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Aner ee a eA Py piekat ay saad Beaute beds sate Moa) ode Mea ares 19 dct r s V9: Real hpi cea E pnd + Asad oh eae dass ia en ne ae i * Ay 1 we nha thee #8 rH ‘ sah font fro eg Aha) Moai s5t ! bet fete ie » tye Eaopciey ied f 1 dae airy 1 ee dad ‘ Mhedut pe GS ; es fai ds ate pod ts ne ay Gath by leet) A “ a4 es ee tie ‘ i co: 4 ‘ eel otis ge : bhi od Sila we fae: baal ee pape ee - ya hed a Ged 9 ra" Ve he " De thet Peay Gemiied Are % ‘a4 aa ab ae Veal ies eh a Yell bg i ak i ie i fa alia’ jen hea deat Aad en ged wi BLY Uheeh ae 4 MV sth hike hare ie Siuiia mn te ! ear ec aty sO One hte sed Abel ‘} ‘ chia fie Va Sy ae penis “hk i * eae son a, oe Ai eats Mi Xs f Dae rs ashy ea Hs ie “ Had acing ae oF jiee WY sti et see) a y a Se of i eee ie tit Hh teh Sanh i Retna thet 4 Hy Rl oe aa 44. po ie oh Sete t i i jl nr fe Shana : tat i 4 We ie Seah sy aes + nA “tt Ca Bey : it a ns a Heh » byes 5 ead 5 yard it eee irien'y Roan peAloge dite Bighata a i ei te as } Ay a bee hebade 1 : gen si (ei Oi Yedda : sits fede, oT yidgitcboae ‘awe . tae eae: ee Peal he era hte veh ia WA Se rh ash i +}: ee bi 4 ti qr ary , mA iy ie 4 ea hatl te + + YOE hag 4a), shout : ai 4 i dt, i g 4 Hire Saati va ) iy Ka GE . 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MANCEL, LIBRAIRE, PUBLICATEUR A LA NORMANDIE, 2 \\ INTRODUCTION. SS oS La philologie n’est plus cette science de pédant qui disséquait les mots et dissertait sur les particules ; elle retrouve dans les idiémes la généalogie des peuples et projette des clartés nouvelles dans la philosophie de Phistoire. Mieux compris, les prétendus hasards, qui semblaient concourir péle-méle a la formation des lan- gues, sont devenus des lois intelligentes et logiques ; les corruptions elles-mémes sont expliquées et rame- nées a des causes nécessaires. La variété et la mobilité des idiémes n’ont plus rien qui déroute la science ; on " sait que chaque langue est faite 4 l'image du peuple qui la produit, et qu’elle en partage toutes les destinées. Elle nait, se développe et se compléte avec lui; puis, lors- qu il a fait son temps, lorsque les liens qui en réunis- saient tous les membres dans une société marchant au méme but et travaillant en commun 4 la fortune de la méme idée, viennent a se desserrer, la force de cohésion dela langue se relachea son tour ; les différents principes quis’ étaient coordonnés dans une sorted’ harmonie, s’exa- gerent au détriment les uns des autres. Ici, le besoin de FRSBOGL clarté devient dominant et la syntaxe est profondément altérée par Vintrusion de particules et de mots auxi- liaires qui n’ajoutent rien ala pensée ; la, le vocabulaire parait d’une pauvreté impuissante, et, sous prétexte de donner plus d’énergie 4 Vexpression, on imagine des barbarismes prétentieux ; ailleurs, on se persuade que la lenteur des constructions ne répond pas a la vivacité de la pensée, et des ellipses contraires 4 la nature de la langue s’y impatronisent violemment ; les mots rejettent | les lettres qui appesantissaient leur prononciation ou laissent derriére eux les désinences qui retardaient la marche de la phrase. Une fois faussée dans son esprit et altérée dans sa grammaire et dans son vocabulaire, la langue s’ouvre 4 toutes les importations étrangéres et se barriole de tous les idiémes avec lesquels elle se trouve encontact. Bientét ce n’est plus un moyen général d’ex- primer ses idées qui appartient a toute une nation, mais un jargon individuel que chacun modifie 4 son gré et approprie a.son usage. Cette décomposition de la langue précipite 4 son tour la ruine du peuple ; désormais sans unité et sans force, c'est une proie offerte 4 qui veut s’en saisir: il se dissout province par province, et son nom lui-méme disparait de Vhistoire, Alors un travail de reconstitution commence; des intéréts communs se sroupent et recomposent de nouveaux centres de vie ; insensiblement le langage s’y généralise et s’organise ; il contracte des habitudes de prononciation, adopte une construction systématique et reconnait des régles de erammaire. S’il n’y a pas encore d’unité dans son es- prit ni d’harmonie entre ses principes, si cen’est pas un , ¢ e — ir ididme complet qui satisfasse 4 tous les besoins de la pensée humaine, c’est déja un patois qui, maleré son indigence, son irrégularité et ses incohérences, suffit aux nécessités de chaque jour. Un temps vient ow les intéréts se compliquent, s’étendent , rapprochent: des populations jusqu’alors divisées, et il se forme un lan- gage intermédiaire qui. facilite leurs communications. Ce mouvement d’agrégation s’élargit de plus en plus et continue jusqu’a ce que toutes ces parcelles de peuple se soient agglomérées dans une seule nation dont la lan- gue incessamment modifiée devient également intelli- gible a tous ses chefs. Créée ainsi par les rapports et le mélange des patois, la langue commune participe de tous ; elle prend 4 l'un ses habitudes de prononciation, a l’autre ses tours de phrase ; elle conserve les idio- tismes d’un troisiéme, et comble, en puisant indistincte- ment dans tous, les lacunes qui existaient dans les dif- férents vocabulaires. Cette composition, en quelque sorte chimique, des langues n’est point abandonnée a d’a- . veugles hasards ; il faut bien sans doute reconnaitre une large part aux circonstances et a des influences dont la philologie n’explique pas toujours la cause premiere ; mais en s’appuyant sur Vhistoire on peut au moins constater leur mode d’action et les effets qu’elles pro- duisent. Maleré cette fusion 4 Pusage de la classe élevée de la société, presque jamais les patois ne disparaissent en- tiérement ; le peuple auquel ils suffisent les conserve avec obstination, et les savants sont obligés de les con- sulter pour connaitre les éléments constitutifs de la aay _ langue et remonter a la forme primitive des mots. Leib- nitz Pavait déja reconnu avec cette profondeur de vues qu’il portait en toutes choses: « Il semble que toutes les langues ne sont que des variations , souvent. bien embrouillées, des mémes racines, mais qu il est difficile de reconnaitre 4 moins de comparer beaucoup de langues - ensemble, sans négliger les jargons dont il serait bon que les savants de chaque pays prissent la peine de re- cueillir les mots particuliers (1). » Un savant dont les connaissances trop exclusivement classiques et quelques épigrammes plus spirituelles que justes ont souvent fait oublierl’érudition etle bon sens, ne craignait pas d’écrire en téte de son dictionnaire des Origines de la langue’ francaise : « Il faudroit sgavoir avec cela tous les divers ididmes de nos provinces et le langage de nos paysans parmy lesquels les langues se ‘conservent plus longue- ment (2). » Les recherches consciencieuses de T'a- cadémicien Bonamy ’avaient amené & soutenir cette opinion dont il ne comprenait pas la cause: « Crest de la langue vulgaire des provinces que se sont formées les langues francoise, espagnole et italienne (3). » Enfin, un homme @une bonne grace infinie, qui avait peu ap- pris ce qu'il savait le mieux et ne réfléchissait guere, | (1) Guvres completes, t. Vi, P. 1, p- 189. Epitre dédicatoire a M. Du (2) Ménage, Origines de la langue francoise, rgot, disait Puy, non paginée. Un des meilleurs esprits du dernier siécle, Tu aussi: Les dialectes ou patois usités dans les différentes provinces, qui ~ wont pas subi autant de variations que les langues polies, ou qui du moins n’ont pas subi les mémes, contiennent aussi nombre de mots étymologiques; cest 1a qu’il faut chercher. (3) Mémoires de V Académie des Inscriptions, t. xxiv, P- 597. SE a mais quirévait trés-juste, M. Charles Nodier, a dit dans un de ses plus spirituels feuilletons : « Je pose donc en fait premiérement que l’étude des patois de Ja langue francoise, bien plus voisins des étymologies, bien plus fidéles 4 Yorthographe et 4 la prononciation antiques, est une introduction nécessaire a la connoissance de ses radicaux ; secondement, que la clef de tous les ra- dicaux et de tous les langages y est implicitement ren- fermée (1). » Notre siécle doit une de ses gloires a cette intelli- gence de importance des patois. C’est en les étudiant et en comparant leurs divergences avec toute la patien- ce du génie, que, malgré des conséquences beaucoup trop systématiques , M. Jakob Grimm est parvenu a re- constituer histoire de la langue allemande et a élever un des plus beaux monuments dont s’énorgueillisse la philologie européenne. La permutation des lettres et les modifications que subit la grammaire dans le passa- ge d'une langue 4 une autre, ont enfin acquis une vraisemblance scientifique , et ont pu étre ramenées a des lois qui, sans avoir cette fixité qu’on leur a témé- rairement attribuée, ont servi de base aux profonds tra- vaux de M. Eugéne Burnouf. En vain le zend s’était -effacé de la mémoire des hommes et ne restait plus qu’a l'état d’énigme dans les livres de Zoroastre ; M. Burnouf' n’avait point besoin, pour le comprendre , de ces livres élémentaires , indispensables jusqu’ici aux plus savants philologues ; il l’a rapproché du sanscrit et du persan, auxquels il avait servi d’intermédiaire , et (1) Le Temps, 10 mai 1854. ) — VI — : des obscurités impénétrables depuis des siécles 4 V’in- telligence humaine se sont complétement dissipées. Un jeune homme tombé, au premier rang des travailleurs, martyr dela science, M. Fallot, fut le premier a sentir . quelle lumiére les dialectes balbutiés au berceau de la langue francaise pouvaient répandre aussi sur son ori- gine et sur son histoire : c’est Vidée originale et vrai- ‘ment méritante de son livre. Malheureusement la mort ne lui a point permis de compléter sa tache, et il était bien difficile de distinguer nettement et de caractériser d’une maniére tranchée des patois qu’aucune ceuvre littéraire n’avait fixés, et qui se fondaient par des gra- dations insensibles les uns dans les autres. Les poétes dont lorigine était le mieux connue, n’offraient eux- mémes a cet égard que des renseignements bien incer- tains ; souvent ils cherchaient 4 se concilier un audi- toire ou des protecteurs habitués 4 une autre variété de langage, et les copistes qui nous ont conservé leurs compositions en rapprochaient méme_ involontaire- ment la prononciation et le style du dialecte qu’ils parlaient depuis leur enfance (4). D’inévitables er- reurs durent donc échapper 4 M. Fallot, et en voulant les corriger, au risque d’en commettre de nouvelles, peut-étre lauteur du plus savant ouvrage que nous ayons sur les origines de notre langue, n’a-t-il pas suf fisamment reconnu la difficulté de Pentreprise et Tin- génieuse initiative de son devancier. Mais il n’en a pas (1);Comme on l’a déja remarqué dans la Bibliothéque de VEcole des chartres, ue série, t. 1, p. 195, il existea la Bibliothéque du Roi deux mss. de Froissart, n°s'8315 ef 9661, dont les formes sont enti¢érement différentes. == YN - moins pleinement accepté le méme point de départ, et Pétude des différents dialectes semblait désormais la premiére nécessité de toute philologie sérieuse. Pour remettre en question ce fait fondamental de Vhistoire des langues, il ne fallait rien moins que l’a- ventureuse publication de M. Génin sur les variations du langage francais depuis le XII* siécle. Quelques lec- teurs étonnés de cette philologie a facettes , qui amuse comme un ouvrage d’imagination, ont oublié que le ta- lent d’écrire ne prouvait pas nécessairement la justesse des idées, et le public , qui ne raisonne pas lui-méme ses opinions, ala superstition du succés. Malheureuse- ment la premiére condition d’un travail d’érudition nest ni une polémique acérée qui ne songe qu’a don- ner de grands coups d’épée, sans s’inquiéter autrement du sujet de la bataille, ni un esprit infatigable, tou- jours prét 4 illuminer Vair d’une gerbe d’étincel- les; rien ne peut suppléer 4 une connaissance ap- profondie des faits et a Vappréciation réfléchie de leurs conséquences (4). Sans un point de départ in- (1) M. Génin s’est méme dispensé d’apprendre nofre viecille langue ; ainsi, p. 217, il traduit Puis fait porter quatre bancs en la place: La vunt sedeir cil ki s’deivent cumbatre. par: Charlemagne fait disposer sur la place, en maniére de champ clos,,. quatre bancs ot vont s’asseoir ceux quise doivent combattre. On ne se bat- tait pas assis ; Sedere avait pris pendant le moyen-age la signification de Stare, comme M. Génin edt pu le voir dans Ja nouvelle édition de Du Cange, t. vi, p. 157, col. 1. Faus, desléaus, Deu anemis, Ou avez-vous vostre asne mis? Deu, Dev, west pas 1a pour desvé, Insensé, comme le dit,M. Génin, p. 223,. — vin — . > contestable et des moyens certains de reconnaitre tous les changements survenus dans la prononciation pen- dant huit cents ans, l’entreprise de M. Génin était im- possible; mais de telles difficultés, insolubles pour tout autre, ne pouvaient arréter une intelligence si témérai- rement ingénieuse. Aprés avoir posé en principe l’uni- note 1 ; cela signifie tout simplement Faux, déloyal, ennemi de Dieu. Il traduif p. 84: Et dist Bouchart: C’est Hugues de Belin Qui lez nos terres vient ardoir et bruir. Et Bouchaud répond: C’est Hugues de Belin qui vient braler et tapager auprés de nos terres, au lieu de; qui vient briler et incendier nos terres au loin. Un autre passage, p. 241, est traduit d’une maniére encore plus in- croyable : Dame, fist elle, je vieng a vos, C’une goute a ma fille el flanc : Si voloit de vostre vin blanc Eft un seul de vos pains faitis ; Mais que ce soit des plus petiz ! Dieu merci, je suis si honteuse ! Mais ainsi m’engesse la teuse Que le me covient demander ! Je ne soi onques truander. Madame, dit-elle, je viens & vous, car ma fille a la goutte ( lisez une dou- leur) au cété ; elle voudrait de votre vin blanc et un seul de vos jolis pains (lisez de vos pains blancs) ; pourvu que ce soit un des plus petits! Dieu merci, je suis si honteuse! Mais ainsi m’angoisse la toux, comme il est vrai que je suis réduite a vous le demander. Je ne sus jamais truander.— II est par trop évident qu’il fallait traduireainsi les derniers vers : Mais, je vous prie, un des plus petits! Dieu merci, je suis si honteuse! Mais la pauvre fille me tourmente tellement qu’il me faut vous le demander : je n’ai: ja- mais su mendier. Tout cela est digne d’un philologue qui a dit, p. 342, que les Anglais nous ont pris les trois quarts de leur langue, et qui nous reprochait derniérement d’avoir publié unde nos plus vieux poémes quinelui parait pas amusant, et d’avoif cherché a corriger par la comparaison des diffé- rents textes , les erreurs qui se glissaient toujours dans les mss.’ du XII° siécle, au lien d’en avoir tout simplement choisi un bon et laissé de cété tous les autres ; Nouvelle revue encyclopédique, t. ut, p. 558. = fy at té primitive du frangais (4), il déclare « qu’il a été fon- dé avec une logique admirable et dans un systéme d’en- semble aussi régulier que vaste (2), » et ajoute : « L’é- tude du vieux-francais, celle de toutes les langues , je pense, mene areconnaitre ce phénomeéne étrange, qu’u- ne langue , 4 son origine, est réguliére , logique dans toutes ses parties, et, 4 son point de perfection , pleine d’inconséquences et d’irrégularités (3). » On doit, selon lui, « ne s’attacher qu’a Ja langue parlée; la premiére tache de quiconque veut travailler utilement sur notre vieille langue est de déterminer le rapport de l’ortho- | graphe a la prononciation (4); » et les consonnances de nos vieilles poésies nousen donnent un moyen que ne peut fausser aucune différence locale de prononcia- tion (5), parce que « les patois n’ont jamais existé que comme langage, et nulle part a l’état de langue littéraire écrite (6). » Nous apprécions trop peu le plaisir de sur- prendre un écrivain de talent en flagrant délit de con- tradiction pour rechercher curieusement s’il ne s’est (1) P. xv. (2) P. xix. Ce qui nel’empéche pas de dire, p. 48: C’est un des nom- breux abus d’un temps ou il n’existait point de Code pour la grammaire, ni pour l’orthographe, et p. 52: Nos péres écrivaient chalt et prononcaient caud : cela vient de ce que rien n’était fixé, pas plus la forme des mots que la valeur des lettres et la nécessité des régles. (5) P. 204. M. Génin a oublié de nous dire en quoi consistait la perfection dune langue. (4) P. xur. (5) P. xvi; nous ne parlons pas des discordances d@’orthographe qu’il indique aussi. Ce singulier moyen ne deviendrait sérieux que si l’on venait au monde avec la conviction de l’unité et de la régularité de la langue, non plus seulement & son berceau, mais A toutes les époques de son histoire. (6) P. 271. 4 eis ee point glissé dans le livre de M. Génin quelques passa- ses qui démentent son systéme; nous aimons mieux l’a- border de front et lui opposer des raisons générales et s’adressant directement aux choses. Un célébre philologue, qui s’était mis au service d’un patriotisme de localité, avec sa volonté opiniatre et son ancien esprit d’avocat, avait déja prétendu qu’une seule et méme langue était née partout du mélange iné- gal du latin avec des ididmes différents. Mais tous les savants qui ne se laissaient point éblouir par la renom- mée de M. Raynouard et son érudition pro domo, s’é- taient refusés 4 croire que des influences philologiques diverses aient pu introduire dans la méme langue des altérations semblables et la reconstituer d’aprés des principes identiques. Ils savaient @ priori qu'il était ra- dicalement impossible que le provencal ett servi de temps darrét entre le latin et toutes les langues mo- dernes de Europe latine. Malgré un assez grand appa- reil de science, cette singuliére prétention n’avait au- cune autre base qu'une malheureuse confusion. - Pour les distinguer des patois allemands , on appelait égale- ment le provenc¢al et toutes les autres corruptions du latin langues romanes (A) , et M. Raynouard avait ad- mis une fois pour toutes que ce vieux roman ne pouvait étre que Pidiéme des troubadours. Le systeéme de M. Génin repose sur une méprise sem- blable : il a vu mentionner avec honneur, dans plu- -sieurs écrivains du XII° siécle, une langue francaise, et (1) Voyez notre Histoire de la poésie scandinave, prolégomenes, p. 185~ LST. , ek cette simple dénomination lui a paru une preuve suffi- sante qu'elle était parlée dans toute la France. S’il eat été moins épris des idées paradoxales, un esprit aussi penétrant eut certainement compris avant tout exa- men, que , dans un pays étendu, divisé en cent pro- vinces, soumises chacune 4 une administration et A une législation particuliéres, et trop isolées les unes des au- tres par une histoire et des intéréts différents pour qu'il s’y établit un centre intellectuel et une littérature generale, il ne pouvait exister d’ididme commun 3 tout le territoire. A défaut de connaissances théoriques sur la formation des langues, une étude réfiéchie des faits aurait di lui apprendre que cette prétendue langue frangaise n’était que le dialecte usité dans I'Ile-de- France (4). Benois disait, dans sa Chronique rimée, en parlant de Louis d’Outremer : Vait s’en vers France e Loiineis , E si enmeine ses Franceis (2). Ce Loiineis, que le poéte distingue ainsi de la France, est le pays de Laon, en Picardie, que les derniers Kar- lingiens se plurent a habiter. Aimés de Varennes, qui (1) L’Ile-de-Franece se composait du pays compris entre la Marne, la Seine, l’Oise, le Valois et le Mulcien. Dans I'origine, ce pays s’étendait vers Je nord-est, jusqu’aux riviéres d’Aisne et d’Ourca, et formait a peu prés une ile. Telle est origine du nom donné a ce pays; M. Guérard, Annuaire historique de la Soci¢té de Vhistoire de France pour 1837, p. 104. (2) L. 1, V. 15598. Nous ajouterons un autre témoignage, Ivid., v. 4491 : Gerpent Paris e tote France ; S'unt Normendie trespassée, Puis entrerent en mer salée, En Engleterre pristrent port. — xi — écrivait dans le Lyonnais, disait, dans son Roman de Florimont : | Il ne fu mie fait en France, Mais, en la lengue des Francois, Le fist Aimes en Lionnois (1). Un passage de Raimbert, de Paris, est encore plus significatif; pour donner une haute idée de la puissance de Braiher, il lui fait dire : Si calens Chartres, et Estanpes, et Blois, Kt tot Pontieu, Berriu et Gastinois, France, Vimeu et tot le Vermendois (2). Les étrangers eux-mémes désignérent pendant long- temps les sujets des rois de France par le nom des dif- férentes provinces du royaume. Guillaume , comte de Poitiers, disait au commencement du XII* siécle : Anc non ac Norman ni Frances, Dins mon ostau (8) ; et Bertran de Born s’écriait & une époque encore plus rapprochée de nous : Ben an camjat honor per avoleza, - Segon qu’aug dir, Berguonhon e Francey (4). * (14) M. P. Paris, Manuscrits francois de la Bibliothéque du Roi, t. un, p- 13. (2) Chevalerie Ogier de Danemarche, v. 11163. Nous ajouterons: une ‘autre cifation d’autant plus remarquable qu’elle ne remonte qu’au XV¢© siécle: Il ara les Francois et ceulx Qui se dient de Picardie. Comment la fille du roy de Hongrie se copa la main dans le Thédtre francais au moyen-dge, p. 502. Voyez aussi la Chroniqueascendante des Ducs de Normandie, attribuée sans raison suffisante 4 Wace, v. 5, et un passage du Roman @Anseis rap- - porté dans le Bulletin de UV Académie royale de Bruxelles, 1838, p. 304. (53) FARAY UN VERS, dans Rochegude, Parnasse occitanien, t 1, p. 1. (4) Pus Lr paron, dans Raynouard, Choix des poésies des Troubadours, t. Iv, p. 170. me: Me so On finit cependant par donner indistinctement le nom de Francais 4 tous les habitants du royaume de France; mais on ne saurait rien en conclure contre la persistance d’un dialecte propre 4 chaque province. Ce n’était 1a qu’une forme de langage amenée ou par ce be- . oin instinctif d’unité qui fut pendant si longtemps ame de notre histoire, ou par une ignorance grossiére. Ainsi, pour en citer un exemple, qui rend l’autorité de tous les autres bien justement suspecte, nous lisons dans l Historia Roderici Didaci, dont le manuscrit a les caractéres ordinaires du XIII* siécle : « Siautem exieris ad nos in plano et separaveris te a monte tuo, erls ipse Rodericus, quem dicunt Bellatorem et Campea- torem. Si autem hoc factum nolueris, eris talis qualem dicunt in vulgo Castellani Alevoso et in vulgo Franco- rum Bauzador et Fraudator (1). » Ces deux derniers mots signifient en provencal Trompeur , Déloyal , et n’ont jamais appartenu a la langue frangaise. Que, chez un peuple aussi grossier que l’étaient les Ibéres, des ididmes divers se soient subdivisés en patois différents (2), on peut croire complaisam- ment que la barbarie seule empécha l’unité de s’y éta- blir et se refuser A en rien conclure. Mais ces dia- lectes plus archaiques et plus usuels se retrouvent également chez les peuples qu’une religion toute natio- (1) Risco, La Castilla y el mas famoso Castellano, app. p. xxxiv. (2) Kau of aiAdor O16 pec Apovtar ypappatinn, ov pig ide, ov OE 7%p yAwttn idux ; Strabon, Géographie, l. m., édit. Paris, 1620, in-fol., p. 139. non OY #455 nale et une civilisation fortement centralisatrice relient en un faisceau plus compact ; le langage n’y peut con- server longtemps son unité primitive: la diversité des conditions, des rapports avec les étrangers et des an- ciens idiémes de chaque province y introduit bientét des différences qui s’étendent, se généralisent et, aprés un temps plus ou moins long, constituent de véritables patois. - A Rome, ow une démocratie sans cesse en action ras- semblait, pour ainsi dire, d’une maniére permanente , tous les citoyens sur la place publique , Cicéron recon-' naissait |’existence d’une langue particuliére au peu- ple (1). Malgré Vextréme fractionnement des états et tous les dialectes que leur ombrageuse indépendance avait créés (2), il y avait aussi en Gréce des patois po- pulaires (3), ot les poétes comiques retrempaient leur verve (4). La langue hébraique , dont Vorigine di- vine et les traditions d’une psalmodie exclusivement confiée 4 une caste sacerdotale, placaient la pureté sous la sauve-garde de la religion, était elle-méme profon- (4) Te divitem futurum , id utrum romano more lJocutus sit, bene nummatum te futurum ; Epistolae ad familiares, 1. vu, let. 16. Quintilien appelle ce langage romain quotidianus, Végéce pedestris, Sidonius Apolli- naris usualis et une foule d’écrivains rusticus. (2) Plura illis loquendi genera... quod alias vitiosum, alias item rectum - est, dit Quintilien, De institutione oratoria, 1. 