ecria Rosa, on nous a vole la tulipe noire. 2. Je suis sortie un instant pour aller prevenir le messager. 3. Non, je n'ai pas laisse la porte ouverte. 4. La clef, je 1'ai constam- ment tenue dans ma main. 5. Quand je suis rentree la porte etait fermee. 6. Le voleur ne peut etre que cet irifame Jacob. 7. Boxtel etait deja en route pour Harlem avec la tulipe noire. 8. II arriva a Harlem le lendemain matin. B. De quels adjectifs sont derives les adverbes qui suivent ? constamment, positivement, lourdement, mollement, par- faitement. C. Traduisez en franqais: i. Cornelius's happiness passed away rapidly. 2. Rosa's cries made him tremble and her pale face made him draw back in fear. 3. The black tulip had been stolen while Rosa had gone to inform the messenger. 4. Some one must have procured a key to Rosa's room. 5. To Cornelius it was evident that the thief was Jacob Gisels. 6. The poor prisoner could not break the iron grating of his door. 7. Gryphus came up and told Cornelius that he would be condemned to death. 8. For Rosa all was not lost; a sud- den thought had come to her mind. 9. Boxtel had jumped into a carriage that was waiting for him and had left for Harlem. 10. On arriving there, he wrote to the burgomaster of Harlem that he had brought with him a perfectly black tulip. 240 EXERCISES XXV Based on page 166, line 13, to page 172, line 7. A. Faites les questions aux reponses suiiiantes: i. En sortant de chez elle, Rosa se rendit chez un loueur de voitures. 2. Rosa fut forcee de prendre un cheval. 3. Elle n'avait pas fait une lieue qu'elle apercut son messager. 4. Le lende- main matin elle arriva a Harlem. 5. Elle se fit conduire chez le President de la Societe horticole. 6. Le President redigeait un rapport. 7. Rosa fit dire au President qu'elle venait lui parler de la tulipe noire. 8. Le President ressemblait un peu a une tulipe. 9. Pour lui, la tulipe noire etait une puissance de premier ordre. B. Faites une phrase complete avec chacune des locutions que void: venir de, se rendre chez, force fut, venir de la part de, se douter de, se contenter de. C. Faites de memoire une description de monsieur van Systens. D. Traduisez en franqais: i. Rosa had made up her mind to find again the black tulip. 2. On horseback, she set out for Harlem. 3. Could she catch up with her messenger? That was the question. 4. He was a good man who would guide and help her. 5. But when van Systens heard Rosa's name he refused to receive her. 6. She insisted in the name of the black tulip, and finally she was received. 7. The Presi- dent thought the tulip had been stolen from Boxtel. 8. Rosa did not know Boxtel's real name; she knew him under the name of Jacob Gisels. 9. Finally the President sent Rosa to Boxtel's hotel. XXVI Based on page 175, line 23, to page 181, line 21. A. Faites les questions aux reponses qui suivent: i. Pen- dant que Rosa etait chez van Syst*ens, Guillaume d 'Orange y EXERCISES 241 arriva. 2. Parce que Guillaume ne voulait pas etre connu de Rosa. 3. Le Prince s'etait assis dans Tangle le plus obscur de 1'appartement. 4. Un officier partit pour aller chercher Boxtel. 5. Je ne suis pas une savante fleuriste, la tulipe noire n'a pas ete trouvee par moi. 6. L 'officier rentra et annonga que Boxtel le suivait. B. Avec chacune des locutions qui suivent faites une phrase complete: mettre au courant, le cas echeant, donner ' 1'eveil, s'agir de, faire rendre justice. C. Recitez le passe defini et le futur des verbes qui suivent en employant un verbe different a chaque personne du temps: rejoindre, peindre, eteindre, craindre. D. Traduisez en franqais: i. Van Systens was delighted becaus the work of his horticultural society pleased William of Orange. 2". His Highness heard that van Systens possessed a black tulip and, as a loyal Hollander, he came to see it. 3. Van Systens did not think that Rosa's pretension had any impor- tance, but William of Orange said that he would examine the case. 4. William of Orange did not wish to be recognized; he told van Systens to call him " Sir." 5. When Rosa was again questioned by van Systens, she again asked that Boxtel should come with the tulip. 6. Rosa told van Systens the whole story of Cornelius and the tulip. 7. When she con- fessed that she talked to Cornelius every day, van Systens turned pale. 8. William of Orange gave Rosa some en- couragement when he said that the horticultural society had nothing to do with political offenses. 9. At that moment an officer announced that Boxtel was coming with his tulip. XXVII Based on page 181, line 22, to page 186, line 4. A . Faites les questions aux reponses qui suivent: i . Boxtel, en personne, entra dans le salon de M. van Systens. 2. Le 242 EXERCISES Prince revint prendre sa place dans Tangle obscur ou il avait place son fauteuil. 3. C'est ma tulipe, je la reconnais. 4. Les yeux de Rosa s'arreterent sur le Prince. 5. Elle etait certaine que ce n'etait pas la premiere fois qu'elle voyait cet etranger. 6. Ah! murmura le Prince, Boxtel est trouble.* 7. Guil- laume suivait tous les mouvements de Boxtel avec un interet de curiosite remarquable. 8. Je ne connais pas M. Boxtel, mais je connais M. Jacob Gisels, repondit Rosa. 9. Je ne nie pas avoir ete a Lcevestein , dit Boxtel. 10. Vous- m'avez vole la tulipe noire , dit Rosa indignee. B. Avec chacune des locutions qui suivent faites um phrase complete: de concert avec, faire prendre le change, vouloir dire, se faire appeler. C. Traduisez en franqais: i. When Rosa saw her tulip in Boxtel's hands she burst into tears. 2. Rosa was certain that she had seen the Prince before, but she could not recall where. 3. Boxtel said (that) he had discovered the secret of the black tulip, but he was somewhat disturbed. 4. Boxtel could not deny having been in Loevestein, but he denied having . stolen the tulip. 5. He did not answer Rosa's questions, but said (that) he had grown tulips for twenty years. 6. When Rosa heard Boxtel pronounce van Baerle's name she was in despair. 7. She did not deny, however/ having followed Cornelius to Lcevestein. 8. Boxtel said that he was in love with Rosa and had asked her to marry him. 9. He finally declared that he had taken from Rosa's room the tulip she had stolen from him. XXVIII Based on page 190, line 15, to page 197, line 1. A . Faites les questions aux reponses qui suivent: i . Pen- dant que ces evenements s'accomplissaient, van Baerle souffrait beaucoup dans sa prison. 2. Gryphus se persuada que la disparition de Rosa etait 1'oeuvre du demon. 3. Gryphus EXERCISES 243 entra dans la prison de Cornelius, tenant a la main un enor- me baton. 4. Cornelius chantonnait la chanson des fleurs. 5. Cette chanson exaspera Gryphus. 6. Est-ce que vous etes fou? demanda Cornelius. 7. Gryphus fit le moulinet avec son baton. 8. Cornelius arracha son baton a Gryphus. 9. Gryphus hurlait de colere. B. A vec chacune des locutions idiomatiques qui suivent faites une phrase complete: prendre le parti de, a la bonne heure, ouvrir de larges yeux, aimer assez. C. Traduises en fran^ais: i. From the window of his cell, Cornelius was looking toward Dordrecht. 2. Gryphus, more furious than usual, entered with a stick in his hand. 3. Cornelius did not heed him. 4. In Gryphus's eyes, van Baerle was a sorcerer. 5. The jailer threatened the prisoner with his stick. 6. But van Baerle told him that if he struck him with his stick he would be dismissed. 7. Nevertheless, Gryphus tried to strike van Baerle, but the latter snatched his stick from him. 8. As Cornelius told his jailer that he could change the bad bread that was brought to him into excellent bread, Gryphus was more and more certain that his prisoner was a sorcerer. 9. When Cornelius told Gryphus that he could make the fish of the Wahal river come up to his cell, the jailer nearly fainted. 10. Then he drew a knife from his pocket and opened it. XXIX Based on page 197, line 9, to page 203, line 14. s A . Faites les questions aux reponses suivantes: i . Je veux que tu me rendes ma fille , dit Gryphus a van Baerle. 2. Gryphus fit un pas vers Cornelius en lui montrant son couteau. 3. Cornelius n'eut que le temps de se jeter derriere la table. 4. Le geolier brandissait son arme en proferant d'horribles menaces. 5. Cornelius assena un vigoureux 244 EXERCISES coup de baton sur le poignet qui tenait le couteau. 6. Pui? il roua de coups son geolier. 7. Deux porte-clefs, un inspec- teur et trois ou quatre gardes arriverent alors. 8. Cornelius se sentit perdu. 9. Parce que toutes les apparences etaient contre lui. 10. En un instant van Baerle fut desarme. B. Avec chacune des locutions qui suivent faites une phrase complete: n'avoir que le temps de, rouer de coups, en un tour de main, seance tenante, etre scant. C. Formez un verbe avec chacun des substantifs qui suivent et employez ce verbe dans une phrase complete: eperon, paleur, angoisse, honneur, grimace, nom. D. Traduisez en franqais: i. Cornelius's table was his protection against the knife that Gryphus was brandishing. 2. That table, however, was not a sufficient protection, and Cornelius dealt a heavy blow on the hand that held the knife. 3. Then the prisoner made up his mind to cudgel his jailer. 4. At that moment, turnkeys and guards appeared at the prison door. 5. Cornelius was told that he would be put to death within twelve hours. 6. Then came an officer who told Cornelius to follow him. 7. Van Baerle was brave and he followed the officer, thinking he was being led to the scaffold. 8. He thought he had no more friends. 9. When he saw that there was no scaffold on the square, he asked an officer where they were leading him. 10. The officer made him enter a carriage drawn by four bourses, and the carriage started off. XXX Based on page 203, line 21, to page 208, line 30. A . Faites les questions aux reponses suivantes: i . La voiture roula toute la journee. 2. Le lendemain matin la voiture entra a Harlem. 3. Rosa et la tulipe avaient etc laissees chez van Systens. 4. Vers le soir un officier vint in- EXERCISES 245 viter Rosa a se rendre a la maison de ville. 5. Elle trouva le Prince dans son cabinet. 6. II ecrivait une lettre. 7. Rosa n'aimait pas beaucoup son pere, parce qu'il etait mediant. 8. Elle lui reprochait surtout de maltraiter van Baerle. 9. Elle aimait Cornelius depuis le jour ou elle 1'avait vu pour la pre- miere fois. 10. C'etait le lendemain du jour ou les freres de Witt avaient ete mis a mort. B. Avec chacune des locutions idiomatiques qui suivent faites une phrase complete: voir en face, se rendre chez quel- qu'un, serrer les levres. seoir tres bien. C. Traduisez en franqais: i. It took a day and a half to go from Loevestein to Harlem. 2. While Cornelius was traveling, Rosa and the tulip were at M. van Systen's. 3. Towards evening, Rosa went to the City Hall where she found the Prince in his office. 4. He did not look at her until he had finished his letter. 5. Rosa confessed that she did dislike her father because he treated Cornelius badly. 6. She had fallen in love with van Baerle the first day she saw him. 7. Rosa hoped that the prince would pardon Cornelius. 8. He gave her a large sum of money. 9. He told her to make her- self beautiful the next Sunday, for that day would be a great holiday for her and her tulip. XXXI Based on page 207, line 3, to page 210, line 9. A. Faites les questions aux reponses suvoantes: i. C'etait surtout par ses arbres que la ville de Harlem etait remarquable. 2. Harlem proposa des prix en 1'honneur des tulipes. 3. Cette ville avait a feter une double solennite. 4. La Societe horticole avait donne cent mille florins pour un oignon de tulipe. 5. Le prince stathouder devait distribuer lui-meme le prix. 6. Tous les yeux cherchaient 1'herome, qui n'etait autre que la tulipe noire. 7. Boxtel pensait encore que le prix lui serait donne. 246 EXERCISES 8. Elle s'appellerait Tulipa nigra Boxtellea. 9. II redoutait cependant d'apercevoir dans la foule la pale figure de la belle Frisonne. 10. Non, il ne 1'apercut point. B. Faites au present de Vindicatif une phrase complete a-vec chacun des verbes qui suivent employes a la forme refltchie: voir, mettre, montrer, ranger, appeler, apercevoir. C. Traduisez en fran^ais: i. Amsterdam was becoming a commercial city and Leyden a scientific city; so Harlem decided she would become a horticultural city. 2. As the black tulip had been discovered, and as William of Orange was coming to attend the ceremony, Harlem was having a double celebration. 3. The procession in honor of the black tulip was made up of magistrates, officers, scientists and noblemen. 4. All along the streets the people were in rows looking at the procession. 5. The heroine of this festival was not a woman but a flower. 6. The most triumphant of all was Boxtel, who thought he had won the prize. 7. Within a quarter of an hour he would receive one hundred thousand florins. 8. Yet he was anxious lest at the last moment Rosa should appear. 9. Not seeing her, he was perfectly happy. 10. When the procession reached the square where the cere- mony was to take place, the tulip was raised on a pedestal. XXXII Based on page 210, line 10, to page 214, line 23. A . Faites les questions aux reponses suivantes: i . Un carrosse poudreux arriva en ce moment. 2. C'est une fete , repondit Pofficier a van Baerle. 3. Celle des tulipes. 4. Ce que tout Harlem contemple maintenant, c'est la tulipe noire. 5. Non, van Baerle ne pouvait descendre de voiture, car il etait prisonnier. 6. II promit sur son honneur de ne pas tenter de fuir. 7. En passant, Guillaume vit un homme qui gesticu- lait a la portiere d'une voiture. 8. Cet homme, repondit . EXERCISES 247 1'officier au Prince, c'est le prisonnier de Loevestein . 9. Permettez au prisonnier de voir la tulipe noire , dit Guil- laume. 10. A ces mots, Cornelius faillit s'evanouir de joie. B. Employee tontes les locutions suiiiantes dans des phrases completes: jouer un role, se remettre en route, en etre fait de quelqu'un, etre pres de. C. Traduisez en franqais: i. The carriage in which van Baerle had arrived in Harlem was old and had squeaking axles. 2. Cornelius was dazzled by the brilliancy of the festival. 3. He was told by the officer who escorted him that the big prize was to be given to the grower of the black tulip. 4. At first, Cornelius thought that could not be true. 5. But the officer told him that the black tulip was yonder on a throne. 6. Cornelius wished to alight from the carriage to look at the tulip, but that was against the orders given to the officer. 7. At this moment, William of Orange arrived. 8. He asked who was the man in the carriage. 9. When he learned who the man was, he permitted him to alight to look at the tulip. 10. Cornelius was so happy that he came near fainting for joy. XXXIII Based on page 215, line 1, to page 219, line 13. A. Faites les questions aux reponses suivantes: i.' Par quatre gardes. 2. Bientot il 'la vit a six pas de lui. 3. L'ceil du Prince s'arreta sur Rosa, sur Cornelius et sur Boxtel. 4. II rappela au peuple quel etait le but de la reunion. 5. Lorsque le Prince demanda au proprietaire de la tulipe noire d'approcher, Boxtel s'avanga. 6. Rosa ! crierent a la fois Cornelius et Boxtel. 7. La tulipe portera le nom de Rosa et celui de Cornelius. 8. Quand Boxtel tomba mort Cornelius reconnut son ancien voisin. 9. A 1'hotel de ville le Prince donna a Rosa cent mille florins. 10. Le meme jour Cornelius et Rosa partirent pour Dordrecht. 248 EXERCISES B. Donnez votre appreciation du roman de Dumas. A quelle epoque et dans quel pays les evenements que raconte Dumas ont-ils lieu? Quels sont les principaux episodes de ce roman ? Quels en sont les personnages les plus importants ? Ayant lu et etudie ce roman de la Tulipe Noire, pourriez-vous vous servir, au besoin, de la plus grande partie des locutions utiles que vous y avez rencontrees? Pourquoi etudiez-vous des romans francais? Peut-on admirer avec intelligence les chefs-d'oeuvre de la litterature francaise sans avoir etudie avec intelligence la langue francaise? A-t-il jamais existe une fleur noire? NOTES Page 1. i. la Haye 'The (or the) Hague.' For all proper names that require comment, see the Vocabulary. 2. des sept provinces unies: Friesland (la Frise), Gelderland, Groningen, Holland, Overyssel, Utrecht, and Zealand, united by the Treaty of Utrecht in January, 1579. Note the capital letters (inconsistently) used on p. 2 (1. 13). 3. Tychelaer. Dumas (or his printer) erroneously spells this name also Tyckelaer (p. 4, 1. 32). 4. Corneille de (Witt) Cornelius De Witt (1623-1672). This de is not the French preposition (used, e.g., in Alfred de Musset), but a Dutch (or Flemish) form meaning 'the.' 5. de (Hollande). In general, it is in old groups that French uses no article after de before names of countries; hence roi de France, but les industries de la France etc.; however, French usage is not consistent in this matter. See p. 2, n. 2. 6. n' etait (not fut). The verb (etait) expresses not an act, but a state. Page 2. i. la republique of Holland. 2. de la (Hollande). Possibly Dumas here uses la because Romains is purely figurative, not a common old group. See p. i, n. 5. 3. du Rhin. Crossed by the army of Turenne and Cond6 at Tollhuis in June, 1672. 4. il est vrai is one of a very few locutions in which il (= 'it') + vb. + adj. need not be followed by de + inf., or by que. Page 3. i. fut (not etait) because Dumas is thinking of an act rather than of a condition having no definite time limits; he might well have written se montra. See p. i, n. 6. 2$0 LA TULIPE NOIRE Page 4. i. Ce fut (not C'etait) because of echappa (pret.). 2. Perce . . . couteau. A concessive clause: 'Though . . .' 3. Ce n'etait (not Ce ne fut) because of fallait. See p. 4, n. i. 4. II vint declarer. A pure infinitive because the idea of purpose (strongly expressed by pour) is extremely faint. Com- pare 'He came and' with 'He came to' etc. 5. 1'avait. Here le (neuter) refers to desespere ; 'had proved' (that he was in despair). Page 5. i. que de. Note that the second infinitive, follow- ing aimait mieux and que, requires de. 2.* que (cet arret). The same que as we find twice in Qu'est- ce que c'est que ca? It serves merely to make what follows more clearly appositive to C'etait . . . peuple. 3. le voir. This le refers (here forward) to the idea expressed by ce . . . assez. See p. 4, n. 5, and p. 67, n. i. 4. etait (not fut) because Dumas is thinking x>f a result and not of the act that brought it about. See p. 3, n. i. Page 6. i. 1'avons (dit). Here le refers forward to the fact described by toute . . . homme. See p. 5, n. 3, and p. 67, n. i. 2. il (est vrai). See p. 2, n. 4. 3. bien autrement 'in a very different way (or sense)'; by implication, 'far more.' Page 7. i. dans 1'esprit. Note the idiomatic change from a (in au coeur) to dans (before 1'esprit), also that a could not stand, with this meaning ('in'), before son coeur. 2. brave scelerat. Not 'brave' but 'worthy.' The adjec- tive necessarily precedes. Why? (See p. 19, n. 3.) 3. en ... maudire 'had gone so far as to curse' etc. See p. 65, 11. 24-25, and the note. 4. de (Corneille) 'of a (Corneille).' Here de serves merely to mark apposition, as in la ville de Paris, un amour de petite chevre, etc. 5. Ce a quoi. Note that ce requires the now purely neuter form quoi. Natural English equivalents might be 'A cry at which' or simply 'Whereat' etc. 6. criait ... la foule. In French, all verbs are inverted thus after a quotation; in English, only a few forms, mostly short: 'said she,' 'asked John,' 'cried the mob,' etc. NOTES 251 7. du (Corneille). A striking popular use of the article. The speaker wishes to express contemptuous hatred. The article is here akin to the demonstrative adjective. 8. le (Jean). Note the effect of omitting both du and le. Page 8. i. de courir. Archaically, ... an infinitive with de is employed now and then instead of a finite verb describing a vivid consequent activity. The subject must be a noun or stressed pronoun and must differ from that immediately pre- ceding. 2. demeurait. Note that qui gardait means 'that was guard- ing'; demeurait likewise marks no definite time limits, but English hesitates to use its progressive forms unless the verb expresses some marked activity. 3. ne 1'etait. When comparison is expressed by verbs, literary French always inserts ne before the second verb. This use of ne originated (long ago) through the confusing (blending) of two ideas. Here we may conceive first that the. crowd was not so threatening because of its shouting etc. To what does the le of 1'etait refer ? 4. seul . . . qui defendit. A characterizing subjunctive due to seul. Note that French has only one group of subjunc- tive forms (here defendisse etc.) to express the tense-values of the two indicative groups called the past definite and the im- perfect indicative. Here defendit represents defendait. 5. le voulez. To what does this le refer ? Page 9. i. et laisse. Why is it unnecessary, in French, to repeat the pronoun (le) ? 2. de (dix-sept a dix-huit ans). English requires 'of from' etc. Here French has to express these two different ideas with a single de. Likewise, we always find que for ( que que, as in j'aimerais mieux que ce soit lui que [ = que que] ce soit moi. 3. la (belle fille). The article is used thus only in very familiar address. Here English might give 'my fine lass.' 4. peut-etre se calmera-t-il. Subject and verb are habitually inverted after peut-etre ; also after a peine, aussi (' accordingly ') , and after various other adverbs or adverbial conjunctions. Page 10. i. que . . . son pere. The clearly accusative 2$2 LA TULIPE NOIRE character of que enables French, without ambiguity, to em- phasize thus the truly emphatic word here pere. However, subjects so inverted are not always necessarily stressed. Often we can preserve the French emphasis by using an English passive construction. 2. Corneille. About three unessential pages of the original text have been omitted. 3. auquel is used here, instead of a qui, to impart a certain legal tone. Page 11. i. murtnurait. Here 'murmured' would properly correspond to murmura. A good way to learn the meanings of the French imperfect is to test constantly the following possible equivalents, illustrated by il murmurait: 'he was (or kept) murmuring,' 'he would murmur,' 'he could murmur,' 'he used to murmur,' etc. 2. que . . . Hollandais. Here the inverted subject bears only a very slight stress. See p. 10, n. i. 3. Aussi ai-je. See p. 9, n. 4. Page 12. i. vous verrez means not 'you will see,' but 'you shall see.' 2. comme . . . bien. Note carefully wherein French differs from English with its 'how well.' 3. sourire de physionomie (triste). Either sourire or physio- nomie, or the whole group, may be the antecedent of qui. 4. c'est cela que. Only after some form of Stre (here est) can the strong form cela (or ca) precede the relative (que); here cela is heavily stressed. 5. sommes (. . . aimes). Wherein different from on ne nous aime guere? 6. Vous vous etes. In good French, no reflexive or reciprocal construction containing a past participle ever allows any aux- iliary but etre. Hence je me suis cache contrasting with je vous ai cache. Is ' You have concealed yourself ' a correct equivalent in respect to the time of the act ? Page 13. i. tous deux. Without les, in this and in like groups (roughly, up to dix), French usually implies 'together'; but this more or less arbitrary distinction is commonly not heeded by Dumas. NOTES 253 2. eussent (reussi). In authentic familiar conversations no form of the simple past subjunctive is ever used, and this group of forms was nearly obsolete in 1672; nevertheless, even in sup- posedly realistic dialogues, the simple past subjunctive (in all its forms) is more or less frequent. Here the living form would be avaient, and for the next eussent we should find auraient. Page 14. i. le laissera prendre. This typically French (or very un-English) construction becomes easy to understand if correctly explained: prendre is here an active (transitive) verb, direct object of laissera ; le is the direct object of prehdre, not of laissera. Page 15. i. soit. Here est would be possible; by using soit, Dumas expresses possibility: ' may be.' 2. Nous morts ('We being dead')- A suspended absolute clause. See p. 118, 1. 12. Page 16. i. Faites-le entrer 'Show him in.' Here le (not elided) is both the object of Faites and the subject of entrer, which is intransitive. 2. vous verriez 'you should see' (not 'would'). See p. 12, n. i. 3. Dechirez-en . . . feuille. Note that en here means 'out of it.' This line has an important bearing on the fate of Corne- lius De Witt. 4. des chairs. Note the plural, brought out in English by 'open gashes in the flesh.' Page JL7. i. ruisselait 'was streaming' (rather than 'streamed'). See p. n, n. i. Page 18. i. un etranger. Good old-fashioned story-teller that he is, Dumas feigns not to know the stranger's name. 2. ne cessait (d'essuyer). Likewise, pas is commonly omitted with savoir, pouvoir, oser, and a few other verbs. Page 19. i. qu'il ne. See p. 8, n. 3. 2. sur elle. After most prepositions, French hesitates to use lui, elle(s), and eux of sexless things, unless there is at least some degree of personification; but here la-dessus (the usual substitute for stir lui etc.) would be clumsy. One could not say sur lui in reference to, say, un toit 'a roof.' 3. brave homme . . . homme brave. A few French adjec- 254 LA TULIPE NOIRE tives (as bon) always, or almost always, precede the noun they modify; when an adjective may either precede or follow (as here), by being made to follow the noun, it more emphatically establishes a class (here the class of brave men). Why la catho- lique Espagne, but 1'Irlande catholique ? Page 20. i. n'oserais etablir. See p. 18, n. 2. 2. voulut (parler). At a definite moment, Bowelt 'wished (attempted) to speak.' What would voulait mean ? Page 21. i. A quoi? 'Beware of = prendre garde a. 2. il . . . beaucoup qui. Why not simply deputes, beaucoup ont etc. ? 3. Tu (as), instead of Vous (avez); why? 4. de la (sorte) = 'in that (fashion)'; the definite article was originally a demonstrative adjective, and this value survives in de la sorte. 5. 1'altesse (also 1'Altesse) = 'his Highness.' Page 22. i. que (cet officier). See p. 5, n. 2. 2. s'emplissait 'was filling' (not 'filled'). See p. 8, n. 2, and p. ii, n. i. 3. en 1'air. This literal meaning is usually expressed by dans 1'air. Page 23. i. que faisait . . . ce flux d'hommes. See p. 10, n. i. 2. en 1'air. Comment on this group. 3. les armes basses. An absolute (a suspended) adverbial clause; see p. 19, n. 3 (basses answers the question wher^e?). 4. homme is here virtually an adjective; we say ' be man enough to ' but ' be a man to.' 5. dessus (not sur lui). See p. 19, n. 2. Page 24. i. et se garde 'and should be kept.' French reflexive constructions commonly express duty, fitness, possi- bility, etc. 2. que perdait. The stress falls on capitaine. See p. 10, n. i. 3. on voit (instead of on le voit). See p. 5, n. 3. Page 25. i. Donne 'Give' requires an object. Likewise prends or prenez often means 'take it' ('take them'). 2. hors la ville. Somewhat archaic; more colloquially, hors de I& ville. See p. 39, 11. 28^29. NOTES 255 3. allez avoir is grammatically equivalent to aurez, and du moment que = aussit6t que. 4. ne pourra (marcher). See p. 18, n. 2. Page 26. i. elle (ne me quittera jamais) 'it [the Bible] shall never leave me.' See p. 12, n. i. 2. dit-elle. Why not elle dit ? See p. 7, n. 6. Page 27. i. rentra fermer. See p. 4, n. 4. Page 29. i. messieurs les 'the honorable,' or possibly 'their honors the'; we say 'Mr. President' etc., bat have no plural to fit messieurs les in this context. 2. il en (veut). Here en stands for du mal 'ill.' Page 30. i. qui . . . supposer? Here qui = qu'est-ce qui (' what ') and is noteworthy as a survival of what was once rather general usage: Qui fait 1'oiseau? C'est le plumage (La Fon- taine). Properly, the question should end thus: supposer? . . . Page 31. i. d'une . . . de 1'autre 'in either case,' 'any- how.' Note this use of la (!') after d'une. Page 32. i. la (tete). In like cases, Dumas sometimes uses the possessive adjective, even when there can be no doubt as to the possessor; likewise many other French authors and speakers. See p. 77, n. 2. 2. sur 1'honneur. Note le (!'); sur mon honneur would have virtually the same meaning. Page 33. i. 1'intention . . . fait (freely) ' the will is taken for the deed.' Page 34. i. Arrete ! arrete ! Used intransitively; also in the infinitive. See p. 213, n. 5. Page 35. i. apres lui. More usually, merely apres. See p. 19, n. 2. Page 36. i. H ne fait pas bon de (le trahir) 'It's (a) bad (thing) to' etc. n is neuter; in this idiom de is often omitted: n fait bon marcher 'It's pleasant to walk.' Cf. n fait beau (temps). 2. et dusse-je. Here et means 'even'; dusse-je ('were I to') might be expressed colloquially by, e. g., quand meme je devrais. See p. 13, n. 2. 3. que je ne m'en inquiete 'than I do.' In French the stress often falls illogically on the verb, as here, where a partial con- 256 LA TULIPE NOIRE trast is made by the difference between inquietez and inquiete, for inquietez might be replaced by (tu) inquietes without any other alteration. Here en (usually of the third person, if pronominal) means 'about myself.' Page 37. i. H n'avait point . . . que = A peine avait-il (or eut-il); here que means 'when.' 2. un assassin. In the original, un autre assassin. The alteration is necessitated by the omission of six short paragraphs following mon frere? in line 9. 3. un autre. In the original, un troisieme. See the pre- ceding note. Page 38. i. j'eusse pu. Colloquially, j'aurais pu. See p. 13, n. 2. 2. je me presente implies je me suis presente. Cf. j'y demeure depuis longtemps. 3. Ouvre. See p. 21, n. 3, and p. 25, n. i. Page 39. i. prenant . . . dans means 'taking . . . from.' French has no preposition adequately representing our 'from'; hence (when de is not allowable) we find dans, sur, etc.; 'distin- guish a proof from an impression' = distinguer une preuve d'avec une impression ; ' taking a book from the table ' = prenant un livre sur la table. 2. des deux. Supply eperons ('spurs'). 3. Quand il fut (la). To realize why Dumas did not use etait, substitute . . . arriva ( = Arrive 1& etc.). 4. apres s'etre assure = s'etant assure or quand il se fut assure. See p. 12, n. 6. 5. jusqu'a ce qu'il fut. This conjunction usually requires a subjunctive, even when (as here) the idea of hope or of purpose is faint or wholly absent. But note that fut may be merely a misprint for fut. Page 40. i. [il] apercevait = 'he could discern' possibly 'he discerned'; il apercut would mean 'he [suddenly! discerned.' See p. n, n. i. 2. ne (1'etait). Why ne ? See p. 8, n. 3. 3. 1'etait. Here le is required because Start is required. Is Je le suis a natural reply to, say, Etes-vous heureux ? 4. marchands nobles . . . noble ville. Note the chiasmus: NOTES 257 ABBA. In which group does the adjective more clearly classify? See p. 7, n. 2, and p. 19, n. 3. 5. Baerle. Frequently Dumas (or his printer) gives us Baerle, which is probably the correct form. A natural French pronunciation would be Berl [bsrl] or Ba-erl [baerf]. 6. tous is the pronoun ( = 'all of them'); pronounce the s. 7. fussent (frappes) is ambiguous because fussent may conceal (may have expelled) furent, expressing the act of coinage, or etaient, expressing the character of the coins; millesime, applied to coins, means merely 'date'; we might say simply 'though one lot was dated 1640 and the other 1610.' 8. avait (passe). With avoir as its auxiliary (instead of etre) passe generally expresses an act rather than the result thereof. 9. de vie a trepas. A very old locution, as indicated by the omission of la and au; the poet Villon (isth century) jestingly writes de mort a vie. Page 41. i. que de. After c'est etre, this que (see p. 5, n. 2) is never omitted. 2. pour ne 1'etre pas. In living French, pas is never final after an infinitive; the natural order in this case would be pour ne pas 1'etre. 3. a sa facon 'to his own liking,' 'of his own fashioning' (the original meaning of facon). 4. allait (s'augmentant) 'kept (increasing),' 'went on (in- creasing).' Note this French way of emphasizing continuity or prolonged repetition of action. 5. D aima (les tulipes) = 'He became a tulip-lover.' What would n aimait mean ? Page 42. i. de peur ... a Dieu. An extravagancy of rhetoric characteristic of the older Dumas. 2. furent (visites). As in line 6, Dumas is thinking primarily of a definitely timed historical fact; hence fut and furent rather than etait and etaient. Page 43. i. commenca de'. Colloquially, commencer a (a commence a) ; a a might seem a bit cacophonous. 2. depuis . . . suivait 'since . . . had followed' (or . . . 'had been following'). Note how English shifts the tense back. 258 LA TULIPE NOIRE 3. grand' peine. A survival from a time when French had no special form for the feminine of grand. The apostrophe is due to the mistaken assumption (i6th century) that the grand used before mere, place, peine, and other feminine nouns, is a shortened form of grande. 4. commencaient-ils a (plaire). See p. 9, n. 4, and p. 43, n. i. 5. visiter. Words of this type (so nearly English in their form) are particularly liable to be misunderstood. See the Vocabulary in all such cases. Page 44. i. lequel. Why not qui ? 2. que (ce malheur). What is this que ? See p. 5, n. 2. 3. H sut is preterit because Dumas can thus definitely lime Boxtel's approach to gratitude. What would savait mean ? See p. 3, n. i, p. 5, n. 4, and p. 20, n. 2. Page 45. i. Boxtel ne put. Why not ne pouvait? See' the preceding note. Page 46. i. a (en etouffer de rage). This whole infinitive clause is equivalent grammatically to an adjective, and it ex- presses a result. 2. qui se puisse. Colloquially, qui puisse s'imaginer. 3. Boxtel eut (une crainte) 'Boxtel [then] conceived a fear* ('got frightened')- See p. 41, n. 5. .Page 47. i. le (penser). See p. 6, n. i, and p. 43, n. 5. 2. il eut (applique), and not il avait (applique), because the dependent clause (du moment oft etc.) expresses only one (very recent) antecedent activity. 3. n'avait tant cree apres Dieu. Another bit of high-flying rhetoric (cf. p. 42, n. i), possibly the source of Th6ophile Gautier's declaration regarding the enormous number of persons 'created' by Honord de Balzac. 4. pour prendre = 'to get [an idea of a lost soul forgotten by Dante].' Hardly 'forgotten,' for in his Divine Comedy (composed between A.D. 1302 and 1319) Dante has a special punishment for jealousy and envy, and d'un damne can hardly mean anything except a type of sinner damned to suffer in Hell. Page 48. i. aperfut-il. Inversion is not required by que de fois, as it is by certain other adverbs or adverbial groups (cf. p. 9, n. 4). As to the tense, see p. 40, n. i. NOTES 259 Page 49. i. quoiqu'il eut (opere). The form expelled by this inevitable subjunctive is aurait (opere) = 'he would have (worked).' Page 60. i. aurait tombe. This use of avoir, instead of serait (with tombee), is characteristic of le francais du peuple (French folk-speech) and contrary to academic usage; the con- ditional expresses here a purely imaginary situation; we might translate: 'there should have fallen a bomb,' but this is explana- tory rather than idiomatic. Page 51. i. s'arrachait etc. (freely) 'was angry enough to tear out his hair'; s'arracha would, express the literal act. 2. comme elles faisaient. Standing for some other verb (here trembler), faire is far less common than 'do'; often it is preceded by neuter le. 3. n'avoir pas (ete soupconne). Here pas does not end the clause; see p. 41, n. 2. 4. eussent. In colloquial French, auraient. See p. 13, n. 2. Page 52. i. son application ' its applicability ' or ' the application of it.' Note this value of son. 2. Van Baerle fut. Cf. p. 3, n. i. 3. au nombre (de) ' among'; also dunombre (de). 4. lorsque lui n'avait ' at a time when he had '; avait (instead of eut) because the antecedent action is neithen immediately ante- cedent to the action expressed by apercut nor its basis. Page 53. i. D remerciait (not remercia) because Dumas wishes to emphasize the continuity (or possibly the repeated ex- pression) of Cornelius's gratitude. Page 54. i. 1'hiver . . . le. Except in a very few sur- vivals of medieval syntax (e.g. sans coup ferir 'without striking a blow'), French cannot make a noun-object precede its verb unless le, la, or les is inserted, as here. 2. allait-il. Note passait-il after Aussi 'Accordingly,' in line 2, and see p. 48, n. i. 3. eurent (visite), and not avaient (visite), because only one (immediately) antecedent act is expressed by apres que etc. See p. 47, n. 2. Page 55. i. cette idee que = 'the idea that.' Cf. ce in ce fait que = 'the fact that.' 26O LA TULIPE NOIRE 2. ef\t (contenu). Colloquially, only avait. See p. 13, n. 2. 3. cut (pas tenu) . Colloquially, only aurait. Page 56. i. a son filleul 'by his godson' whom French syntax, with a, here treats as the indirect object; when ambiguity is possible, a commonly is replaced by par. 2. qui vint (rather than qui viendrait or qui pourrait venir) because of the 'attraction' exerted by eut and fut. 3. 1'avons (vu). See p. 5, n. 3, p. 6, n. i, and p. 23, n. 3. Page 67. i. florissant dans son ignorance 'blithely ig- norant,' 'in all the blitheness of his ignorance,' or the like. Page 58. i. toutes (choses). Here toutes is a pronoun meaning 'all these [being things]'; though it refers to two masculine nouns, as well as to proclamations (/.), it is attracted into the feminine by choses. Page 59. i. se delectait 'would delight'; then (for s'ab- sorbait) 'would become absorbed.' See p. u, n. i. 2. Craeke. Dumas spells this name also Craeke. 3. se precipitait 'was dashing'; see p. n, n. i. Page 60. i. un (intact). Being here a pronoun ( = 'one'), un must not be linked to intact; we might insert qui est. Page 61. i. Pour quoi faire? Here quoi is the object of faire (cf. Que faire?), though its form seems to make it the object of Pour, whose object is really faire. French does not allow pour que faire. 2. N'importe ('No matter,' 'Never mind') is a special locu- tion with which pas is never used. See p. 18, n. 2. Page 62. i. la feuille de la Bible is destined to play a great part in Van Baerle's fate. 2. quoiqu'il connut. If the verb could be indicative, what would be its form? 3. Je le suis. The use of etre (suis) entails that of le. This statement (rather than, say, Oui, monsieur le juge) has an ex- tremely formal tone. See p. 40, n. 3. Page 63. i. qui est fixe = qui a pris son parti. 2. indiquait. , Unlike English in such cases, French may visu- alize the act as something going on, even when the act is def- initely timed by the context and is really instantaneous. Page 64. i. le paquet . . . demeure 'the parcel that had NOTES _ 26l remained.' Note that demeure, reste, arrive, and other like past participles, are frequently used thus with no relative clause. 2. qui s'offrirent. Indicative, in spite of les premiers, be- cause Dumas is not emphasizing the fact that the sheets were the first that the magistrate happened to see, nor that they might have done something else than s'offrir a ses regards. 3. Comment! que je vous suive ! 'What! Am I to follow you!' Here, as where this que happens to mean 'let's,' a desire is at least implied; we may supply voulez-vous. 4. qui perdait. Not 'who lost' but 'who was losing.' See p. ii, n. i. Page 65. i. a lui remis ( = qu'on lui avait remis). Note how the fixed series thus exemplified (prep., pron., p.p.) differs from the fixed English series 'handed (to) him,' 'known to me,' 'given me.' 2. Boxtel . . . sut 'Boxtel learned.' Similarly il cut often means 'he got.' Why? 3. Boxtel . . . de sa (recherche). In this idiom, le point oft . . . de ('the point at which ... in') explains en in en etait, p. 7, 1. 15. Page 66. i. au lieu que ce fut 'instead of its being.' If au lieu did not require the subjunctive (here expressing unreality), we should expect serait, corresponding to serait and aurait in line 13. 2. gueules de bronze de Venise. Into these 'bronze jaws' (' throats ') the Venetian government had encouraged informers to put their signed or anonymous notes. Thus innocent persons often suffered with the guilty. Page 67. i. nous avons vu. Here a le which might idio- matically stand for the fact expressed by s'etait acquitte etc. is omitted. See p. 4, n. 5, p. 5, n. 3, and p. 6, n. i. 2. soit honte, soit faiblesse 'whether through a sense of shame or through weakness.' Note that par is not required. 3. dans le crime 'in crime' rather than 'in the crime'; but in either case French syntax requires le. Page 68. i. les archers. Presumably acting as police, like the francs-archers created by Charles VII of France. 2. restait a accomplir (le second) freely, ' now for the 262 LA TULIPE NOIRE second.' A few French verbs (mostly intransitive), of which rester is perhaps the most frequent, may thus be initial (inversion without il ' there '). Page 70. i. apres elle. See p. 35, n. i. 2. le matin meme 'that very morning.' See p. 21, n. 4. 3. etait dressee 'was standing.' Why? Note that French has no single verb equivalent to 'stand.' 4. 1'affaire de Boxtel 'what Boxtel needed.' Cf. p. 43, n. 5. 5. atteignait. Why not atteignit ? ' Page 71. i. il eut beau chercher 'it was useless for him to search.' In this idiom, the adjective was originally felt to modify the infinitive (beau chercher but bel aller) and had an ironical value ('he had a fine seeking'). 2. ou les a-t-il-pu. Colloquially, ou a-t-il pu les etc. Cf. p. 46, n. 2. 3. a s'aplatir 'hard enough to smash . . . flat.' See p. 46, n. i. 4. n aura eu expresses probability; see end of note on aurait tombe (p. 50, n. i). Page 72. i. etait (preoccupe). Why not fut? See fut ecroue, 11. 15-16. 2. et qu'il. Instead of repeating in full lorsque, parce que, and like forms, French usually has simply que. Note that quand (also comme) has, by analogy, the same effect as the initial forms with que. 3. sourire de geolier 'jailor's smile.' Here geolier refers to jailors in general. 4. pour Vexil 'to go into exile.' Dumas italicizes because he really means 'to go to his death.' Page 73. i. il entrait. Here English allows, and even favors, 'he was entering.' See p. 53, n. i. 2. reste seul. See p. 64, n. i. 3. blanc manteau (rather than manteau blanc) follows the style of la blanche neige. See p. 19, n. 3. 4. un triste regard. More normally, un regard triste. See P- 19, n. 3. Page 74. i. lui montrait. Here 'was showing him' would be impossible. See p. 63, n. 2. NOTES 263 2. ou 1'on. This use of le (!') for the most part not col- loquial is allowable when on is not closely followed by the pronoun le, la, les. Page 76. i. destruction de. Here de is clearly preposi- tional ('of'); the partitive group must give up its de, for de de si douces esperances would not be French. Cf. p. 9, n. 2. 2. tin sombre desespoir dont. If sortit meant literally 'is- sued,' dont would be replaced by duquel or by d'ou. Page 76. i. comme il. Here il refers to Gryphus; comme Gryphus . . . dit-il (line 7) would have been clearer. 