1, ch. 5, et Lanzi est allé jusqu’a dire : Ogni citta, ogn’isola ebbe idiotismi non comuni alla nazione; Saggio di lingua etrusca, t. I, p. 402. (3) Ovoyata TOALTIXG. ei (4) Les savants avaient méme fait sur ce sujet des livres qui malheu- reusement sont perdus ; voyez Fabricius, Bibliotheca gracca, |. Iv, ch. i Pr. 556. a yng dément modifiée. C’est saint Jérome qui nous l’assure: « Hebraeis, pro voluntate lectorum atque varietate re- gionum, eadem verba diversis sonis atque accentibus proferuntur. » Cette uniformité de langage , A laquelle nous attachons avec raison une si grande importance politique et littéraire, resta pendant longtemps telle- ment étrangére aux nations les plus civilisées que l’é- criture des langues sémitiques ne chercha pas méme a exprimer les voyelles, et quand, 4 une époque relati- vement bien récente, on voulut en fixer la prononcia- tion par une sorte de notation phonétique, il fut impos- sible de lui donner une valeur réguliére. Fata valet a vel r, damma o vel u; kesra valet 1 vel £, dit Mori- nus (1), et il n’indique pas encore tous les sons que ces signes expriment, méme dans la langue littéraire. Vers la fin du premier siécle de notre ére, Vexact Quintilien écrivait déja: « aliud esse latine, aliud prammatice loqui (2). » Les altérations étaient naturel- " lement bien plus profondes dans les provinces qu’au ceeur de l’Efat, ot la congervation des formes républi- caines et les exercices judiciaires en plein air mainte- naient sinon la pureté , au moins l’unité de Ja langue. Dés le [V* siécle, selon saint Jéréme : « Ipsa latinitas et regionibus quotidie mutabatur et tempore (3). » Ces corruptions étaient soumises a des régles systématiques, comme le prouve ce passage si remarquable de saint (1) Zxercitationes de lingua primaeva, p. 434: le zeber, le pisch et le zihr des Persans expriment aussi des sons tout-a-fait différents. (2) De institutione oratoria, 1. 1, ch. 6. (3) Epistola ad Galatas, |. u, préf. a Augustin : « Plerumque loquendi consuetudo vulgaris utilior est significandis rebus, quam integritas litera- ta (1). » Les différentes invasions qui, en se succédant pendant plus de cing cents ans dans les Gaules, y ap- portaient incessamment de nouveaux éléments de cor- ruption , empéchérent sans doute le langage du peuple de se reformer aussi vite en une langue réguliére : mais on y trouve des traces de patois dans les premiéres an-— nées du V° siécle (2), et Alcuin, le savant de la cour de Charlemagne,nous en attestel’ existence: « Literata quae scribi potest; illiterata quae scribi non potest (3).»Bientot cette langue , dont il parle avec tant de dédain et que, en sa qualité d’anglo-saxon , probablement il connais- sait mal, devint- assez étendue, nous dirions volontiers assez générale, pour que les conciles enjoignissent aux ecclésiastiques de s’en servir dans leurs prédications (4). Cen était donc plus un jargon informe, tropindigent pour. suffire 4 tous les besoins de la pensée, mais une véri- table langue que lon cultivait*avec soin et qui avait déja des prétentions littéraires , puisque saint Gérard louait son maitre saint Adalhart, qui naquit en 750, de (1) Doctrina christiana, 1. 1; nous citons ce passage d’aprés les Elé- ments carlingiens de M. Barrois, et nous devons dire aner) nous n’avons pu le trouver 4 la place qu’ils indiquent. - (2) Sedebat autem sanctus Martinus in sellula rusticana , ut est in usibus servulorum, quas nos rustici Galli Trepetias, vos vero scholastici, aut certe tu qui de Graecia venis, Zripodas nuncupatis; Severus Sulpitius, De Vita sancti Martini, p. 443, éd. de 1709. (3) Opera, t. u, p. 268. (4) Les conciles de Tours et de Reims, en 812; de Strasbourg, en 842 ; de Mayence, en 857 ; dans Labbe, Sacro-sencta concilia, t. vit, col. 1249, 4256, 1263 ‘et t. vin, col. 42. — 2 Pavoir parlée avec assez de perfection pour faire croire qu il n’en savait aucune autre (4). De ces altérations, de plus en plus étendues, du la- lin sortirent tous les patois romans. I] y a déja cent ans que Maffei le reconnut pour ceux de V’Italie (2), et , les études, vraisemblablement indépendantes d’Ober- lin, le conduisirent aux mémes résultats pour les né- tres: « Le patois des différentes provinces de la France, fort différent en lui-méme, remonte, quant & son ori- gine, partout aux changements que la langue latine , introduite autrefois dans les Gaules par les Romains et corrompue ensuite en rustique et romane, eut A e3- suyer depuis le XI ou XII* siécle environ (3). » Trop perspicace pour tomber dans I’étrange erreur de date qui s’est glissée a la fin de ce passage , M. Génin ena, peut-étre sans le vouloir, confirmé l’assertion capita- le, mais en restituant aux patois une plus haute anti- quité de cing ou six siécles. « Les patois, » dit-il, « ont leurs racines situées beaucoup plus profondément que celles de la langue frangaise. Il faudrait creuser jus- qu’aux ididmes usités dans chaque province avant la conquéte latine, en commencant par replacer cette province dans l’ensemble politique dont elle était un (1) Qui si vulgari, id est romana, lingua loqueretur omnium aliarum putaretur inscius; si vero theutonica, enitebat perfectius ; si latina, in nulla omnino absolutius ; Acta Sanctorum, janvier, t. 1, p. 416. (2) Certa cosa essendo che i nostri odierni dialetti non altronde si for- marono che dal diverso modo di prononziare negli antichi tempi, e di par- lar popolarmente il latino ; Verona illustrata, dans Muratori, Antiquitates italicae medii aevi, t. 1, col. 1043. ’ (3) Essai sur le patois lorrain des environs du comté du Ban de la Roche, p. 3. 2 — Sn = élément (1). » Cette corruption des langues par leur contact avec d’autres idiémes, et leur reconstitution A laide des éléments divers que histoire de chaque pro- vince y avait mélés, sont des faits trop naturels pour avoir besoin de témoignages authentiques (2). L’exis- tence et la yariété des dialectes furent pendant long- temps trop indifférentes pour étre remarquées ; mais il arriva, en 842, qu’une défiance réciproque obli- gea les fils de Louis-le-Débonnaire de prendre leur ar- mée a témoin de leurs engagements, et, pour étre en- tendus de leurs soldats, ils s’exprimérent dans la lan- gue usuelle du pays (patrius sermo), dans celle qu’a- vaient parlée leurs péres (3).Cette origine du mot Pa- tois, que confirment si heureusement ces vers un melt ironiques de Jehan de Meung : Si m’escuse de mon langage Rude, malostru et sauvage ; Car nes ne sui pas de Paris , , Ne si cointes com fu Paris, Mais me raporte et me compere Lp) Pp. 272. (2) Nous citerons seulement un passage fort curieux d’Ovide : Mixta sit haec quamvis inter Grajosque Getasque, E male pacatis plus trahit ora Getis : In paucis remanent grajae vestigia linguae, Haee quoque jam getico barbara facta sono. Pontica, \. v, él. 7. Voila les premiers germes de la langue romane que l’on parle encore en Valachie. (3) Ces serments nous ont été conservés par Nithard, |. m, ch. 5; un fac-simile a été inséré par Roquefort dans son Glossaire de la langue ro- mane, t. 1, Pp. XX. = — r-— Au parler que m’aprist ma mere, A Méun quant je l’alaitoie (4) ; cette origine , disions-nous , explique pourquoi l’on donnait par opposition le nom de Clerkois au francais qui était enseigné dans les écoles. Li quas pecchie de pareche , c’on apele en clerkois Accide, dit un vieux ma- nuscrit cité par du Cange (2), et, pour rendre toute in- certitude impossible , ce mot Accide vient évidemment du grec Aznderx. Mais une volonté opiniatre de conser- ver au langage toute sa pureté archaique n’empéchait point des altérations journaliéres de le modifier profon- dément. Des radicaux celtiques et germains s’y étaient umpatronisés ; les flexions en avaient insensiblement disparu , et des populations, jadis latines, qui croyaient toujours parler le langage de leurs ancétres, en étaient venues a ne plus pouvoir se comprendre. Un naif chro- niqueur nous apprend que les moines d’un monastére, situé dans le Boulonnais , souffraient impatiemment, dans le XII° siécle, leur dépendance d’une abbaye du Poitou, a cause de la différence des langues (3). Quel- ques années seulement aprés, Quesnes de Béthune s’é- criait dans une de ses plus jolies chansons : La roine ne fit pas que courtoise Qui me reprist, elle et ses fiex li rois ; - Enceir ne soit ma parole francoise, Si Ja puet on bien entendre en francois ; (1) M. Paris, Manuscrits franegois de la Bibliotheque du Roi, t. V, p. £5. (2) T.a, p. Si, col. 2, éd. de M. Henschel. (5) Propter linguarum dissonantiam ; dans d’Achery, Spicilegium, t. 1x, p- 430. Ne cil ne sont bien appris ne cortois Qui m’ont reprist, si j’ai dit mot d’Artois, Car je ne fus pas norriz a Pontoise (4). Roger Bacon écrivait dans le XIII° siécle: « Namet _idiomata ejusdem linguae variantur apud divyersos, si- cut patet de lingua gallicana, quae apud Gallicos, et Pi- cardos, et Normannos, et Burgundos multiplici variatur idiomate. Kt quod proprie dicitur in idiomate Picardo- runy horrescit apud Burguados, imo apud Gallicos vici- niores (2). » Kn 4348, on traduisait en patois picard des actes royaux rédigés dans le dialecte de l’Me-de- France (3) , et de nombreuses copies, conservées aux archives du royaume, prouvent que ces transcriptions corrigées et appropriées au langage de chaque localité avaient lieu dans toute la France (4). Il était résulté de cette multitude de patois un tel arbitraire d’expression, que la parole ne parvenait plus 4 rendre la pensée in- telligible. L’auteur de Image du monde disait au com- mencement du second livre : Maintes coses sont en romans (t) Romancéro francois, p. $3. . (2) Opus majus, P. ur, p. 44, éd. de 1733. Gallici signifie ici les habi- tants de I’lle-de-France et ajoute une nouvelle preuve a celles que nous avons déja données, p.xi-xu. Une lettre que saint Bernard écrivit de Clairvaux dans les premiéres années du XIfe siécle, aux moines d’Autun, n’est pas. moins précise : Nec tamen mirum quia , et multis terrarum spatiis, et di- versis provinciis, et dissimilibus linguis ab invicem distamus ; Lettre txvu, Opera, t.1v, p. 173, 6d. de 1642. ; (3) Delpit, Rapport sur les archives municipales de la ville d’ Amiens , -cité par M. Le Roux de Lincy, Les quatre livres des Rois, Introd. p. LXVIII. (4) Michelant, Li romans @’Alixandre, Préf. p. xiv. — xxl — Dont cascuns n’entent pas le sens, Encor sace il bien le langage (4). Kt on lit dans la préface d’une traduction des psau- mes dont l’écriture a les caractéres ordinaires de la fin du XIV° siécle : « Et pour ceu que nulz ne tient en son parleir ne rigle certenne, mesure ne raison, est laingue romance si corrumpue qu’a poinne li uns entend l’aul- tre; ef a poinne peut on trouveir ajourd’ieu persone qui saiche escrire , anteir ne prononcieir en une meismes semblant menieire, mais escript, ante et prononce li uns en une guise, ef Ji aultre en une aultre (2). » Ce n’est pas seulement le corps qui, par une loi pro- videntielle, aspire au plaisir, V'intelligence éprouve les mémes besoins , et trouve aussi dans sa propre force la puissance de les satisfaire. Les sauvages le plus péni- blement préoccupés des premiéres nécessités dela vie, aiment eux-mémes a redire des chants grossiers qui les soutiepnent dans leurs fatigues et marquent le mouve- ment des danses par lesquelles ils les oublient. Lors donc qu'il ne s’agirait pas d’un peuple aussi naturelle- ment gai et aussi amoureux du plaisir, on pourrait as- surer que chaque province avait une sorte de poésie a Pusage de ses habitants, et par conséquent rédigée dans leur langage. En vain l’ignorance générale de l’écriture, Ja rareté des matiéres premiéres et surtout Vinutilité (1) B. R. ne 7991", non paginé; le poéme fut composé ou plutét transcrit en 1244. (2) B. Mazarine, n° T., 798, fol. 2, verso. Roquefort avait déja cité cette curieuse préface dans son Glossaire, t. u, p. 492, (@aprés un autre ms. fort différent, qu’il croyait aussi du XIVe sidcle ; ce qui prouverait qwetle est plus ancienne., == XX — d’écrire une littérature exclusivement destinée aux gens qui ne savaient pas lire , en auraient-elles empé- ché les moindres vestiges de parvenir jusqu’é nous ; Vexistence littéraire de nos différents dialectes n’en se- rait pas moins certaine ; histoire de la poésie de tous les peuples ne permettrait pas d’en douter. Les vieux poémes allemands se distinguent presque tous par une orthographe ou des formes grammaticales particuliéres, qu’on ne saurait attribuer au caprice des auteurs, et les nombreux patois de Italie s enorgueillissent d’une littérature qui ne le eéde ni en richesse ni en talent & celle de bien des langues , polies par la classe la plus élégante de la société (1). Il y eut méme un pays ot, sous l’influence d’un esprit sensible a la beauté et d’une civilisation aussi zélée gardienne de Vindépendance des villes que de la liberté des individus, les dialectes con- servérent leur pureté dans la bouche des gens éclairés, et acquirent des développements assez complets pour suffire 4 toutes les nécessités des grandes compositions littéraires. Les principaux dialectes de la Gréce con- coururent également a la gloire de sa littérature ; si les Homérides et Hérodote avaient donné la préférence alionien , elle dut au dorien l’élévation de Pindare et la grace énergique de Théocrite; & l’éolien et a Pattique les vers brulants de Sapho, la profondeur politique de Thucydide, et les inimitables beautés de son théatre (2). (1) Voyez Adelung, Mithridates, t, u, p. 496-534; Fernow, Ramischen Stu- . dien, t. uw, p. 214-543 et le Catalogue de la bibliothéque de M. esa n° 152—171 et 1611—1759. (2) Voyez M. Peyron, Origine de i tre illustri dialetti greci parangonata > Rael Mais, comme en France, pendant le moyen-age, ses ha- biles écrivains ne se servaient pas des formes spéciales 4 une ville, ils fondaient ensemble les plus rappro- chées et en formaient une langue moyenne qui deve- nait agréable a un plus grand nombre d’intelligences. Ainsi, par exemple, le dorien de Pindare différe beau- coup des inscriptions béotiennes, et lionien d’Hérodote était un composé littéraire des quatre variétés qu'il a lui-méme signalées. Sans doute les trouvéres qui tra- vaillaient pour les hauts barons cherchaient 4 leur plaire en se servant de la langue qui leur agréait da- vantage ; mais il y avait 4 cdté, au-dessous si l’on veut, une littérature faite pour le peuple, dont les au- teurs choisissaient aussi le langage qu’il entendait le mieux. Les traductions recommandées par les conciles étaient certainement dans la langue la plus accessible au grand nombre (4), et d’heureux hazards nous ont conservé plusieurs compositions dont les formes dia- lectales sont trop fortement marquées pour étre mécon- nues. Les Voyages d’Outremer du comte de Ponthieu ont des formes picardes trés prononcées, qui se retrou- vent adoucies dans les fabliaux d’Eustache d’Amiens et de Jean de Boves. Les Miracles de la Vierge par Gau- tier de Coinsy sont écrits en bouguignon (2), et Margue- con quella dell eloquio illustre italiano, dans les Mémoires de l Acadé- mie de Turin, série nt, t. 1, ef M. Ahrens, De graccae lingude dialectis. (1) Ils le disaient eux-mémes: Quo facilius cunecti possint intelligere quae dicuntur ; dans Labbe, Sacrosancta concilia, t. vu, col. 1265. Larticle 15 du De officio praedicatorum est encore plus positif: Quod bene vulgaris populus intelligere possit; dans Baluze, Capitularia regum_ Francorum, année $13. (2) Probablement en haut-bourguignon ; nous ne parlons que de la lecon = Ate —- rite de Duyn se servait probablement du dauphinois (4). Souvent méme cette appréciation des dialectes n’est pas une simple conjecture que leur mélange et les al- térations des copistes rendent toujours un peu incer- taine. La préface du psautier dont nous avons déja parlé, commence ainsi : « Vez ci lou psaultier, dou la- tin trait et translateit en romans , en laingue lorenne, selonc la veriteit commune et selonc lou commun lain- gaige (2). » Borel nous a conservé une vieille chanson en langue de Cahors (3). Sébastien Mamerot se vantait encore dans le XV° siécle d’écrire en vray soissonnois, et Jean Lemaire disait vers le méme temps des habitants du Brabant, dont la littérature populaire est si riche : « Ceux-ci parlent le vieil langage gallique que nous apellons wallon ou romand, et en usons en Hainaut , Cambresis, Artois, Namur, Liége, Lorraine, Ardennes et en Roman-Brabant , et est beaucoup différent du francois (4) ». Sil nous est resté si peu d’ouvrages écrits en patois, c’est que les scribes étaient ordinairement des eens lettrés qui ne se bornaient méme pas a changer le style et lorthographe (5). Comme le dit fort bien Pasquier, les copies des anciens manuscrits étaient « diversifiées en autant de langages, comme il y avoit eu diversité de du ms. B. R. n° 7208, quiest daté de 1209, car ainsi, qu’on le verra tout a l’heure, les copistes apportaient méme involontairement de grands change- ments dans les textes originaux. (1) Histoire littéraire de la France, t. XX, p. 342, 313, 314, 319 et 320. (2) B. Mazarine, n° T, 798, fol. 1, verso. (3) Thrésor des recherches et anliquités gauloises, p. 229. (4) Illustration des Gaules, 1.1, ch. 16. (5) Histoire littéraire, t. xvi, p. 743, note. Sh AE temps: car les copistes copioient les bons livres, non , selon lanaifve langue del’auteur , ains selon laleur (4).» Nonseulementla langue de l’He-de-France se perfection- na plus rapidement que les autres, mais]’autorité chaque jour plus étendue du pouvoir royal et les nombreux jongleurs qu’une cour riche et avide de plaisir attirait autour delle, par le double attrait de Vintérét et de la gloire, la rendirent bientdt dominante ; et les copistes qui se piquaient de beau langage, cherchérent méme involontairement 4 en rapprocher le dialecte des ma- nuscrits quils étaient chargés de reproduire. Cette su- périorité du patois de Paris résulte si naturellement du siége du gouvernement et des grands encouragements qu’y trouvaient les poétes que nous en citerons seule- ment une preuve positive. Dans une Vie de saint Tho- mas Becket, qu il termina en 117%, trois ans aprés son martyre, Garnier de Pont-Sainte-Maxence s’écriait avec orgueil : Mis languages est buens, car en France fui nez (2). En vain compterait-on sur la rime et sur la mesure pour corriger les altérations et les corruptions des ma- nuscrits ; la versification était aussi peu fixée que la Jangue, et, selon le besoin du moment, le poéte dis- joignait les diphtongues, contractait violemment les syllabes qui excédaient le moule de son vers et soumet- (1) Recherches de la France, \. vir, ch. 3. La B. R. possede quatre exem- plaires du Roman de Godefroy de Bouillon, et ily en a deux en rouchi, un en bourguignon et un en picard. (2) Bibliotheque de l’ Ecole des chartes, t. 1v, p. 210. — XXvI — tait les finales aux modifications les plus arbitraires. M. Génin lui-méme l’a reconnu dans un de ces moments ou le bon sens naturel l’emporte sur les malheureuses nécessités d’un systéme : « Un point bien plus impor- tant était la permission d’altérer les mots dans leur ter- minaison pour le besoin de la rime, et dans le nombre de leurs syllabes pour le besoin de la mesure (4).» Les exemples de ce despotisme de la versification sont trop fréquents pour que nous en indiquions un grand nom- bre; on peut les multiplier en ouvrant nos vieux poémes a peu prés. au hasard. Raimbert disait dans la Chevalerie Ogier de Dannemarche : Et dist Braihier : Or oi mult lais gabois ; Oy lai dire Alemans et Thiois (2). Quoique ces lignes se suivent immédiatement, oz ne peut avoir qu’une syllabe dans la premiére, et la me- sure force de lui en donner deux dans Ja seconde. Les noms propres étaient subordonnés comme les autres mots a ces exigences du rhythme ; dans la Chanson d’Antioche dont M. Paris va publier une aussi bonne édition qu’on peut l’attendre de son exactitude et de sa science, Graindor dit : Jherusalem l’apele qui droit la veut nomer (3), (1) P. 239; voyez aussi la swite de ce passage et les p. 211 et 245. (2). V. 11196. La méme licence se trouve, dans le Roman de Renart 3 ily a, t. 1, p. 89, v. 2374: Conter l’avez oi assez. et ibidem, Vv. 2383': Se tw vels, si m’en giéte un poi, Kt dist Tybert : Merveilles oi. (3) Oh Va 7. ye eee a ee — XXVII — et cing vers seulement plus bas, il écrit sans facon : Huimais pores oir de Jhersalem parler. Les finales accentuées du participe et les pronoms eux-mémes étaient modifiés sans aucun souci des plus fortes habitudes de Voreille : Conbatuz s'est ; ce ne sai gié Sé Erec a son duel vangié (1), disait Chrestien de Troyes, et Gautier de Coinsy allait jusqu’a rendre muet un monosyllabe indispensable au sens de la phrase : De lespine ist la rose et la fleurs de la ronce ; Véoir moult bien devroient li murtrier larron ce (2). Tant de libertés avec la langue ne suffisaient méme pas toujours ; quand la rime devenait trop rebelle, on Jui substituait ?assonance , Alexandre du Pont ne crai- gnait pas de dire dans une piéce ou la consonnance était systématiquement cherchée : De biel éage estes encore, Grans renommée de vous vole (3). Le choix des rimes n’ett-il pas été habituellement subordonné a toutes les différences des dialectes, il fau- drait done le reconnaitre : la versification n’offre aucun moyen de-déterminer avec certitude la prononciation du vieux-francais , et cependant Vauquelin de la Fres- (1) Chrestien de Troyes, Erec et Enide, B. R. fonds Cangé, n° 73, fol. 5, r°, col. 2, ¥. 