2. un mort 'a dead man,' 'a corpse.' In its power to make nouns of adjectives, French far surpasses English, which, in translating French, often has to add some inaccurate noun or a clumsy 'one.' 3. lui vint (instead of vint a lui) because here the coming is purely figurative. 4. qu'il y avait fracture. Unmodified nouns are rather com- mon after il y a (avait etc.). 5. laisse. Properly laissee, because la plainte is feminine. But laisse sounds like laissee. Such 'mistakes' are very com- mon in French, especially in manuscripts. Page 77. i. mon devoir de Chretien ' my duty as a Christian' or 'my Christian duty.' Cf. p. 72, n. 3. 2. ses yeux. French is not wholly consistent; see p. 77, n. 3. 3. les yeux. The usual style (in referring to parts of the body) when there can be no doubt as to the possessor, when the noun is not the second of two such nouns, as on p. 92, 1. 10 (latete . . . dans ses bras), and when the noun is not modified, as e.g., in sa jolie main. Page 78. i. me (remettre le bras)? Why not pourriez remertre mon bras? (Cf. p. 77, n. 3.) How could one prove that this me is dative ? 2. que vous (faut-il). Is this vous dative or accusative ? See the preceding note. . 3. ses (manches). Cornelius is playing surgeon: ses = 'his own.' 4. cela que. Why is cela allowable here before que ? See p. 1 2, n. 4. 264 LA TULIPE NOIRE 5. (pendant que) je vais soutenir = je soutiendrai. See p. 25, n. 3. 6. dessus is used to avoid sur elle because after prepositions French hesitates or refuses to apply elle-(s), lui, and eux to sexless things. See p. 35, n. i. Page 79. i. nous lui en. Here en = 'with it'; de lui would be impossible; see p. 19, n. 2. 2. L'etaient-ils, eux . . . ? 'Were they ...?'- Us must not be stressed. See p. 89, n. i. 3. que vous le soyez, coupable. Here coupable has to be added because otherwise le would not refer to anything. Page 80. i. vous sauver, vous = 'save you.' As vous pre- ceding sauver is proclitic (conjunctive), it must not be stressed; sauver vous would be impossible; hence the second vous. 2. il sera trop tard. This il is neuter; one could not correctly say elle sera trop tard. 3. impatiente. Here, as often, French uses an adjective in- stead of the corresponding adverb (impatiemment) . 4. si fait. Originally, si fais (Latin sic facio 'so I do,' sic facts 'so you do') for the first and second singular, si fait (sic facit'so he does') for the third singular, etc. Only si fait ( = 'yes, of course,' 'yes, I do,' etc., according to the context) survives, and si fait is now applied indifferently to all 'persons' and to both numbers. Note that, like si alone, si fait denies or con- tradicts a negative statement. 5. ces scelerats de de Witt. On the second de see p. i, n. 4, observing that French allows, e.g., je parle de de Musset 'I am talking of [M.T de Musset'; otherwise de de is ruled out (see p. 9, n. 2, and p. 75, n. i). On the first de see p. 7, n. 4, noting that English usage allows 'scoundrel of a De Witt' and even 'scoundrels of De Witts.' 6. ce . . . pis 'the worst thing possible'; pis is here a neuter substantive adjective. Page 81. i. de jamais (revenir). What determines the meaning of jamais ? 2. la belle (freely) 'my handsome lass'; see p. 9, n. 3. 3. (quand vous y) venez. Were Rosa thinking exclusively of the future, the verb (following quand) would have to be viendrez. NOTES 265 Page 82. i. H . . . point 'He made no attempt to deny it.' 2. H ('It') is justified by the que-clause and the context keeps it from meaning 'He.' 3. impliquait expresses not an act but a state; hence not 'was involving' but 'involved.' See p. 70, n. 5. 4. en politique. Any other preposition would require la; e.g. pour la politique. 5. qu'il dit. Here dit (necessarily subjunctive because of the negation) expels disait. Having only two groups of .simple forms, the subjunctive necessarily cannot time actions or states so accurately as can the indicative with its five simple groups. Page 83. i . put (a characterizing subjunctive) expels pourrait. 2. courut (subjunctive because of the negation) expels cour- rait ; in other cases it might have expelled courait or courut. Page 84. i. la voie que j'ai dit, and not . . . dite, be- cause here it is not la voie but rather some unexpressed thought, such as que ce paquet avait suivie, that is felt to be concerned by dit. See p. 92, n. 3. 2. j'ai su ('I learned') is the colloquial equivalent of je sus. See p. 44, n. 3, and p. 65, n. 2. Page 85. i. du (Buytenhoff) . The original text (incor- rectly) had de. 2. s'etait venue placer. A purely literary (archaic) arrange- ment; in living French, etait venue se placer. Page 86. i. est la chose? 'is the thing to occur?' 2. Monsieur, pour midi. A speaker of higher rank would have been more likely to say Pour midi, monsieur. 3. Fallait suivre. More colloquially, allait le suivre. Cf. p. 85, n. 2. 4. et qui tremblait. Possibly to avoid the ill-sounding group blanc et tremblant. Page 87. i. puis-je. A complementary infinitive (here faire) is obviously not required. Page 89. i. que moi j'aimais 'as / loved'; moi is inserted because je must not be stressed (much less may j'!). See p. 79, n. 2. 2. une larme tremblante. More correctly tremblant, be- 266 LA TULIPE NOIRE cause the form in -ant(e) is here not an adjective but a participle: 'a tear trembling on the edge' and not 'a trembling tear, on the edge.' Note tremblanteTau = tremblanfau. 3. m'avoir (un crayon) 'get me (a pencil).' Note that avoir may .mean 'get' just as savoir may mean 'learn' if the 'hav- ing' and the 'knowing' are instantaneous acts. See p. 84, n. 2. 4. que (je vous 1'ecrive) 'so that (I may write it for you)'; when preceded by an imperative, que often has this value (pour que). Page 90. i. les initiates de C. W. means, not 'the initials of C. W.,' but ' the initials C. W.' Cf. le mot de justice = le mot justice. See p. 7, n. 4. 2. Parrain. See p. 218, 11. 25-28. 3. ce livre avait en lui. Here ' the book ' is more or less personi- fied; hence the unquestionable correctness of en lui (see p. 35, n. i). 4. Ecrivez dessus (instead of Ecrivez sur lui) because the book is here regarded as a purely sexless thing; there is no per- sonification. See the preceding note and p. 78, n. 6. Page 91. i. en mon lieu et place. A locution dating from a time when a single form of the possessive adjective could com- monly govern two or more nouns, even of different genders (place is feminine). A special (archaic) locution because the syntax which it exemplifies cannot correctly be generalized. 2. et elle en sante ! 'and her in good health!' 'May God find me . . . ! ' Note where the stress falls in the French. 3. je ne saurais 'I really couldn't.' Usually without pas. Page 92. i. si mourante 'so utterly exhausted.' Cf. p. 89, n. 2. 2. la tete . . . ses bras. A typical group: first the article, then the possessive adjective. See p. 77, n. 3, and cf. p. 93, 1. 9. 3. les prescriptions [f.] que je vous ai dites. Here the parti- ciple agrees. See p. 84, n. i. . 4. qu'avaient entendu. Translating with 'heard by,' we can throw the stress where it falls in the French. See p. 10, n. i. 5. en amis ... en persecuteurs. Each pluralizing s is silent. Only the context shows (except to the eye) to whom the nouns following en ('as') refer. NOTES 267 Page 94. i. quoi qu'il en eut 'whatever he was getting out of it,' 'whatever it was costing him' (or ... 'was going to cost him'). Here eut (subjunctive because of quoi que) appears to have expelled aurait. 2. ses yeux. Would les yeux be possible in this case ? See p. 77, n. 2. 3. le vent froid de 1'epee. A natural fact? or pure rhetoric? Page 95. i. d"es mains assez douces. Apparently, 'gentle enough,' or 'not ungentle'; but possibly assez is introduced to avoid the abruptness of des mains douces. 2. commenca de (instead of commenca a). See p. 43, n. i. 3. la justice celeste. Would the motive thus assigned be truly creditable ? 4. condamnait expresses not an act but the condition result- ing from an act. See p. n, n. i, p. 70, n. 3 and 5, and p. 82, n. 3. 5. trop peu coupable = 'not guilty enough' (peu coupable = 'not very guilty'). 6. Cornelius. In the original text, Corneille a variant ex- plained by p. 2, 1. 6. Page 96. i. faire sa prison perpetuelle = 'to serve his life-sentence.' 2. la poitrine . . . sa tete. Why not la ... la or sa ... sa ? See p. 92, n. 2. Page 97. i. quand le bourreau avait amene. Here both the antecedent act and the act following it are expressed with the pluperfect; fit (instead of avait fait) would require eut amene. See p. 47, n. 2. 2. que (devait cacher). See p. 10, n. i. 3. pour . . . molosse 'because of ... watchdog.' As for un fond de culotte, we might say 'a breeches-seat' (cf. coat- collar' etc.). Cf. p. 12, n. 3, and p. 77, n. i. Page 98. i. alia trouver = 'sought,' 'went off to see,' or the like. See p. 4, n. 4. 2. ses fulipes sur le cceur. See p. 77, n. 3, and p. 98, n. 3. 3. mourait. A vivid substitute for serait mort, or possibly for mourrait. v 4. ses caieux sur son cceur. Cf. p. 92, n. 2, and p. 98, n. 2. 5. qu'une somme. What is this que (qu') ? See p. 5, n. 2. 268 LA TULIPE NOIRE Page 99. i. c'est (qu'il) 'the reason is' or 'the reason was.' Whatever may be the tense of the following verb, est is frequent because French commonly makes the explanation present. 2. 1'affaire. Lesquels. The pause is too marked to allow 1'affaire; lesquels. But why not qui ? 3. D voulut. Why not H voulait ? See p. 20, n. 2. Page 100. i. que (d'etre enferme). What is this que ? See p. 5, n. 2. 2. le savant M. Grotius 'the learned Mr. Grotius,' rather than 'the (great) scholar, Mr. Grotius.' Cf. la catholique Espagne. See p. 19, n. 3, also p. .106, n. i. 3. tout frissonnant. This form in -ant is not adjectival but participial, and au soleil is its adverbial complement. See p. 57, n. i, and p. 89, n. 2. 4. y peuvent. More colloquially, peuvent y. Cf. p. 46, n. 2, and p. 86, n. 3. 5. Quelqu'un qui attacherait . . . courrait = Si quelqu'un attachait . . . il courrait. Is courrait pronounced like courait ? Page 101. i. de ses (nouvelles) = ' (news) of himself.' Note this meaning of ses. 2. vingt-huit ans. See p. 3, 1. 13. 3. et qu'on ( = et quand on). See p. 72, n. 2. Page 102. i. commenca par manger 'first devoured' - 'ate' would destroy the figure of speech. ' 2. Ce que voyant [,3 les pigeons 'Seeing which, the pigeons.' Cf. p. 7, n. 5. 3. Loewenstein. Dumas (or his printer) gives also Loewe- stein, Loevenstein, and Loevestein. 4. entre (ses mains). In line 27, dans (les mains). . Page 103. i. 1'histoire (du pigeon) 'the pigeon episode.' Note histoire de rire 'for a joke.' Page 104. i. Des que j'ai regu. More correctly (unless the acts are intended to be thought of as virtually simulta- neous), Des que j'eus recu, and, colloquially, either Des que j'ai eu recu or Aussitot (apres avoir) recu. 2. il y vint. Colloquially, il y est venu. Note the sudden shift to the purely literary form and see n. 3. 3. je lui demandai. Colloquially, je lui ai demande. Like NOTES 269 the simple past subjunctive (note troquat, line u), the past definite forms are now obsolete in everyday conversation, and were either obsolete or obsolescent as early as 1672. Page 106. i. pas de grimoire 'no devilish scrawling.' The books written by Grotius were in Latin and common folk as- sociated Latin with the Black Art; grimoire (like grammaire and our 'gramary') was derived from grammatica, which in those days was applied only to Latin grammar or to Latin. (Hence our grammar schools.) 2. ce que vous dites la. The value of this la is evident, but how shall we translate it ? 3. 1'un (de). Here the article has some slight demonstrative value. Cf. p. 215, n. 2. 4. mon second (pere). Why second rather than deuxieme? Why seconde (and not deuxieme) nature ? 5. un peu (cela) '(that) a bit,' or '(that) if you please.' Similarly Dites-moi un peu 'Just tell me.' Page 107. i. a quelque chose a lui? 'has a right to own anything?' 2. repliqua Gryphus. Why not repondit? Why the inver- sion ? (See p. 7, n. 6.) 3. bouilliront 'shall boil' (not 'will boil'). See p. 12, n. i. 4. tinssiez. Colloquially (then as now) teniez. Even the most 'realistic' French dialogues frequently contain in books verb-forms that would never be used in genuine conversations. 5. Ce . . . perdu. A proverb quoted in various collections. 6. je leur tordrai le cou. A distributive singular; frequent in French; here English requires 'necks.' 7. cette mechante (promesse). Meaning ' malevolent ' or malicious,' mechant-e usually follows its noun (compare un mechant livre ' a wretched book ' with un livre mechant ' a malicious book'). See p. 19, n. 3, and observe the close con- nection, between promesse and a Cornelius. 8. de le (fake). To what does le refer ? See p. 4, n. 5. Page 108. i. et comme il avait (ferme) = 'and when he had (closed).' What verb-form would quand require? See P- 54, n. 3. 2. sur laquelle fixait . . . Cornelius. Cf. p. 7, n. 2. 270 LA TULIPS NOIRE 3. Mais comment . . . pour 'But how did you manage to'; also trouver moyen de. Page 109. i. precieux tresor. Why not tresor precieux? See p. 19, n. 3. 2. et (vous) 'and yet (you).' French is full of traps for the unwary ! 3. j'ai beni. Note that je benis^ may mean either 'I bless' or 'I blessed,' and that je benis, here, would necessarily be am- biguous; hence possibly the so-called passe indefini, though j'ai beni expresses here a definitely timed act and is, therefore, the (colloquial) equivalent of a passe defini. See p. 104, n. 3. 4. nous pleurames. Then (and still more so now) a bookish substitute for nous avons pleure. See p. 104, 3. 5. j'ai tenu dans ma (main). Usually la (main), but perhaps Rosa means 'my own hand.' Page 110. i. je me les faisais lire. Here me is the indirect object of lire, which is the direct object of faisais and has les as its direct object. 2. depuis . . . je les brule 'for some time now I have been burning them.' What would brulais mean ? 3. toute rougissante. Here toute is adverbial; rougissante is an adjective (not a participle). See p. 100, n. 3. Page 111. i. le voir. Why le ? See p. 5, n. 3. 2. depuis qu'il avait 'since he had had.' See p. no, n. 2. 3. eut-il. Colloquially, meme s'il avait, or (more likely) quand meme il await. 4. oft il cut (voulu). Colloquially, oft il aurait (voulu) = 'he might (would) have (liked).' 5. eut (paru) = aurait (paru). Each French substitute in notes 3-5 represents the colloquial form or the literary form. 6. qui put 'that might' (not 'that could'). Subjunctive (in- stead of pourrait) because of the ideality of the result. 7. sa (blanche main). Were the hand Van Baerle's, the descriptive adjective would still require sa. See p. 77, n. 3. 8. sa blanche main. Why not sa main blanche ? See p. 73, n. 3. 9. du bout de ses 'with the tips [cf. p. 107, n. 6.] of his.' Note sa = ' her.' NOTES 271 Page 112. i. fortune . . . sac. Our proverb warns against putting all one's eggs into the same basket. 2. que 1'on regarde 'that has been considered.' See p. no, n. 2. 3. le jour que. Why que instead of ou ? Page 113. i. auraient manque. In English, 'should fail' rather than 'should have failed.' 2. J'ai compris. Here English seems to require 'I understand.' 3. tels (perhaps so written by Dumas) should be telles. Why ? 4. si (notre jardin) 'to discover whether (our garden).' Note this value of si. Page 114. i. des trous . . . des rats. In which case is des merely an indefinite adjective ? 2. et 1'on. One of a few cases in which le (!') prevents hiatus before on. 3. n'entrera 'shall enter' (not 'will enter'). See p. 16, n. 2, and p. 26, n. i. 4. me venir (instead of venir a moi) because here venir ex- presses purely figurative movement. See p. 76, n. 3. 5. lui apportait 'would bring him.' See p. u, n. i. Page 116. i. ce que . . . de soins 'what [ = how much] care.' Note this typically French arrangement of words. Cf. p. 12, n. 2. 2. pensee. Dumas may have intended to write pensees (pi.). Very often French can differentiate plurals from singulars only for the eye. 3. U y a instead of n y avait, like C'est que instead of C'etait que, Ce fut que, etc. This use of a becomes clear if we translate: 'I have in mind.' See p. 99, n. i. 4. C'etait. Here C'est would be at least possible. See the preceding note. 5. la dependance . . . de son pere 'Rosa's dependence on her father.' Note how radically French differs from English in this case. 6. etaient (separes) expresses not an act but a condition re- sulting from an act. See p. 5, n. 4. 7. aurez pense. Unlike English (with 'you have thought'), French logically employs a clearly future verb. 272 LA TULIPE NOIRE Page 116. i. notre volonte a nous-memes 'our own will.' Cf. mon pere 8. moi 'my father.' 2. et qu'il. Why not et parce qu'il? See p. 101, n. 3. 3. avons-nous dit. Inverted as in true dialogue. See p. 7, n. 6. 4. Alors . . . plume. This 'scene' is in fact a favorite of novelists and playwrights. Page 117. i. qu'une. What is this que (qu') ? See p. 5, n. 2. 2. trop grave . . . pour que . . . ne s'informat (pas) 'too serious for Cornelius not to inform himself.' Note this difference between French and English idiom. Page 118. i. futes is wholly uncolloquial; likewise sortit (line 12) and vint (line 13). 2. Moi sortie 'I having gone out' ... moi venue 'I having come.' See p. 15, n. 2. 3. il y (vint). To what place must this y refer ? 4. Me voir, moi? See p. 80, n. i; also p. 89, n. i. 5. ne se peut interesser. Colloquially what ? See p. 46, n. 2, and p. 71, n. 2. 6. vous . . . connait. Where should the stress logically fall in the text ? See p. 36, n. 3. 7. je vis. Purely bookish. What is the colloquial form ? See p. 104, n. 3. 8. je n'eus (pas). Why not je n'avais (pas) ? Cf. p. 46, n. 3. Page 119. i. qu'il ne 'but that he' better, '-without his ' etc. Why no pas after rendit ? 2. votre tulipe, & vous? See p. 116, n. i. Page 120. i. planterai-je expresses obligation. 2. voyez-vous is a softened imperative, with the subject (vous) expressed; vois-tu may have the same function. 3. elle ecouta inquiete. See p. 80, n. 3. Page 121. i. on 1'entend de loin, lui. See p. 118, n. 4. 2. une porte qui se fermait. After verbs of perception, rela- tive clauses commonly replace infinitive clauses (here, se fenner). 3. huit jours 'a week'; so quinze jours = 'a fortnight.' Explain these idioms. Page 122. i. A quoi? See p. 21, n. i. NOTES 273 Page 123. i. criait 'kept crying,' 'kept yelling.' See p. n, n. i. 2. repliquait. Why not repondait ? Page 124. i. la laissait. Possibly a little more vivid than 1'aurait laissee. See p. 98, n. 3. 2. des tulipes is purely appositive; might be omitted, but is emphatic. Rewording, we could get: On vous donnera autant de tulipes que vous en voudrez. 3. Elles vous valent et vous les valez (freely) 'You're equally worthless.' See p. 118, n. 6. Page 125. i. tout a son desespoir 'who had wholly given way to his despair.' Cf. tout 3. vous 'yours devotedly.' 2. dit a voix basse Rosa. See p. 7, n. 6, noting the insertion of a voix basse. Page 126. i. sa douleur amere (rather than son amere douleur) because Dumas wishes to stress the idea of bitterness. See p. 19, n. 3. 2. Je n'y. Note survivre a + object; whence y survivre 'survive it.' 3. & ce qu'il (cultiv^t) 'to his cultivating.' Note why ce is required. Page 127. i. Si vous eussiez. Colloquially what?. See p. 13, n. 2. 2. vous aussi vous 'you too.' Why the second vous? Cf. p. 118, n. 4. 3. que (ce Jacob). What is this que? 4. Je ne savais que repondre. Note that except before an infinitive French requires ce que, jf accusative ( = 'what') in indirect questions. Here quoi (repondre) would be possible. Cf. p. 61, n. i. Page 128. i. n'aurait-il (pas) 'shouldn't he' (not 'wouldn't he'). 2. on en a ' one can get ' etc. Cf. p. 89, n. 3. 3. ce (me semble). Can ce be used in general as a subject? For example, would ce m'amuse be correct ? Page 129. i. Jacob disait 'Jacob was saying' (not 'Jacob said'). See p. n, n. i. 2 que (de s'en assurer). See p. 117, n. i. 274 LA TULIPE NOIRE 3. J'en ai peur 'I fear he is,' 'I fear so' (rather than 'I am afraid of him'). Page 132. i. une chose 'one thing'; but the French stress falls on chose. Page 133. i. etait bien plus encline . . . qu'a elle. Ap- parently Dumas should have put bien plus before a sa tulipe or before qu'a elle. 2. Cette resolution, c'etait. Note this extremely frequent redundant use of ce. Cette resolution etait represents a less usual style. Page 134. i. auquel il dftt (not devait) because duty is denied to exist. After il la voyait comme etc. we should find devait. Page 135. i. pour le corsage de sa maitresse 'for his sweetheart's bodice.' 2. voila Rosa qui vient. See p. 121, n. 2. Page 137. i. On en (etait arrive). Cf. p. 7, n. 3, and p. 65, n. 3. 2. le boire et le manger (here, ' all appetite ') survives from a time when many infinitives could be used thus, i.e., as pure nouns. Page 138. i. la (viendrait chercher). Why must la be inserted? See p. 54, n. i. 2. Gryphus sorti. Why might this be misunderstood if spoken, or if read aloud? See p. 118, n. 2. Page 139. i. le pas. Better, son pas. Dumas is not al- ways a careful writer. 2. d'esprit et de corps. No article, though each noun is de- terminate: cf. manquer de politesse, in which politesse is inde- terminate (vague). 3. C'est pour cela expresses the cause: 'That is why.' Page 140. i. le Jacob. See p. 7, n. 7. Page 141. i. regardant ... si 'looking ... to see whether.' Note this value of si. 2. il sortit a pas de loup stopping to see whether the coast was clear; 'he sneaked out.' Page 142. i. jusqu'a ce qu'enfin . . . il calma. See p. 39, n. 5. NOTES 275 2. je 1'avais devine. Not 'him'; hence 'suspected it.' 3. terre de rue. In those days, streets were commonly not paved. 