43. (2) B. R. fonds de la Valliere, n° 85, fol 291. (3) Roman de Mahomet, v. 1663. — XEVIE. — naye disait encore, dans la seconde moitié du XVI° siécle : Car, depuis quarante ans, desja quatre ou cing fois, La facon a changé de parler en frangois (1). Si l'on en juge par les irrégularités de Vorthographe, et toutes les lettres muettes qui la surchargeaient de leurs superfluités , ces modifications ont da souvent — étre aussi bien profondes. D’ailleurs, une langue ne se compléte qu’avec le temps, en empruntant a d’autres idiémes les mots qui lui sont nécessaires pour combler ses lacunes, et ceux que le francais prit dans les autres dialectes ne purent conserver exactement ni leur sens _ primitif, ni leur ancienne prononciation. Il. se préoccu- -pait naturellement beaucoup moins de Vidée quils avaient d’abord exprimée que de V’insuffisance du vo- cabulaire ; et les habitudes de l’oreille et des organes de Ja voix , lesprit d’unité et d’harmonie que ’homme porte instinctivement dans toutes ses ceuvres effacaient bientét Ja différence de prononciation qui produisait des discordances. Beaucoup de mots ont donc perdu leur premiére forme romane, la seule qui ptit mettre sur la trace de leur étymologie. Sans doute le vieux- francais littéraire a souvent gardé avec assez de fidélité lorthographe et la signification des racines, pour ren- dre inutiles des intermédiaires encore plus rapprochés; ainsi Feu, autrefois Fuec, vient certainement de Focus, et Faubourg, en vieux-francais Forsbourg, de Foras bur- gus ; Poison est dérivé de Potio , puisqwil a eu pendant (1) Satyres, p. 244. wwe XT longtemps le sens de breuvage, et Yon ne saurait révo- quer en doute Vorigine latine de Curi veux, quand on a lu dans le Roman de Brut : Il fut de Brien angoisos Et de la secolre curios (4). Certaines formes provencales mieux conservées per- mettent de supposer aussi des analogies d’une vraisem- blance suffisante. On a déja, par exemple, et probable- ment avec raison ,prétendu que Malotru, Malastrucx,dans la Jangue des troubadours,venait de Male astrosus (2), et que Malade, en provencal Malaute et Malapte, était une corruption de Male aptus. Mais les ididmes , développés surtout par les poétes, sont soumis A des perfectionne- ments euphoniques, qui en déguisent l’ancienne ortho- graphe. La valeur primitive des mots y est elle-méme masquée par des acceptions métaphoriques qui finis- sent par se dépouiller de leur caractére poétique et passent dans la langue usuelle. Si vraisemblables qu’el- les puissent étre , les inductions que !’on tire des vieux monuments littéraires ne manifestent donc pas toujours avec assez de clarté les origines de la langue; et, s'il est_ vrai que Vhistoire des mots soit en méme temps celle des idées, et que, pour apprécier les croyances et (1) V. 14807. (2) Une forme tout-a-fait analogue au latin existait aussi en vieux fran- ¢ais; mais elle y était fort rare; nous en pouvons cependant citer deux exemples. Le glossaire latin-francais du XV¢° siécle, conservé ala B. R. fonds de Saint-Germain, n° 4189, explique Calamitosus par Chetiz, Malestruz, et on lit dans des Lettres de grdce de 1407, citées par Carpentier, t. 1, col. 1130: Je suis bien malostru de tant avoir parle a toi... escommenie que tu es. ——~\ Reo les pensées qui ont rendu familiéres 4 tout un peuple ces hardiesses de langage qui modifient le sens d’un si erand nombre d’expressions, il soit nécessaire de re- monter a leur signification primitive, létymologie est un élément indispensable de l’étude sérieuse des déve- loppements de la civilisation. Plus respectueusement soumise a !’ habitude, la lan- sue populaire reste plus fidéle & sa premiére forme. _ Comme la parole y exprime naivement la pensée, sans que l’ambition de bien dire renforce, 4 grands frais de rhétorique, la signification naturelle des mots, leur va- leur n’y est point altérée par la méme fluctuation. Au- cune idée d’harmonie factice et d’élégance de conven- tion ne reprend la prononciation en sous-ceuvre et n'obscurcit l’étymologie par des modifications arbitrai- res. Sans doute le vocabulaire ne demeure pas inva- riable; mais les changements en sont plus lents, moins — capitaux et se subordonnent pour la plupart a deux lois dont il n’est pas impossible d’apprécier Pinfluence. La premiére est toute matérielle et cherche 4 mieux appro- prier le langage a son but, ’ rendre la communication des idées plus facile et plus prompte : elle élimine ou change les lettres qui embarrassent la prononciation ou laralentissent. La seconde nait, au contraire,du besoin d’unité qui travaille Pintelligence : elle réduit Jes sons du vocabulaire ; rapproche, par un lien plus sensible a Yoreille, les mots qui forment le fonds habituel de la langue, et s’efforce d’établir entre la prononciation des — rapports qui rappellent ceux qui existent entre les idées. Malgré les exigences de son livre, M. Génin n’a pu — XxXxx1 — sempécher de reconnaitre cette supériorité archéologi- que du patois sur le langage des classes éclairées. « Le ’ patois, » a-t-il écrit dans un de ces moments de sincé- rité avec lui-méme,ow il fait si bon marché de sa thése, « lepatois des paysans de thédtre n’est autre chose que lancienne langue populaire , c’est-a-dire la véritable langue francaise , notre langue primitive, qui est dé- posée au fond de la société et y demeure immobile. C’est de la vase, disent avec dédain les modernes; il est vrai, mais cette vase contient de lor, beaucoup d’or (4). » Dés le milieu du XIV° siécle, les paysans se servaient dune foule de mots qui avaient déja disparu de la langue des villes; on lit dans le Leys d’amors : E celas que han lors pagelas, - Como son monjas e vaquieras (2). Quelques exemples rendront plus incontestable cette utilité des patois pour la connaissance des origines du francais. L’étymologie d’Emoulu est clairement déter- minée par le patois lorrain ot. Ramoule signifie Aigui- ser, Repasser sur la Meule. Coutre vient certainement du latin Culter, puisque Queutre a conservé dans le pa- tois normand Je sens de Mauvais couteau, et Vorigine (1) P. 299. Tl avait déja dit, p. 289: C’est le véritable langage d’autre- fois, qui était dans l’origine celui de tout le monde, qui s’est trouvé ensuite le langage des classes inférieures, parce que celui des hautes classes s’était modifié ; voyez aussi p. xvi. Nous ne savons alors comment M. Génin con- cilie 1a multiplicité de nos patois avec son unité primitive de la langue francaise ; mais nous n’avons pas 4 nous occuper des contradictions de son livre. (2) Lexique roman, t. 1v, p. 469. i EE ear singuliére que les savants donnent a Rien (A), est con- firmée par le patois bressan ot Rin signifie encore Chose : | Alin, portin li quaque rin E ase béti’on pou de fin (2). L’étymologie de Brandir resterait aussi fort obscure (3), si Branda que le patois de la Haute-Auvergne emploie avec lacception d’ Allumer , ne la rendait évidente : ce mot signifiait d’abord Secouer comme un tison que lon veut allumer, et vient, ainsi que Brandon , de Vislan- dais Brandr ou du vieil-allemand Brand, Tison. Fesser trouve aussi son explication dans le patois de Nancy ou Fasse signifie Verge, Houssine , et malgré le sens de anglais Sad, Triste, on comprend la signification de Maussade, quand on sait que les habitants de la Bresse emploient encore maintenant Sada avec V’acception d’A- eréable : Ell’ a na piéce de lar, Oncore du ple mau sada (4). Le grand nombre de métaphores empruntées a la vie ' des champs prouve d’ailleurs que les habitants des cam- pagnes ont exercé une grande influence sur la forma- tion du frangais, et que c’est dans leur langue qu’on peut l’étudier a sa source. Nous citerons, entre beaucoup d'autres, Manger son blé en herbe, Chercher pature, (1) Ils le font venir du latin Rem : le méme changement Widée, amené aussi par une forme grammaticale, a fait Aucun d’Aliquis. (2) Noéls bressans, p. 134. (3) Ménage le fait venir de Vibrare. (4) Noéls bressans, p. &. — KXXIII oie Mordre a la grappe, Couper Vherbe sous le pied, Mettre Ja charrue devant les bceufs, et le sens actuel de plu- sieurs mots manifeste clairement des habitudes sem blables. Ainsi Labor, dont la signification était géné- rale chez les Romains, ne se dit plus dans le langage usuel que du travail agricole ; Galvauder signifie litté- ralement Abattre des pommes avec une gaule, et Tache, quit vient sans doute de l’allemand Tasche, Poche, n’ex- primait d’abord que obligation d’emplir une poche des produits de la récolte. Mais les intéréts de la philologie ne sont ici que se- condaires : bien des germes d’opposition et de méfiance disparaitraient avec les diversités du langage, et toutes les provinces, désormais plus unies et plus compactes, _ marcheraient du méme pas aux destinées communes auxquelles la Providence appelle la France. Chaque jour prépare cet avenir : des communications plus fa- ciles ont aplani toutes les barriéres naturelles qui frac- tionnaient le sol et en isolaient les différentes parties. Des lois, rédigées en frangais, se sont substituées. par- tout aux coutumes locales qui perpétuaient les diffé- rences de langues. Une administration centralisatrice oblige tous les habitants de discuter leurs intéréts de chaque jour et le chiffre de leurs contributions avec des agents, presque toujours étrangers au pays, qui ne comprennent pas son patois ou ne veulent pas s’en ser- vir. Un systéme général de recrutement réunit sous les mémes drapeaux des hommes sortis de. toutes les pro- vinces, et les force d’apprendre un nouvel idiéme, com- mun aux subordonnés et aux chefs , qui rende I’ obéis- 3 —— XAX1¥ — sance possible et permette de commander 4 son tour. La participation illimitée des citoyens aux affaires pu- bliques, éveille des désirs de connaitre et des besoms politiqués, qu’on ne satisfait que par la lecture de jour- naux trop ambitieux d’influence pour adopter la langue des gnorants et des pauvres d’un canton. Enfin, grace aux progrés de la conscience publique , un enseigne- ment primaire, plus généreusement distribué, devient d’année en année plus obligatoire, et ne tardera pas a familiariser les plus grossiers paysans avec le Jangage des classes éclairées. Il’est donc facile de le prévoir , bientét les patois auront complétement disparu : beau- coup de mots employés encore par les péres ne sont déja plus intelligibles pour les enfants , et Yon doit se hater de les recueillir si Pon porte quelque interet aux . origines de la langue. | Tous les patois méritent ainsi Pattention seribtie des philologues ; tous ont enrichi le francais de leurs dé- pouilles, ou conservent avec un soin plus respectueux des radicaux communs dont ila modifié la signification et la valeur. Mais il en est qui par l’époque et les cir- constances ou ils se sont formés, par les nombreuses populations qui les parlaient , par leur richesse et par Vinfluence qwils ont exercée sur la langue littéraire, sont beaucoup plus importants que lesautres,; et, atous — ces titres, le patois normand se recommande le premier i Vétude. Dés le XII° siéele, il était différent du fran- cais, puisqu’on lit dans l’Entheticus de Johannes de Sa- lisbury : Hoc onus, ecce jugum, quod vitans nostra juventus ——~ ERY = Ad summum currit prosperiore via, Admittit Soloen, sumit quod Barbarus offert, Inserit haec verbis, negligit arte loqui. Hoc rita linguam comit Normannus, haberi Dum cupit urbanus Francigenamque sequi (1). Cent ansaprés, Richard de Lison disait dans sa Bran- che du Roman de Renard, Qu'il est Normanz ; s'il a mepris , I] n’en doit ja estre repris , Sé il ya de son langage (2). L’auteur du vieux poéme sur Elie de Biville, dont M. Couppey a publié des fragments dans les Mémoires de l’Académie de Cherbourg, parle méme du Haque langage (3). C’était ce dialecte que les Normands avaient porte en Angleterre et dont les écrivains qui s’en ser- vaient, reconnaissaient l’infériorité littéraire; ainsi Luces du Gast disait au commencement de sa traduction du Roman du Saint-Gréal : (Entre)preng a translater (du) latin en francois une partie de cele estoire ; non mie (1) V.135. (2) Dans M. de La Rue, Essals historiques sur les bardes, t. I, p- 282. (5) Année 1843, p. 109. Selon ce savant écrivain, le poéme serait de la fin du XIIfe siécle, mais l’écriture est beaucoup plus moderne et la copie est trop.corrompue pour permettre de déterminer, méme approximativement, age de la langue. M. de La Rue dit aussi que Johannes de Salisbury avait, dans sa soixantiéme lettre, fait Péloge des habitants de Lisieux et du Lieu- vin pour Ja pureté de leur langage ; Essais historiques sur les bardes, t. 1, P. 280 ; mais cette citation n’est pas plus exacte que la plupart des autres ; VPévéque de Chartres n’a parlé que du style, de l’éloquence : In amicum si- quidem imperitum sermone et scientia ingenium illud Lexoviense exeris, linguam acuis Lexoviensem, cum qua nunquam manum conserere mihi propositum est ab initio, vel dici orator praepotens ; dans le Bibliotheca maxima Patrum, t. xxu, col. 425. | men) BARES pour ce que je sache srantment (de) francois ; ainz a- partient plus ma langue et ma parleure a Ja maniere d@Engleterre que a cele de France, comme cis qui fu en Engleterre nez (1). Wilhelm de Wadigton , ou plutét Wadington, s’exprimait avec la méme humilité dans son Manuel de pechies qui ne peut étre bien pos- térieur au XIII* siécle, puisque Robert Mannyng Pimita en 4303 : De le Franceis vile ne del rimer Ne me deit nuls hom blamer ; Kar en Engleterre fu ne, E norri, e ordine, ¢ alevé (2). Ila fallu une singuliére ignorance de Vhistoire des temps barbares pour attribuer aux Celtes cette forte unité nationale qu’aprés bien des siécles les dévelop-_ pements de la civilisation parviennent enfin a établir. Comme on le voit encore dans les montagnes de I’ Ecosse, chaque petit clan avait eu d’abord son patrimoine sé- paré, son administration domestique et son gouverne- ment de famille. Beaucoup avaient disparu , absorbés par les autres; mais, grace a d’heureuses circonstances, quelques uns avaient conserve une existence indépen- dante et presque distincte. Les nécessités de la vie é- taient si simples, les acquisitions de Vindustrie si h- mitées et les ressources du commerce si nulles, que cha- cun se suffigait 2 Iuieméme. Dans le IV® siécle, Marcien (1) Dans M. Keller, Romvart, p. 134 ; M. P. Paris a publié deux autres lecons un peu différentes de ce passage dans les Manuscrits francois de la Bibliotheque du Roi, t. 1, p. 128 et 156. , (2) Dans Warton, History of the english poetry, t-1, P- 63, 6d. de M. Price. om SAS de Héraclée, qui sans doute cependant ne les connais- sait pas toutes, comptait encore seize nations dans I’ A- quitaine et vingt-cing dans la Lyonnaise (1). Des inté- réts communs avaient formé une sorte de lien fédéral que l’amour de Pindépendance relachait dans les jours de calme ; mais, la preuve en est a toutes les pagagdes Commentaires de César , il Se resserrait dés que la né- cessité d’unir et d’organiser ses forces venait a se faire sentir. Si tous les idiémes celtiques avaient gardé des rapports assez sensibles pour rester intelligibles a tous les Celtes, leur ignorance de l’écriture ou le dédain qu’ils en faisaient, et Pabsence de tout centre politique et commercial ne permettent pas de douter que le langage de chaque canton n’eiit insensiblement subi des modi- fications considérables. Une preuve positive s’en trou- yrait au besoin dans la grande différence des patois que les savants s’accordent 4 considérer comme dérivés du celtique, et dans cette quantité de mots particuliers a chaque province , dont les radicaux manquent dans toutes les autres langues ott l’histoire autorise a les cher- cher. Peut-étre les grands centres de population, situés dans la partie des Gaules appelée depuis Normandie , conservaient-ils avec une certaine pureté leur idiéme particulier ; mais, selon la fréquence et l’extension de Jeurs relations avec eux, les habitants intermédiaires mélaient tous ces dialectes dans des proportions diffé- rentes, et il en résultait une multiplicité de patois, peu fixes, peu étendus et par conséquent fort disposés (1) EGyn; Weprrdoug dans le Geographi minores, t.1, p. 48 et 49. ——~ XEAVIT --— recevoir les additions , et a se préter aux changements que les circonstances pouvaient rendre nécessaires. Les Romains pénétrérent dans PArmorique , dés les premiers temps du séjour de César dans les Gaules (1); ils y construisirent des bains, des temples, des theatres; plusi urs hauteurs ow ils campérent conservent encore le nom de Mont-Cadre (2); et les nombreuses routes que l’on reconnait sans peine aux épaisses chaussées en pierre sur lesquelles elles sont assises (3), témoignent du séjour prolongé quils y firent. Leurs relations avec les habitants y devinrent donc pacifiques ; elles s’éten- dirent de plus en plus, se multipliérent et se prolon- gérent au moins pendant cing siécles. Les Grees sem- blent avoir eu aussi A une époque quelconque des rap- ports de commerce avec la Basse-Normandie ; au moins tout le Cotentin donnait naguére encore au demi-boige seau le nom de Cabot, et ce mot, inconnu aux patois voisins, qui était d’un usage assez général pour que les paysans aient appelé les petites meules de foin dont la forme est cylindrique, des Cabots, vient probablement du grec Ka6eg, Mesure. Dans les derniéres années du Ill’ siécle, les Saxons commencérent a ravager les cotes (1) Il est déja question de ses rapports avec les Lexovii dans le De bello — gallico, |. m1, ch.9;1. vu, ch. 75, et avec les Unelli, Ibidem, 1. m1, ch. 1, et l. vu, ch. 75. : (2) Voyezla Notice sur les camps romains dont on remarque encore les traces dans le département de la Manche, que notre savant maitre et ami, M. de Gerville, a publiée dans le tome septitme des Mémoires de la Sociélé des antiquaires de Normandie: le nom primitif de Coutances était, comme on sait, Castra Constantia. (3) Elles sont appelées dans les campagnes Route pierréc, Chemin haussé ou levé. mae 8 8 de l’Armorique (1) et ne tardérent pas 4 s’y établir (2). L’influence d’une vie plus facile et plus calme adoucit bientét leurs moeurs; ils s’adonnérent 4 la péche, & agriculture, au commerce (3) et formérent des liaisons de bon voisinage avecles anciens habitants du pays qu’ils avaient si longtemps effrayé de leurs déprédations (4). Leur siége principal était dans cette partie du Bessin , qui fut depuis nommée oflingua Sa.conia (5); mais ils s’é- ({) Ce fut en 286, selon Eutrope, Zpitome historiae romanae, 1. 1x, ch. 13, et Paul Orose |. vu, dans dom Bouquet, ft. 1, p. 597. L’origine germanique des Saxons ne peut aujourd’hui faire objet d’un doute, mais il ne serait pas impossible qu’on eit quelquefois désigné sous le méme nom d’autres hom- mes du midi; au moins Witichind a-t-il dit en parlanf de leur origine : Super hac re varia opinio est, aliis arbitrantibus de Danis Nortmannisque originem duxisse Saxones, aliis autem aestimantibus, ut ipse adolescentulus audivi ‘quemdam praedicantem, de Graecis; Annalium 1. 1, dans Meibom, Rerum, Germanicarum t. 1, p. 629. Si cette conjecture pouvait étre exacte, les singuliers rapports du patois normand avec Je grec s’expliqueraient naturel- lement; mais ici, comme en beaucoup d’autres cas, on a prisa la lettre une désignation purement métaphorique. Graecum est, non legitur ; disaient les clercs pendant le moyen-adge, et le peuple appela du grec toutes les langues inintelligibles. Ce passage de Wace en est une preuve évidente : Cerno, cernis, cé est véoir, Et Delx a non an ebreu £1; De ces deus moz est fez Cernel. Li uns est grius, Valtre latins. Roman de Brut, v. 14238. (2) Venantius Fortunatus louait déja l’évéque de Nantes, Félix, @avoir sou- mis les Saxons au joug du Christ; Opera, 1. m1, poéme 8. (3) Oizxouor de adtas dvOpmmor caynvevovteste xa yny YE@pPYouVTES xaLt em éu.mopray vauttAAopevot é¢ tTnvOe THY VNTOYV; Procope, De bello gotthico, 1. 