4. a vous 'by you.' But for et a cet infame Jacob, we should find je vous etc. Cf. p. 56, n. i. 5. reste 1'exposition. We might say, 'now, as to the ex- posure.' See p. 68, n. 2. Page 143. i. sera sorti. Why the future perfect? 2. Demain soit. After demain make a slight pause; soit FJswat] = 'all right.' Page 145. i. C'etait . . . qu'avait la 'That was' etc. See p. 106, n. 2. 2. n'etait (rather than n'est) because se dit means 'said to himself'; n'est would more accurately express this common- place thought. 3. apres . . . echangees (and still more apres . . . faites) is chiefly a literary construction; cf. apres fortune faite. 4. elle a leve. A technical (botanical) expression; otherwise usually elle s'est levee etc. Note fleurira* noire, p. 147, 1. 31. Page 146. i. droit, as its form shows, is adverbial; note droit comme in line 4 and haute in line 5. 2. que je regarde follows le premier but is indicative. See perds, line n. 3. depuis qu'elle est. Why not a etc ? Cf. p. 38, n. 2, p. 110, n. 2, and p. 146, n. 4. 4. je ne quitte (plus). What two time-values has this quitte? 5. de vingt-six ou vingt-huit(ans). See p. 3, 1. 13. Page 148. i. qu'on (apparently) 'which one,' rather than 'whom one.' 2. qu'il vous faut envoyer. More colloquially, qu'il faut que vous envoyiez or merely que vous devez envoyer. Page 149. i. si elle allait ne pas (etre), instead ef . . . n'allait pas (etre). Why? 2. dessous (la porte). Here dessous is a pure preposition and replaces the more usual sous. See p. 138, 11. 30-31. Page 150. i. La tulipe fleurie. See p. 118, n. 2. 2. de (vingt-cinq a vingt-six ans). See p. 9, n. 2. 3. en (dix heures). Why not dans? 276 LA TULIPE NOIRE Page 151. i. le president is heavily stressed. 2. a personne 'by anybody.' Why a? See p. 56, n. i. 3. et aussitfit ouverte. What three words might we correctly insert ? Page 153. i. levait. Note leva (line 3) and see p. n, n. i. 2. pensa (s'evanouir) 'came near (fainting).' In this sense, penser could formerly have an impersonal subject, a subject incapable of thought. Page 154. i. Je ne 1'eusse. What is the colloquial form ? See p. 13, n. 2. 2. Donnez. See p. 38, n. 3. 3. que je mette 'and I'll put,' or 'for me to put.' See p. 89, n. 4. 4. van Herysen. Elsewhere Dumas calls this same person van Systens. See Chap. XXV. Page 155. i. il arrosa . . . genievre (freely) 'he drank to [or celebrated] ... in the best gin' etc. Page 156. i. a suivre Rosa dans (le jardin). Possibly this dans means 'in,' possibly 'into'; French sometimes has no clear means of distinguishing. See p. 118, 11. 28 ff., and p. 130, 11. 15-19- 2. la suivit . . . au (jardin) means, apparently, 'followed her ... in (the garden).' See the preceding comment and note dans les corridors. Page 167. i. que grace a 'when, thanks to'; the preceding negation has the effect of a peine. 2. on le pense bien 'as you may easily imagine'; likewise vous (le) pensez bien. Page 158. i. de la journee 'in the daytime.' Note this de. 2. il y avait plus 'what is more.' Note this use of plus. 3. chose etrange (like ' strange to say ') is a set phrase. 4. Rosa ne sortit point. Cf. je n'y vais pas ce soir et je n'y vais point. Balzac, Gobseck. Page 159. i. Boxtel entrait 'Boxtel would enter' ('was wont to enter'). See p. n, n. i. Page 160. i. lorsque Rosa descendait. Note the contrast: descendit . . . descendait See p. n, n. i. NOTES 277 Page 161. i. fausse clef = 'counterfeit key'; clef fausse = 'wrong key.' Page 162. i. comme si j'eusse. Colloquially, what? See p. i3> n - 2 - 2. devant moi. What would avant moi mean ? .3. une fausse 'a counterfeit (one).' See p. 161, n. i. Page 163. i. j'enfonce. Why not j'enfoncerai ? Page 164. i. 1 a grand bruit. Could a bruit, or a un grand bruit, be conceivably substituted? If not, why not? 2. devant (elle). The situation seems rather to require derriere. Why ? 3. ce conspirateur a pendre. Here a pendre means ' who ought to be hanged'; a pendre is adjectival. Cf. p. 46, n. i. 4. C'est bon 'I'll show you,' or the like. See p. 43, n. 5. 5. (le gouverneur) saura 'shall know.' not 'will know.' See p. 12, n. i. Page 165. i. S. A. = Son Altesse. 2. la bonne edition 'the right edition.' See p. 43, n. 5. 3. Boxtel sorti. See p. 138, n. 2. 4. 1'ami (Gryphus), 'his good friend (G.),' instead of son ami etc., expresses familiarity. 5. a une tulipe noire. See p. 56, n. i, and p. 151, n. 2. Page 166. i. Et la attendit. Dumas' paragraphs are said to owe their often striking brevity to the fact that for his feuilletons he was paid by the line. 2. que vehait de lui. Why this arrangement? See p. 10, n. i. Page 167. i. bas cotes. As this adjective clearly distin- guishes the kind of sides, one would expect c6tes bas (cf. a voix basse), but the note on brave homme . . . homme brave (p. 19, n. 3) states a strong tendency, not an exceptionless rule. 2. qu'il n'avait retrouve. Why ne (see p. 8, n. 3), and why not trouve ? Page 168. i. y etait [rather than y fut] (arrive) because this action has no close nor causal relation to that expressed by elle arrivait. Cf. p. 47, n. 2. 2. van Systens. In reality, Dumas has called him van Herysen. See p. 154, n. 4. 278 LA TULIPE NOIRE Page 169. i. serait-il expresses doubt: 'can some mishap have befallen him ? ' Page 170. i. qui 1'est 'who is,' or 'who is so.' Why le (!') ? See p. 40, n. 3, and p. 62, n. 3. Page 172. i. ce cas pea] echeant 'in this event.' See echoir. 2. et moi. Note that this is a deferred reflexive, following non-reflexive forms. See p. 12, n. 6. 3. et que 'and if.' An added condition is seldom expressed by et si. Page 173. i. Cependant has here its original meaning (ce pendant = 'meanwhile'), now preserved chiefly in literary usage. Page 174. i. le derangeait. English idiom prefers 'had disturbed him.' See p. n, n. i. 2. bourguemestre. Normally bourgmestre; Dumas's spell- ing indicates the true pronunciation. 3. si (. . . vous alliez) 'suppose (you should).' Note this rather frequent value of si. Page 175. i. qu'est-ce cela. Make a slight pause before cela. See p. 5, n. 2. 2. J'ai oui dire has the same syntax as 'I have heard tell,' and oul (instead of entendu) gives it a like archaic tone. Page 177. i. 1'aura tentee. Cf. p. 169, n. i. 2. prendre le pas sur 'walk in ahead of.' 3. son introducteur 'the person letting (or showing) him in.' 4. Monsieur 'Sir.' See line 2. 5. qui s'asseyait. See p. n, n. i. 6. on le comprend. See p. 5, n. 3. Page 178. i. prit un livre dans. See p. 39, n. i. 2. point implies 'as you are aware'; in Old French, point often had this expletive value. 3. Dusse-je. Colloquially, what ? See p. 36, n. 2. Page 179. i. tous deux. See p. 13, n. i. Page 180. i. depuis trois mois 'during the last three months.' Note this value of depuis. Page 181. i. ne laissait pas de faire. In this sense ('fail'), laisser is always negatived. 2. qui ... transports 'who is alleged' etc. See p. 177, n. i. NOTES 279 3. querir. Now, if not in Dumas's time, the "correct" form is declared to be querir. Page 182. i. partie. See p. 73, n. 2. Page 183. i. 1'oeil . . . scrutateur 'with a' etc. Is this kind of clause frequent ? Page 184. i. que vous dites etre 'whom you declare (or state) to be.' A type of construction commoner in English than in French. Page 186. i. demandee en mariage. A step (here ficti- tious) necessarily preceding a direct appeal. 2. prendre le change. A locution derived from a trick of wild animals that cunningly send their pursuers off on a false trail. Page 186. i. C'est cela que. Why is cela allowed before que ? See p. 12, n. 4. 2. qu'il fftt. What indicative form does this fut expel ? Page 188. i. tous trois. See p. 179, n. i. Page 191. i. n'est-il pas. Colloquially, n'y a-t-il pas. Page 192. i. un mauvais sourire. Here, and in lines 23-24, thought and voice both stress the nouns. 2. triste mais charmante chanson. Presumably, this song does not go back to any Dutch original but, rather, was com- posed by Dumas or composed for him. Page 193. i. nous sommes plus que fou. Here nous sommes (royal or "editorial"), instead of tu es, parodies the im- personal use of 'we' for 'I' (meaning, of course, Van Baerie), and the adjective (fou) is properly singular. Page 194. i. Sera chasse tout gedlier. An inversion characteristic of legal statutes. See p. 142, n. 5. 2. qui portera la main sur un prisonnier d'Etat 'who shall [of course not 'will' !] assault a state prisoner.' Likewise 'shall' (not 'will') in lines 11-12. 3. Quiconque . . . par 1'epee. Matthew 26, 52: 'for all they that take the sword shall perish with the sword.' 4. Quiconque . . . baton 'Whosoever hits' etc., parodying the Biblical declaration. 5. va is an expletive: 'I tell you,' 'don't forget that,' or the like. 280 LA TULIPE NOIRE Page 195. i. un mauvais (pain) 'a bad kind of bread.' Likewise, elle parle tin frangais exquis. 2. si je le suis (freely) 'you'd better believe I am.' This use of si implies (in other contexts) vous vous demandez or like phrases, commonly not expressed. 3. quand nous ne sommes que nous deux 'when there are only two of us' or 'when it's just you and I.' Note this French idiom. Page 196. i. les pigeons de Dordrecht may mean either 'the pigeons from Dordrecht' or 'the Dordrecht pigeons.' Cf. p. 9, n. 2, and p. 39, n. i. 2. C'est . . . que (le pigeon), 'it makes a nice roast, a pigeon does.' See p. 5, n. 2. 3. qui mangerait = 'who- ate' or (less colloquially) 'who should eat.' Why ? 4. ce (me semble?). See p. 128, n. 2. 5. me semble ? An interrogative intonation should begin with un homme. 6. sonelem ent. According to a "natural philosophy " which became obsolete two or three centuries ago, the universe con- sisted of four elements: earth, air, fire, and water. Hell was generally conceived as a realm of fire. 7. des pans de faits. This de marks apposition rather than partition (note avoir un jour de libre); it has no Eng- lish equivalent and is often omitted: il y avait six hommes (de) tues. 8. de larges yeux. Here larges is adverbial, like grande in porte grande ouverte 'wide-open door.' Page 197. i. encore une fois. Supply je vous le demande. Page 198. i. avec has here approximately its original meaning, 'with it' (for avec is derived from the medieval Latin apud hoc ' with this'); avec lui ( = 'with it') is thus avoided; see p. 19, n. 2. 2. coqs noirs. In old lore, demoniacal creatures were habitu- ally imagined as 'black.' 3. dedans 'in it.' Why not dans lui? See the note on avec (just above). 4. Gryphus brandissait. See p. n, n. i. NOTES 28l Page 199. i. le couteau sous le pied. The first le (in- stead of son) is correct because this is an absolute clause; the second points out a part of the body ('his foot'). 2. seance tenante (' then and there ') is an old locution, grammatically similar to cependant (ce pendant). 3. des us et [yzej coutumes. A legal archaism; us(= usages) occurs only in this locution. 4. que . . . Cornelius. What would be the effect of putting permettre last ? See p. 10, n. i. Page 200. i . H avait . . . de la peau. Is this probable ? 2. Ce dont. See p. 7, n. 5. 3. sonnaient 'were clanking.' See p. n, n. i. 4. C'est ici 'This is.' Ceci est would be incorrect. 'These are ...'=? le n = le numero. Page 201. i. et le dr61e qui m'avait. Here the relative (qui) does not identify le drdle and might be omitted. 2. le garde historien. Ordinarily a noun, historien serves here as an adjective. 3. faire la grimace. In certain locutions, as here, the article has no demonstrative value; grimace is indeterminate: no particular ' wry face ' is referred to. Page 202. i. n etait ecrit (freely, 'It was fated') is a , Biblical expression and is purely figurative. 2. n y avait presque compensation. See p. 76, n. 4. 3. ses vieux yeux gris de chat. Here gris is a noun; interpret: 'gray as a cat's.' 4. vous en veuille. Subjunctive because il est naturel = il n'est pas etrange. 5. a mon corps defendant ('in self-defense'). In old French, the gerund (now preceded only by en) could be preceded by any preposition and could follow its noun-object; a mon (son) corps defendant is a survival of obsolete syntax; living syntax requires en defendant mon (son) corps. Page 203. i. Soit [swat]. See p. 143, n. 2. 2. qui lui echappait. See p. n, n. i.- Page 204. i. il entrait. See p. n, n. i, and p. 73, n. i. 2. le prince qui ecrivait. Note that here qui does not identify le prince. 282 LA TULIPE NOIRE 3. ma fille. The absence of a descriptive adjective (e.g. belle) tends to convey the meaning 'daughter,' clearly decided by line 30. Page 206. i. c'est dimanche la fete etc. 'the tulip celebra- tion (or tulip-day) comes on Sunday' etc. 2. que voici. Presumably, the florins are lying on the prince's desk. Page 207. i. s'arrondissaient expresses not action but a state. See p. 8, n. 2. 2. Harlem devint folle. In fact, nearly all Holland. Dumas does not exaggerate the strength of the tulipomania (tulipomanie) which numerous books on tulips describe as having gripped the Dutch at that time. This fad was largely commercial. Note that here Dumas makes Harlem feminine. 3. en 1'honneur. One of the few locutions in which en is followed by the definite article. Cf. p. 22, n. 3. Page 208. i. qu'on y put. Is this y in the position re- quired in normal speech ? 2. digne d'elle. Here elle would be required (cf. p. 19, n. 2) even were there no degree of personification. Why ? 3. d'un (oignon). The preposition de (here = 'for') is not uncommon after expressions of price. Page 209. i. en avant de lui expresses the idea of remote- ness more clearly than would devant lui. 2. sa pretendue (fille). In this sense ('alleged') pretendu-e regularly precedes the noun it modifies, possibly upon the anal- ogy of ledit, ladite ' the said,' 'the aforesaid' (legal terms') . Cf. p. 19, n. 3. 3. enlumine ('illuminated') means, artistically decorated with little paintings called miniatures, with great capital letters, gold borders, etc. 4. qu'il . . . decouvert. This gramatical device (in which il = ' there ') enables the speaker to throw his emphasis where it belongs here on une merveille. Cf. p. 7, n. 6, p. 142, n. 5, and p. 194, n. i. 5. rond-point runs counter to a general tendency. Why ? See p. 19, n. 3. Page 210. i. d'une (musique). Formerly 'music' could be preceded by 'a.' Why ? NOTES 283 2. qui serait entre. Here simply 'entering' will enable us to avoid a clumsy (possibly a misleading) clause. See p. 50, n. i. 3. le voir. To what does this le refer ? Cf. p. 4, n. 5. Page 211. i. lui et sa tulipe absents. Note absents and see p. 118, n. 2. * Page 212. i. tout Harlem. As indicated by de Harlem, the pronunciation should be [tu arlem]; Harlem is normally masculine. See p. 207, n. 2. Page 213. i. vous me tuerez 'you may kill me' (not 'will' and not 'shall'). 2. a peine passes qu'il. See p. 57, n. i. 3. et qui. A frequent redundant use of qui. 4. 1'a (desire). To what does this le (1) refer ? 5. d'arreter. Used intransitively also in the imperative. Cf. p. 31, 1. 19, and p. 34, n. i. Page 215. i. qui attirait. See p. n, n. i. 2. a 1'un (des angles). Here le (!') has little or no value, for its original demonstrative character has, like an unused muscle, become atrophied; colloquially it would be omitted. Cf. p. 106, n. 3. 3. fine laine rouge. Which adjective clearly classifies the wool ? See p. 19, n. 3. Page 216. i. qui trouverait 'who should produce'; a etc promis may mean either 'was promised' or 'has been promised.' See p. 104, n. 3. Page 217. i. portera 'shall bear.' See p. 107, n. 3. 2. Tulipa. The original text has (incorrectly) Tulipia. 3. et Dieu . . . heureux. Another fantastic extravagancy. See p. 47, n. 3, and p. 94, n. 3. 4. son faux Jacob. Here faux expresses both the man's misrepresentation of his identity and his falseness. Cf. p. 19, n. 3, p. 161, n. i, and p. 209, n. 2. 5. et . . . de 1'autre. More commonly, la main dans la main. Page 218. i. la bourse aux etc. Here a has the same value as in la dame aux camelias or le marche au ble. 2. fait (fleurir). Used causally, fait (p.p.) is invariable; note elevee (f.). 284 IA TULEPE NOIRE 3. leurs merites a tous deux. Cf . leur maitre a tous ' master of them all.' Page 219. i. du c6te de~ la France. As if France were only a stone's throw away. 2. il fut. See p. 3, n. i. As for rude, see the Vocabulary. Page 220. i. qui 1'aimerait. Logically, the stress should perhaps fall on the object (cf. p. 36, n. 3), but each aimer ait is emphatic. 2. ne fut point mort. What indicative form does this fut expel ? 3. cornme elle avait fait. Here no le (!'). See p. 4, n. 5. robned. VOCABULARY a at, to, in, into, for, on, onto, with, by, from; a demain! to-morrow ! avoir quelque chose a soi have something of one's own; son ... a lui (a elle) his (her) own . . .; a lui seul all by himself; de la politique a Cornelius political matters of Cornelius's; perdre a consigner lose in recording; a cheval on horseback; a moi seul by myself; a plat flat (adv.); & vide empty; a terre on the floor; penser a think of (or about); rouler a dix pas roll ten paces; a dix pas d'ici ten steps from here; faire pressentir a Rosa make Rosa forebode; a deux mille francs worth two thousand francs; a ce que je crois it seems to me; a pendre deserv- : to be hanged; for other ..^anings of a see the impor- tant members of the groups in which a occurs absser lower * net abandon, forsake, rop, let go dumfound, stun i> (fig-) dishearten; s' , tumble, sweep, swoop abeille/. bee abimp i. abyss aboie^vnt m. barking abolir abolish, do away with abominable abominable abondance /. abundance, plenty abord m. approach, vicinity; d' (at) first, at the outset, in the first place aborder approach, accost aboutir a end in, come to abreger abridge, shorten, cut short abri m. shelter abriter shelter abrogation /. rescinding absolu-e absolute absolument absolutely absorber absorb; s' be ab- sorbed, be engrossed abus m. abuse, breach accent m. accent, tone accentuer accentuate, stress accepter accept; de agree (consent) to acces m. admittance, access accessoire m. accessory acclamation /. acclamation, shout accommodement m. (satisfac- tory) arrangement accommoder adapt, fit, conform, adjust accompagnement de, avec to the accompaniment of accompagner accompany, go with accomplir accomplish, do, carry out, complete, fulfill; s' come to pass, be fulfilled accomplissement m. fulfillment, execution accorder grant, concede; il ac- corda (114, 15) he granted it 2 86 ACCOUDER AIDE accouder, s' lean (on one's el- bow-s) accourir run up, hasten (to the scene); en foule & throng to accoutume-e usual accroitre, s' increase accueillir receive, welcome, greet accusation/, charge; see raise accuser accuse; 1'accuse the defendant acharnement m. (fierce) eager- ness, tenacity; avec like mad acharner (a), s' be bent (upon); acharne-e rabid, implacable, furious acheminer, s' go forward, walk, set out, go on, make (vers for) acheter buy achever finish, complete, con- clude Achille Achilles (chief hero of the Iliad) acquerir acquire, get, win; repos acquis rest that he had in- herited acquiescer acquiesce, agree acquis-e see acquerir acquitter perform, fulfill; s' de acquit oneself of, carry out acte m. paper, deed, document action /. activity adapter fit, fit on, apply, put on adhesion /. adherence adieu farewell, good-bye admettre admit, receive administration/, government admirer admire adonner, s' devote oneself, give one's mind; adonne-e devoted adopter adopt adorer adore, worship adresse /. skill, address adresser address, direct, send; une question ask a question; s' & address, turn to adroit-e skillful, clever advenir happen; ce qu'il ad vie n- dra what will happen adversaire m. opponent, adver- sary aere-e airy, well-ventilated affaire /. thing, matter; 1' d'un coup d'ep6e (04, 7) just a stroke of the sword; bien 1' de B. just what B. needed; faire les s de at- tend to 's business affaisser, s' sink, sink down affame-e hungry, famished affecter affect, pretend affermir strengthen, confirm affirmatif, affirmative affirmative affirmer affirm, declare affoler infatuate; s' de go daft over affreux -se awful, frightful afin de, que in order to, in order that age m. age, right age; quel age . . . ? how old . . . ? don- nee a son age (in, 6) given him because of his age age-e aged, age"d; age de 22 ans twenty-two years old agenouiller, s' kneel (down) agent m. agent agir act; il s'agit de it is a ques- tion of, ... is at stake, the point is to; il ne s'agissait que de all he had to do was to agiter agitate, shake, wave, move; bien agitee full of excitement; s' fidget, work nervously agneau i. lamb agrandissement m. enlargemen( agreable agreeable, pleasing agreer please agricole agricultural ah oh, (sometimes) ah; ah ca! I say! or see here! (see sa and mais) aide /. aid, help; & 1' with the help AIDER AMERTUME 287 aider help, aid aigle m. eagle aigu, aigue shrill, sharp, pointed aiguille /. needle aiguillon m. point, spur aiguiser sharpen aile /. wing, sail (of windmills) ailleurs elsewhere; d' for the rest, besides, furthermore, by the way, however aimer love, like, be fond of; aimer + mieux prefer; j'aime- rais mieux I would rather; adieu et aime-moi farewell and love me ever; j'aime & croire I hope ainsi thus, so, in this state; done therefore, so then; que (just) as, not only . . . but also, as air m. air, look, appearance, bearing aise (i) /. ease, convenience; tout a son as much as he pleased aise (2) : bien de very glad to ajouter add ajuster aim at alchimie/. alchemy alerte alert, wide-awake Alexandre Alexander (the Great) King of Macedonia, prover- bial as a conqueror (356-323 B.C.) Alexandrie /. Alexandria (Egypt) allee/. path or walk (in a garden) Allemagne /. Germany allemand-e German aller go; votre bras va a mer- veille your arm is getting on famously; va le rejoindre! go join him ! aliens done ! come ! or come now ! or nonsense ! diable de Craeke, va! you, Craeke, look here! (va and allez = also see if I don't); je veillerai, allez I'll be on the watch, depend on it; so je te pincerai, va (194, 21); aux opinions (legal) withdraw for consultation; n'allaient point s'infiltrant could help creeping; s'augmentant keep increasing; ou vous allez avoir [= vous aurez] depasse when you (shall) have gone beyond; aller reparaitre ap- pear further away; s'en go away; qui s'en allait tonner which went thundering down alliance /. marriage allonger hold out, extend; le pas (lengthen one's stride) hasten along, walk (more) briskly allumer light, light up alors then; ? how's this ? eh bien ? well then, what now? alourdir, s' become heavy (dull, stupid, benumbed) Alphen a town about 7 miles east of Leyden altere-e altered, contracted, dis- torted, angry Altesse /. Highness; 1' his Highness Amalecites m. Amalekites (ap- parently confused with the Amorites, Joshua x, 12) amant m. lover, sweetheart amasser amass, gather; amasses thronged amateur m. (tulip-) fancier, col- lector, expert, lover; noun or adj. amateur (37, 31) ambassadeur m. ambassador ame /. soul, mind, heart; ame d'elite noble heart ameliorer improve; s" improve amenager arrange (a garden bed) amender improve amener bring, bring about, carry amer, amere bitter amerement bitterly amertume /. bitterness, bitter sorrow 288 AMI APPRECIER ami-e friend, lover; friendly; ami de la bouteille fond of liquor ami tie /. friendship; fake become friendly amollir soften amollissement m. softening amonceler, s' gather, pile up amour m. love; pour 1' de moi for my sake; propre pride, self-respect amoureux -se (de) in love (with); devenir fall in love; un a lover, a suitor Amsterdam Holland's chief sea- port amuser amuse, entertain; s' de take pleasure in, make game of an m. year;, avail . . . ans was . . . years old analyser analyze, examine closely ancetre m. ancestor ancien-ne former, old, ancient; see maison aneantir crush, bring to naught aneantissement m. annihilation, complete prostration ange m. angel angelique angelical angle m. corner, angle Angleterre /. England angoisse /. anguish; pi. pangs of anguish animal (pi. animauz) m. animal, beast animation/, warmth (of temper), ill-feeling animer animate, excite, stir; s' gel excited (or angry); anime-e wrathful Anne d'Autriche possibly the Anne of Austria who was born in 1601 (d. 1666); possibly the daughter of Philip III of Spain, wife of Louis XIII of France, and regent (1643- 1661) annee /. year annonce /. announcement annoncer announce anonyme anonymous, nameless antagoniste m. adversary, oppo- nent antecedents m. pi. previous habits antichambre f. antechamber, hall antique ancient, antique antre m. den Anvers m. Antwerp anxiete /. anxiety aout m. August apaiser, s' be appeased, subside apercevoir perceive, see; s' perceive aplanir smooth, smooth out aplatir flatten, smash flat apoplexie /. see foudroyer apo still e /. marginal note, post- script apostrophe /. apostrophe, re- proach apparaitre appear, be seen apparemment apparently apparence /. appearance; en apparently apparition /. appearance (ar- rival); certe to appear like that appartement m. apartment, (pi.) rooms appartenir belong appat m. lure, bait, attraction appeler call; s' be called applaudir applaud applaudissement m. applause application /. application, appli- cability appliquer apply, press, lay or set or stand (sur against), give, put apporter bring, carry, throw in the way (a of) appreciation /. estimate, ap- praisal apprecier appreciate, appraise APPRENDRE ASSOMBRIR 289 apprendre learn, teach, hear (said), hear about apprentissage m. apprentice- ship, learning appreter get (make) ready, pre- pare approcher approach, put near, bring near; faites (216, n) bring forward; s' de draw near, draw toward approprier, s' get, catch hold of appui m. support, prop, backing appuyer support, lean, rest; s' sur (or a) rest on, lean on apres after, behind; chercher (des yeux) look about for; d' according to; - que after apres-demain (the) day after to-morrow apres-midi m. or f. afternoon aquilin-e like an eagle's, aquiline arbre m. tree arche /. ark (of the Covenant) archer m. constable, policeman, archer ardemment ardently, passion- ately, earnestly ardent-e ardent, passionate, ear- nest ardu-e arduous arete /. edge argent m. silver, money argenter brighten (as with silver) argus [argy! s] Argus (in Greek mythology, a dog-like monster with a hundred eyes) arme /. weapon; place d' s drill (or parade) ground armer arm, cock (a gun) armoire /. closet, wardrobe arracher snatch, wrest, pluck, pull off, tear out arranger put in order, settle; s' avec settle the matter with arrestation /. arrest arret m. stop, decree, sentence arreter arrest, check, stop, de- cree, resolve upon, decide; a pris le parti bien arrete has thoroughly made up his mind; s' stop, halt, rest, pause arriere, en back, behind, back- ward arrivant, le nouvel the new- comer arriver arrive, happen, occur, succeed (at last); a go as far as, succeed in ; a parler de come to (the subject of); qu'arrive au (134, n) until; jusqu'a vous reach you arrondir make round, round out; qui s'arrondit (219, 28) who rounded out his property arroser sprinkle, water; -- ... avec le meilleur genievre celebrate in drafts of the best gin arsenal m. arsenal, arms-factory art (i) m. art, craft art (2) abbreviation for article artere /. artery, thoroughfare article m. article, clause artificieusement artfully ascendant in. influence, power, ascendency aspect m. look, sight aspirer inhale, breathe in assassinat m. assassination assassiner assassinate, murder assemblee /. gathering, assembly assener deal (a blow), let drive assentiment m. assent asseoir seat, set; s' sit down; etre assis-e be seated, be sit- ting assez enough, rather, a good deal, pretty, pretty well; peu + adj. hardly (a) assidu-e assiduous, attentive assieger besiege assister & be present at assombrir, s' darken, become gloomy, grow sad 2QO ASSOMMER AVANT-DERNIER assommer knock down, fell assurement assuredly assurer, s' make sure atelier m. workshop, studio atmospherique atmospherical atome m. atom attacher fasten, attach, connect (ft with) attaque /. attack, assault attaquer attack, assail atteindre (a) reach, attain^strike, hit; atteint et convaincu in- dicted and convicted atteler harness; attele de drawn by attendre wait, await, expect, be in store for; que wait for ... to; en attendant mean- while; s' ft expect attendrir move, affect attendrissement m. emotion attendu considering; que (inasmuch) as, whereas attentat m. attempt, criminal assault, outrage attention a, faire heed, mind attirer attract; see tirer attrayant-e attractive attrister sadden aucun-e no, (not) any, anyone, no one, none audace /. boldness, audacity au-dessous below or underneath (it, them); de below au-dessus above, above (it, them); de above, over auditeur m. hearer augmentation/, increase, growth augmenter, s' increase, grow aujourd'hui to-day; que now that auparavant before, previously, beforehand aupres de near to, with; des Orangistes in the minds of the Orangemen aurore /. dawn aussi as, also, too, therefore aussitot immediately, forthwith; que as soon as autant (de) as much, as many; j'en ferai I'll do so too; - de . . . de (just) as much (many) . . . (just) so much (many); d' plus (or mieux) . . . que all the more ... in that (or because) autenticite /. authenticity, gen- uineness autentique authentic, genuine auteur m. author, originator automne m. autumn autorization /. authorization, warrant autoriser authorize autorite, /. authority autour (de) around; tout all round autre other; vous s savants you scholars; deux s mois two months more; -- chose another thing; d' else; tout qu'un anyone but a; see ni autrefois formerly autrement otherwise; bien - feroce far fiercer Autriche /. Austria auvent m. awning .(over a door) avance /. advance; la belle (freely) what would be the use of it? (174, 20); ftl' , d' , par in advance, beforehand avance-e radical; see avancer avancer advance, get ahead, come (go, thrust) forward; s' come forward etc. avant before; trois jours for (the next) three days; tout most of all; -- que (or de) before; en forward; en de in front (ahead) of avantage m. advantage avant-cour /. front courtyard avant-dernier next-but-last; see dernier AVARE BAS 291 avare miserly; noun miser avarice /. greed, miserliness avec with, with it (198, 3); effort with an effort; bruit noisily; - - des livres (106, 2 ~3) by using books or with his book-learning; ressem- blance likeness to avenir m. future averer aver, prove by evidence avertir inform, warn aveu m. confession, avowal aveugle blind; noun blindman aveugler blind avide eager, greedy avidement eagerly, greedily avis m. advice, notice, notifica- tion; & son in his opinion aviser advise, perceive, consider, be mindful, look to; s' de take it into one's head to avoir have, get; qu'avez-vous ? what is the matter with you? or what ails you? etc.; il y a there is, there are, the matter is; il y avait there was, there were; il n'y avait pas loin it wasn't far; il n'y a pas de ma faute I'm not a bit to blame; il n'y a pas a en douter there's not the least reason to doubt it; il y a deux ans two years ago; il y avait deux ans two years before; qu'y a-t-il? what is wrong? or what is the matter? il avait quarante- neuf ans he was forty-nine years old; 1'ovale a pres d'un pouce the oval is almost an inch long; hate (faim, froid, etc.) be in haste (hun- gry, cold, etc.); quoi qu'il en cut (94, 10) whatever it cost him avorte-e unsuccessful, abortive; see avorter avorter fail, come to naught avouer avow, confess avril m. April azur m. azure azure-e azure, blue B bagne m. penitentiary, convict prison bague/. ring bah! pshaw! oh well! nonsense I what's this? dear me! bahut m. cupboard, chest of drawers bafser (i) kiss baiser (2) m. kiss, baisser lower; les yeux (or la tete) look down; se stoop balai m. broom balancement swing, swinging, swaying balbutier stammer balcon m. balcony balustrade /. balustrade, railing bane m. bench Banco [_sic] Banquo; see "Mac- beth " bande /. band, strip bannir bannish bannissement m. banishment bapteme m. baptism; see fonts baptiser christen; du nom de christen barbouilleur m. dauber, scribbler baril m. barrel Barlaensis (Latin) of Baerle, Baerle's Barneveldt (about 1547-1610), Grand Pensionary in 1586; beheaded on a charge of treason barque /. boat barre /. bar, rod, crosspiece, rail barreau m. rail, bar bas (i), basse low; bas cotes (d'une route) footpaths; tenir basses hold downward bas (2) m. bottom; a bas down 2Q2 BAS BOIS with; en has below, from below (86, 31); en has de down from bas (3) adv. down, low, in low tones; plus ! not so loud! baser base, found bataille f. battle; champ de battlefield bataillon m. battalion batave (208, 6)-Batavian (Dutch) bateau m. boat batelier m. boatman batiment m. building, ship, craft, vessel batir build baton m. stick, staff, cudgel, club; de commandement staff of command (of office) battement throb, beat, flutter or flapping (of wings) battrS beat; des mains clap one's hands baume m. balm bazar m. bazaar beau, bel, belle beautiful, lovely, handsome, fine; au beau mi- lieu in the very midst; la belle (we.) my (pretty) lass, young lady, miss; il fait .beau the weather is fine; il cut beau chercher it was useless for him to search, in vain he searched beaucoup (de) much, many; adv. greatly, far beaute/. beauty beche /. spade beffroi m. belfry Bengale m. Bengal (in India) benin, benigne benign, kind, sweet-tempered benir bless bequille/. crutch bercer lull (berceau = cradle), delude besogne /. task, job, work besoin m. need; avoir de need bibliotheque /. library, bookcase bien (i) well, much, very, really, greatly, quite, far, of course, just; - - morts quite dead; on vole un florin nobody hesitates to steal a florin; on le pense as you may readily imagine; ! right! or done! c'est ! all right! or I see! (106, 7); je tuerai leur maitre (198, 4) I can kill their master too; ou or (stressed), or else; du much; des many; - - que although; si que so that; as adj. si vous la trouvez if you like it [Jthe letter] bien (2) m. good(s), property, welfare bien-etre m. comfort bienheureuse nouvelle very wel- come bit of news bientot soon bienveillant-e kindly biere (i) /. beer biere (2) /. coffin bijou m. jewel billet m. note, letter billot m. block bistre m. bister (a brown pigmeni made from soot) bizarre odd, strange, queer blanc, blanche white, blank blanchatre whitish blancheur /. whiteness blanchir become white, whiten blaspheme m. blasphemy, oath ble m. wheat blesser wound, hurt blessure /. wound, bruise bleu-e blue bleuatre bluish bloc m. (headsman's) block blond-e blond, fair boire drink; perdre le et le manger lose all taste for food and drink, lose all (one's) appetite bois m. wood; de wooden BOITE BRUMEUX 293 boite /. box, case Bombay m. chief city of India; ceded to East India Company in 1668 bombe /. bombshell bon, bonne good, kind, pleasant, right, worth while, wise, well; un bon diable a jolly fellow; v & la bonne heure ! glad to hear it ! de bonne heure early; a du bon has some good about it; il ne fait pas bon de it is not well (wise or safe) to bond m. bound, jump, leap bondir jump, leap, be startled, (of heart) beat violently bonheur m. good luck, good result, happiness, happy life; par happily, luckily bonhomme m. man, fellow, chap, codger; le Gryphus old Gryphus; 1&, la (194, 19) there, my good man bonjour good-day, good-morning bonsoir good-evening bonte /. goodness, kindness; du ciel! great heavens! bord m. edge, border, bank border line, border, skirt bordure /. edging, border borne /. spurstone (of wait) borner limit bouche /. mouth bouder pout, be sulky boue /. mud, mire bouffee /. gust bouger move, stir, budge bougie /. wax candle bouillie/. pulp; mis en ground to a pulp bouillir boil, seethe bouledogue m. bulldog bourdonner hum, murmur, buzz bourgeois-e burgher, citizen, plain, common, homely, mid- dle class; foule bourgeoise crowd of burghers; gartie bourgeoise citizens' guard bourgeon m. bud bourgmestre m. burgomaster bourguemestre variant of bourg- mestre bourreau m. executioner, tor- mentor, (fig.) villain bourreler torment, sting, goad, prick bourrer de coups cudgel thor- oughly, thrash soundly, pound well, pommel etc. bourse /. purse, ready money, cash on hand bout m. end, tip; au de (of time) after (au de huit jours a week from now); a por- tant point-blank bouteille /. bottle, (fig.) drink (liquor) boutique /. shop, (small) store Brabanfonne, la the lady of Brabant (41, 22) brandir brandish, flourish, swing braquer direct, point, bring . . . to bear bras m. arm brasseur m. brewer brave good, worthy, brave bravement bravely brigand m. bandit, cut-throat, (voc.) you rascal brillant-e bright, shiny; see briller briller shine brin m. blade, bit briser break; se break, be broken broder embroider brouillard m. fog brouille /. misunderstanding, coolness brouiller, se quarrel, fall out broyer grind, 'Crush bruit m. rumor, noise bruler burn; brulant very hot, burning brume/, mist, haze brumeux -se misty, hazy 2Q4 BRUN CASSER brun-e brown brunir burnish brusquement bluntly, abruptly brutalizer bully, ill-treat, maul bruyant-e *noisy, loud; une musique bruyante a blare of music bucher m. funeral pile, stake bureau m. office but m. aim, goal, purpose, object Buytenhoff (properly the name of a square adjoining the Bin- nenhof,' a group of buildings at the Hague) Buitenhof Buytruysheim -van Baerle's gar- dener (89, 14) $a see cela c here, here now; ah cS mais ! is he mad? fa maitre G. (193, 25) Oho, master G.; fa et la here and there, to and fro, hither and thither cabinet m. cabinet, small room, private office; see vitre cabrer, se (of horses) rear cacher hide, conceal cacheter seal cachette /. hiding-place cachot m. dungeon, cell cadavre m. corpse, dead body cadre m. frame cafe m. coffee; brule roasted coffee (color) cahier m. book, notebook caieu m. offset (shoot from a bulb oignon; secondary outer bulb); loosely (45, i) bulb caillou m. pebble caisse/. box, chest calcul m. calculation, reckoning calculer calculate, reckon, esti- mate, compute calice m. calyx, flower-cup calleux -se callous calme m. stillness, calm, calm- ness; avec calmly calmer quiet, calm; se quiet down calomnie /. calumny, slander camp m. camp campagne ./. campaign, country (outside towns); maison de country-house canal (pi. canaux) m. canal . canon m. barrel (of a gun), gun, guns (208, 8) capable able; un amateur serait de an expert could easily . . . capitaine m. captain capital m. capital (money, wealth) capitale /. capital (city) caprice m. whim, caprice capricieux -se whimsical, capri- cious, fickle, fitful; la capri- cieuse the fickle creature captif, captive captive car for caractere m. character, temper cardinal-e cardinal; les points cardinaux the points of the compass (TV., E., S., W.) caresser pet, fondle, caress, coddle caresses /. fondling, petting, (ironically) gentle attentions carre-e square; un a square plot (of ground) carreau m. (square paving) brick, (or tile) floor carriere /. career carriole/, covered cart, trap, 'gig' carrosse m. carriage cas m. case; au 06 in case; en tout , dans tous les at all events, however, any- way case /. pigeonhole, compartment easier m. set (or nest) of drawers (or pigeonholes); see case casque m. helmet, headdress (made of a gold band and lace) casser break, shatter; se break, etc. CATARACTE CHANGEMENT 295 cataracte /. waterfall, cataract cause /. cause; a de because of causer cause, chat; tulipe talk (of) tulips ca valeric/, cavalry, armed horse- men cavalier m. cavalryman, horse- man caverne /. cavern, cave cayeu see caieu ce (i) pron. this, that, it, he, she; ce 'sont these (or they) are; c'est ici this is; c'est ik that is; c'est que the reason is that; est-ce que do you, does he, etc.; ce qui, ce que what, (that) which; ce a quoi whereat; ce que voyant seeing which; ce dont vous me menacez what you're threat- ening me with; profiter de ce que profit by the fact that; de facon (a ce) que so that; je m'intet:esse a ce que vous sachiez lire I'm interested in having you learn to read; ce qu'il y a de jugement how much judgment there is; c'est dimanche la fete Sunday is the festival day ce (2), cet-te, ces this, that, these, those; cette idee que the idea that; a ce point que to such a degree that; en ce moment-ci at this very instant ceans here, in this place ceci this ceder yield, give in ceinture /. belt, girdle cela that; ca va bien T am well; c'est ga that's it, that's right; pour quoi ca? why so? ou ca where? ou cela? where shall I do that ? (where can I hide ?) celebrer celebrate celeste of (or from) heaven, . heavenly cellule /. cell celui, celle, ceuz, celles the one, he, she, they, these, those; - -ci this one, he (stressed:), the latter; - - -la that one, the former, the other cendre /. ashes cent a hundred centaine, une about a hundred; des s hundreds centre m. center, middle cependant meanwhile, however, yet, on the other hand cercle m. circle, radius ceremonial m. ceremonial, cere- monies ceremonie /. ceremony certain-e (a) certain certainement certainly certes certainly certitude /. certainty cerveau m. brain Cesar (Julius) Caesar (101-44 B.C.) cesser cease, stop, give up Ceylan m. Ceylon (island near India) chacun -e each (one), every one chagrin m. sorrow, grief; sha- green (leather) chaine /. chain chair /. flesh; des s ouvertes from the gashes in the (his) flesh chaise /. chair, chaise (a vehicle), post-chaise chaleur /. warmth, heat chambre /. room; & couch er bedroom champ m. field; sur le forth- with chance/, chance, luck chanceler stagger, totter; chan- celant-e unsteady, etc. change a, faire prendre le send ... off on a wrong trail changement m. change, shift- ing, transfer 296 CHANGER CINTRE changer change, shift; de change, shift chanson /. song chanteur, chanteuse singer chantier m. shipyard, dockyard chantonner hum (of persons) chapeau m. hat chaperonne-e coped chapitre m. chapter chaque each, every charancon m. weevil, smU beetle charge /. office, charge, obliga- tion; a la seule with the single condition charger charge, load, intrust, overdo, crush (a plant); se take charge charitablement charitably, kindly charite /. charity charmer charm, delight chasser drive (away or out), dismiss, force chaste chaste, pure chassis m. frame (of a flower- bed), sash chat m. cat chateau m. castle, fortress chatiment m. chastisement, pun- ishment chatouilleux -se particular, touchy chaud-e warm, hot; (as m. noun) j'ai chaud I am warm; il fait chaud it (the weather) is warm or hot; tenir chaud a keep . . . warm chaussee /. highway chauve bald chef m. chief, leader chef-d'oeuvre m. masterpiece chemin m. way, road, journey; continuer son walk on; faire son meet with success, advance; prendre le -- de (fig.) bid fair to; en coming (going) forward cheminee /. fireplace, mantle- piece, chimney chemise /. shirt chene m. oak tree chenevis m. hempseed cher, chere dear, beloved, ex- pensive, costly chercher feel (grope, reach) for, look about, seek, look for, search, try; aller go for, fetch; venir come for, come to see; ... des yeux look about for cherir cherish, be (very) fond of; cheri de beloved by cheval m. horse; a on horse- back cheveu-x m. hair chevre-feuille m. honeysuckle chez in (at, to) the house of, at (or to) 's; regarder le voisin look into his neighbor's; de Cornelius lui from Cornelius's yard to his own; van Baerle at van Baerle's; entra van Systens entered van Systens's office; vous at your house, at home; - son antagoniste in (the