1v, ch. 20, Opera, t. u, p. 567, 6d. de Bonn. (4) Sidonius Apollinaris écrivait 4 Numatius : Littoribus Oceani curvis inerrare contra Saxonum pandos myoparones quorum quot remiges videris, totidem te cernere putes archipiratas ; 1. viu, let. 6, dans Sirmond, Opera, t. 1, col. 1063; voyez aussi'Poéme vil, V. 369. (5) Concedimus quasdam res sitas in comitatu Bajocensi, in pagello qui ee talent certainement etendus sur tout le littoral de la Normandie. Un des neuf préfets qui gouvernaient sous les ordres d’un comte ou méme d’un duc (4) le Littus saxonicum, résidait 4 Rouen ; le séjour d’un autre était 4 Coutances et plusieurs savants ont vu dans Grannona que le Notitia dignitatum per Gallias donne pour chef- lieu au tribun de la premiére cohorte (2), l’ancien nomde Granville. Tout porte méme a croire que de nombreux établissements se trouvaient a l’extrémité du Cotentin; quelques localités y ont conservé des désinences en tot (3), qui,malpré la grande liaison des deux ididmes, paraissent plutét appartenir au saxon qu’au norse (4). Clitourp, dans le canton de Saint-Pierre-Eglise, est vraisembla- dicitur oflingua Saxonia, id est villam nomine Heidram; Capitulaire de Charles-le-Chauve, dans Baluze, t. u, col. 1440, et la méme expression s’y trouve, col. 69. Ce nom qui n’a pas encore été expliqué d’une maniére satisfaisante, vient sans doute du vieil-allemand O¢, Terre, Possession et de Ling, Bruyére, Broussaille, et signifie Saxe couverte de bruyéres, Saxe in- culte : ce qui s’accorde fort bien avec ce que Jon sait de l’état du pays. Une autre étymologie ‘ne serait pas cependant impossible; Ot-lingua peut si- gnifier Patrimoniale, Libre, et l’on sait par un passage fort curieux de Pro- cope, qu’a la différence des Saxons allemands, ceux de Bayeux ne payaient aucuntribut: Ta pev ahra Dpayyov xatnxoor dvtec, @opoy psvtor dmayoyny ovdenwmnote mapacyoucvor; De bello gotthico l. 1v, ch. 20; Opera, t. ul, p. 567, 6d. de Bonn. Les Saxones Bajecassini sont mentionnés souvent dans nos vieux historiens; Grégoire de Tours, Mistoria ecclesiastica Francorum, |. v, ch. 27; 1. x, ch. 9 et Historiae Francorum epitomata, col. 579, éd. de Ruinart ; Frédégaire, Chronicon, dans dom Bou- quet, Recueil des historiens de France, t.u, p. 409; voyez aussi von Wer- sebe, Velker und Voelkerbiindnisse, n° 147. (1) Dom Bouquet, Recueil des historiens de France, t. 1, p. 577. ~ () Dans dom Bouquet, Recueil des historiens de France, t. 1, p. 127. (3) Hectot, Quettetot, Le Vrétot. Brétentot, Garantot, etc. (4) Lisiandais Tof¢ signifie plutot un Espace, vide et par suite une Cour qu’une Habitation; voyez cependant M. Estrup, Bemerrkninger pag en reise 4 rae Xia blement un petit village saxon (4) ; Vinscription méro- vingienne du Ham, dans V’arrondissement de Valognes, semble indiquer une origine antérieure a Rollon (2), et Vancienne fortification , appelée Le Haguedike, dont les restes existent encore a Vextrémité nord-ouest de la presqu’ile du Cotentin (3), doit remonter au-dela du X° siécle, puisque les incursions des hommes du Nord devinrent alors de véritables invasions , et qu’au lieu de se sauver avec leur butin dans les lieux les moins fréquentés et les plus faciles a défendre, comme les bandes de pillards saxons, les Normands pénétraient i Normandiet, p. 153, et M. Petersen, Om stedsnavne i Normandiet, dans le Normandisk tidskrift for Oldkyndighed, t. u, p. 227. (1) Klin Thorp, Petit village ; on donne encore le nom de Tourp, Tour- pelus, & quelques groupes de maisons qui sont toujours sur le bord de la mer; nous citerons ceux d’Anneville en Saire et d’?Omonville-Hague. (2) Ce nom se trouve d’ailleurs dans Ouistreham, Estreham, et Ham dins la Mayenne, dont l’origine saxonne ne peut étre mise en doute ; probable- ment Hémesvez, dans l’arrondissement de Valognes, signifiait aussi le Ha: meau auprés de l’eau. Quoiqu’il en soit, i] faut au moins reconnaitreace Ham une origine septentrionale, puisque dans une charte de 1028, il n’étaif pas -encore soumis aux formes de la déclinaison latine : In villa quae vocatur Hams... In Ham villa; Cartulaire de Saint-Pére de Chartres, t.1, p. 108 ef 109. (5) Il avait une lieue et demie de long, et séparait le promontoire de la Hague du continent: voyez les Recherches sur le Hagucdike et les pre- miers établissements des Normands sur nos cétes, que M. de Gerville a fait imprimer dans les Mémoires de la Socicté des antiquaires de Normandie, Caen 1835. Au reste, ces fortifications étaient dans les habitudes de tous les peuples du Nord: Normanni devastata ex maxima parte Hlotharici regni regione, prope fluvium Clyla (i. Thylia ? la Dyle), loco qui dicitur Lovonium (Louvain), sepibus, more eorum, munitione capta, securi consederunt ; An- nales Fuldenses, année 891; dans du Chesne, Scriptores Normannorunr antiqui, p. 18. Nous regardons aussi comme d’origine saxonne un petit camp dont les restes se voient encore prés de la pointe de Jobourg, ct les’ deux redoutes circulaires qui défendaient le petit port d’Omonville et ont con- servé leur ancien nom de Heucs. Tae hardiment au cceur du royaume, & travers les contrées les plus peuplées et les plus riches. Tous les Saxons ne se fixérent pas sur le bord de la mer ; les derniers ar-— rivés et ceux qu’une imagination inquiéte ou une posi- tion difficile poussaient 4 des destinées nouvelles, s’a- vancérent dans lintérieur du pays. Toutes leurs traces eussent-elles disparu du sol, cette dispersion résulte- rait naturellement de l’état presque désert, de la pro- vince, et d’ailleurs on peut conclure du nom de Saxia, donné par plusieurs documents du IX siécle 4 la ville de Seez (1), que si les Saxons ne V’ont pas fondée , ils s’y établirent en grand nombre. Vers 441, Aetius aban- donna une partie des Armoriques au roi ac Alains, et cette cession ne resta point nominale ; nous savons par la Chronique de Prosper qu’Eocaric en chassa les habi- tants (2) et forma un état, appelé Alamanwia, qui com- prenait sans doute Alengon (3) et ces deux communes des environs de Caen, connues encore aujourd’hui sous le nomd’ Allemagne. Quelques Francs vinrent aussi pren- dre des terres en Normandie, puisque, en parlant d’un é- vénement arrivé au temps de Frédégonde, Grégoire de — Tours mentionne Cives Rothomagenses et praesertim se- (1) Voyez le Gallia christiana, t. x1, p.675 et 678, Le cartulaire de Saint- Pére de Chartres, t.1, p. 115 et Odolant Desnos, Mémoires historiques. sur laville @Alengon et sur ses seigneurs, t. 1, Dissertation préliminaire, p- XXXI. (2) Alani quibus terrae Galliae ulterioriscum incolis dividendae a patritio Aetio traditae fuerant, resistentes a:mis subiguntet, expulsis dominis terrae, possessiones vi adipiscuntur ; dans dom Bouquet, t. m1, p. 639. (3) On a prétendu, mais sans en donner aucune espéce de preuve, que cette ville devait son nom aux anciens Aulerci, dont la position géographi- que n’a pu encore étre déterminée avec certitude. —— XLII; — niores loci illius Franci (4). Mais la province n’en était pas moins presque déserte au moment de sa cession aux Normands : Terra maritima, dit Guillaume de Jumiéges, quae nunc vocatur normannica, ob diuturnos pagano- rum excursus silvis undique adultis, a cultro et vomere torpebat inculta (2). Les rares habitants qui s’y trou-_ vaient encore, semblent avoir vécu dans un isolement et une indépendance du reste de la France qui leur avait permis de conserver leurs usages et Jeur langue : car un des premiers actes du gouvernement de Rollon fut d’é- tablir partout des coutumes dont il emprunta certaine- ment la forme et les principales dispositions a sa pre- miére patrie : Jura et leges sempiternas, voluntate prin- cipum sancitas et decretas, plebi indixit atque pacifica conversatione morari coegit simul (3). Les anciens pl- rates qui s’étaient fixés en Normandie n’avaient donc pas entiérement oublié leur dialecte septentrionnal , et _ des faits positifs confirment cette conjecture. Quand les Francais voulurent députer le vieux Hasting 4 Rollon, | pour en obtenir quelque tréve : Respont Hastenc: N’irai pas sols. (1) L. vit, ch. 31. (2) Historiae Normannorum 1. ui, ch. 17; dans du Chesne, Historiae Normannorum secriptores antiqui, p. 230. Nous ne parlerons pas du témoi- gnage de Benois, Chronique rimée, |. 1, V. 6613-6625, qui ne répétait habi- tuellement que les récits de Dudon ou de Guillaume de Ju miéges, mais nous ajouterons une autre autorité tout a fait indépendante : Occidentalis Gallia- rum plaga, largiori sinu maris britannici recepta, in desertum est atque so- litudinem redacta ; Chronicon Fontanellense, appendice, dans d’Achery, Spicilegium, t. u, p. 284, éd. in-folio. (3) Guillaume de Jumié¢ges, Historiae Normannorum 1. u, ch. 19; dans du Chesne, Ibidem, p. 232. —— SEY Dune li baillent chevalers dous, De lajdanesche‘Jange apris (1). Quoiqu ‘ils n’eussent pas sans doute amené beaucoup de femmes avec eux, Rollon et ses compagnons ne re- noncerent pas sur le champ a V’idiéme qu ils avaient parlé si longtemps (2). Il était encore en vigueur sous (1) Benois, Chronique rimée, 1. u, v. 3271. (2) Un des plus savants philolognes de Allemagne s’est cependant risqué jusqu’a dire dans une brochure intitulée, Veber die romanischen Schrift- sprachen, p. 44: Die Normenner tauschten schnell ihre Sprache fir die ro- manische aus, und zwar mit einer gewissen Liebhaberei an diesem Tausche, so dass letztere Sprache nur unbedeutende Veranderung durch sie litt. Mais M. Diefenbach a tiré d’un fait au moins fort douteux une conséquence cer- tainement inexacte. Ce glossaire prouvera que les Normands ne mirent point d’empressement a oublier leur langne, puisque les radicaux d’une: foule de mots qui n’existent point dans d’autres patois, se rattachent évi- demment aux idiémes germaniques. L’influence réelle du norse sur le francais est beaucoup plus difficile 4 reconnaitre : les mémes racines appar- ticnnent presque indistinctement A tous les dialectes septentrionaux, et les. patois de toutes les provinces ont plus ou moins contribué a la formation de la langue politique et littéraire. Différentes considérations senblent cepen- dant bien contraires a Vopinion de M. Diefenbach : d’abord, le francais ne parait s’étre formé définitivement que dans le EX° siécle, lorsque la langue des autres races sermaniques avait perdu ses caractéres les plus tranchés, et que celle des Normands conservait encore la pureté de sa prononciation et de son vocabulaire. Puis la plus grande partie des premiers écrivains francais, dont les ouvrages ont acquis quelque célébrité, vivaient en Nor- maudie ou en Angleterre, et durent souvent faire des emprunts au lan- gage usuel qui, comme on en peut encore juger par son état actuel, avait beaucoup de racines islandaises. Et cependant chaque année en fait dispa~ raifre dont on retrouvera quelques traces dans louvrage trés curieux que M. Auguste Le Prévost va publier sous le titre beaucoup trop modeste de Notes pour servir & la topographie et & UVhistoire des communes du dé- partement de ’Eure. Ainsi on y Jit dans une charte de 1060: Tamen in eis dedieis piscationem quae vulgo dicitur Croignim, et dans une du XII siécle: Super rupem quae dicitur Witeclive : Klauf qui probablement changeait de voyelle dans quelque dialecte, puisgue le danois en a fait Klippe, signifie en islandais Rocher et Hvit Blanc. — XLV — Guillaume-Longue-Epée; dans sa conférence avec lui , le saxon Hermann A la danesche parleure Le comenca a aresnier. De ce se prist a merveiller Li dux, e si lia enquis Ou il aveit ensi apris A parler lange poi seue En (I.E) poi des Saisnes entendue (4). Mais insensiblement la population des frontieres prit Vhabitude de parler la langue de ses voisins. Adémar disait, au commencement du X° siécle » Tunc Roso (1. Rollone) defuncto, comite Rodomense, filius: ejus Willelmus loco ejus praefuit. Hic fuit a pueritia bapti- satus, omnisque eorum Nortmannorum qui juxta Fran- ciam inhabitaverunt multitudo fidem Christi suscepit et gentilem linguam omittens Jatino sermone assuefacta est (2). De nombreuses relations avec des etrangers ap- prirent aussi un nouvel ididme. aux habitants de Rouen. Avec plus de pénétration politique qu’on n’en. suppose aux princes du X° siécle, Guillaume-Longue-Epée com- prit que la difference des moeurs et des intéréts amene- rait des guerres fréquentes entre la Normandie et la France; il voulut donc que son fils sut la langue de ses ancétres pour traiter au besoin plus facilement avec les rois du Nord, et Penvoya a Bayeux. Quoniam , lui fait (1) Benois, Ibidem, Vv. 40550; Dudon raconte le méme fait dans du Chesne, Historiae Normannorum scriptores antiqui, p. 100. Hermann avait été prisonnier des Normands. . (2) Dans Labbe, Nova bibliotheca manuscriptorum, t. 1, p- 166. — XLVI — dire un écrivain dela fin du X° siécle/4) ,quoniam quidem Rothomagensis civitas romana potius quam dacisca uti- tur eloquentia,et Bajocensis fruitur frequentius dacisca . lingua quam romana, volo igitur ut ad Bajocentia defe- ratur quantocius moenia (2). Mais ces rapides innova- | tions dans la langue du pays n’étaient pas générales ; les Normands ne voulaient pas méme oublier leurs croyances religieuses. On lit dans un écrivain contem- porain : Hugo, dux Francorum, crebras agit cum Nord- mannis, qui pagani advenerant vel ad paganismum re- vertebantur , congressiones... Ludowicus, Rodomum repetens, Turmodum, Nordmannum qui, ad idolatriam gentilemque ritum reversus, ad haec etiam filium Wil- lelmi aliosque cogebat regique insidiabatur simul cum Setrico, rege pagano, congressus cum éis interimit (5). (1) Dudon, chanoine de Saint-Quentin ; au moins son histoire s’arréte A la mort de Richard I, en 996. ¢. (2) De moribus et actis primorum Normanniae ducum, 1. m, dans du Chesne, Historiae Normannorum scriptores antiqui, p. 112. Benois est bien plus positif, l. nm, v. 44520: : Si a Roem le faz garder E norir gaires longement, I] ne savra parlier neient Daneis, kar nul ne li parole : Si voil qu’il seit a tele escole Ou I’en le sache endoctriner Qué as Daneis sache parler: Ci ne sevent riens fors romanz ; Mais a Baiues en a tanz Qui ne sevent si daneis non. Evidemment, dans ce passage comme dans une foule d’autres, Benois a traduit Dudon, et les différences tiennent a l’infidélité ordinaire des traduc- tions du moyen-age, ou peut-étre au désir de se rapprocher un peu plus de — l'état présent des choses. (3) Flodoard, Chronicon ; dans du Chesne, Historiae Francorum scrip- ores, t. U, p. 607. — XLV — Toutes ‘les ‘différences d'origine avaient été si fidele- ment conservées que Richer appelait Richard Pirata- niin dux (1); et Bernard ne manqua pas de les exploiter pour déterminer les Normands 4 se soulever contre sh d’Outremer : Seignors, fait-il, de Normendie, Sumes pramis a congeer E a la terre delivrer ; Ne vout li reis qu’i ait Daneis : Tout a doné a ses Franceis (2). D’ailleurs, les rapports avec le) Danemark étaient trop multipliés pour ne pas empécher Vididme normand de tomber dans un oubli complet. Richard. I appela par deux fois une armée danoise a son secours, et ses anciens compatriotes accoururent deux fois 4 sa voix: _ En une prée verz, erbue Fu la danesche genz venue, . Dunt mult i out milliers e cenz, dit un chroniqueur officiel (3), et il ajoute que, séduits sans doute parla douceur du climat et la ressemblance des mosurs et de la langue, beaucoup de ces auxiliaires restérent en Normandie : Al saint baptesme receveir Ne fu li nombres pas petiz ; Mais ne l’retrait pas li escriz Ne vos sai dire combien ne quant ; Mais c’en furent li plus vaillant (4). (1) Historiarum libri quatuor, p. 64. (2) Benois, Chronique rimée, 1. u, V. 15619, (5) Benois, Ibidem, v. 23471. (4) Benois, Ibidem, v. 24675. —— XLVIII — Richard II fut obligé de recourir aussi aux Danois, et ne les trouva pas moins empressés (4); il semble méme avoir su leur langue, puisque Seen (Sven), vint a Rouen pour traiter de la paix directement avec lui (2), et nous croirions volontiers que beaucoup de Ses sujets parlaient encore le danois. Au moins Benois dit, en .racontant le second mariage de son péere: | . Out el pais une meschine, Gentil femme, gente pucele, Sos ciel ne trovast l’om plus bele Ne plus sage ne plus corteise, vptnd De pere e de mere Daneise (3), iG GOs et le souvenir de cette origineaurait probablement péri, si leur langage n’en eit conseryé un témoignage vi- vanity! 6) "Bee aaa Sous l’influence @’une législation commie et d’un gouvernement qui attirait de plus en plus toutes les af- faires de la province A Rouen, ces diverses langues se corrompirent l'une l’autre, se mélérent, et il sortit de cette fusion un nouvel idiéme (4), ou les formes ¢t Vesprit du latin durent bientét prévaloir. Malgré la res- semblance qu’un savant danois a cru trouver entre lé singulier bonnet du pays de Caux ét la coiffe encore usi- (1) De Norwege li rei Colan Et de Suave lirei Coman. Wace, Roman de Rou, t. I, p. 346. Benois les appelle Olaive et Laaman. (2) Benois, Chronique rimée, v. 27676. (3) Benois, Ibidem, v. 24809. ; stood Le (4) Unum ex diversis gentibus populum effecit (Rollo) ; Chronicon Fon- ! tanellense, append. dans d’Achery, Spicilegium, t. u, p. 285, éd. in-fol. { sn SL cee tée en Irlande (1), bien peu de femmes avaient suivi les compagnons de Rollon dans leur aventureuse expédition enFrance. Leurs épouses ne parlaient pour la plupart que le roman, et l’on a reconnu depuis longtemps que la mére, qui vit renfermée dans sa maison et s’occupe incessam- ment de ses enfants, exerce sur leur langage une action prépondérante. Quoique les Normands ne semblent pas avoir été de bien ardents prosélytes, leur christianisme plus ou moins sincére les avait au moins familiarisés avec le latin et le roman grossier, que les prétres et les moines préféraient 4 la langue payenne. La part que Rollon prit 4 toutes les guerres de Charles-le-Simple et de Rodolphe, les voyages de Guillaume-Longue-Epée en France, le séjour de Louis-d’Outremer 4 Rouen et I’é- ducation que Richard Ii recut 4 sa cour, firent du fran- cais la langue des dignitaires ecclésiastiques et des sei- gneurs; mais il y avait 4 cété, surtout dans le Cotentin, dans le Bessin et dans ’Hiémois, un patois populaire qui conservait certainement beaucoup de formes sep- tentrionales. Non seulement on distinguait encore, du temps d’Orderic Vital, le clergé danois du clergé indi- géne, mais une charte de la fin du XI° siécle mentionne Yorigine normande d’un habitant du Cotentin (2), et , (1) M. Estrup, dans son Bemcerkninger paa en Reise i Normandict, Copenhague, 1821. (2) Quidam Normaunigena de Constantini pago, dans le Carlulaire de Saint-Pere de Chartres, selon M. Depping, Histoire des expéditions ma- ritimes des Normands, p. 355, note 5, éd. de 1844. Nous n’avons pu y trouver ce passage, mais nous en citerons un autre qui est dans une charte de 1070: Quidam, Normannus genere, Herbertus nomine, de Meli Curte (Mélicourt), in territorio Molinorum Castri (dans le canton de Broglie) ; t. 1, p. 107. ‘3 he aie i nous lavons déja dit, de pareilles distinctions ne se se- raient pas maintenues si elles n’avaient eu des bases solides dans la différence du langage. C’est ce patois, altéré par un usage de neuf sidcles, et considérablement réduit par une foule de mots plus modernes et plus faciles 4 comprendre, qui se trouye encore aujourd’hui dans la bouche du peuple. Sans doute quelques expressions ne sont pas aussi fréquem- ment employées dans certains cantons, plus ouverts a VY influence du frangais, ou méme en ont disparu com- plétement; mais la masse est restée au moins intelli- gible a la plupart des vieillards qui n’ont point quitté leur village, et histoire donne l’explication de toutes ces différences. Elle nous apprend qu’enclavé comme il est au milieu des terres, loin des. grandes voies de communication, arrondissement de Vire a du garder plus de racines islandaises et saxonnes ; qu’en relation continue avec les Bas-Bretons,le département de l’Orne et arrondissement de Mortain ont naturellement adop- té des mots celtiques étrangers au reste de la province, et que les rapports beaucoup plus multipliés des habi- tants de la Haute-Normandie avec les autres provinces rapprochérent nécessairement leur langage des formes romanes du francais , tandis que, dans un isolement presque complet des populations purement latines , les Bas-Normands conservérent les caractéres tranchés de leur ancien patois. Ii serait dailleurs impossible de supposer une origine récente 4 cette langue populaire, puisque une grande partie se retrouve dans le vieux- fides, goad francais des livres (1). Maleré les corruptions qui en masquent la forme primitive, on parvient méme encore a rattacher clairement un certain nombre de mots aux langues des différentes nations qui ont habité la Nor- mandie. A défaut de ces liens, les altérations que la mauvaise prononciation du peuple fait subir au francais , sont assez constantes et assez uniformes pour prouver que la formation du patois ne tient nia des hasards, nia des irifluences toutes locales ; c’est un résultat, nous dirions volontiers une conséquence, de Vhistoire générale de la province. Partout, malgré le prolongement de la voix sur les finales, la prononciation y est devenue a la fois (1) Aussi avons-nous souvent prouvé par des cifations que nous aurions pu rendre beaucoup plus nombreuses, qu’i! ne s’est pas détaché du francais, seulement depuis quelques années: il lui est certainement antérieur par son vocabulaire et par sa prononciation. Ainsi, par exemple, une de ses bizarreries les plus antigrammaticales est union du pronom singulier