case of) his antagonist (so lui in his case); de moi from my house chien m. dog chimerique purely fanciful chimie /. chemistry chirurgien m. surgeon chceur m. chorus choisir choose, select chose /. thing; quelque (de) something; peu de little, not much; etrange strange to say Chretien, chretienne Christian christianisme m. Christianity chuchoter whisper chute /. fall ciel m. heaven, sky cinq five cinquante fifty cintre-e arched CIRCONSTANCE COMPATISSANT 2Q7 circonstance /. circumstance, oc- casion circulairement in a circle circuler circulate, run (about) cire /. sealing-wax, wax seal cirer wax, polish citer quote citoyen m. citizen civiere /. litter clair-e light, clear, bright claire-voie openwork; etait a could easily be watched clameur /. clamor, din clarte /. clearness, brightness classer class, classify clavette /. sph'nt (properly peg, cotter) clef/, key; (fermer) a double turn the key twice round clemence /. clemency, mercy clement-e merciful, mild Cleopatre Cleopatra, queen of Egypt, object of the passion of Mark Antony and Julius Casar; after the battle of Actium (30 B.C.) she killed herself by letting an asp bite her climat m. climate clocher m. spire, steeple clopiner limp, hobble along cocher m. coachman, driver codex m. set of rules (or of laws), code cceur m. heart, soul, mind; see tenir coffre m. chest, box coiffer wear as a headdress coiffure /. headdress coin m. corner i col m. (78, 12) neck; see cou colere /. anger; en angry collegue m. colleague coller a lay . . . close to, press . . . against collet m. coat-collar colline /. hill colombe /. dove Colombia (49, 24-25) a kind of tulip color er color; plus colore brighter colored combattre fight, combat combien (de) how much, how many, how combinaison /. combination comble m. top; de fond en from top to bottom comestibles m. pi. eatables, pro- visions comite m. committee commandement m. command commander command comme as, like, how, when; - je marche bien! how well I can walk! je vous vois as surely as I see you; preuve by way of proof; sans ... sans . . . without either . . . or ... commencement m. beginning commencer begin; il commenca par aller . . . the first thing he did was to go ... comment how, what?' how's this? commerce m. trade, intercourse; avoir avec have dealings with, be in league with; le des Indes the India trade commere /. (old) gossip; bardie bold wench, shrew' commettre commit, do, perform commis m. clerk commode convenient (a for), suitable, comfortable commun-e common, united communiquer communicate commutation (/.), ordre de re- prieve compagnie /. company compagnon m. companion comparer compare compartiment m. compartment, pigeonhole compatissant-e compassionate 298 COMPATRIOTE CONSTATER compatriote m. or f. fellow coun- tryman, fellow countrywoman complaisance /. kindliness, readi- ness to please and be pleased complet, complete complete, requisite, full completement completely completer complete complice m. accomplice; de in league with complicite /. complicity, being an accomplice; de - - avec in league with complot m. conspiracy comploter plot composer compose, make up comprendre understand, com- prise compromettre implicate, com- promise compte m. count, account; se rendre de realize; de a demi on joint account, in equal cooperation; au bout du after all compter count, allow for, pay out, rely; sans que to say nothing of the fact that comte m. count; le de Tilly Count Tilly concentrer concentrate concerner concern concert, de in common, jointly concevoit conceive concierge m. janitor concitoyen m. fellow-citizen conclure conclude, infer condemnation /. condemnation, (death) warrant condamner condemn, sentence; aux frais sentence to pay costs; le condamne the con- demned man; see frais and justice condition que, a la on condi- tion that conduire conduct, lead, bring, take, drive conduite /. conduct, behavior confiance/. confidence; valet de trusted valet confiant-e confident, trusting confier intrust, confide confisquer confiscate conformer a, se comply with congres m. congress, society connaissance /. knowledge, ac- quaintance, consciousness; age de age of discretion; faire become acquainted; sans unconscious connaitre know, be acquainted with; ne cohnaissant pas des (180, 27) take no cognizance of, have nothing to do with; se en be an expert in, know all about connivence /. connivance conquerant m. conqueror conquerir conquer consacrer devote conseil m. counsel, advice conseiller (a) advise, counsel conseiller, conseillere adviser, counsellor consequence, en hence, so consequent, par consequently, therefore conserver preserve, keep considerer consider, look at consigne, forcer la break in (enter forcibly and against orders) consigner record, set down consister consist consolation /. consolation, com- fort consoler console, comfort; se be consoled consommer accomplish conspirateur m. conspirator conspiration /. conspiracy conspirer plot, conspire constamment constantly constater ascertain, state, (note and) record, declare CONSULTER COUP 299 consulter consult contact m. contact, touch contemplation /. contemplation, gazing contempler behold, gaze at contemporain-e contemporary contenant m. receptacle contenir contain, restrain content-e glad, satisfied contenter satisfy; se be satis- fied contenu m. contents contester dispute, debate continuer continue, go on, keep on contraindre compel; contraint par la force under duress contraire contrary; au on the contrary . contrariete /. vexation, disap- pointment contravention /. breach, infrac- tion contre against, with, toward, for contreforte-e strengthened (con- trefort = buttress) contre-maitre m. bos'n's (boat- swain's) mate contre-poids m. counterpoise, offset, consolation contrevent m. (window) shutter convaincre convince, convict convenablement properly, fit- tingly convenir (a) suit, befit, agree (de on), understand conviction /. conviction convier invite convoquer convoke, call together convulsif, convulsive convulsive, clinched coq m. cock, rooster coque /. shell, capsule (of a tulip) coquet-te spruce, dainty, daintily dressed, trim coquetterie /. coquetry coquin m. rascal, knave corbeille /. basket corde /. cord, string Corneille ou Cornelius (2, 6) Cornelius corps m. body, corpse, organiza- tion; a son defendant in self-defense; du delit corpus delicti, i.e. material proof (of an offense), exhibits correspondence/, correspondence correspondant-e correspondent corrompre bribe, corrupt ' corruption /. bribery corsage m. bodice corset m. bodice cortege m. procession costume m. garb, costume, dress c6te /.rib; a side by side cote m. side, direction; bas footpath; a near by, just at hand; a de beside, along- side of, by; a ses s at his very door; du in the direc- tion; de son for (or pn) his part, also, likewise; de from aside, with a side glance; d'un autre on the other hand coteau m. hill, hillock cotoyer skirt cou m. neck couchant-e setting; le couchant the sunset, the West couche /. layer, hotbed coucher (i) lay, put to bed, sleep; chambre a bedroom coucher (2) m. setting (of the sun) coude m. elbow couler flow, run couleur /. color couloir m. passage (narrow) hall coup m. blow, stroke; le - partit the gun went off; a sur surely; - - de couteau knife thrust; de mousquet shot; - de pistolet pistol shot; de sifflet whistle; s de fouet lashing; s de crocs use of (the) fangs; d'epee sword-thrust, stroke 300 COUPABLE CURIOSITE of a sword; de vent blast of wind; tout a suddenly, all of a sudden; du premier at the very start coupable guilty, culpable, to blame; noun culprit couper cut, cut off, cut short, stifle; le cou cut off the head, ( fig.) wring the neck coupole /. cupola cour 1 /. court, courtyard, yard courage m. courage, pluck couramment fluently oourant, mettre au acquaint . . . with the facts; tenir au keep . . . informed courber bend, bow down, weigh down courir run, hasten, speed, be abroad, spread swiftly through, spread in; la poste go post- haste; par le temps qui court nowadays couronne /. crown couronner crown courrouce-e angry, wrathful courroux m. wrath course /. running, errand; re- prendre sa go on again court-e short coussin m. cushion couteau m. knife; coup de stab, slash couteux -se costly coutume/. use, habit; que de than usual (ly) couvee /. nest of eggs, brood couver sit on (eggs), brood couverture /. blanket, cover couvrir cover craindre fear crainte /. fear; de que . . . ne lest crane m. skull craquer crack, crackle, grind, squeak crasseux -se filthy crayon m. pencil creature /. creature, being creer create crenele-e notched, battlemented creuser dig, hollow out creux m. hollow, crack crever burst, burst open, tear, put out (eyes) cri m. cry, yell, shout crier cry (out), shout, yell, squeak, creak crime m. crime criminel m. criminal; d'Etat political convict crisper contract, clinch, clench, (of lips) curl croc m. tooth (of a dog), fang, (fig.) tusk; coups de s biting crochu-e crooked, hooked croire believe; je ne crois pas I don't think so; qui avait cru remarquer who had supposed he saw or who supposed he had seen croisee /. (French) window croiser cross, meet (going con- trariwise) croissant-e increasing; see croitre croitre increase, grow crosse /. butt (of a musket) croupe/, rump cru-e raw; also p.p. of croire cruaute /. cruelty cruche /. pitcher cruel-le cruel cueillir pick, pluck, gather, collect cuir m. leather; de leathern, leather cuisine /. cooking, kitchen, fare cultiver cultivate, raise, grow; ne se cultivent point cannot be grown culture /. cultivation, growth, growing, culture cupidite /. covetousness, greed curiosite /. curiosity, inquisitive- ness; interet de inquisitive interest CURIEUX DECEPTION 301 curieuz -se curious; noun in- quisitive person cygne m. swan; see below Cygne-Blanc (171, 22) an inn; see above cylindre m. cylinder cynique cynical d'abord see abord daigner deign (to), condescend (to) dalle /. flagstone, flag, slab dame (i)/. lady dame (2). why ! well, well ! I de- clare ! to be sure damne, un a lost soul dangereux -se dangerous, (of insects) noxious dans in, within, in the midst of, about, on,with, from, out of, of, in conformity with; le but de aiming to; la nuit under the cover of night; - sa maison (43, 22) by (close to) his house Dante (Alighieri) greatest of Italian poets (1265-1321); his Inferno (Hell) is divided into parts, each designed for some fit and special punish- ment; Dumas (47, 26) wrongly imagines that Dante has de- picted no torments like those of Boxtel davantage more, any more, further de (i) of mental directions: of, concerning, about, as to, per- taining to; rire de laugh at; s'occuper de concern oneself with; il s'agit de it is a ques- tion of, the point is to; ou van B. etait de sa recherche (the point) that van B. had reached in his investigation; craindre de fear to; riche de rich in; argent de poche pocket-money; son amour- propre de bourguemestre his pride as burgomaster; (2) be- fore numerals and the like: plus (moms) de more (less) than; (3) expressing separa- tion: from, away from, off, out of; (4) expressing position in place or time: de 1'autre c6te on the other side (also at, in); de 1'apres-midi in the afternoon; de la journee dur- ing the day; de nuit by night; (5) of agents and agency: with, by; servir de serve as; (6) of degree and price: by (clever d'un etage add a story to); haute d'un pouce one inch tall; payer de pay for; donner de give for; (7) possessively and partitively: de Jean of John, John's; quelque chose de bon something good; des paris de faits bets made; du, de la, des some, any; donner de ses nouvelles give news of oneself; (8) appositively: ce scelerat de de W. that rascal of a De W.; (9) de sorte que so that; de cette facon in that way; (10) of material etc.: of or from; (n) hist, inf.: et les bourgeois de courir and the citizens ran; (12) for other examples and other mean- ings see many words (in this Vocabulary) with which de is recorded and defined debarrasser rid, free debattre, se struggle deboucher pass out, issue, emerge detiRut standing, on one's feet, upright debris m. debris, rubbish, wreck- age . decadence /. decline, decay deception /. disappointment 302 DECERNER DEMANDE decerner award decevant-e deceiving, decep- tive; see decevoir decevoir deceive, disappoint decharger discharge, unload, re- lieve, clear dechiqueter mangle, tear to pieces dechirer tear, tear off, tear open, rend decidement decidedly, certainly, really decider decide declarer declare, state declin m. slope; au on the slope decompose-e distorted decorer decorate decouper carve, outline decourager discourage; se lose heart decouvert, mettre a lay bare, bring to h'ght decouverte /. discovery decouvrir discover, uncover, dis- close, reveal decrire describe decroissant-e decreasing, dying away decupler increase . . . tenfold dedaigneux -se scornful, dis- dainful dedain m. disdain, scorn dedans within, inside, inside (of) it; montez la-dedans get in defaillant-e / failing, faltering, fainting defaire undo, unmake, over- throw; se de get rid of defaite /. defeat defaut m. defect, flaw, blemish, fault, want; & de in default of, if not (a), wanting; a votre if you do not (suffer) defendre defend, protect, for- bid; a son corps defendant in self-defense defense/, defense; se mettre en stand on one's defense defiance /. distrust, diffidence; pi. suspicions defiant-e distrustful, diffident, suspicious defier challenge, defy; se de mistrust defigurer disfigure - defter file off, file by defroque /. cast-off clothing, old clothes degager free, release, draw back from degat m. damage, havoc degonflant de fiel discharging its load of bitterness; see gonfler degout r,i. disgust, loathing degouter disgust; se become disgusted degrader de strip of, degrade from degre m. degree, step deguiser disguise, conceal dehors outside; en out, out- ward; en de outside (of), out over, save deja already; c'etait quelque chose that alone (or of itself) was something dejeuner m. breakfast, (possibly) luncheon deia (de), par or au beyond, further than Delft a town near the Hague; famous for Us pottery deliberation /. council, proceed- ings delices /. pi. delight, rapture delicieusement delightfully, rap- turously delirant-e frenzied, raving, wild delit m. crime; see corps delivrer rid, free, deliver demailloter unswathe, unwrap demain to-morrow demande /. request, demand DEMANDER DESCENDRE 303 demander (a) ask, ask (to), re- quest (de to) ; a ask (leave) to; se wonder demarche/, (fig.) step demettre, se resign demeurer" dwell, live, remain, pause demi-e half; tin demi-degre half a degree; une demi-heure half an hour; neuf heures et demie half -past nine; a demi half adv.; see compte and voix demi-degre, demi-heure see demi demolir demolish demon m. devil, fiend; ton art du your devilish craft demonter dismount, take down, upset demontrer demonstrate, prove denature-e unnatural denonciation /. denunciation; see denoncer denoncer denounce, betray, 'give . . . away,' inform against denoter denote, betoken denouement m. end, outcome, upshot dent/, tooth dentelle /. lace depart m. departure depasser surpass, exceed, out- strip, get beyond depeche /. message, dispatch dependence /. (state of) depen- dency dependre (de) depend (on) depense /. expense, expenditure, outlay depenser spend deplaire displease; . . . lui de- plaisait he didn't like . . . deplorer deplore deployer display, unfold deposer place, deposit, lay (down), put depositaire in. keeper, . holder, trustee; de holding depdt m. deposit, trust depouiller strip, despoil, deprive, throw off depuis since, from; longtemps long, for a long while; cinq mois during the last five months; je me sens -- ma reclusion ... I have felt in myself during my solitary confinement . . .; que since, during the time that has passed since deputation /. committee, depu- tation depute m. deputy, representa- tive deranger disturb, bother, upset; . se take the trouble (to do something), trouble oneself dernier, derniere latter, last, final, late, recent, lowest; dans ces s temps of late; arriver les s be the last to arrive derobee, a la stealthily derober conceal, hide, rob; se steal away derouler unroll denier e behind; de from behind, hind adj. des (de + les) of the, some, any, or not to be translated des from, since, as early as; des le meme jour from that very day; des le lendemain the very next morning; des que as soon as desalterer, se quench one's thirst disappointment m. disappoint- ment desappointer disappoint desarmer disarm desastreux -se disastrous descendre alight, descend, come (go, let, bring, carry) down; ca, qu'on descende now, down- stairs with you 34 DESERT DE WJTT desert-e deserted, forsaken, un- inhabited desesperer drive to despair, dis- hearten, despair; see below desespere-e desperate, in despair desespoir m. despair, despera- tion deshonorer dishonor designer designate, point out desir m. desire, wish, longing, yearning desirer desire, wish desole-e sorry, sorrowful, grieved desordonne-e disorderly, dis- ordered desormais henceforth dessein m. design, plan; avoir plan desserrer unlock, ' open; see serrer dessiner draw, design dessous under, under it (or them), beneath, etc.; l&- under it, under them, beneath, etc. dessus on it (or them), upon; au de above, beyond; par- tout above all; sens dessous upside down, topsy- turvy destiner destine, intend; des- tine-e fated, doomed, etc. destruction /. destruction, ruin- ing detachement m. detachment detacher detach, take away, loosen, loose, pluck; se de- tachait sur was outlined against detente /. trigger detenteur, detentrice holder, de- tainer determiner decide, determine deterrer dig up, disinter detester detest, loathe detour m. circuit, winding way; faire un go by a round-, about way detourner turn aside, turn; - les yeux look away; se - turn aside, swerve detrdner dethrone detruire destroy deuil m. mourning, grief deux two; tous both; piquer des ply both spurs; de ses mains with both hands deurieme second devant before, ahead of, in front of, in the presence of ( vous in your presence); aller au- de go to meet developper develop, unfold devenir become; folle de go mad over; amoureuz fall in love; que devint-il? what became of him? mais alors que ? but what might become of me then? (192, 15) deviner guess, divine devoir (i) owe, ought, should, must, have to, be (destined) to; dusse-je even though I were to (had to) devoir (2) m. duty devorer devour devoue-e devoted, loyal, trusty devouement m. devotion, stead- fast affection devouer devote de Witt (i) Cornelius De Witt (1623-1672}, Dutch statesman and naval officer, brother of John De Witt and murdered with him, Aug. 20, 1672 de Witt (2) John De Witt, born at Dordrecht about 1625, be- came Grand Pensionary in 1653, played a great part in Hottatid's relations with Eng- land and Sweden, helped to foil plan of Louis XIV to annex the Spanish Nether- lands; opposed and was murdered by the Orangemen (Aug. 20, 1672) DIABLE DOT 305 diable m. devil, fellow, (excl.) the deuce ! il a le au corps there's no holding him in; au . . . ! the deuce take . . . ! - de Craeke hang you, Craeke diabolique diabolical, devilish dialoguer parley, talk diamant m. diamond Dieu m. God; bon ! good heavens! -- merci (Old Fr., la merci by] the grace of God) thank God; le bon God Almighty, the good Lord differer differ, defer, postpone, put off difficile difficult, hard difficilement with difficulty digne worthy; en Hollandais as befits a Dutchman dignement worthily dignite /. dignity, honor digue /. dike, dam dimanche m. Sunday diner (i) dine diner (2) m. dinner dire (i) say, tell, tell of, state, mention, speak out, mean; laissez-le dire let him talk; on dirait you might think; se - - style oneself; dit-e called; tout est dit everything is settled; vouloir mean dire (2): au de to believe, according to direction /. direction, manage- ment diriger vers, se make for, start toward discours m. speech, discourse disparaitre disappear disparition /. disappearance dispenser exempt, dispense with disposer dispose, arrange; dis- pose-e ready, etc. disposition /. inclination iissiper, se scatter, break up distance, lancee & (198, 17) thrown hard distinguer distinguish, see plainly, make out distraction/, pleasure, diversion, recreation distraire entertain, distract distribuer distribute, award divers, diverse different; pi. various divin, divine divine, heavenly diviniser deify diviser divide dix-huit eighteen dix-sept seventeen dix-septieme seventeenth docteur m. doctor doigt m. finger dolent-e mournful, piteous dome m. dome domestique m. servant domicile (de) m. abode (in), residence (in) dominer rise above, rule, prevail (over) dommage m. harm, damage, a pity dompter subdue, overcome, tame don m. gift done then, therefore, so, so then, pray , . ., do . . .; aliens ! nonsense! or come now! ecoutez listen please donner give, set (an example), open (sur on), yield; donne, mon enfant give it to me, child; se comme pose as, pretend to be dont of which, whose, of whom, by (in, out of) which, etc. Dordrecht Dordrecht or Dort, a town on an island in the Maas, ii miles S.E. of Rotter- dam dormir sleep d'Orsay a town in Rhenish Prussia (also Dorsay) dot [dot] /. dowry 306 DOUBLE ECLAT double duplicate, two-fold, double, extra, combined; fermer a clef turn the key twice; le de ce que twice what; see clef and tour dtfublement doubly doubler double, line, fold, dupli- cate, (fig.) take into one's own hands, fill (un emploi) in one's own fashion doucement sweetly, gently, softly, slowly douer endow douillet, douillette soft, (fig.) downy douleur /. grief, sorrow, pain; une telle de succes (46, 3) such a pang of success douloureusement sorrowfully, painfully, grievously douloureux -se painful, sorrow- ful doute m. doubt douter doubt, suspect; se de suspect, feel sure of; je m'en doute I have my suspicions douteux -se doubtful, dubious douve/. stave doux, douce sweet, soft, pleas- ant, gentle douzaine /. dozen douze twelve drame m. drama drapeau m. flag dresser set up, raise, erect, write down (or out), draw up, train; se rise, etc. droit m. right; a bon rightly, justly droit-e straight; adv. tout droit straight on, directly droite /. right (hand); a (to the) right drolement peculiarly, singularly, queerly dupe /. dupe, victim dur-e hard, harsh (pour to) duree /. duration durement harshly durer last durete /. harshness, cruelty eau /. water; de vie brandy; see grand ebabir astound, amaze; ebahi-e aghast, etc. ebene /. ebony eblouir dazzle eboulement m. landslide, cave-in ebranler shake, set in motion; s' start (off), move on (or forward), begin to march; la porte s'ebranlait the door was breaking loose ebrecher notch, (fig.) make a hole in ecarter push aside, remove, dis- card; rues ecartees back streets; s' draw aside, etc. echafaud m. scaffold echafauder pile up; sec echafaud echange m. exchange (de for) echanger exchange echapper escape; laisser let go, let out, (make) involuntarily, drop; les a litres noms nous echappent the other names we can't just now recall echauffer excite; s' le sang get excited echeant, ce cas in that event echelle /. ladder, scale (of sizes) echelon m. rung or round (of a ladder) echine /. back, spine echo m. echo echoir fall due echouer fail eclair m. flash, flash of lightning eclairer light, light up; s' light up eclat m. burst, explosion, splen- dor; les s de sa voix the loudness of his voice ECLATANT EMINEMMENT 307 eclatant-e bright, brilliant, loud; see eclater eclater burst, break out (or forth), explode; en san- glots burst out into sobs ecole/. school ecolier, ecoliere pupil economic /. economy, thrift; s savings ecot m. bill (for drink), (stand- ing) treat ecouler, s' elapse, pass; ecoule-e elapsed ecouter listen (to) ecraser crush, overwhelm (de joie with joy) eerier, s' exclaim, cry out , ecrire write, write down, spell ecrit m. writing, written order, document ecriture /. handwriting, writing ecrou m. prison record, jail record (containing data as to a prisoner); lettre d' letter of commitment, warrant; see ecrouer ecrouer enter as a prisoner, enter (with instructions to the jailer) in the prison book; see ecrou ecumer foam, froth, be very angry ecurie /. stable ecuyer m. horseman, squire, rider edifice m. building edit m. edit edition /. edition efifare-e (p.p.) scared, frightened, wild effaroucher scare, frighten away effectivement really efifet m. effect; en in effect, in truth efficacement efficaciously effiler, s' taper effort (pour) m. effort (to), en- deavor (to) effrayant-e frightful; see effrayer effrayer frighten; see effrayant effroi m. fright effroyable frightful egal-e equal, like; c'est just the same; cela m'est I don't care egaliser level, smooth down egard m. consideration; a cet respecting this egarement m. bewilderment, frenzy egoisme m. selfishness egorger slaughter, (Jig.) butcher egorgeur m. murderer, (fig.) butcher eh! eh! or oh! or ha! eh bien well (then), well, sir; what of it! (196, n); mais! still better! elancer, s' shoot (forth) dart, dash, rush, spring; peupliers elances tall and slender pop- lars electrique electric, electrical eleve m. or f. pupil, ward eleve-e lofty, with a high ceiling; see elever elever raise, bring up, rear; faire -- d'un etage have a story added to; s' rise, arise, ascend Elisabeth possibly the queen of England (1533-1603) elite /. elite; d' choice, best elle she, her, it, herself, etc. eloigne-e distant, far (away, off) ; see eloigner eloigner remove, move away, withdraw, dismiss, send away; s' (de) go away (from), forsake; see eloigne erabarras m. embarrassment, plight embarrasser embarrass embellir embellish embrasser embrace, kiss emigrer emigrate eminemment eminently 3 o8 EMMENER ENERGIE emmener take away emoi m. excitement; mettre en put in a flutter emouvoir excite, move, stir (up) ; emu-e agitated, deeply moved, (of the voice) broken with emo- tion emparer de, s' seize, get hold of empechement m. obstacle, hin- drance, prevention empecher (de) prevent (from), keep (from) empester taint emplir fill; s' be filled, fill emploi m. position, employment, office, function employe m. employee employer use, employ emporter carry away (or off); s' get angry, fly off, dash on; s' Si give vent to, break out in; 1' sur prevail over empourprer, s' flush (up) empreinte /. imprint, print, mark empressement m. haste, eager- ness, zeal empresser, s' hurry; empresse-e eager, in haste, hasty emprisonner imprison emu-e see emouvoir emule m. competitor en (i) in, into, on, at, as, like (a); en digne Hollandais as befits a Dutchman; en haut .... en bas (86, 31) from above . . ., from below; en scandant (in) scanning; en s'eloignant as she moved away; en parlant while (by, in, through) talking; en s'ou- bliant eux-memes meanwhile forgetting themselves; en soupirant with a sigh; en di- sant (204, 30) if he had said en (2) thereof, of it, of them, out of it, out of them, from it, from them, for it, for them, thereby, therewith, therefor, on that account, with it, about myself (36, 31) , etc.; (on) en (etait arrive 1 ) in the course of events (137, 7); en avec-vous? have you any? s'il en est temps encore if there is still time for it; en etre a (to) have gone so far as to; en vouloir a bear ... a grudge; s'en aller go away encadrer frame, encircle; s'en- cadre is framed encaisser box, encase, put . . . in a box, embed encan (m.); & 1' at auction enchainer chain, fetter, bind enchanter enchant, charm enchevetrer entangle enclaver, s' (of land) be in- cluded enclin, encline inclined enclos m. enclosure, yard encoignure/. corner encombrer obstruct, encumber, block encontre de, a 1' toward, against, counter to . encore still, yet, again, also; une fois once more; il y a trois mois only three months ago; qu'est-ce ? what now? encouragement m. encourage- ment encourir incur, draw down upon oneself encre /. ink endormi-e asleep; sec endormir endormir put to sleep, benumb, hoodwink; s' go to sleep, fall asleep endroit m. place, spot, point; & 1' de about, concerning^ with regard to, against; a son . toward him enduire coat, smear energie /. energy, force ENERGIQUE ENVI 309 energique energetic enfance /. childhood, boyhood, girlhood enfant m. or f. boy, child, girl, lad, lass enfantement m. giving birth, bearing (offspring) enfermer shut up, lock up, con- fine, enclose enfievrer, s' become feverishly excited enfin finally, at last, in a word enflammer inflame, excite; s' flash (blaze, light) .up, shine forth enfler swell, puff up, inflate enfoncer thrust, break in, bury; s' bury oneself, draw back enfouir bury, plant, hide away enfuir, s' run away, flee engager engage, pledge, strongly advise, urge; - une lutte engage upon (start) a struggle engloutir swallow up, devour engouffre'r swallow up; s' rush, pour, etc. enhardir embolden; s' a make bold to enivrer intoxicate, enrapture enjamber stride (climb or clam- ber) over enlever take away, remove, carry off, purloin, kidnap enluminer illuminate (manu- scripts, etc.) ennemi m. enemy, foe ennui m. tediousness, boredom, annoyance, vexation ennuyer bore, weary; s' feel irked (bored, etc.) ennuyeux -se boring, irksome, vexatious enorgueillir (de), s' pride one- self on enorme enormous, tremendous, huge enormement tremendously, very greatly enquerir de, s' inquire as to enrager be enraged, be mad; fake madden, drive . . . mad; enrage enraged, mad; noun fanatic, madman enseigne /. sign ensemble together, at the same time ensevelir wrap in a shroud, bury ensuite then, next, afterwards, secondly, besides entablement m. entablature entamer begin, start (up) entendre hear, understand; dke hear (said); parler de hear of; s' understand each other enterrer bury, put in the ground (plant) entete-e stubborn, headstrong enthousiaste enthusiastic entier, entiere -entire; tout wholly, heart and soul entierement wholly, entirely entomologie /. insect life entour, a 1' around, round about entourer surround entrainer carry along (or away), involve entre between, among, in, into entree /. entrance, door, coming in, entering entrefaites, sur ces meanwhile, while all this was going on entreprendre undertake entrer (dans or a) enter, go or come (into) ; faire show in entrevoir catch a glimpse of entrevue /. interview, meeting entr'ouvrir half open; entr'ou- vert-e half open, ajar envabir invade, overrun, (fig.) take hold of enveloppe /. envelope, wrapper envelopper wrap, wrap up envers (fig.) toward, to, against envi, a 1' vying; vb. -\ vie in + vb. in -ing 310 ENVIE ETIQUETER en vie /. envy; avoir de feeb inclined (desire) to envier envy envieux -se envious; 1'envieux the envious one environ (i) about, roughly speak- ing environs (2) m. pi. suburb, en- virons envoye m. messenger, deputy, envoy; see envoyer envoyer send; chercher send for; dire a send word to; - rouler send rolling; see envoye epais-se thick epaisseur /. thickness, thick part, depth epanouissement m. opening (up), blossoming epargne /. savings epargner spare; lui le chemin save his steps epaule /. shoulder; see hausser epee /. sword epeler spell out (atidibly) eperdu-e distracted, dismayed, desperate, deeply moved eperon m. spur epier spy, spy upon epingle /. pin epoque /. epoch, tune epousee/. (207, i) bride epouser marry, wed epouvantable frightful, fearful, dreadful epouvanter frighten, terrify epoux, aux deux (219, 3) to the bride and groom eprendre de, s' fall in love with; s'6prit d'un amour violent pour fell violently in love with epreuve /. trial, test, ordeal; see eprouver eprouver feel; see epreuve erreur/. error, mistake escalier m. stairs (Sight of stairs), stairway escarboncle /. carbuncle (sort of red garnet) escorte /. bodyguard escorter escort espace m. space, room Espagne /. Spain espece /. species, sort, kind, variety (42, 15) esperance/. hope esperer hope, hope for, hope to see; en trust in, put one's trust in espion m. spy espionnage m. spying explosion /. explosion, outburst espoir m. hope esprit m. mind, wit, spirit; 1' public public opinion esquif m. skiff essayer try essentiellement essentially essieu m. axletree, axle, hub essouffle-e breathless, winded essuyer wipe (off), dry (away) estrade/. platform, stage et and; et . . . et both . . . and; et vous (109, 10) and yet you; et dusse-je (36, 23) even though I had to etablir establish, fix, set up etage m. floor (story); premier second story, etc. etat m. state, condition, pro- fession, calling, business; pri- sonnier d' political prisoner; pi. (2, 8) legislative assembly ete m. summer eteindre extinguish, put out; laisser let ... die out etendre stretch, extend, spread; s' stretch out, etc. etendue /. extent eternel-le eternal, everlasting eternellement forever, eternally eternite /. eternity etincelle /. spark etinceler sparkle, flash, glitter etiqueter label ETIQUETTE EXECUTEUR etiquette /. label, plant-marker etoile /. star etonnement m. astonishment etonner astonish; s' que wonder that; faire 1'etonne feign to be surprised etouffer choke, smother, stifle etourdir astound, daze, bewilder etrange strange; chose strange to say etrangement strangely etranger, etrangere stranger, foreign; a not concerned with etrangler strangle, choke, throttle etre (i) be, belong, be true; il en sera de meme that will be the case also; c'est que the reason is that, it is (was) be- cause; (as aux. of aller and other intr. vbs. of motion, and in all reft, or recip. construc- tions requiring a p.p.) have; nous ne sommes que nous deux (195, 22) there's only you and I; ce serait Si (46, 20) ... it would be enough to . . . ; c'est que the reason is that; est- ce que (interrog. formula) do you, did they, etc.; n'est-ce pas? isn't it true? etc.; c'est vous dire . . . que (218, 21) in a word; soit! so be it! or all right or granted; soit que . . . soit que whether ... or; que j'ai ete chercher whom I went to get etre (2) m. being etreindre grasp, cfasp etrier m. stirrup etroit-e narrow, close, tight etude /. study etudiant m. student etudier study Europe /. Europe europeen-ne European eux them, themselves, they evacuer clear, evacuate gvader, s' escape Evangile m. Gospel evanouir, s' faint, swoon, dis- appear; etre evanoui-e be in a swoon evanouissement m. swoon; see evanouir evaporer, s' evaporate, vanish evasion /. flight, escape eveil m. alarm, warning, hint, clue; mettre ... en put . . . on his guard eveiller awake, arouse; s' wake up; eveille-e adj. awake, wide-awake evenement m. event, emergency eventail m. fan, screen eventrer disembowel, gouge, break open evidemment evidently, obviously evident-e evident, obvious eviter avoid, shun; qqch. & qqn. save one (from) some- thing evolution/, development, growth, evolution ex- (prefix) ex-, former exact-e exact, precise, right, accurate exactement exactly exactitude /. exactness, accuracy exagerer exaggerate exaltation /. exaltation, elation examen m. examination, scru- tiny examiner examine, scrutinize exasperer exasperate ex-bourgmestre m. ex-burgo- master excellent-e excellent excepte except exclamer, s' exclaim, cry out excuse /. excuse, apology excuser excuse execrable unspeakable executer carry out, do, execute, perform executeur m. executioner 312 EXECUTION FAIRE execution/, carrying out, execu- tion exemple m. example; par for instance, (excl.) you don't say so! I never! dear me! exempt-e free, devoid exercer exercise, practice, exert exhibition/, exhibition, display exigeant-e exacting, hard to please; see exiger exiger require, exact, demand; see exigeant exil m. exile; see pour existence /. existence, life exister exist expedier send, send off, forward, dispatch expeditif, expeditive expeditious, quick experience/, experiment expirer expire explication /. explanation expliquer explain; s'en avec make that clear to exploit m. achievement, feat exploiter turn to account, ex- ploit (industrially) expose m. statement, outline, description exposer expose, set forth; s' risk oneself exposition /. exposure exprimer express expulsion /. expulsion extension /. extent, range extrait de (legal) taken out of extraordinaire extraordinary extremement extremely extremite /. end fabrication /. making fabriquer make, manufacture face /. face, side (surface); en de opposite, in the face of, face to face with; regarder en look straight at, stare at; voir ... en stand before, face; faire -- a withstand, face (resist) facher vex, make . . . angry facile easy, compliant facilement easily facon /. manner, way, fashion; a sa to suit himself; d'une ou de 1'autre anyway; de , a so as to; de (& ce) que so that factice unreal (imaginary) faible weak, feeble faiblement weakly, feebly faiblesse/. weakness, feebleness faiblir weaken, become weak faience/, crockery, earthenware, pottery faUlir come near, all but . . . faim /. hunger; mourir de - starve faire do (de with), make, con- stitute, perform, cause, serve; quelques pas walk a few steps; les affaires de attend to 's business; Pignorant sham ignorance; - amitie avec make friends with, strike up a friendship with; un reve have a dream; se - 1'illusion have (create for one- self) the illusion, deceive one- self into thinking; face a withstand, resist; comment how to go about it; (causally) cause to, make, have, get to; naitre les fleurs cause the flowers to bloom; fit arreter had (i.e. caused to be) arrested; entrer let in, show in; mourir de faim starve to death; Us 1'ont fait fuir they have helped him to escape; venir send for; que bring about that; (in quoting, pret. only) fit-il, etc. said he, etc.; (impers.) il fait chaud (froid) FAIT FEU 313 it is cold (hot); il faisait grand vent there was a heavy wind; il fait beau the weather is fine; il ne fait pas bon de it's not well to (see bon); ce serait fait de vous that would be the end of you; se make for oneself, become, come about, take place, hap- pen fait (i): si yes indeed fait (2) m. fact, deed; au in fact, in truth, to be sure; - faux untruth, falsehood; tout & quite, altogether faite m. summit, top, ridgepole, (fig.) rafters falloir be necessary, be needed, must; ce qu'il fallait aux Orangistes what the Orange party wanted; il faut croire que it is plain that; il faut qu'il se soit sauve he must have escaped; aussi, fallait-il le voir (219, 21) so you ought to have seen him; il lui fallut descendre he had to go down; s'il le faut if need be falot m. large lantern fameux -se famous, notable (218, 16-17) familiariser familiarize familiarite /. familiarity; ses s his familiar interests familier, familiere familiar; des familiers (de la prison) em- ployees (turnkeys, etc.), (freely) hangers-on, frequenters familierement familiarly famille /. family; chambre de - (72, 21) 'private parlor,' 'family sitting-room' fanatisme m. fanaticism faner fade; se fade fanfaronnade /. boasting, blus- ter, blustering fangeux -se muddy, miry fardeau m. burden, load farouche fierce, savage, shy fatalite /. fate, fatality fatigant-e tiresome, wearisome fatigue /. weariness fatiguer tire, weary, jade faucher mow, mow down faucon m. falcon faussaire m. counterfeiter, forger (i?6, 32) faute /. fault, mistake, mischief, wrong-doing; sans without fail; de for want of, through not fauteuil m. arm-chair, easy-chair faux, fausse false, untrue, wrong, counterfeit (fausse clef) , make- believe; porter & faux miss (its or one's ami), not strike [the floor]] squarely favori-te favorite, pet felicitation /. felicitation, con- gratulation, compliment felicite happiness, joy feliciter (de) congratulate (on) femelle /. female, hen (pigeon) femme /. woman, wife; nom de married name fendre split, cleave; fendu-e cleft fenetre /. window, (loosely) window sill fer m. iron, point (of a lance); de iron ferme (i) /. farm, farmhouse ferme (2) firm, steady, steadfast fermement firmly, steadily, steadfastly fermer close, lock; see clef and verrou fermete /. firmness, strength, steadiness feroce ferocious, furious, cruel ferrant, marechal blacksmith, horseshoer fete/, holiday, festival; de la tulipe Tulip Day feter celebrate feu (i) m. fire, light FEU FOND feu (2) late: (jocularly) le roi Salomon feuillage m. foliage f euille /. leaf feuillet m. leaf (of a book) fevrier m. February fi fie; done! fie now! fiancee(/>./>. o/fiancer) betrothed, bride-elect ficelle/, twine, string fidele faithful fidelement faithfully fidelite/. faithfulness fiel m. gall, bitterness fier intrust; se (a or en) trust (to or in) fier, fiere proud fierement proudly fierte/. pride fievre/. fever fievreux -se feverish, excited; noun fever-patient figure/, face, figure fil m. thread, twine, yarn file /. rank; -- & droite right wheel, column right filer file, march file.t m. thread, snare, net fille/. daughter, girl, lass; jeune young lady filleul m. godson fils m. son fin (i) /. end fin (2), fine fine, dean-cut, deli- cately formed; la main fine with shapely hands finir end, finish, turn out; il finit par . . . finally he . . ., at last he ... fiscal of the Exchequer; see procureur fixe fixed, steady, staring fizement fixedly; regarder - stare at fixer fix, set (a for); me voila fixe now I know what to think; se settle flairer scent, smell, sniff flamand-e Flemish; noun Flem- ing flambeau in. torch, candlestick flamboyer light up, flash, gleam, blaze flamme/. flame, flash flanc m. flank, side Flandre /. sg. or Flandres /. pi. Flanders; dans les (219, 21) in all Flanders flatter flatter flechir bend, give way, flinch, sink flegme m. coolness, stolidity fleur /. flower, (fig.) finest flowers, gems fleurir bloom, flourish, thrive; see florissant fleuriste-tulipier m. tulip-seller, tulip-grower flexible flexible, pliable floraison /. blooming; en - blooming, in bloom flore/. flora florin m. (a Dutch coin worth now about 40 cents; in 1672, much more) florin florissant-e prosperous, thriving, flourishing; see fleurir flot m. wave, (fig.) flood, tide; a s in waves flotte /. fleet flotter float, be wafted flux in. flood, tide f oi /. faith ; ma indeed, upon my word fois /. time (occasion); a la at the same time; a la ... et both . . . and; encore une once more folie /. madness, insanity, folly, foolish thing, fad or craze (41, 28) fonce-e (of color) deep, dark fonction/. office, function, duty fonctionnaire m. official fond m. bottom, back, back- ground, depths (of Heaven); FONDATEUR FRISSONNER 315 de culotte breeches-seat; a thoroughly; au (48, 13) at heart; de' en comble utterlj fondateur m. founder fonder base, found fondeur m. metal-founder (caster, molder) fondre melt, swoop down, rush; se - - melt, (fig-) be over- whelmed fonds m. sg. basis, receptacle fontaine /. fountain, street well fonts (m. pi.) de bapteme bap- tismal font; tenir . . . sur les stand godfather to force /. (often pi.) force, strength, fortitude, duress (see con- traindre); a de by (dint of), through; de vive forcibly; lui fut he could but forcene-e furious, mad forcer compel, oblige, force, drive back, break in, break through; -- la consigne see consigne foret /. forest formalite /. formality former form, make formidable formidable, awful, terrible fort adv. very, very much, hard, fast, a great deal fort-e strong, powerful, rigorous, violent forteresse /. fortress fortune-e happy, fortunate, lucky fosse /. trench, ditch fou, fol, folle mad, crazy, insane, very fond; noun madman, crazy person, lunatic foudroyer utterly crush, dum- found; apoplexie foudroyante fatal stroke of apoplexy; p.p. thunderstruck, etc. fouet m. whip; see coup fouiller dig in, search, ransack foule/. crowd, throng fouler tread, tread on, tread down fournir provide, furnish fourreau m. sheath, scabbard ' fracas