de la premiére personne avec un verbe au pluriel, et on lit dans une lettre de Francois I a M. de Montmorency : J’avons espérance qu’y fera bean-temps, veu ce que disent les estoiles que j’avons eu le loysir de voir ; Lettres de la reine de Navarre, t.1, p. 467. La contraction, si générale dans les phrases interrogatives, de la seconde personne du pluriel des verbes avec le pronom, était aussi fort usitée dans le XVIe siécle. La reine de Navarre qui se piquait cependant d’érudition et de bel-esprit, disait encores Av’ous souffert que je fusse huée, Montrée au doigt, ou battue, ou tuée? Miroir de Vame pécheresse, p. 42. On trouve aussi en vieux-francais Manjusse et Chiffler : Girbers semont l’emperéor Pepin Et la réine au gent cors seignori Et tos les autres que manjussent o li. Mori de Garin, v. 485. Chascuns de li chifle et parole. Dans Méon, Nouveauzx fabliaux, t. u, p. 24. plus rude , plus séche et plus gréle. Les diphthongues s'y simplifient ; les nasalisations s’affaiblissent, souvent méme disparaissent entiérement; l’a se ferme assez pour se rapprocher de I’ (1); I'v remplace l’o et leu; l’é s’alonge; l’ax prend le son del’h, et l’or celui de l’xt; V1, que la plupart des dialectes ajoutent fréquemment aux autres voyelles, pour en adoucir la prononciation , n’y mouille que les syllabes commencant par un L, pré- cédé dune autre consonne (2), et les terminaisons en ER qui sont précédées d’un c (3) ou que le changement habituel du s en cet du cu en « (#) rendrait trop du- res. Ces spécialités, que les philologues ont déja recon- nues dans le dialecte normand du XII* siécle (5), sont d’autant plus remarquables que lislandais se distingue aussi des autres idiémes germaniques par les mémes caractéres; I’1 y est comparativement fort rare et le K s’y substitue presque toujours au cu. Un fait plus curieux encore, qui jette une vive lumiére sur l’origine du pa- tois normand, et montre comme au doigt P influence qui a le plus activement concouru a sa formation, c’est que les patois de la Flandre, de l’Artois et de la Picar- (4) Linverse a lieu aussi dans un trés-petit nombre de cas : Accater,, Acheter ; Rapasser, Repasser ; Trassauter, Tressauter ; etc. (2) Nous citerons, comme exemple, Blieu, Bliond, Eclié (Eclair), En- cliume, Fliew (Fleur de farine), Gliand, etc. On ajoute aussi un 1 aux deux monosyllabes Jens (Intus, Dedans) et low. (3) Bergier, Dangier, Mougier (Manger), etc. (4) Kachier (Chasser), Dréchier (Dresser), Kigretie (Charrette), Bokier (Boucher), etc. Généralement le Ch ne devient dur qu’au commencement des mots. (5) Fallot, Recherches sur les formes grammaticales de la langue fran- caise au XIIIe siecle, p. 25-30; M. Ampére, Histoire dela formation de la langue francaise, p. 343-356. wo BLS some die, et méme de la Franche-Comté, de toutes les pro- vinces ou les hommes du Nord se sont établis en grand nombre, ont avec lui des ressemblances frappantes : presque tous les mots qui leur sont communs se pro- noncent de la méme maniére (1). L’influence septen- trionale est d’ailleurs écrite partout sur le sol , et c’est la meilleure preuve de la dépopulation de la province , lors de sa cession 4 Rollon, ou d’un opinidtre attache- chement des Normands pour leur langue (2). MM. Au- guste Le Prevost et Petersen ont indiqué un trés-grand nombre de noms géographiques , dont Vorigine ger- manique est fort vraisemblable (3); nous nous bor- nerons a en citer quelques-uns qui, pour la plupart, n’entraient pas dans le cadre de leurs recherches. Le Havre signifie en islandais le port (4); c'est le nom que l’on donne encore maintenant en danoisa Copenhague(5); (1) 11 sernble seulement probable que les anciennes aspirations norman-. des ont été fort adoucies par l’usage; ainsi, par exemple, on trouve écrit dans les Lois de Guillaume-le-Conquérant, ch. xvi: Qui pur haur ne fist ne pur altre chose. L’accent parait aussi un résultat de l’influence germani- gue; car on lit dans une lettre de Notker Balbulus, publiée par M. Grimm: Oportet autem scire, quia yerba theutonica sine accentu scribenda non sunt praeter articulos; ipsi soli sine accentu pronuntiantur acuto aut circum- flexo ; dans le Gattingische gelehrte Anscigen, 1835, n° xcul, p. 911. (2) Un autre fait le prouve d’une maniére bien positive : malgré les rap- ports de leur langue avec I’anglo-saxon, les Scandinaves qui s’établirent dans le Northumberland donnérent 4 différentes localités des noms tirés de Jeur propre langue: Meerg heiti landsins eru thar gefin a norrena a ne Hatkonarsaga goda, ch. 3. (3) Nous citerons, entre autres, les noms terminés en oa bose, by, dale, fleur, gard, houlde, land et tot. (4) La forme ancienne s’était beaucoup moins écartée de V’islandais Han: Braz fu de mer, hafne i aveit. Lai de Gugemer, v. 152. (5) Kjobenhavn, Port arrondi ; la forme latine est, comme on sait, Hau- nia, Havnia et Hafnia. eee EER ee Dieppe est aussi une corruption de Vislandais Diup, Profond, qui se retrouve dans le nom de la Douve et dans les Diépes de la Seine ; Estrand est la Céte; Ouis- ircham et Estreham, le Village de Pouest et de lest. L’Auge et la Hague viennent sans doute de Hagi, Patu- rage (1). On lit dans la Chronique de l’abbaye du Bec : In Normannia est quidam locus, qui dicitur Beccus et ita vocitatur a rivulo decurrente ; c’est, en effet, la signi- fication de Vislandais Beck. Tous les noms of ce mot se trouve ont également un sens philologique : Bolbec signifie Ruisseau de la ferme (2); Bricquebec , Ruisseau esearpé (3); Caudebec , Ruisseau froid (4); Foullebec, Ruisseau puant ; Houlbec, Ruisseau encaissé (5); Orbec, Kuisseau fangeux; Robec, autrefois Rodebec, Ruisseau rouge, et Rolbec, Ruisseau sinueux. On appelle encore maintenant les fosses des Haules, les bas-fonds des Hoellandes, les langues de terre qui conservent plus long- temps leur verdure pendant les sécheresses de lété des Groin , les hauteurs sur le bord delamer des Hogues, les petites iles des Houlmes, les promontoires des Nez et les courants d’eau rapides des Raz. Les dénomina- tions géographiques prouvent méme, d’une maniére certaine, que les Normands conservérent leur ancienne (1) Aucia, Auga et Augum avaient probablement la méme origine. On lit dans la charte de confirmation dé l’abbaye de Saint-Etienne de Caen par Henri [I : Cum sylvaet algia ef cum terris. (2) C’est aussi le nom d’une paroisse du Danemark. ; (3) Ou comme nous avons dit dans le Glossaire, Ruisseau qui a un pont. (4) On la quelquefois appelé Beccum Caletensium, Ruisseau de Caux; mais on trouve dans de vieux documents fluvius qui dicitur Caldebech et Kald signifie Froid en Islandais. (3} Ce nom se retrouve aussi en Danemark. ee ee langue longtemps aprés leur conversion au christia- nisme; car ils ne durent pas s’empresser de batir des temples chrétiens dans les localités sans importance, et Yon retrouve dans de simples communes, comme Car- suebu (1), Querqueville, Criquetot, Criqueville (2), le nom parfaitement reconnaissable de Kyrkja, qui signifie en islandais Keglise. Si les faits dont le souvenir est resté dans Vhistoire n’autorisent point une critique circonspecte A attribuer aux Normands cette influence prépondérante sur la langue et la littérature frangaises que Heeren a supposée (3), on peut du moins croire avec Hickes qwils apportérent en Angleterre un grand nombre de mots d’origine danoise. « Quin etiam etsi voces, quas Normannia Neustria sua ad majores nos- tros jam tum semisaxonice locutos detulerunt , ad tria genera reduxerimus , scilicet ad gallo-francicas, gallo- latinas et danicas, notandum tamen est haud’ pauca in anglo-normannicis occurrere,de quibus statuere non possum, an danicae, vel gallo-francicae, an alius forte originis sunt (4). » On se tromperait singuliérement en (1) Une paroisse des iles Féroé s’appelle également Kirkeboe, et il y a prés de Copenhague un village de Quericbi. (2) Cette transposition du x est encore trés-fréquente dans le patois Nor- mand : quoique on écrive Breitevilic, le peuple prononce toujours Berle- ville. (3) Unter den ausweertigen Volkerschaften, die in den Jahrhunderten des Mittelalters Frankreich, entweder bloss durchstreiften, oder sich auch darin niederl‘essen, sind die Normannen unstreitig diejenigen, denen nicht allein die franzcesiche Sprache sehr viel zu verdanken hat, sondern die auch den eanzen Gange der franzcesichen Litteratur in ihrer ersten Periode grossen- theils, die ihr eigenthiimliche Richtung gaben; Ueber den Einfluss der Normannen auf die franzesiche Sprache und Litteratur, dans ! Histeri- sche Werke, t. 1, p. 352. (4) Grammatica anglo-saxonica, p. 02. so UME Stes jugeant la langue usuelle des Normands au moment de la conquéte par les lois de Guillaume, qui ont cer- tainement été récrites sous ses successeurs, ou méme par la grande quantité de mots francais dont anglais est bigarré; car la domination normande répandit le gout de la langue et de la littérature frangaises, et, com- me l’a remarqué Skinner, beaucoup d’écrivains, parmi lesquels on regrette de compter Chaucer, y introdui- sirent encore, plusieurs siécles aprés, un grand nombre de mots nouveaux : « Chaucerus, pessimo exemplo, in- tegris vocum plaustris ex eadem Gallia in nostram lin- guam invectis, eam nimis antea a Normannorum yicto- ria adulteratam, omni fere nativa gratia et nitore spoliavit, pro genuinis coloribus fucum illinens, pro vera facie larvam induens (A). » . ve Les développements naturels d’une langue commune 2 tout un peuple sont contrariés par des influences si nombreuses et si variables qu’en voulant systématiser toutes les lois qui les régissent, on arrive ade prétendus principes d’une variété trop infinie pour avoir un carac- tére véritablement scientifique. Les idiémes qui, comme allemand, se sont développés, pour ainsi dire intérieu- rement, a l’abri des langues étrangéres, échappent jus-: qu’a un certain point a ces tiraillements en sens divers et conservent une sorte d’unité historique ; il n’enest pas ainsi du francais: composé d’éléments hétérogénes, dis- séminés dans cent patois différents (2), il les a réunis (1) Ztymologicon linguae anglicanae, préface. (2) M. Schnakenburg en a fait connaitre un assez grand nombre, quoique - son Tableau synoplique et comparatif des idiémes populaires dela France, e/a un peu au hasard selon les circonstances et les besoins du moment. Le fond est sans doute le dialecte que l’on parlait dans l’Ile-de-France, mais la prééminence lit- téraire du normand (1), les mariages de nos rois avec des femmes du midi, amoureuses de l’élégance et du plaisir, mille autres circonstances individuelles , dont Vhistoire n’a pu garder un souvenir complet, amenérent de si fréquents changements dans la langue, qu’on ne reconnait plus d’esprit systématique dans la formation des mots, ni d’unité dans la prononciation. Lors méme que les emprunts eussent été plus multipliés, et qu’une accentuation différente ne les eit pas masqués, les ca- ractéres particuliers de chaque patois n’en auraient pas moins disparu dans une fusion qui s’est continuée pen- dant plusieurs siécles. Pour remonter aux radicaux pri- mitifs et saisir les lois qui ont dominé les développe- ments de la langue et lui ont donné de l’ensemble et de V’harmonie, il faut l’étudier 4 la source, dans la bouche méme du peuple. Malheureusement l'étude historique des patois pré- sente aussi d’insurmontables difficultés. D’abord il existe & cété, ou pour mieux dire au-dessus, une lan- gue plus raffinée et plus intolérante qui exerce une ve- Berlin 1840, soit déplorablement incomplet. Les quatre-vingt-cing traduc- tions de la parabole de l’Enfant prodigue recueillies par M. Coquebert de Monbret, dans ses Mélanges sur les langues, dialectes et patois sont elles- mémes bien loin de donner une idée de Ja multiplicité de nos patois. M. Spano a pu insérer dans son Ortograjia sarda nazionale, Cagliari 1840; jusqu’a vingt-deux traductions différentes du Pater noster en patois sarde. (1) La plus grande partie de nos anciens écrivains appartient a la Nor- mandie, au moins par la langue : la Chronique de Geoffroy Gaimar, le Voyage de Charlemagne, la Chanson de Roland, la traduction des Livres des Rois,. coe EVIE ritable pression sur toutes les formes qui leur sont pro- pres. Leur syntaxe se simplifie et s’efface de plus en plus ; ils cessent bient6t de pouvoir se préter aux jeux de la pensée et ne conviennent plus qu’a l’expression naive et toute matérielle d’un besom ou dune idée (1). Ils pont plus d@autre prétention que d’étre aussi fa- ciles & prononcer qu’a comprendre, et dans ce but ils rejettent ou modifient les lettres qui embarrassent la prononciation, et établissent entre les sons des rapports qui rappellent ceux qui existent entre les idées. Ainst, par exemple, la Chopine se nomme & Nancy Chopinte, et la forme ronde et allongée du grain d’une espéce de haricot qui gardait en vieux-francais son nom latin Fa- © séol (2), et avec la désinence des diminutifs Faséolet, Va fait appeler par le peuple Flageolet. Sans doute, comme nous l’avons dit, la langue d’un grand pays a sa base dans l’esprit de la nation et se développe naturellement par les manifestations de sa pensée ; mais les patois particuliers aux derniéres classes sont loin doffrir les mémes caractéres de fixité et de nécessité. Soumis dans chaque localité 4 des influences diverses qu’aucune rai- son générale ne neutralise , ils se grossissent au hasard d’importations étrangéres (3) et d’imaginations indivi- celle de Marbod, les poémes de Wace et de Philippe de Thaun, les chroni- ques de Benois etde Jordans Fantosme, le Chastoiementd’un pére & son fils, le Lai d’Ignaurés, la branche du Roman de Renart par Richard de Lison, etc. (1) Nous ne parlons pas de certaines poésies ambitieuses, comme sont par exemple celles de Jasmin, qui dédaignent la naiveté des patois et aspirent -aen faire des langues littéraires : le talent qu’on y peut mettre fait mieux ressortir Pinintelligence de la tentative. (2) On le trouve encore dans Rabelais, Pantagruel, 1 mm, ch. 8. (3) Ilest, par exemple, difficile de creire gue Pocha qui signifie dans le cordial: Wea duelles qui ne relévent que du caprice. Par ignorance ou par métaphore on donne souvent aux choses des noms qui dans d’autres localités en désignent de diffé- rentes : Tolupe le nom du Coquelicot dans l'arrondis- sement de Bayeux est sans doute une corruption de Tulipe, et le Coquesne est 4 Valognes le Petit érable et non le Fréne @ fleur, comme en vieux-francais (1). Peut-Ctre n’est-il pas un petit centre de population qui ne change entidrement le sens de certains mots, ou n’affectionne des expressions presque entiérement inconnues aux au- tres. Ainsi le Moineau est appelé Pisli a Avranches, Pottin & Coutances, Moisson & Valognes, Friquet a Bayeux et Quilleri dans Orne (3). Les noms de la . pomme de terre sont encore plus variés ; on trouve dans patois de la Meuse, Petite mare, Flaque d’eau, n’ait point de liaison avec Yanglais Poachy, Marécageux ; mais si frappantes qu’elles soient des ressem- blances qui ne s’appuient point sur des faits historiques, doivent toujours inspirer une grande défiance. Ainsi Yon serait d’abord tenté de voir des rapports @origine entre le pronom anglais de la premiére personne ef celui du patois de Mon{belliard : Y olli errai dans in champ Que n’aivai pe de terre. Dans Fallot, Recherches sur le patois de Franche-Comté, p. 128. Mais on comprend bientdt que cette ressemblance orthographique a pu. ar- river de deux maniéres; par l’adoucissement du pronom allemand Ich, ou par le rejet de la finale romane qui est restée en espagnol, en italien et en valaque. (1) Quequesne, dans le Glossaire latin-frangais de }a Bibliotheque de Lille; B. 36. (2) A Avranches, par exemple, on appelle le tombereau Hol/e. (3) Les noms significatifs sont surtout soumis 4 de grandes variations : tout le monde n’est point frappé des mémes circonstances et ne les rend pas de la méme maniére. Ainsi la Bergeronnette est appelée selon les localités. Hochequeue, Branlequeue, Baquouc, Baquoiie, Danchemare, Batemare, _ Batalesive et Lavandiere : on Vappelte en breton Kannerezig-ann-dour, Petite batteuse d'eau, = LX — des communes 4 peu prés limitrophes, Colinette (1), Gaingain, Pataffe (corruption de Patate), Quinquin (le méme nom que Gaingain), Tambourin, Tartouffle (sans doute de l’allemand Kartoffel), et Truche (corruption de Truffe) (2). Le patois d’Avranches nous offre méme exemple remarquable d’une différence purement eram- maticale : il a conservé dans certains temps du verbe Aller des formes qui ont sans doute appartenu d’abord a une conjugaison différente : SUBJONCTIF PRESENT. Que je men oige, Que tu t’en oiges, Qu'il s’en oige, Que je nous-en allions, Qu’on vous en alliez, Qu’ils s’en oigent. Kt ce qui rend plus curieuse encore la nouvelle in- trusion d’un autre verbe dans cette conjugaison, c’est qu’ilest probablement d'origine gothique (3), et qu’on ne le retrouve poini dans les autres dialectes romans. Cet élément arbitraire et local qui s’introduit inévi- tablement dans tous les patois, en rend déja les étymo- logies suspectes, et d’autres raisons , 4 la fois plus gé6- nérales et plus essentielles, en infirment toutes les bases. Sauf quelques rarés exceptions, ce sont des conjectures (1) Ce nom désigne plus particuli¢rement la pomme de terre longue. (2) Dans une seule commune du canton de Murat (Cantal), selon M. de La Bouderie, Mémoires de la Société royale des antiquaires de France; Nouvelle série, t. 11, p. 385, on luidonne jusqu’a quatre noms: freufa, Tri- fola, Patyn et Nouver. (3) Tout semble au meins indiquer qu'il vient par aphérése de g-aggan. — LxXl — plus ou moins ingénieuses qui ne peuvent prétendre a devenir de la science. La permutation réguliére des lettres quileur donnerait un caractére scientifique, sup- pose une connaissance exacte de trois éléments qui par la nature méme des patois échappent A toutes les re- cherches. Un patois ne se détache pas tout-a-coup des langues dont il dérive : elles sont d’abord altérées par des corruptions irréguliéres dont il ne reste aucune trace, et les premiéres tentatives de reconstruction dans un langage véritablement différent ne se fixent pas non plus dans la mémoire du peuple (1). Voila donc deux données, la connaissance des derniéres altérations de la langue et celle des premiéres ébauches des patois, qui sont nécessaires 4 histoire des mots puisqu elles per- mettent seules d’apprécier les changements quien ont mo- difié la forme, et toutes deux sont également impossibles. Peut-¢tre enfin n’a-t-on point suffisamment tenu compte d’un fait capital, c’est que les révolutions des langues, et plus particuliérement encore la formation des patois, ne se font point par l’écriture des lettrés, mais par la parole du peuple. Les plus savants travaux qui soient venus a notre connaissance, acceptent comme une ve- (1) Le nom latin du Fenouil, Feniculum, ne vient pas, comme le prétend assez ridiculement Ménage, de Fenum ; ce n’est pas certainement De petit foin: asa forme, on le croirait volontiers d’origine celtique quoique sa racine n’existe pas en breton; mais on trouve en erse Fineal et en Irlandais Feneul. Une coiffure s-mblable au Bavolet des Normandes que ce glossaire expli- que par Petit voile bas, s’appelle dans le patois dela Meuse Bagnolet, et ce mot a de grands rapports avec le latin Panneolum, Petit voile. Nous citerons encore le normand Affurer, Voler ; la prosthése d’une voyelle était si fré- quente, surtout dans les verbes, qu’on ne saits’il vient de Furari ou ad’ Au- Jerre, et la connaissance de la premiére forme léverait toutes les incer- titudes, — LXH -- rité préliminaire , ou Vinamobilité de la prononciation ou son exacte représentation par Vancienne orthogra- phe, et malheureusement ce sont Ja deux suppositions qui ne sauraient non plus avoir aucune réalité. Le Chant des Fréres Arvals (1), et ’ Inscription dela colonne ros- trale (2) prouvent qu'il n’y avait méme pas a proprement parler d’orthographe latine : chacun obeissait plutot aux caprices de son oreille qwil ne se contonnaiaiaaee ha- bitudes générales, et écrivait un peu a sa guise. Les Celtes ne paraissent méme pas avoir jamais possédé de caractéres nationaux, ayant par conséquent une valeur reconnue, et au milieu du IX° siécle, au moment méme de Ja formation de nos patois, l’allemand Otfrid disait dans la lettre qui précéde son poéme sur le Christ, comme une des grandes difficultés de son entreprise , que ses compatriotes « usum seripturae in propria lin- gua non habere (3). » Le roman lui-méme ne s’écrivit suére avant le XII* siécle, et les irrégularités d@ortho- sraphe étaient assez constantes pour empécher d’en ti- rer aucune induction légitime : au lieu de Chesne ou Quesne , les deux formes habituelles de Chéne, la tra- duction des Livres des Rois, ot: tout cependant mani- feste le travail d’un clere, écrit & quelques lignes seu- lement de distance Chaigne et Chaidne (4). Dans une (1) Voyez Marini, Gli atli e monumenti dei fratelli Arvali, tabl. xu; chaque vers est répété trois fois et les variantes sont assez considérables — pour avoir jeté de grandes obscurités sur le sens. (2) Voyez Graevius, Thesaurus antiquilatum romanarum, t.r1v, p. 1810, ‘ou M. Egger, Latint sermonis vetustioris rediquiae selectae, p. 102. (3) Dans Schilter, Thesaurus antiquitatum teutonicarum, t.1, p. 10. (4) P. 186 et 187, éd. de M. Leroux de Lincy. lettre fort curicuse de 1453, on trouve encore avec la forme Angloiz vingt fois répétée: « Et y furent les champs tous converts d’Engles (1). » Quant a la pronon- ciation, les poétes n’auraient pu prendre tant d’étranges libertés avec elle, si elle etit été véritablement fixée. Ce n’est pas la une simple conjecture, les preuves abon- dent ; pour en citer une qui dispense de toutes les au- tres, il y a des syllabes sur lesquelles la voix glisse avec rapidité