m. racket, crash, din, tumult fracture m. fracture, break fraichement recently; see frais (2) fraicheur /. coolness, freshness frais (i) m. pi. cost-s, expense-s; see justice frais (2), fraiche fresh, cool franc, franche frank, candid, free francais-e French, Frenchman, etc. franchement frankly; see franc franchir leap over, climb over, cross franger fringe frapper strike, knock, coin; - dans ses mains smite one's hands together; - - du pied stamp; -- deg pieds et des mains (74, 14) kick and pound; frappe-e d'une . . / stricken by a ... fraternite /. brotherhood, broth- erly love frayer open up (a way) fredonner hum (an air) frein m. bit, bridle frele frail, weak fremir tremble, quiver frequent-e frequent frequemment frequently frequenter frequent frere m. brother frileux -se chilly, shivery Frise /. Friesland (Frisia) ; toile de Frisian linen frison, frisonne Frisian; /. Frisian girl frisson m. shiver, shudder frissonner shiver, shudder, 316 FROIDE GISAIT quiver; tout frissonnant all shivery froid-e cold; j'ai froid I'm cold; il fait froid it's cold; see chaud froidement coldly, coolly froissement m. rustling froncer wrinkle, curl; - le ' sourcil frown front m. forehead, brow frotter rub fugitif, fugitive fugitive, fleeing, fleeting fuir flee, flee from; faire help .... . to escape fuite /. flight funerailles /. pi. funeral funeste fatal, baneful, dread, calamitous fur et a mesure, au in propor- tion, gradually fureur/. fury, rage furieux -se in a rage, furious; noun madman, maniac, fa- natic fuseau m. spindle futur-e future; le mort the condemned man gage m. wages, salary gagner win, earn (make, get money), reach gai-e cheerful, merry, gay galamment galantly galant m. suitor galerie /. gallery galop m. gallop; partir au - gallop off; prendre le start off at a gallop; au de deux chevaux behind two galloping horses galoper gallop garantir protect garden m. boy, lad, fellow, (young) man garde (i) /. guard, keeping, care; prendre & beware of, take care of; se mettre en put oneself on the defensive garde (2) m. guard (a man) garder guard, watch, keep; se de be careful not to; et se garde (24, 8) and is to be kept gardien m. warden, keeper, guardian garnir adorn, line, fill garrot m. withers gateau m. cake gater spoil, mar gauche left, awkward Gaufredy (195, 21) a French ecclesiastic, burnt at Aix as a sorcerer, jo April, 1611 gazon m. turf, (green-) sward gemir moan, groan, creak gemissement m. moan, groan gendre m. son-in-law gener hinder, hamper, embarrass general-e general; en general as a rule genereux -se generous, invigo- rating genievre m. gin genou m. knee; a x on one's knees, kneeling genre m. kind, sort; du de like gens m. or f. pi. people, servants, attendants gentil, gentille gracious, genteel, pretty gedle /. jail geolier m. jailer geranium m. geranium germe m. germ, seed germer sprout gesir lie (recline) geste m. gesture, bearing, move gesticuler gesticulate gibet m. gallows gigantesque gigantic gilet m. waistcoat giroflee /. gilly-flower gisait, gisant see gesir GLACER GROTE-MARKT 317 glacer chill, freeze; glace-e ice- cold, etc. glacial-e icy, cold-blooded glisser slip, slide (down); se (dans) steal (in, into) gloire /. glory glorieux -se glorious glorification /. glorification gond m. hinge gonfler swell Gorcum Gorkum, a town about 22 miles E. S. E. of Rotterdam gorge /. throat gothique Gothic gourdin m. club, cudgel, (?) rope's- end gout m. taste, savor, fancy, lik- ing; manger a mon eat what I like gouter eat (a bit of) lunch, eat a mouthful or two, etc. goutte /. drop gouverneur m. governor grace /. grace, pity, mercy, favor (87, n), pardon; faire de la vie spare one's life; - a (exceptionally s a) thanks to; par for mercy's sake gracieusement gracefully, gra- ciously gracieusete /. (kind) attention, graciousness gracieux -se graceful, gracious gradin m. step, tier graine /. seed; see malfaisant grand-e, grand' great, tall, large, grand; laver a grande eau wash with plenty of water; grande rue main street; grands cris loud cries; au galop at a fast gallop; un mois a whole month; un parti a strong resolution; en grand n a large scale andier, Urbain (195, 21) a sorcerer; a novel by Dumas is entitled " Urbain Gr andier " (Crimes celebres) and Grandier figures in Vigny's "Cinq- Mars"; he was burned at the stake in 1634 grandir grow, increase, empha- size, magnify grand-pere m. grandfather gras-se fat, soft (61, 24) gratis adv. without charge gratter scratch grave grave, serious gravement gravely, seriously graver engrave gravir climb, ascend gravite/. gravity, seriousness gravure /. engraving gre de, savoir be grateful (or thankful) for gredin m. scoundrel greffier m. clerk of the court grele slender, lank grenier m. attic, garret, loft gres m. sandstone (slab) griffe/. claw; pi. (fig.) clutches grillage m. wire-work, light iron grating grille /. gate, grating, barred gate, barred door grille-e grated, barred grimace, faire la make a wry face grimoire m. (106, 2) conjurer's scrawling, devilish scribbling grimper climb, clamber grincer les dents, de colere gnash one's teeth (for anger) gris-e gray, dull, tipsy; noun gris de chat cat's-eye gray grisatre grayish grommeler grumble, mutter gronder scold, roar, growl Groote Markt (Great Market); see Grote- Markt gros-se large, big, heavy; ecrire bien gros make one's letters very big grossir enlarge, swell Grote-Markt (French form of the GROTIUS HARLEM name of a square near the center of Haarlem) ; see Groote Grotius (1583-1645) a Dutch jurist, regarded as one of the founders of international law; as a leader of the Remonstrants, he was condemned to life im- prisonment at Loewenstein, 1619; with the help of his wife, who had concealed Jterself in a box supposed to contain books arid thus could take his place, Grotius escaped in 1621 groupe m. group, cluster guere hardly guerir cure, heal guerite /. sentry-box guerre /. war, warfare gueule /. mouth, jaw guichet m. (small) grated win- dow, wicket guichetier m. turnkey guider guide, lead, drive Guillaume d' Orange (William of Orange) born at the Hague, 14 Nov. 1650. "As head of the house of Orange he became the leader of the democratic monarchical party in opposi- tion to tlte aristocratic repub- lican party headed by John De Witt" (Lewis). In 1672 he saved Amsterdam from the armies of Louis XIV by opening the dikes; in 1677 he married Mary, daughter of the Duke of York who became King of England in 1685, as James II; in 1689 began the reign of William and Mary; upon her death (1694) William reigned alone; as the result of a fall from his horse, he died in 1702. Dumas confuses this William with William the Silent Guillaume le Taciturne (William the Silent, of Nassau, 1533^- 1584), founder of the Republic of the United Netherlands, great grandfather of William of Orange guirlande /. garland, wreath (' Aspirate h' is indicated by l h.. .) habile able, capable, clever, skill- ful habilement skillfully; see habile habilete/. ability, skill; see habile habiller dress; s' de dress in habit coat, garment, dress; pi. (208, 15) apparel habitant m. inhabitant; les bons s de the good people of habiter inhabit, live (in) habitude /. habit, usage; que d' than usually habituel-le habitual, usual, wonted habituellement usually habituer accustom 'hache/. axe 'hagard-e haggard, wild 'haie /. hedge; faire la (209, 20) stand along the sides, hedge them in 'haine /. hatred, hate 'hair hate 'haleter pant, breathe hard 'hallebarde /. halberd 'halte/. halt; faire une halt 'harangue /. harangue, speech 'haranguer harangue, make a speech to, talk to 'harangueur m. speech-maker, spouter 'harasser weary, fag, tire out 'harceler heckle, plague, torment 'hardes /. pi. things (clothing, etc.) 'hardi-e bold 'hargneux -se surly, peevish 'Harlem/. (207, 19), m. (212, t and elsewhere) Harlem or Haar- lem HARMONIEUX HUITIEME 319 'harmonieux -se harmonious 'hasard m. hazard, chance 'hasarder risk, venture; se venture 'hate/, haste; a (or en) toute with the utmost haste 'hater, se hasten 'hausser raise, shrug (the shotd- ders) 'haut (i), haute high, tall, loud; la tete haute his head erect; d'un pouce one inch tall 'haut (2) m. top, height; du en bas de down from; en above, from above (86, 31); par en from the top, above 'haut (3) adv. loudly; (tout) aloud, loudly; les armes! (8, 28) present arms! 'hauteur /. height, level 'Haye, la the Hague (capital of the Netlierlands) 'hein! hey! or what! helas! alas! herbe /. grass, herb heritier, heritiere heir, heiress heroine /. heroine heroique heroic heroi'quement heroically 'heros m. hero, paragon (of probity) Herysen (154, 21) sec Systens hesiter hesitate, falter, waver heure /. hour, moment, time; une one o'clock; tout a 1* just now, presently; a la bonne I'm glad to hear it; de bonne early heureusement luckily, happily heureux -se fortunate, happy, lucky heurter hit against; se dash 'hideux -se hideous 'hideusement hideously hier yesterday 'hisser hoist, raise histoire /. history, story, episode historian m. historian hiver m. winter 'hocher toss, shake, jerk 'hollandais-e Dutch; noun Hol- lander, Dutchman, etc. 'Hollande/. Holland homme m. man; a a man to honnete honest, (really) straight- forward, honorable, good, worthy (often ironical); homme upright man, gentle- man honnetete /. honesty, upright- ness, respectability honneur m. honor; tre de 1' de (208, 4) be a matter of pride to honorer honor 'honte /. shame (de for) ; avoir be (or feel) ashamed 'honteux -se ashamed, shame- ful Hoogstraet a. street in the Hague, west of the Buitenhof; appar- ently supposed by Dumas to be a building (18, o-n) Horace (Quintus Horatius Flac- cus, one of the greatest of Roman poets, 64-8 B.C.) Horace horloge /. clock (on tltc outside of buildings) horreur /. horror 'hors (usually hors de) out of 'hors-d'oauvre, un irrelevant horticole horticultural horticulteur m. horticulturist h6te m. guest, host hotel de ville town hall; see maison h6tellerie /. hostelry, inn 'houe /. hoe 'hourra m. hurrah; apparently used to express angry disap- pointment (30, 3) heigh! (?) 'huee /. yell, hoot, whoop 'huit eight; jours a week; see quinze 'huitieme eighth 320 HUM INDIVIDU 'hum [hbm, hmj (192, 30) h'm, ahem humain-e human humanite /. mankind, humanity humecter wet, moisten, water 'burner inhale, breathe in humeur/. (ill) humor, petulance humide wet, moist, damp humidite /. moisture, dampness 'hurlement m. howl, howling, yell 'hurler yell, howl hybride m. or f. hybrid (sterile crossing) 'hyene /. hyena hypocrite adj. hypocritical ici here; c'est ici this is idee /. idea idole /. idol ignorer be ignorant (or unaware) of, not know He /. island illisible illegible illuminer illuminate, enlighten illusion /. illusion, delusion; se faire 1' imagine, make the mistake of thinking illustre illustrious imaginaire imaginary; puissance imaginative powers imaginer imagine imiter imitate immediatement immediately immobile motionless imparfait-e imperfect impassible impassive impatiemment impatiently impatienter, s' become impatient imperatif, imperative of com- mand imperieux -se imperious imperieusement imperiously impitoyable pitiless, ruthless implacable relentless impliquer implicate, involve, imply impopularite /. impopularity important, le plus the most im- portant feature importer matter; n'importe no matter; que vous importe? what do you care? imposer (a) impose (upon) imprecation/, curse, oath imprimer print, give, impart, deal (a blow, etc.) improviser improvise iraprudemment imprudently, recklessly imprudent-e rash; m. noun rash man impunement with impunity imputer impute inanime-e inanimate, in a swoon, lifeless incarnadin-e incarnadin, tinted red incertain-e undecided incessamment incessantly incliner incline, bend; s' bo\v, bend, incline inconnu-e unknown; noun un- known man, stranger incontinent straightway inconvenient m. drawback, hin- drance; je n'y vois pas d' I see nothing to hinder incroyable incredible incruster (fig.) embed, get firmly (dans into) indefini-e indefinite indefiniment indefinitely Indes /. (now usually Inde) Indies indicateur that points out, telltale indigne unworthy indigne-e indignant indiquer designate, point out, indicate indispensable indispensable, re- quisite indissoluble inseparable; d'une facon indissolubly individu m. individual, person INEPUISABLE inepuisable inexhaustible inerte inert, motionless, dull inestimable priceless inevitable unavoidable inexprimable inexpressible infaUiibilite/., infallibility, unerr- ing accuracy infaillible unerring, infallible infailliblement without fail infame infamous, foul; noun scoundrel inferieur-e inferior, lower infernal-e hellish infiltrer, s' filter, creep infime very low infiniment infinitely inflexible unbending, unyielding informe shapeless informer inform, (intr.) investi- gate (49, 7); s' inquire infortune /. misfortune infortune-e unfortunate, ill- starred infraction /. breach, violation, infringement (a of) infructueux -se unfruitful, un- availing, fruitless ingenieux -se ingenious ingrat-e thankless, ungrateful inintelligible unintelligible inique iniquitous Injure /. insult injurier insult, berate injuste unjust, unfair innocence /. innocence innocent-e innocent, harmless inoffensif, inoffensive harmless inonder floor, bathe inquiet, inquiete anxious, dis- quieted, restless, nervous inquieter disturb, trouble; s' be anxious, worry inquietude /. anxiety, uneasiness, disquietude inscription /. inscription, head- line inscrire inscribe, write down, record INTERROGER 321 insensible imperceptible, insen- sible insensiblement imperceptibly insister insist, lay stress insomnie /. sleeplessness inspector inspect, look at inspecteur m. inspector, superin- tendent inspirer (a) inspire (in) , installer instal, set up; s' settle, put up, etc. instance /, entreaty, urgent re- quest; avec urgently instant m. instant, moment; a 1' meme immediately instigateur m. inciter, instigator, ringleader instinctif, instinctive instinctive instinctivement instinctively instruire instruct, inform instrument m. instrument, tool, implement insulter insult insupportable unendurable intact-e untouched, whole, sound intelligence /. intelligence, un- derstanding, intellect; etre d' be in league intelligible comprehensible intention /. intention, purpose, will intentionne-e, mal ill disposed interdire forbid interesser interest, concern; s' (a) take an interest (in) interet m. interest; see curiosite and mettre interieur-e interior, inside, inner; m. noun inside, interior, homt, intermediate m. intermediate; par 1' de through interpeller question, call upon interposer, s' come between interrogation /. examination interrogatoire m. (judicial) ex- amination interroger question, interrogate, feel (a pulse) 322 INTERROMPRE JUSTE interrompre interrupt, break into intime m. or f. intimate friend intimite/. intimacy intrigant-e m. or f. intriguer, schemer, ' wire-puller ' intrigue /. plot, plotting, intrigue introduc-teur -trice introducer; see introduire introduire introduce, let in, present introuvable undiscoverable, not to be got (or had) inutile useless, unnecessary inutilement uselessly inventer invent, devise inventeur m. inventor inviter invite, ask, bid, request involontaire involuntary involucrum (Lat.) m. involucre (surrounding leaves) irai, irais, etc. see aller ironie /. irony ironiquement ironically irreconciliable unreconcilable irregulier, irreguliere irregular irriter anger, irritate isoler isolate ivre intoxicated, drunk; mort dead drunk jadis formerly, of yore jaillir spring forth, come up jais m. jet jalousie /. jealousy jaloux -se jealous; noun jeal- ous man, etc. jamais ever; a tout forever; ne . . . never; - natura- liste n'avait ... no naturalist had ever, never had naturalist jambe /. leg Janvier m. January jardin m. garden; des plant es botanical garden jardinier m. gardener; gar?on gardener's boy jasmin m. jessamine jaunatre yellowish jaune yellow Jean John Jeanne (/. of Jean) Jane jeter cast, throw (away), fling, utter; a la poste mail (or post); lui jeta bas son... knocked off his . . . jeune young; fille girl, young lady joie /. joy; faire la de bring joy to; permettre une & indulge (a child) ; se mettre en celebrate joindre add, adjoin; les mains cksp the hands; se join joli-e pretty joue/. cheek jouer play; des pieds ply one's feet jouir de enjoy jour m. day, daylight, life; le by day, during the day; tous les s every day; au point du at daybreak; il faisait encore assez there was still enough daylight journee /. day; de la that whole day, while there was (is) daylight joyeux -se joyful, cheerful, merry juge m. judge jugement m. judgment, good sense, sentence juger judge, decide, imagine; - S propos de see fit to jupe /. skirt jurer swear, swear to (or by) j usque to, up to until; dans le into the very; jusqu'en Portugal as fyr as Portugal; la so far, thus far; jusqu'i to, as far as, even, to ... very; jusqu'S ce que until justaucorps m. close-fitting body- coat juste just, exactly, correctly, JUSTEMENT LEQUEL 323 aright; un an upright (or righteous) man justement justly, precisely, in fact, as it happened justice /. justice, law, trial (judicial) proceedings; frais de costs justification /. vindication justifier justify, warrant justum et tenacem just and steadfast (first words of an ode by Horace, III, 3, i) 1' see la and le la (i) the (or not to be translated), my, your, etc.; la belle fille (DOC.} my fine lass; de la sorte in that fashion, of that sort la (2) her, it li there, at hand, then; de li from there, thence, from that tune; c'etait li that was; ce sont li those are; se trouver li be at hand; ce que tu dis li what you are saying; also here (88, 27) la-bas over there, yonder labeur m. labor, toil laboratoire m. laboratory lacerer tear up, slash lache cowardly; noun coward lacher let go, release; le coup fire the shot; la detente pull the trigger lachete /. cowardice, act of cowardice laconique laconic laconiquement laconically laid-e ugly laideur/. ugliness laine /. wool, woollen stuff laisser leave, let, allow; ne pas de not fail to lait m. milk; blanc de milk- white laiterie /. dairy, dairy farm lambeau m. shred, tatter, strip lame /. blade lamentable pitiable, heart-rend- ing lance /. spear, spear-like stamen lancer throw, dart, cast, launch, hurl, bring forth languir languish, linger, pine lanterne /. lantern; sourde dark-lantern laquelle see lequel large broad, wide, generous; ouvrir de s yeux effares (196, 25) open one's eyes wide in fear largeur /. breadth, width larme /. tear; fondre en s melt into tears lasser weary Lavater (1741-1801) Swiss phi- losopher and poet, noted for his work on physiognomy laver wash, wash off (or away) le, 1' (i) def. art. m. the (or not to be translated), my, your etc.; 1'ami G. (his) friend G.; (popularly) le Jean [so du CorneUle] (7, 26) ; 1'infime G. that infamous G.; le soir meine that very evening; le beau malheur! what a mis- fortune ! le, 1' (2) pron. him, it, so (or not translatable) lecon /. lesson lecteur m. reader lecture /. reading; see prendre leger, legere light, slight, thin legerement lightly, slightly legitime lawful, legitimate leguer bequeath lendemain m. next day; le soir the next evening lent-e slow lentement slowly lenteur /. slowness, deliberate- ness lequel, laquelle, lesquels, les- 3 2 4 LES LOUIS quell es which, who, whom, what, that; see 99, 24 les (i) the (or not to be trans- lated: eveiller les soupcons awaken suspicions) ; my, your, etc.; les charmants caieux ! what charming offsets! see la (i) and le (i) les (2) them; see la (2) and le (2) lestement briskly, smartly lettre/. letter; d'ecrou war- rant leur (i), leurs their leur (2) them, to (for, from) them, etc.; le, la, les . . . their levant-e rising; noun sunrise, East lever raise, lift, (intr.) sprout; la tete (les yeux) look up; se rise, get up, stand up levre /. lip levrier m. greyhound Leyde /. Leyden (in S. Holland) liasse /. bundle (of papers) liberte /. liberty, freedom libre free, at liberty licence/, license lier (a) bind, fasten, tie (to), connect (with) lieu m. place, cause, ground, reason; avoir take place, occur; "donner & give rise to; au instead; en mon et place (legal) in my stead (9 1 . 2) lieue /. league (2.422 miles) lieutenant m. lieutenant ligne /. line; & une pres al- most to a dot liguer league, ally limbes m. pi. limbo lime /. file lin m. flax; de flaxen linge m. linen (pi. bed linen), cloth Linnee (44, i) Linnaeus (Swed- ish naturalist, 1707-1778, famed especially for his botani- cal classifications) Ike read lisiblement legibly lisse smooth lit m. bed livide ashen-hued, ghastly pale livre (i) /. pound livre (2) m. book livrer deliver, give up; se - devote oneself Loevestein, Loevenstein, Loe- westein, etc. a castle on an island farmed by the rivers Maas and Waal (Wahal) loger lodge, put up logis m. lodging, lodgings, abode loi /. law loin far, far away; il n'y avait pas it wasn't far; de - from afar lointain-e distant; dans le - in the distance, far beyond one loir m. dormouse loisir m. leisure, spare time long (i), longue long long (2): le de along, down, up and down, alongside of, by longer go along, skirt longtemps a long tune; depuis for a long while, long longuement at length longueur /. length lors then; des -- from that moment lorsque when louable laudable, praiseworthy louange /. praise, commendation louer (i) praise louer (2) hire, rent loueur m. one who lets out; - de chevauz liveryman Louis XIV Louis XIV (1638- 1715), called "the Great," reigned from 1643-1715; his court was brilliant, but he LOTJP MANIFESTER 325 made France pay dearly for his love of conquest and of personal glory loup m. wolf lourd-e heavy, flagrant, very bad lourdement heavily, clumsily Louvois (1641-1691) minister of :c'