quoiqu’elles soient marquées d’un accent. cir- conflexe (2). Ces corruptions de la prononciation varient méme selon les temps et selon les lieux, et ajoutent de nouvelles difficultés a la recherche des étymologies les plus difficiles: ainsi Vorigine du francais Blaude est rendue encore plus obscure par la forme Glaude qui a prévalu dans le département de la Meuse. Les patois ne se forment d’ailleurs qu’a des époques d’imagination, ou la parole animée du peuple détourne a chaque instant les mots de leur signification primi- tive. Beaucoup de ces expressions métaphoriques pas- sent dans la nouvelle langue avec un sens littéral, et créent dinextricables difficultés aux savants qui ra- ménent toute Phistoire des langues a de simples per- mutations de lettres (3). Pour étre adoptés par tout un peuple, ces changements de signification ne peuvent (1) Bibliotheque de VEcole des chartes, Deuxiéme série, t. 1, p. 246- 247. Nous avons choisi cet exemple entre mille, parce qu’il prouve que la: prononciation fermée de la diphtongue oi est bien plus ancienne que Re- gnier, qui s’en moquait cependant comme d’une nouveauté. (2) Hopital, Patendtre, Pentecdte. (5) Ainsi, par exemple, Loguence est sans doute une corruption d’Zla- quentia ct Avoir de la loquence signifie dans le patois de Reims: Ayoir une VOIX trés-for te. aoe RE Fee étre amenés par un pur caprice d’imagination : ils tien- nent A des idées, généralement répandues, dont la con- naissance importe sérieusement & qui veut étudier les développements de V’intelligence publique ; mais dans la rapide succession de faits qui composent Vhistoire, elles changent bientét 4 leur tour et il n’en reste plus aucune autre trace que les mots dont elles ont modifié la valeur. Toutes les étymologies de ce genre sont donc nécessairement un peu hasardées, et nous nous borne- rons 4 en indiquer un petit nombre qui nous paraissent suffisamment vraisemblables. Latin Burrae (1), Choses sans valeur ; Bourrier, Mau- vaises herbes. Islandais Farsiuk , Gravement malade ; Fersir , tre transi, Tremblotter (2). Islandais Kof, Embarras d’esprit ; waved Désirer ardemment. Islandais Korra, Respirer difficilement ; Chorer, Mar- cher lentement, Gouver une maladie. Islandais Litt, Mauvais; Lité, Mal leveé. Islandais Lure, Lacheté ; Laurer, Pleurer. Islandais Skafin, Brave (3) ; Escafer, Tuer. (1) Nous ne avons vu que dans Ausone : At nos illepidum, rudem libellum, Burras, quisquilias ineptiasque. Praefatiuncula ad Latinum Pacatum, Vv. 4; et il est probable que Vorigine en est celtique. Au moins selon Scaliger, la majeure partie des nations Aquitanniques appelaient Burrae les vétilles, les niaiseries (Quisquiliae) : en espagnol et cn catalan Burro s‘gnifie encore Ane et Burrada, Aneric, Sottise ; le peuple dontie le. méme sens & Bour- rique. ; (2) C’est sans doute aussi l’origine de Farcin, en vieux-francais Fersin. (3) Scafion signifiait encore en vieux-francais Voleur de grand chemin. — iXv — Anglo-saxon Hrestan, Se reposer ; Arestison, Retard. Vieil allemand Geren, Désirer avidement; Gouras, Gourmand. Bil 4 Vieil allemand Heuer, Téte de héte sauvage ; Ahurir , Abasourdir (4). Quoique aussi diyerses que toutes les ficures de mots qu imagine la fantaisie des poétes, ces transformations se rattachent, pour la plupart, & un petit nombre de causes dont on peut au moins pressentir V influence. Quelquefois, par exemple, on donne un sens particu- lier & des mots dont la signification était générale : ainsi, anglais Flép, Cordial , désigne, dans le patois normand , une Boisson composée de cidre, d’eau-de-vie et de sucre. Souvent, au contraire, c’est le sens par- ticulier qui est oublié ; Pidée se généralise ; puis , par une nouvelle métaphore, les mots s’emploient dans une acception tout-a-fait différente de celle qwils avaient d’abord : le normand Effabi, Troublé, Effronté, semble venir de Vislandais Favis, Sot , Grossier (2); et Flanier, Avare, de Pislandais Flanni, Libertin. Parfois aussi le changement de signification est amené par une sorte d’opération logique de Vintelligence; ainsi, du latin Egenus, Pauvre, on a fait sans doute Eguené, Avare (3), (1) Littéralement Donner une téte de béte sauvage. Le vieux-provencal Abuzar, dont la signification était la méme, signifiait au propre, Rendre ours, et l’on disait des criminels auxquels il était permis de courir sus qu’ils portaient une Téte de loup : Wargus sit, hoc est expulsus, disait aussi la Loi des Ripuaires et Varg signifie Loup en islandais. (2) Sil venait du latin Favonius, Batard, un changement de méme nature aurait eu lieu. (3) Tl aura sans doute signifié d’abord Qui fait peu de dépense. D Live et Equené, Affamé, Affaibli (4). I] est enfin des idées particuliéres 4 chaque population , qui réforment la va- leur des mots et les marquent a leur empreinte. Un adage du Hava-Mal, que le francais a traduit par le pro- verbe populaire : Mieus vaut goujat debout qu’ empereur en- terré, montre quelle estime les peuples du Nord faisaient dela vie pour elle-méme; et cette idée, si naturelle a des sucrriers qui ne croyaient pas méme qu'il fut per- mis de se reposer pour mourir (2), s’est exprimée par Je sens méprisant que le patois normand donne 4 trois corruptions différentes du latin Caro,Chair(3). Sous Pin- fluence du respect général qu’inspirait la vieillesse, il a modifié aussi l’acception primitive de Chenu (4) et Cossu, Vieillard (5) et y attacha une idée d’ excellence. La signification injurieuse qu’a prise le mot latin Co- guus ,Cuisinier (6) confirme! opinion des savants, qui pla- cent le berceau de nos ancétres+dans un pays ou la pré- (1) Dans le patois du Berry, Acni (Haqueny) dont l’origine est certainement la méme, signifie Tombé d’inanition, Ereinté, Epuisé. (2) Les anciens Scandinaves professaient un souverain mépris pour ceux qui mouraient sur une paillasse, et pour éviter une telle ignominie, ils se taillaient des runes sur le corps avec leur épée. (3) Cari, Haridelle ; Carne, Cheval sans énergie et sans vie ; Carou, Corps sans Ame; la méme idée a formé le francais Charogne. Nous devons dire cependant qu’en breton Kar signifie Chose sans valeur. (4) Or se vont tuit de vos gabant, Juesne et chenu, petit et grant. Erec cet Enyde, B. R. fonds Cangé, n° 73, fol. 10 v°, col. 1, Vv. 40. 1] pourrait cependant venir aussi du breton ; Kann y signifie Brillant. (5) Cossi selon Pezron, Antiquité de la nation et de la langue des Celtes, _ p. 279; Koza conservé cette signification en breton. Dans un glossaire la- tin du XIe siécle de la Bibliotheque de Rouen, cat. prov. A, 389, Cossualia est interpreté par Festivitates. se (6) Coquin eut méme sans doute pendant quelque temps la signification du latin, car on lit dans P Apparition de maistre Jchan de Meung par Ho- noré Bonnet: , ome WE ee paration des aliments et le meurtre des animaux né- cessaires 4 notre subsistance étaient une caused’ infamie. Une réminiscence de ces temps, antérieurs a tousles té- moignages positifs de notre histoire, a sans doute changé aussi le sens de lislandais Kockr, Cuisinier, et en a fait le normand Achocre, Lourdaud, Maladroit (1). Les langues qui se développent, pour ainsi dire,spon- tanément et sont fixées par la littérature d’un peuple , finissent par modifier ou méme rejeter entiérement les mots étrangers qui ne s’accordent point avec les ha- bitudes de la prononciation ou Vesprit du vocabulaire; mais il n’en saurait étre ainsi des patois, qui sont créés selon les besoins du moment pour servir d’intermé- diaire 4 de nombreux ididémes: ils se grossissent in- différemment de tous les mots, que dinappréciables hasards leur rendent nécessaires. Il y a donc un cer- tain nombre d’expressions empruntées a d’autres_pa- tois, dont les corruptions n’ont pu étre déterminées par des principes entiérement semblables (2). Pour Or sont venuz meschans..devins, Serceliers, arquimaus coquins, Qui vuellent par art d’invoquer Sans Dieu les malades saver. B. R. fonds francais, n° 7202, fol. 8, recto. Selon Hickes, il aurait été pris aussi dans une autre aeception qui se rap- prochait beaucoup plus de lidée primitive ; Nunc Coguin, Coquine, quae olim apud Gallos otio, gulae et ventri deditos, Ignavum, Ignavam, desi- diosum, Desidiosam, Segnem significabant ; Linguarum veterum septentrio- nalium thesaurus, t.1, p. 251. Gueux est sans doute aussi une corruption de Quewx : Le duc trois gueux pour sa bouche, chascun compté par quatre mois, et doit le gueux en sa cuisine commander, ordonner et estre obey ; Olivier de la Marche, Estat de la maison de Charles-le-Hardy; année 1474, t. 1, p. 520, éd. de Petitot. (1) Le patois de Rennes emploie ce mot avec la méme acception. (2) Les patois d’un méme peuple ont rarement des origines diverses ; ils —— LAY = donner une base scientifique aux étymologies,ilfaudrait par conséquent reconnattre avec certitude la patrie pri- mitive de chaque mot, et l’on sait seulement que le mélange fréquent de toutes les provinces dans une his- toire commune dut amener de nombreux échanges de mots. A défaut de preuves plus positives, on trouverait, dans les différents patois , beaucoup de phrases pro- verbiales dont la construction et Vidée sont trop bi- garres pour avoir été imaginées dans plusieurs provin- cos indépendantes. Nous en choisirons quelques exem- ples dans le patois normand : Ne pas en étre bon marchand sienifie aussi, dans le patois bressan, Avoir sujet de se repentir d’une chose; et , dans les Maximes géneéralles du droict francois, le berrichon Delommeau se servait de la singuliére locution : Etre fait mourir : La loy de Draco estoit bien plus rigoureuse, par laquelle les pa- rents de celuy qui avoit tué un home estoient faits mourir, s’ils pouvoient estre apprehendez , a faute de trouver et apprehender celui qui avoit tué, Avoir de quoi est dans Regnier (1); Benois disait , dans sa Chro- nique rimée : | | Les dous purneles de ses .uiz ioe * Ne gardout pas plus cherement (2); f ne sont différents que parce que les altérations des ididémes primitifs n’ont pas constamment suivi les mémes lois. ({) Pourveu qu’elle soit riche et qu’elle ait bien de: quoy. Satire tt, V. 144. On trouve déja dans le Registre des mestiers de Paris, par Estienne Boileau : Il puet estre chavenacier a Paris qui veut franchement, pour qu’il sache le mestier fére, et qu’il ait de coi; p. 149, éd. de M. Depping. C’est probablement une ancienne forme latine, car on lif dans Pétrone, ch, 45 : Et habet unde. (2) L. 11, Vv. 12724. — FE et notre expression elliptique : Avoir le ventre serré se retrouve, avec son complément, dans un poéme qui re- monte au XII° siécle : Dist li rois : Dame, bien puet estre verté ; Jen ai le cuer el ventre si serré Que ne me puis aidier ne conforter (4). Il y a dailleurs, dans les patois, des mots qui n’ont pas vraisemblablement une origine normande ; tels sont, par exemple, Davee, dont le p préfixe (2) se re- trouve A autre bout dela France , dans le patois du Béarn (3); Andain et Staseran, Ce soir, qui, sil’on en croyait d’étranges ressemblances, viendraient de Pitalien Andafe et Stasera; Chowmacre, Cordonnier, dont lapronon- ciation allemande s’est méme assez bien conservée (4). Quelques-uns sont éyidemment empruntés au culte (1) Chanson du vilain Hervi, B. R. fonds de Saint-Germain frangais, n° 4244, fol. 9, v° col.1, v. 4 Nous pourrions multiplier presque indéfiniment ces exemples; Faire les cent coups , Jouir d'une chose (En venir a bout), Battre la breloque (Déraisonner), ete. (2) C’est probablement la préposition De que la basse-latinité réunissa souvent avec d’autres prépositions, De sub, De intus, De ab ante, etc. Ces capricieuses réunions étaient aussi trés-fréquentes en viewx-francais ; Vau- quelin de La Fresnaye disait dans son Art poctique : Ii advint du depuis qu’avec le mouvement Le violon joua beaucoup plus plaisamment, » et cette locution s’est conservée dans le patois normand. (3) Digat me, Paloumettes, Qui y ey a Cauterés ? — Lou rey et la reynette Si bagnan dad nous tres. aus M. Mazure, Histoire. du Béarn et du pays basque, p. 480. (4) On dit cependant dans Varrondissement de Valognes Swr Vaséran, Sur ie soir, et le vieux-francais employait dans le méme sens Sérée ct Sée- rence. . (5) On dit aussi quelquefois Choumaquc. — LXX — catholique, comme Adoremus, Révérences ; Agios, Longs discours, et Agiots, Cérémonies, Caresses hypocrites (A); Asperges, Goupillon (2), et Rabis, Salutations (3). D’autres semblent méme remonter 4 des religions abandonnées depuis des siécles : Amomi, Fou, est sans doute dérivé de Momus, Dieu de la folie; Apolon, Corset, a proba- blement aussi une origine mythologique , puisqu’il se Tetrouve dans le patois de la Meuse et qu’on lit dans YElucidari de las proprias : Apolavo'l febus, que vol dire?bel (4). On a méme conservé, surtout dans le Bocage, l’ex- clamation Perjou, qui est certainement l’ancien serment des payens Per Jovem (5). D’autres mots sont restés dans (1) Autrefois les chantres se mettaient en voix en chantant Ie verset grec Agios,| Ischiros. On trouve aussi Agios en vieux-francais : Faut-il faire tant d’agios ? Commancez mes petits deablos. Arnoul Gresban, Mystére de la Passion. Dans le patuis de Nancy Agiole signifie Simagrée, Singeries: La signification de l’islandais Kias, Flatterie, peut cependant inspirer des doutes sur cette origine. (2) C’est aussi sans doute l’origine du francais Aspersoir. (3) D’autres souvenirs de la Passion sont restés dans le patois normand : on dit proverbialement : Etre renvoyé de Caiphe a Pilate, et Etre connu ‘comme Barabas 4 la Passion. Probablement le nom de Lune rousse que l'on donne a la lune d’avril, pendant laquelle le temps est souvent assez froid, vient de la couleur des cheveux de Judas : par une autre souvenir biblique on appelle la premiére semaine de mai qui en fait ordinairement partie, semaine de Cain. (4) Dans Raynouard, Lexique roman, t. m1, p. 297. Ce mot existe aussi dans le patois de la Meuse, et peut-étre, malgré le latin Pallula, doit-on assigner la méme origine 4 Polacre, Pouiller et Pouillot. (5) D’autres souvenirs de l’histoire ancienne sont restés populaires ; on appelle en Normandie les veuves inconsolables des Artemises et dans son Dictionnaire roman dom Frangois cite Acate comme un synonyme de Bon et fidéle ami. eo LEX — la mémoire du peuple aprés des évenements qui avaient © vivement frappé son imagination, comme Bosche, Ho - rion et Tac qui se rattachent tous trois au souvenir d'une épidémie (4). en est quelques-uns qui n’ont été em- pruntés & aucune autre langue. C’est le patois qui les a créés lui-méme avec assez de justesse pour qu ils soient devenus d’un usage général. Le nom; normand du Pic, VEpé, désigne aussi heureusement que le mot francais un oiseau qui fait des trous dans les arbres (2); le Martinet , ?Hirondelle des fenétres, est un petit oi- seau qui commence & se montrer dans le mois de mars (3), et le nom de Piquerolle convenait fort bien 4 la Rougeole qui couvre la peau de taches rouges, semblables 4 des piqires (4). Quelquefois enfin les patois n’empruntent que V’idée des mots et Pexpriment avec leur propre vocabulaire ; ainsi le nom vulgaire que l’on donne en Normandie a la Préle, Queue de cheval, se retrouve dans le breton Lést marc’h, et tous deux sont une traduction littérale du Jatin Equasetum. «Pour se guider a travers toutes les obscurités qui cachent les origines du vocabulaire et reconnaitre au moins la filiation des mots qui n’ont subi en venant d'une autre langue que des changements d’orthographe, (1) Mais la signification s’en est singuligrement modifiée ; ainsi l'on at- tache plus & Bosche qu’une idée de puanteur, et le Tac qui n’était en vieux-francais qu’une sorte de grippe, est devenu dans le patois normand une maladie extrémement dangercuse ; peut-étre parce qu’on y avait con- servé le mot islandais 7'ak, Pleurésie. (2) La méme idée I’a fait nommer Wood-pecker en anglais et Biche-bou dans le patois lorrain. (3) Le patois de la Meuse Vappelle Maricloé. (4) Le patois lorrain lui donne un nom analogue au francais, Pourperelle . — LXXH — | | il faudrait pouvoir s’appuyer sur un systéme régulier de permutation, et ’on ne trouve dans le patois normand que cette loi, commune a tous les langages usuels, qui subordonne a la commodité de la conversation les sou- venirs étymologiques, et les similitudes de son, par les- quelles Pintelligence se plait 4 marquer la parenté des idées. Ce principe, d’wne variété infinie dans ses appli- cations, n’y a méme jamais eu la puissance dominante quil exerce ordinairement dans les corruptions qui constituent les patois. Le normand s’est formé par le mélange @’ididmes appartenant A des familles aussi dit férentes par les habitudes de la prononciation que par la grammaire, et loin de rendre ses éléments latins en- core plus euphoniques et plus usuels, il leur a souvent donné des articulations plus fortes et plus rudes 4 ’o- reille. On peut cependant tirer de sa comparaison avec le frangais la connaissance de quelques tendances ha- bituelles qui ajoutent 4 la vraisemblance de certaines etymologies ou empéchent imagination de s’égarer & leur poursuite. D’abord, iln’introduit quetrés-rarement de nouvelles lettres dans l’intérieur des mots, si ce n’est dans un but évident d’euphonie, comme pour sé- parer des consonnes que d’anciennes contractions ont accumulées dans la méme syllabe. Au commencement des mots dont la premiére lettre est un s suivi d’une consonne, il ajoute aussi souvent, comme en italien, un E (1). Souvent méme, sans doute pour éviter un con- cours désagréable avec d’autres mots, il fait précéder d’une voyelle simple ou nasalisée des consonnes initiales (1) Hsquelette; Escorpion , comme en vicux-francais , dans Keller , Rom- vart, p. 262. — LXxXIlr — dont Ja prononcialion nexigeait aucun effort (1). Le ronflement du r lui inspire une répugnance marquée. Au commencement des mots il le transpose et en di- minue encore le son en rendant la voyelle plus so- nore (2). Il le rejette aussi 4 la fin des syllabes qui com- mencent par une autre consonne (3) et ne lui donne | aprés un E, alafin des mots, que la valeur d’un accent. Quelquefois enfin il le change en 1 (4), ou le supprime entiérement, surtout devant les liquides (5). Il évite aussi soigneusement le son duc suivi d’un n (6), et par une singuliére coincidence avec italien, il prononce quelquefois ¢. comme un & mouillé (7). Mais, quoique générales, ces régles et celles qu’une étude attentive du patois normand découvrirait encore (8), ne sont point assez constantes pour servir de base certaine a des re- cherches sur l’origine des mots. Les étymologies que nous allons indiquer s’appuyent sur de capricieuses res- semblances que le sentiment de chacun apprécie a sa guise, et n’ont point ce caractére profondément systéma- tique quipeut seul légitimer des prétentions scientifiques. (1) Adouler, Etrichard, Encharger, comme en vieux-francais; Thrésor des récréations, p. 112. (2) Arcondire, Ahauchier , Artrourser. (3) Berdouiller , Bertelle ; Forment, comme en vieux-francais; Cheva- lerie Ogier de Danemarche, v. 3812. (4) Angola, comme dans le patois du Tarn. (5) Abre , Bone, Cone, Mélan , Méle. (6) Enseiner, Sine, (Signature), Vine. (7) Dans le patois de Saint-Lo; Liand, Lianne. (8) Voyez ce que nous avons déja dit, p. un. Au reste, il y a dans chaque localité certaines variantes de prononciation qui lui sont propres. La régu- larité ne peut s’établir que dans une langue d’un usage assez étendu pour que les hasards et les caprices individuels qui exercent une si grande in- fluence dans les petits cercles , soient neutralisés par lV’esprit de la langue et les habitudes générales dela prononciation des masses. — LAxXlyV — Les patois que créa la nécessité d’un langage usuel qui servit d’intermédiaire A des ididmes différents du- rent s’écarter beaucoup plus du latin que la Jangue lit- téraire. Par l’effort des traductions pour se rapprocher de leurs modéles et les doctes préoccupations des clercs , elle en voulait conserver tout ce qui n’était pas con- traire au nouvel esprit dont elle était animée (1), tan- dis que, abandonnés de plus en plus aux derniéres classes du peuple, les patois s’éloignaient insensible- ment deleurs sources latines. L’influence toujours crois- sante du francais put seule neutraliser leurs tendan- ces, ou méme par une foule de mots nouveaux leur don- ner des apparences opposées ; mais quelques faits mal appréciés ne sauraient prévaloir contre le développement naturel des choses. La plupart des mots normands d’o- rigine latine, quisont étrangers au francais , en ont donc disparu aprés une longue désuétude: nous cite- rons entre autres: Affurer, de Furari plutét que d’Au- ferre (2); Agratier, de Gratus (3) ; Alipan, d’ Alapa (4); (1) Elle en conserva d’abord quelques habitudes de syntaxe et méme des flexions qui marquaient les cas , puis elle remplacga par des dérivés du latin un assez grand nombre de mots dont Vorigine était différente, et enfin in- troduisit dans Porthographe des lettres muettes qui n’avaient aucun autre but que de la rapprocher des formes latines. (2) Ce mot existe aussi dans l’argot. (5) Il n’est pas indiqué dans le Dictionnaire de Roquefort, mais on lit dans le Trettie du joli buisson de jonece, par Froissart : Tu ne dois pas escarcyer Ce qui fe poet agracyer. Poésies , page 531. Le frangais moderne Agréer est bien plus éloigné de sa_ racine; on dit aussi en Normandie Rengratier , Remercier, Rendre grace. : (4) On disaif en vieux-francais Alipe. — LXx¥ — Arder, d’ Ardere ; Avios d’ Avis ; Clavette, de Clavis (4) ; Coffin, de Cophinus (2) ; Coger, de Cogere ; Cortine, de Cortina; Courgée, de Corrigia (3); Eduquer, d’ Educare (4); Essiau, d’Exitus ; Grenons, de Crines ; Ilau, VMlic ; In- diter, d’Indicere ; Malon, de Malum (5); Poultre, de Pul- litra; Querir ,de Quaerere ; Raine, de Rana (6). Il en est cependant quelques-uns qui semblent ne lui avoir ja- mais appartenu, au moins d’une maniére générale, comme Aclas, de Claudere (7) ; Aubouffin, d’ Album fa- num ; Avernom, d’ Adversum nomen ; Bacul, de Baculus ; Custos, de Custos (8); Emolenté, de Molitus (9) ; Enouler,, d’Enucleare ; Esiquié, @’Exiguus ; Eterse, d’Extergere ; Itou, d’Ita (10); Lime, de Limes ; Margo, de Merga; Pous, de Pulsum ; Precimé et Princimi, de Proxime ; Queutre, de Culter et Vésonner, de Vesanus (11). D’autres sont (1) Ou peut-étre de Clavus, comme le vieux-francais ; Claviot , qui a la méme origine, n’a pas d’analogue en frangais. (2) Dans le patois de la Meuse, la signification latine s’est mieux con- servée; Coffinotte y siguifie Petit panier. (3) Agourgie signifie, dans le patois de la Meuse, Fouet de charretier. (4) On dit plus souvent Induquer. (5) Malan avait cependant en vieux-francais une signification qui devait se rapprocher beaucoup du normand Malandre. (6) Peut-étre cependant venait-il du celtique, car en breton ef en erse Ran ala méme signification. (7) Sans doute Cloison et Ecluse ont Ja méme origine. (8) Le vieux-frangais Custode avait le sens plus général de Gardien. (9) Le francais donne le méme sens a Moulu. (10) Cette origine nous parait plus vraisemblable que celle qui se ratta-- cherait A anglais Too, car le mot Ifow existe aussi dans le patois du Jura. (11) Ces singuliéres étymologies ne sont poiut particuliéres au patois nor- ‘mand; nous citerons dans le patoisde Reims £grot , Malade, d’Aeger; dans le patois picard Inter, Parmi, d’Inter; dans le patois de la Meuse Hirsu, Velu , de Hirsutus et Marender, Gotter, de Merenda; dans le patois de la Haute-Auvergne Nora, Belle-Fille, de Nurus; Scondre, Cacher, d’Abscon- sve. LXXVI — plus remarquables encore; leurs racines sont passées aussi dans la langue iin int mais elles y ont prig une forme et quelquefois méme une signification différentes: tels sont Ajuster, Joindre, de Juxta; Gani, Moisi, de Canus (1) 5 Canibotte, Tige de chanvre, de Cannabis Cibot, Jeune ognon, de Caepa (2) ; Dépit , Mépris, de Dacyitones (3) ; Ecame, Barridre de cimetiére , de Scam- num (4) ; Gerque, Brebis, de Vervex ; Nila Remuer, de Movere (5) ; Parents, Pare ct mére, de Patni Gen (6); Poigne, Main, de Pugnus ; Quasiment, Presque, de Qua- si.(7) ; Vépe, Guépe, de Vespa et Vi, Gui, de Viscum. Si lon s’en rapportait 4 des témoignages que le dé- dere et Steba, Manche dé charrue, de Stiva ; dans le patois bressan Aura , Vent léger, d’Aura et Ran, Balai, de Ramus dont on avait formé aussi le vieux-francais Ramon ; dans le patois languedocien Aret, Bélier , d’Aries; Douliou, Tonneau, de Dolium: Lus, Merlin, de Lucius et Nessi, Ignorant? de Nescius. Il y a méme des locutions populaires inconnues au fran¢gais, qui Viennent certainement du latin ; telle est, par exemple, Faire avec quel- qu'un, ou Pon reconnait sans peiue le Mecum facere des Romains. (1) Comme nous‘V’avons déja dit, p. txv1, Chenu conserva d’abord en francais le sens du latin ; le patois donne une signification analogue a Canir et a Chancir. (2) Le patois du Languedoc appelle aussi ’Ognon Cebo ; mais le francais en a fait Cive et Ciboule. (5) Le vieux-franeais avait aussi conservé la signification latine : Abia- thar le volt sacrer al Deu despit. Guernes, Vie de Saint-Thomas de vane torbéry, p. 7, V- 25, 6d. deM. Bekker. (4) Eschamel signifiait en vieux-francais Marche-pied ; l’Ecame est assez basse pour qu’on puisse passer facilement passer par dessus et Yon y arrive ordinairement per deux ou trois marches. . (5) Il se trouve aussi dans le patois de Reims ; le francais Hmouvoir ne s’emploie qu’au moral. (6) Il est bizarre que le patois normand lui ait conservé sa signification littéraire, et qu’il ait pris dans le fr ancais lettré, le sens de Proches que lui donnait la populace romaine. (7) Le patois a ajouté au francais la finale mené qui est la forme habituelle des adverbes. — LXxvll — dain des Anciens pour l’étude des langues étrangéres rend bien suspects, il n’aurait existé dans les Gaules que trois ididmes ; mais lors méme que tous les langa- ses particuliers eussent pu réellement y étre ramenés 4 trois grandes familles, dinnombrables différences se seraient introduites dans le vocabulaire, Il faut aux langues, pour conserver leur unilé, un centre politique qui relie toutes les localités ensemble et propage les mémes habitudes de pensée, une littérature que la connaissance générale de Vécriture conserve dans toute sa pureté, ou des livres religieux dont le culte remette chaque jour le texte en mémoire; et, maleré les obscurités qui enveloppent Vhistoire primitive des Gaules, nous savons que toutes ces conditions y étaient également impossibles. Hi n’y avait donc pas, a propre- prement parler, de langue celtique ou gauloise , mais une foule de dialectes, dont l'ancien caractére avait , selon les lieux, subi des modifications plus ou moins profondes, et quis’étaient grossies de toutes lesnouvelles expressions que le développement des idées , le hasard ou le caprice y avait importées. Les mots dorigine cel- tique, que le patois normand a gardés, viennent ainsi certainement de plusieurs dialectes, qui ont disparu depuis des siécles sans laisser aucune autre trace de -Jeur existence. Beaucoup d’étymologies que, sur la foi de quelques ressemblances fortuites, on croit trouver dans d’autres ididmes, appartiennent done probable- ment aux langues celtiques, et la part qui leur revient, au moins dans la formation des patois, a di étre singu- liérement amoindrie. Le breton seul peut fournir encore — LXXVI quelques données incontestables, et nous indiquerons un certain nombre de mots étrangers aux autres lan- cues, dont une évidente analogie avec ses radicaux rend Vorigine suffia mment vraisemblable (1). Agonir d’An- kenia, Chagriner (2) ; Amarer d’ Amar, Chaine, Cable (3); Beton de Beol (4) ; Béle de Beler, Cresson ; Bibet de Fibu ; Boucan de Bouc’h , Voix (3) ; Bouzin de Bouc’hou ; Bouzare, Rendre sourd (6) ; Bragues de Braguez; Brande Brenn (7); Branes de Brennid ; Braver de Brav, Beau, Agréable (8) ; Brehain de Brechan (9) ; Bruchet de Bru- (1) Il ne peut s’agir que de vraisemblance ; car nous sommes loin de con- naitre tous les anciens mots saxons et normands, et ’on ne saurait douter que le vocabulaire breton ne se soit encore enrichi, a des dates assez ré- centes , d’un grand nombre de mots appartenant aux langues avec les- quelles il s'est trouvé en contact. Beaucoup d’anciens mots en ont égale- ment disparu, et nous ne pouvons citer souvent que des dérivés qui n’ont avec les mots normands que des rapports d’crigine. _ (2) Comme le son nasal était particulier aux langues celtiques, 1’a au- rait perdu facilement sa nasalisation en passant dans le patois normand ; peut-étre est-ce arrivé aussi pour le francais Agonie, en breton Ankou. Ce mot peut étre aussi une corruption par euphonie @’Ahonir. (3) C’est aussi sans doute l’origine du francais Démarer. (4) Nous n’indiquons la signification du breton que lorsqu’elle aimere de celle du normand. (5) En gallois Buciad signifie Beuglement ; le sens primitif était donc probablement Bruit, Tapage, et l’origine de Boucaner, Bougonner et Bouzin se rattache sans doute au méme radical. Boucan a la méme signification dans le patois de Nancy. (6) Voyez la note précédente. _ (7) C’estun de ces mots, en trés-petit nombre, qui se retrouvent sans aucun changement en gallique, en erse et en irlandais; Pline cite déja comme usité dans les Gaules Brance ; Historiae naturaiis 1. Xv, ch. 7. (8) Une acception semblable existe cependant en italien, et le francais la lui a empruntée dans l’expression Air de bravoure. A Nancy, Brauve signi- fie aussi Bien habillé. (9) On trouve encore maintenant en anglais Barren, autrefois Bareyne : Wilow-tree : Hit is sayd that the sede therof is of this vertue » that ifa ~~ LAs = ched; Bunce de Buanek , Vif, Emporté ; Cabus de Kab , Téte (1); Campagne de Kompezen; Carre de Ker; Canne de Kawnen (2); Canter de Cant, Cété (3); Castille de Kastiz , Correction, Punition (4); Cauvette de Kavan; Chatel de Chatal, Bétail; Chéret de Kerr ; Choaine de Choanen (5); Cloquer de Cloc’hevez , Gloussement de la poule qui appelle ses petits; Cowline de Goulacen , Lu- minaire ; Darne de Darn; Décrouer de Krouga, Pendre ; Dégraviner de Krafina, Eeratigner (6); Dehait de Déhet; Déluré de Luréek, Paresseux ; Doui de Dour , Eau (7) ; Dramer de Dramm, Poignée de verges; Ebaubir d’ Abatfi (8) ; Etriver de Striva (9) ; Fourgoter de Fourgasa, Agi- man drynke of it, he shall gete no sones, but only bareyne doughters ; Ber- tholomeus , De proprietatibus rerum, fol. 236. (1) Un mot semblable existe dans les langues germaniques, en allemand Kopf, en flamand Kop, etc. ; mais l’erse Cabaisd, Virlandais Cabais/e et Panglais Cabbage nous paraissent rendre une origine celtique plus vrai- semblable. (2) Vaisseau & contenir le blé ; le gallique, Verse et irlandais se rappro- chent beaucoup plus du normand ; Cann y signifie Vaisseau ; Kanna a le méme sens en islandais. (5) C’est encore un de ces mots que Von peut également rapporter aux langues celtiques et teutoniques ; K ant a la méme signification en islandais qu’en breton. , (4) Par une de ces circonstances extraordinaires qui jettent tant d’incer- titudes dans histoire des langues, le fran¢ais Chdtiment est beaucoup plus rapproché de la signification du breton que le vieux-frangais Castoiement, Avertissement, Lecon. (5) Peut-étre cependant ce mot vient-il du latin Canonicus ; voyez Varti- cle que nous lui avons consacré dans le Dictionnaire. (6) Ce mot pourrait aussi avoir été formé de Gravier et signifier Faire tomber le sable : le vieux-frangais Degravoier rend méme cette étymologie plus probable. (7) Ou Dowez, Fossé plein d’eau ; voyez Varticle du Dictionnaire. (8) Peut-étre Rendre baube. (9) On écrivait en vieux francais Estriver. — LXxx — ter , Remuer ; Freuler, de Frel, Fléau ; Gadolier de Gadal ; Gorot de Gor; Goudper de Goapaer; Gouine de Gouhin ; Graffiner de Krafina ; Grigne de Krina, Ronger avec les _ dents (4); Grigner de Grinouz, Hargneux , Querelleur ; Gronée de Groun, Amas, Réunion; Guermenter de Garm, Cri, Plainte (2); Guezette de Gwez, Sauvage, Grossier; Hagues de Higan ; Haiter de Heta; Haqueter de Hakein ; Bredouiller (3); Héguir de Heugi; Heudes de Heid ; Heuse de Heuz; Houdri de Hudur , Sale; Houler de Houlier, Agent de débauche; Hucher de Joucha ; Jaffe de Javedad ; Jaleé de Jala, Impatienter (4); Jarausse de Jarons (5); Jojo de Jo; Landorer de Landar, Pares- seux (6); Lanfais de Lanfez; Locher de Loc’ha; Lousse de Lou; Marga du celtique Marga , Marne (7); Margane de Morgaden ; Mehaigner de Mec’hana , Mutiler ; Met de Met; Mucher de Mouc’ha, Se masquer ; No de Noad (8); Oche d’Ask (9) ; Pinger, Poncer et Pucher, de Punsa , Ti- rer.de Peau; Tabut de Tabut ; Tewrgue de Torchad (10); (i) C’est aussi sans doufe lorigine du francais Grignotter. (2) Legonidec ne le donne pas dans son Dictionnaire, mais il se trouve aussi en gallique. (3) Haquier a leméme sens dans le patois des Vosges. (4) Peut-étre aussi de l’islandais Juda, Pousser des vagissements. (3) On dit aussi Arrousse; le latin Jarrossia et Pespagnol Algarova ont sans doute la méme origine, quoique l’article arabe al semble indiquer une &étymologie orientale. (6) Il peut venir aussi de Vislandais Lenda, Rester fiché a une place. (7) Ce mot nous a été conservé par Pline, Hisloriae naturalis 1. xvu, ch. 6. (8) Nous yrattachons No plutét qu’a Naoz, car on trouve dans le bas-latin Noda, avec la signification de Ruisseau. | (9) L’O se retrouve dans le basque Ozca, le provencal Osko et le francais Décocher et Encocher. (10) Dans le patois picard, Terchier signifie Lier, Entourer d’une ¢eur- quetie : Eti doit-estre mes serjans tant c’on ara tot soie et terchie as cous — LXXXI — Tondre de Tundre (1) ; Toguet de Tok; Treuil du gallique Troell (2); Varou de Garo, Féroce , qui a conservé sa forme primitive dans Loup-garou. Sans pouvoir donner 4 ces inductions une base positive, on doit aussi regar- der comme celtiques les mots inconnus aux autres idiémes européens , qui se trouvent dans un patois dif- férent , assez éloigné de la Normandie pour en rendre Yemprunt bien peu probable. Mais tant de hasards in- fluent sur le vocabulaire des langues cantonnées dans un petit territoire (3), que ces étymologies sont encore plus incertaines que les autres, et nous nous bornerons 4 en indiquer quelques-unes, auxquelles un usage moins restreint et la nature des idées et des sons ajou- tent une nouvelle vraisemblance : Agalis et Agobilles, en rouchi; Arias, dans la Meuse, dans la Haute-Auvergne Harias (4); Bourre, dans Ja Lorraine ct la Franche- 7 de VPabeie; Charte de 1257 publiée par M. Le Roux de Lincy, Livres des Rois, intr. Pp LXxXil. i (1) Peut-étre cependant vi nt-il de Vislandais Tundr, Allumer, ou méme du latin Zxtundere, Faire sortir Ante diem Paschae vetus aple extinguitur ignis Et novus e silicum venis extunditur. Nao,eorgus, Regni papistici l. tv, p. 149, éd. de 1553. (2) Ce mot semble perdu en breton ; mais il appartenait certainement aux langues celtiques, puisqw’il n’est pas isolé en gallique et qu’on y trouve aussi Treilliaw. Tourner, et 7roelli, Tourner comme une roue. (5) Nous en citerons un exemple frappant ; quoique la position du Jura au milieu des terres y empéche le peuple de connaitre les Poulpes de mer, qui se nomment en Normandie Satrowille , on y appelle par une métaphore évidente les femmes malpropres des Sadrouilles. (4) Hairii signifie Empécher dans le patois lorrain, et le vieux-frangais donnait un sens analogue a Harier : Nous sommes mors, ame ne nous harie. Villon, Guvres , p. 308. > nig ain. LR Comté (1); Chiboller, dans le patois des Vosges Quibau- ler, Renverser ; Crane, dans le patois de Nancy ; Croen , dans V’Isére Croei, Fruit vermoulu ; Dru, le vieux pro- vencal Drut se prenait dans toutes ses acceptions ; Ecourre, en Romanche, dans la Meurthe, le Jura, VIsere et la Bresse (2); Froe, dans le patois de Nancy Froux ; Gade, en Languedoc Gadde, et dans la Vendée Jede ; Gambier, dans les patois du Berry et du Jura Gamby , Boiteux ; Guigner, dans la Haute-Auvergne Guigna, Re- earder de travers (3); Margoulette, a Reims le Bas du visage , dans la Meuse Bouche dun enfant; Randonner, en provengal Randar, Arranger, Preparer ; Ratatouille , dans la Bresse Talouza , Ragotit ; le patois du Berry hui donne le méme sens qu’en Normandie. On retrouve aussi, dans la basse-latinité, quelques mots cont Lo- (4) El y ai enne fontaine a moitan , Tra bourres bianches y vant baignant. Dans Fallot , Recherches sur le patois de Fr anche-Comté, p. 129. Ce mot existait aussi en ,vieux-franca's ; un dictionnaire frangais-latin , conservé a la bibliotheque dv Conches , dont ’écriture est du X{Ve siécle, Vexplique par Anas et l’on trouve assez souvent dans la basse-latinité Bou- reia. (2) Lo mouyin de bin dinno Quan lo blo N’ét écou ne mayssonu. Noéls bressans , p. 49. Le sens primitif était sans doute Batre le blé ainsi que dans la plupart des patois, comme le prouvent le normand /coussin et le vieux-francais Escoussour , Fléan; il ne s’est changé en Secowr qne parce qu ‘autrefois on battait le bié en le secowant : le peuple Vemploie méme encore avec la signification de Battre. Malgré le latin Sewccufere, nous regardons ainsi une ‘origine celtique comme fort probable. (5) Guin avait un sens analegue en vieux: francais : Je donne 4 quelqu’an un guin Wail. Villon. Guvres, p. 444. Peut-étre cependant vient-il de Vallemand Wirken , comme Guincher. — LXXXIII ~- rigine semble celtiquc, tels que Bronchious , Brucus (4); Calenger, Calengia; Carabas , Carabaga ; Dacer, Datare ; Deumet , Duma; Chauvir, Calvere ; Cher, Cherium ; etc. La plupart de ces mots ont, ainsi qu’on le voit , un sens fort restreint ou une signification peu usuelle, et n’ont di qu’a cette circonstance exceptionnelle de n’avoir pas été remplacés par des synonymes étrangers. La langue i laquelle ils appartenaient est tombée graduellement en désuétude, et, comme ils n’affectionnent aucune série particuliére d’idées et se rapportent indifférem- ment a tout ce qui fixe Pattention dun peuple, on y reconnait les derniers restes de Pidiéme , que les au- tres langues ont successivement recouvert d’une couche plus ou moins épaisse (2). Cette disparition presque compléte du celtique suf- firait déja pour empécher d’apprécier avec exactitude influence que le norse exer¢a sur la formation du pa- tois normand. Sans doute on s’est trompé en regardant comme teutoniques les anciens idiémes usités dans les Gaules ; les noms géographiques qu’y donnérent les pre- miers habitants et les documents philologiques que peuvent encore fournir les différents patois, repoussent également cette croyance. Une preuve positive de sa fausseté se trouverait méme au besoin dans le Roman de:-Brut ; Wace, qui, ainsi que tous les poétes francais du XII* siécle, se bornait 4 rimer des traditions popu- (1) Broncheux dans le Dictionnaire latin-francais du XV® siécle: Ms. de la Bibliothéque de Lille, E, 36. (2) Nous ne parlons pas ici des anciens mots celtiques qui sont entrés dans la langue francaise ; c’est parce qu’ils ne sont plus celtiques que le patois les a conseryés. . — LXXXIV — laires, disait sans craindre de heurter un souvenir his- torique : ) Redic li respondi premiers : Brez est, si fu bons latiniers : Ce fu li premiers des Bretons Qui sot le langaige as Sessons (1). Mais il n’en faut pas moins reconnaitre que ces deux familles de langues ont leur berceau dans Orient et durent a cette communauté d’origine de nombreux rap- ports dont il n’est plus possible de pressentir Pétendue. En vain done beaucoup de mots normands auraient-ls encore un sens analogue dans les idiémes germaniques, leurs racines pourraient avoir existe aussi en celtique ; et, dans le doute, il ne serait plus permis d’en rien con- clure. D’ailleurs, l'histoire des langues tewtoniques nous apprend qu’une partie considérable de leur vocabulaire est tombée en désuétude, et la grande rareté des monu- ments de l’époque payenne autorise a croire que tous les mots apportés en France n’ont point laisse de trace dans leur premiére patrie. Peut-étre méme deyons-nous aux persévérantes recherches d’un de nos plus savants compatriotes de pouvoir en citer un dorigine scan- dinave qu’on employait encore en Normandie dans la seconde moitié du XI* siécle, et qu’aucune lan- sue germanique n’a conserve dans son vocabulaire : Tamen in eis dedi piscationem quae vulgo dicitur Crot- gnim (2). Au reste, malgré les incertitudes dont cette « (1) V. 7119. (2) Charte de 1060, citée par M. Auguste Le Prevost dans le curieux ouvrage qu'il va publier sous le titre beaucoup trop modeste de Notes pour servir @ la topographic et a Vhisto're des Communes du déparie- m-— LXXXV -—— connaissance si incomplete des anciennes langues et la nature des choses obscurcissent l’étymologie la plus cer- taine en apparence, l’influence des hommes du Nord sur le patois normand est écrite clairement dans les moeurs, les usages et quelques locutions trop bizarres pour ne pas étre fort significatives. Ainsi l'on compte encore en Normandie par Si« vingt (A), et Pon y dit Anuié au hea d@’ Aujourd hui (2) ; le conscrit qui tire un mauvais billet ale Sort, et enislandais ce mot signifie Now (3); Vhomme que l'on méprise est un Homme de rien, et les anciens Scandinaves appelaient aussi Nithingh la personne chas- sée d’ une guilde (4) ; les demoiselles nobles sont comme en Allemagne des Filles de condition (5) ; on échange des ment de UEure. Nous avons déja fait remarquer, dans les Prolégoménes de notre Histoire de la poésie scandinave , que la plupart des termes de mirine et de péche étaient , méme en franeais , dérivés de la langue norse. (1) C’est ce que les Scandinaves appelaient Storrhundrade, Le grand cent; en vieux-fran¢ais on comptait aussi quelquefois par vingt: A set vint homes sen puct huimais partir. Raoul de Cambray , p. 136, ¥. 9. Sil t'en donnoit deux vingtz, A tout le moins tu prendroys cela. Farce nouvelle des deux savetiers. (2) On comptait dans tout le Nord par nui/s et non par jours : Nec die- rum numerum ut nos, sed noctium computant; Tacite, De moribus Ger- manorum. Mais si cetie analogie était seule , on n’en pourrait rien conclure, puisque les Gaulois avaient le méme usage ; voyez Caesar , De bello gallico, 1. vi. (3) Il avait méme conservé son ancienn: signification en vieux-frangais : Sur un cheval sist qui fu sors. Benois, Chronique rimée, |. 11, Vv. 3858. Par opposition , on appelle les bons billets des billets blancs. (4) Loi du roi Eric, art. 1v, dans Kofod Ancher, Om gamle danske Gilder og deres Undergung , piéces justificatives. (5) Von Sfand ; on y appelle aussi son mari, Mon homme , Mein Mann. — ree ERAN or anneaux le jour de ses fiancailles (4); un coup frappé dans la main marque la conclusion d’un marché (2), et le Trefeu ou biche de Noél est un souvenir du feu d’Yulé, qui se retrouve en Italie (3), en Angleterre (4) et dans tous les pays oi les hommes du Nord se sont établis avant leur conversion au christianisme (5). L’islandais est celui de tous les anciens dialectes bas-allemands qui s’est le mieux conservé: l’anglo- saxon est certainement mélé d’une foule de mots d’o- rigine bretonne et latine, et les documents en saxon, en francique et en vieux-frison que nous possédons encore ne sont pas assez étendus pour nous permetire d’en reconstituer le vocabulaire. Dans Pimpossibilité de recourir a d’autres sources, nous avons done indiqué, comme dérivés de V’islandais, des mots qui maleré V'in- fluence prépondérante des pirates danois, purent avoir une origine saxonne ou francique: Abéler , de Beita , Nourriture ; Acauchier, de Kalsa ; Acclamper, de Klampi, Cheville; Accravanter, d’ At krabba, Mettre en désordre; ( (1) Saman hofum brenda bauga I Balidurs haga largtha. Friththiofesaga, ch. vt. (2) Crest ce qu’on appelait dans la basse-latinité (H)andelangum : Per hance chartulam libelli dotis, sive per festucam atque per andelangum ; dans dom Bouquet, Recueil des historiens de’ France, t. 1v, p. 555. (3) Sciocch de Natal. Si chiama cosi fra noi un ciocco o ceppo il pin grosso, che mettesi da banda per brucciare il di di Natale ; Cherubini, Di- zionario minalese, s. Vv. ScioccH. (4) On l’y appelle Yule-Clog et Christmas-Block. Voyez Herrick, Hespe- vides, p. 309; Brand , Popular antiquities, t.1, p. 254-258, éd. de M. Ellis; etc. (5) Mémoires de l’Académie celtique, t. u1, p. 441; Cherubini, Dizio- nario milanese, loc. laud., et Thiers, Traité des superstitions, t. 1, p. 523. —— LXXXVII — Adous, @At dubba, Orner ; Affource, de Fodr, Nourri- ture du bétail; Affribourdi, d’Afred, Gelé et Burda, Violence ; Agoucer, de Gussa, Parler légérement; Agrap, de Greipa, Prendre ; Ayroussé, d’At krusa , Attrister ; Aingue, d’Aungul ; Alise, de Leysa, Vide, Creux (4) ; Amigraner , de Hamaz, Devenir et Grana, Excellent; Ar?, de Har, Elévation; Arodiver, d’At reida, Mettre en colére; Astiquer, @ At staga, Revenir a la charge ; Afori, de Torr, GAté ; Auluer, de Aulaz; Bade, de Bada, Se baigner ; Ba- goul, de Baga, Mauvais vers (2) ; Bar, de Bera, Porter (3)5 Bartous, de Barata, Combat ; Béditre, de Bedr ; Boel, de Bol, Habitation ; Bisquer, de Beiskiaz, Rager ; Broe, de Fraud (4) ; Bru, de Brud; Buret, de Bud, Habitation (5); Cachard, de Kaka, Toucher du bout des doigts ; Caille, de Kal, Tache ; Calard, de Kalinn, Malade ; Cambot, do Kampi, Quia peu de barbe ; Capon, de Kapun, Cha- pon ; Capucher, de Keppa ; Cas, de Casa, Amasser ; Gas- setier, de Kassi, Petit écrin ; Chiper, de Kippa, Dero- ber ; Clanche, de Klinka ; Cline, de Clini, Salir ; Cofn, de Kot; Cranche, de Krank (6); Crépir, de Kreppa; Dale, de Dal ; Doure, de Diup, Profond ; Drugir, de Draugaz; (1) Une origine celtique n’est pas non plus impossible puisque Leys si- gnifie encore en breton Moite, Humide. (2) Peut-étre aussi le radical du francais Bagatelle. (3) C’est sans doute aussi ’étymologie de Bariée ou Barateée. (4) Les autres langues germaniques avaient sans doute des mots qui s’en rapprochaient davantage , car Brauen signifie en a'lemand Ecumer. (5) Il avait conservé sa premiére signification dans Bur-le-Roi, pres de Bayeux, et Bures pres de Neufchatel. (6) Dans le patois de Nancy , Cranqua, qui est aussi certainement dérivé d’un mot germanique , se prend dans une signification dont on s’explique trés-bien la différence ; il signific Mourir. — LXXxvIlI — Ecaucher, de Skaka; Elinguer, de Slengia ; Esprangner, de Sprengia ; Estamper, de Stappa ; Fignoler , de Finn , Beau ; Finer, de Finna ; Flaner, de Flanni, Libertin ; Flaquin, de Flak, Surface plate ; Flio, Flo, de Flock; Floquer, de Floekiaz ; Gable, de Gafl ; Galapian, de Ga- lapin ; Gales, de Gala, Se réjouir (1) ; Gz/fe, de Kif, Que- relle ; Gilloire, de Gilia, Lancer de l’eau ; Glas, de Glad, Joyeux ; Gloute, de Glata, Perdre ; Gravé, de Grafa, Trouer ; Grimer, de Grem, Blesser ; Grison, de Griot, — Pierre (2) ; Groin, de Groin, Verdoyant ; Groler, de Krulla, S’agiter (3) ; Hair, de Har; Hati, de Hat ; Haule, de Hol (4) ; Havron, de Hafrar ; Heri, de Heri ; Hogue, de Haug ; Hubi, d’Ybinn ; Inele, de Sniall (5); Jacasser, de Jage, Jargon ; Lague, de Lag, Ordre (6); Leican, de Leikinn, Qui passe son temps a jouer ; Lelice, de Leeda, Fantéme; Lider, de Lida ; Lite, de Litt, Mauvais; Lou- rer, de Lur, Faiblesse ; Mattes, de Mat, Aliment ; Na- pin, de Knapi; Naqueter, de Gnaka, Rendre un bruit aigu; Ohi, d’Oheill, Valétudinaire ; Peuffre, de Pelfr, Dépouille ; Pougue, de Poki; Quenottes, de Kenni, Ma- (1) C’est aussi la racine du francais Gala et Régaler. (2) Le frangais Grés semble avoir la méme origine. (5) Il avait conservé son sens primitif dans le vieux-francais Croller , Grouiller et peut-étre Grelotier. (4) Dans des glosses allemandes du VIIIe siécle, faussement attribuées a Kero, on trouve Holi avec la méme signification ; dans Graff, Althochdeut- sche Sprachschatze, t. 1, p. XLiv- (5) Il semble plutét venir du vieil-allemand Snel, mais on trouve dans le Voyage de Charlemagne, v. 613: ceo Puis serrai si Jegers e ignals e ates : et probablemeut le ¢ indique ici seulement que le son du n était mouillé. (6) Le patois normand prend aussi le mot francais dans l’acception d’Es- péce , Qualité. — LXXXIX — choires ; Raguin, de Hrok, Insolent (1); Ravenel, de Ha- _ fan, Prendre ; Refaire, de Refiaz ; Tac, de Tak, Pleu- résie ; Trouss¢é, de Truss, Paquet ; Trumutu de Thrumu, Tonnerre, Combat ; Vatre, de Vatn, Eau (2). Il nous ett été facile d’augmenter cette liste de plu- sjours mots ; mais leur étymologie nous parait plus dou- teuse, ct nous avons préféeré en citer quelques-uns dont Ja racine a disparu de l’islandais et s'est conservée dans d’autres ididmes germaniques : Ableter, du sothique Able- tan (3) ; Abrier, du vieil-allemand Adbirihan, Couvrir ; Affray, du vieil-allemand Kiver (4); Agasse, de Valle- mand Agaza; Agohee, du vieil-allemand Gouh, Moque- rie; Agrifer, du vieil-allemand Greifen (5); Ahonir, du vicil-allemand Hon, Honte; Argaigne, de allemand Arg, Méchant (6) ; Aramie, du vieil-allemand Ramen, Affirmer ; Averlant, de Vallemand Haverling ; Benom, de Pallemand Beiname ; Bougues, de l’anglo-saxon Bog, Marais et par suite terre mouvante ; Brasillé, de Valle- mand Brezel, Patisserie qui craque sous les dents (7) 5 * (1) C’est aussi la racine du francais Rogue. (2) Par une euphonie fort commune, on a changé le n enn; cest en allemand Wasser et en anglais Water. C’est probablement aussi la racine,de _ Vautrer ; dans le patois normand Vatre, signifie Mouillé, Sali. 2 49) mir yf (5) Le normand Ini a seulement donné un sens réfiéchi. (4) Le francais Affres a wieux conservé la prononciation de Vallemand ; c’est ce qui nous a empéché d’y voir une corruption VE ffroi , que Yon pro- nonce en Normandie Effrai. ' (5) Peut-étre cependant est-ce une métaphore et signifie-t-il litiéra'ement Prendre avec des griffes. . (6) Le vieux frangais disait Argu et le normand en a formé le verbe Zr- juer, en al'emand Aergern; comme on voit, Pa y avait pris aussi le son dune. (7) De Braten, Rotir , Rissoler ; une autre étymo'ogie est indiquée, comme , possible, dans le Dictionnaire. Cami ce Chipoter,dusaxon Cyppan; Delle, deVallemand Theil (1); Feliche, du vieil-allemand Slizzan, Mettre en piéces (2); Fiee, de Yallemand Viele, Beaucoup ; Frioler , du go- thique Friks, Désireux, Avide ; Gamaches, de Vallemand Kamaschen ; Gaut, du saxon Wald (3); Girte, de Palle- mand Ziererey, Minauderie (4) ; Guincher, de Vallemand Winken, Faire des signes avec les yeux; Han, du vieil- allemand Han ; Houter, du saxon Haten ; Houve, du vieil- allemand Houvva; Hut, du saxon Heet ; Licher, de Val- lemand Lecker, Friand ; Lousse, de Vallemand Liigen, dont le patois rhénan a fait Lus, Ruse, Artifice; Moisson, de Pallemand Mez; Namps, du saxon Nam, Gage (5), ou plutét Namfeoh, Bétail qui sert de gage ; Ram, du vieil-allemand Ramma ; Tar, de Pallemand Theer (6). Langlais pourrait aussi nous fournir beaucoup de mots qui se retrouvent presque sans aucun changement dans le patois normand, comme Beillée, Belly ; Chope, Yo chop; Choquet, en vieil-anglais Coket (7); Clinque, To clink ; Craniere, Granny ; Criquet, Cricket; Dréchier, To dress; Ebe, Ebb (8); Gounelle, Gown (9); Granter, To (1) Le ra se changeait habifuellement en p, comme tous. les philologues allemands l’ont remarqué ; anglais Deale en est un autre exemple. (2) Le francais Eclisse ala méme origine. | (3) Ev vieux francais Gwal¢ ; une origine celtique ve serait pas impossible, si Altaserra avait eu quelque raison pour dire dans son Rerum aquitanica- rum etc., p. 434: Bagaudae dicti quasi Sylvicolae; Gau enim lingua gallica Sylvam sonat. (4) Il peut venir aussi du latin Girare. (5) Le francais Nantir a la méme origine. _ (6) En vieux-frangais Terque. (7) Coketa en bas-latin’, Vase servant de mesure. (8) En danois Fbbe. | (9) En italien Gonna. ae GE eer srent ; Harer, To hare ; Picot, Peacock ; Reluquer, To look ; Remembrer, To remember ; Super, To sup; Vim- blet, Wimble ; Viquet, Vicket. Mais, lors méme que ces mots n’auraient pas une origine saxonne indépendante, ik faudrait, pour en rien conclure, savoir s ils ont été appor- tés en Angleterre dans le X° siécle, ou en Normandie pendantle XIV*, L’occupation incompléte des Anglais y souleva d’ailleurs des répugnances trop eénérales pour qu’ils en aient modifié sensiblement le patois (4), et une foule de proverbes communs , qui se retrouvent dans les autres parties de Ja France (2), rend Vinfluence normande bien plus vraisemblable. On doit sans doute lui attribuer aussi beaucoup didiotismes que les gram- mairiens s’accordent a regarder comme purement an- glais : telle est par exemple la construction du verbe substantif avec le participe present. Benois disait dans sa Chronique rimeée : Le noble gentil damisel Si plout a toz, ¢ lor fut bel Qué. a Roém fust sejornanz (3). (1) La pronone’ation fermée de V’a rest pas cerlainement d’origine an- glaise, puisque dans une foule de mots francais dérivés du latin, i! a pris le son del’a; Aimer, Pere, Mere, Faire, etc. (2) He cut the grass from under his foot; He ts as poor as a church mouse ; Look for a needle in a bundle of hay ; Love me, love my dog ; There is not a pin to chuse between *eom; etc. Ce mest pas seulement , comme on voit , ’idée qui est la meme ; de telles analogies se retrouvent trop souvent ehtre des peuples sans aucun rapport historique ensemble , pour qwil y edt rien aen conclure ; mais expression est identique dans les deux Jangues. Quelquefois méme la phrase proverbiale a été employée dans un autre sens ; ainsi To ride the great horse se dit du sty'e et non de Phu- meur. (3) L. nt, Vv. 12745. ee ED ire La tournure si bizarre par laquelle les Anglais se de- mandent des nouvelles de leur santé, semble elle-méme d’origine normande, puisqu’on lit dans le Lai de Ha- velok : Il lt demandent de lur pere Et comment le fesoit leur mere. Quelques noms géographiques pourraient seuls in- spirer des doutes ; mais tant de hasards influent sur leur choix que des inductions auxquelles manque toute autre base, sont nécessairement bien suspectes; ainsi , par exemple, James, la traduction anglaise de Jacobus, s’é- loigne trop capricieusement du latin pour qu’on ne soit pas tenté d’y voir un nom importé d’ Angleterre, et Be- nois parlait déja, dans le XII* siecle, de Saint-James- de-Bevron (1). . Il serait facile de trouver , dans le vocabulaire de plusieurs autres langues, des analogies aussi frappan- tes; mais, lors méme que les ididmes qui ont concouru 4 la formation du patois normand nous seraient com- plétement connus, on ne pourrait rien conclure d’une ressemblance de mots qui ne s’appuie pas sur les rap- ports historiques des peuples. Nous n’indiquerons donc donc aucune étymologie arabe: (2), hébraique (3), ni méme espagnole (4). Si les ressemblances mateérielles , (1) L. u, v. 15401. (2) Attifer semble venir de Thiphé, dont la signification est la méme. (3) Aré semble venir de Haré; Caler, de Cala, Cesser (ou du grec Xahaos, Céder), Chamailler, de Chamah, Dispute ; Crac, de Crac, Pierre; Machu- rer, de Maccah, Blessure. (4) Quelques mots comme Arrousse (Jarrossia en has-latin, oer en espagnol) Blé chico (Chico, Petit), Pagnolée (Tréfle d' Espagne) montrent — XClil — qui paraitraient les légitimer, n’étaient pas un de ces jeux du hasard que Videntité des organes de la voix dut rendre bien nombreux , elles tiendraient 4 des rap- ports communs avec une autre ididme qui aurait servi Vintermédiaire. Peut-étre seulement devrait-on faire une exception pour quelques mots dérivés du grec, comme Apeur, d’Anopra, Circonstances embarrassantes ; Bragues, de Boaxes (1); Cabot, de Kaos; Cacouard, de Kaos (2); Calin, de Kates, Bon, Doux, ou de Kadivdecy, Etre assidu: Cortil, de Xoptes (3); Dia, de Ata; Foinillard, de Devices, Meurtrier ; Gaurer, de Taupes, Orgueilleux ; Gobelin, de KoSahes (4) 5 Lobet, de Aces; Pion, de Hwa, Boire ; Tayon, de Qztes (5); Trémaine, de Tprpnvatos ; Triques-niques , de Tpryoy verxos , Dispute pour des che- veux (6). Le grec resta longtemps usuel a Marseille (7); il le devint & Lyon pendant le I siécle (8), et nous que VEspagne ne fut pas sans influence sur Pagriculture normande ; mais nous ne croyons pas que Charer vienne de Charlar, ni Vousoyer de Vosear. (1) Nous avons déja indiqué comme possible une origine celtique ; dans le patois du Tarn qui fut plus soumis & liniluence grecque, on dit Bragos. (2) Dans le patois Jorrain Cacozéle signifie Zéle mau vais, indiscret, et Ca- cou est un mot injurieux en Basse-Bretagne. (3) Ce mot pourrait venir également du latin Horlus, ou du vieil-allemand Cartin ; en provengal on disait aussi Cortil et le patois limousin Va con- servé. (4) En allemand Kobold et en breton Gobilin. (5) Oncle ; il y a une liaison semblable entre le latin Avus et Avunculus. (6) Les autres patois o.t aussi conservé quelques mots qui semblent d’o- rigine grecque; tels sont dans le patois de la Meuse Gouri , Cochon, de Xorgog et dans le patvis picard, Iki, La, d’Kxer et Ecaras, Echalas , de Xapaé. (7) Saint-Jéréme , Opera , t. 1v, p. 254; Suétone, De claris rhetoribus , ch. 1; Strabon, Géographie, liv, p. 124 eb 125, éd. de 1587. (8) Saint Irénée s’en servait pour combattre ies hérésies répandues dan. — xcIV — savons , par la Vie de saint Césaire, qu’on l’entendait encore pendant le Vi° dans toute lancienne Narbon- naise (1). L’établissement des colonies phocéennes dans la Provence ne fut point la seule cause de son influence; les Romains lettrés en portaient partout la connaissance avec eux, et Cicéron disait, dans son discours pour le poéte Archias : « Graeca leguntur in omnibus fere gen- tibus; latina suis finibus , exiguis sane, continentur. » Quelques-uns des mots grecs qui sont passés dans le patoisnormand, semblent mémeavoir toujours été étran- gers au provencal et aux autres dialectes intermédiaires. Un fait plus significatif encore, c'est que Vargot a con- servé des mots quwil est difficile de ne pas croire dérivés du grec : tels que Affre, Vie, de ®pnv, Esprit; Arton, Pain , d’Aptos; Esganacer, Rire, de Paves, Joie (2). Quoique les envahissements continus du frangais aient, depuis quelques années surtout, singulierement réduit le vocabulaire normand , peut-étre une connais- sance exacte de tous les mots nous ett-elle permis de remonter plus stirement a ses sources. Mais il est _ peu de villages qui n’aient des expressions, sinon en- tiérement inconnues aux autres, au moins sensiblement modifiées dans leur prononciation ou dans leur valeur; et si on avait déja cherché a les recueillir d’une ma- son diocese ; il dit méme en termes positifs qu’il écrivait dans la langue du pays: AttAws nar &Andas xnae idvatenwe ; préf., p. 4,éd. de Grabe. (1) Caesarii vita,lib.1, par.14; Compulit ut..... instar clericorum, alii graece, alii latine, presas antiphonasque cantarent; dans dom Bouquef, t. m1, p. 384. (2) Ces mots se trouvent dans Ie dictionnaire argot, publié par Grandval, a appendice de son poéme intitulé: Cartouche , ou le vice puni. mene Eee niére complete (1), personne n’avait encore publié les résultats de ses recherches. Les glossaires partiels de MM. Louis Du Bois (2), Pluquet (3), Lamarche (4), Chrétien de Josse du Plain (5), Gourgeon (6) et de Les- (ang (7) sont, méme dans leur étroite spécialité , deé- plorablement incomplets, et ne peuvent prétendre a au- cune importance philologique. Hs ont réuni les mots au hasard, sans chercher a en généraliser la signification, et les ont publiés sans en fixer la date par aucun exemple et sans en éclairer l'histoire par l’étymologie. M. La- (1) Le Journal historique de Verdun, de 1749, février, p. 182, annonca quun associé de la Sociclé de littérature d’Oriéans les avait recueillis dans intention de les publier, mais il ne l’a pas réalisée et on ne connait pas méme son nom. (2) recherches sur Vétymologie et Lemploi des locutions et des mols qui sesont introduits ow conservés dans le département de VOrne et qui wappartiennent pas a la langue francaise de nos jours, dans les Mé- moires de VAcadémie celtique, t. V., p- 39-50 et p. 173-180: le dernier mot est Gur. Mais nous avons appris par une réclamation de M. Pu Bois , insé- rée dans le Pilote du Calvados dus décembre 1846, qu’un nouvel article, étendu a toute la province, a paru dans le quatrieme volume des Mémoires de ta Société des antiquaires de France. (3) Contes populaires , traditions, proverbes et dictons de Varron- dissement de Bayeux , suivis Wun vocabulaire des mots rustiques et des noms de lieu les plus.remarquables de ce pays ; Caen, 1825, in-8°, et ré- imprimé a Rouen l’année suivante avec drs additions. (4) Extrait dun dictionnaire du vieux langage ou patois des habitants dvs campagnes des arrondissements de Cherbourg, Valognes ef Saint- » Lo, dans les Mémoires de la Société royale académique de Cherbourg , Cherbourg, 1843, p. 125-4097. ng (5) Usages ; préjuges , superstitions , dictons , proverbes ct anciens mois de Varrondissement d Argentan ; dans PAnnuaire argentinois et tire _ apart, Alengon, 1855, in-18. (6) Glossaire du langage de Condé-sur-Noireau, Caen, 1850, in-8°. (7) Glossaire du patois de Varrondissement de Mortagne ;ce travail inéditnous a été communiqué par M. De La Sicotiére. oa KUNE marche seul a senti qu’on ne faisait point de la philo- logie comme de la statistique, en recueillant des docu- ments par ordre alphabétique; il a voulu leur donner de la valeur par des recherches de linguistique compa- rée , qu'une critique assez circonspecte n’a malheureu- sement pas toujours dirigées. Les productions en pa- tois nous étaient aussi d’une bien faible ressource ; nous ne connaissons de véritablement normandes que quelques chansons grossiéres, pour la plupart inédites et d’une date récente : la Farce des Quiolards (4) et la Campénade, petit poéme satirique de Lalleman. Le caractére tout littéraire des vaux-de-Vire d’Olivier Basselin, prouve qu’en les attribuant 4 un ouvrier fou- lon, la tradition s’est laissée tromper par un pseudo- nyme, que la nature bacchique de ses vers et les conve- nances de sa position obligeaient de se cacher derriére un nom populaire, et nous n’hésitons pas a les attribuer a Jean Lehoux, avocat de Vire, qui en fut le premier édi- teur. Il adapta probablement a ses chansons quelques- uns des refrains du foulon quiétaient restés populaires; peult-étre méme se borna-t-il parfoisa corriger quelques piéces , mieux conservées que les autres dans les caba- rets ; mais, maleré toutes ses affectations darchaisme, il est impossible de ne pas reconnaitre, aux recherches _ de l’expression , aux souvenirs mythologiques et aux tournures latines, la poésie d’un lettré qui n’oublie ses connaissances classiques qu’aprés avoir laissé sa mé- moire au fond de son verre (2). La Mazarinade, publiée ({) Rouen, 1736, in-12. (2) Hy ala, comme on vo't, des questions forf curieuses et fort obscures ; —— (XCVIL -——- on 4649. sous le titre de Les Malldtiers ou les Pesquecua: en yau trouble, en vérs normands , n’est qu'un mauyais pas- tiche sans vérité dont il était impossible de tirer aucun parti. Nous en dirons autant de La Muse normande, re- cueil satirique od Ferrand s'est efforcé dimiter le patois purin, que l’on parle encore maintenant a Rouen, dans Jes quartiers Saint-Vivien et Martainville: Eussent-elles habilement copié la langue du peuple, ces poésies dun bel-esprit, prétentieux nous auraient été bien inutiles : ce singulier patois est trop essentiellement différent de celui du reste dela province pour qu’on puisse lui sup- poser une méme origine (1) et les réunir tous deux dans le méme vocabulaire. Pour combler les inévitables la- cunes de notre travail , nous nous sommes adressé, par Vobligeant intermédiaire du Recteur de Y Académie de Caen, aux éléves des écoles normales primaires, et nous en avons recu plusieurs petits glossaires fort bien faits, parmi lesquels nous devons citer surtout celui de M. Robet, éléve de V’école d’ Alengon. Mais, pour réunir dans sa main des éléments disséminés. sur tous les points du pays, il faudrait les demander, plusieurs an- nées de suite, a toutes les écoles normales de la pro- vince, et charger les Inspecteurs primaires d’en contro- , mais M. Asselin a simplement réimprimé l’édition de Lehoux; M. Du Bois y a ajouté plusieurs autres chansons, une préface intéressante et des notes philologiques 4 peu prés inutiles, ef M. Travers a pris dans les autres éditions tout ce qu’il a trouvé de bon & prendre. M. Lambert, ‘conservateur de la Bibliothéque de Bayeux, posséde encore quelques vaux-de-Vire iné- dits qu’aucun caractére saillant ne distingue des autres, et nous en avons vulune copie qui appartenait & M. Piuquet. (1) C’est encore 1a une question fort intéressante que Gervais n’a point éclaircie dans son Coup-d’e@il purin. 7 == RUN ler fa valeur sur place, et c’est ce qu’un simple par- liculier, sans autre titre que l'amour de la science , ne peut ni demander sans indiscrétion, ni obtenir avec assez de suite et d’exactitude (4). Heureusement plu- sieurs antiquaires distingués savaient par eux-mémes les difficultés de notre entreprise, et nous ont affectueu- sement remis les matériaux qu’ils avaient amassés pen- . dant de longues années. Pour faire apprécier toute Pimportance de leurs communications, il nous suffira de nommer MM. de Gerville, le patriarche de Parchéo- logie normande; De La Sicotiére , Mancel, Bonnin, Poulet-Malassis et Alfred Canel. Maleré un si précieux concours , ce glossaire, comme toutes les premiéres publications de ce genre , n’en est pas moins nécessai- rement bien incomplet, et nous prions toutes les person- nes qui portent quelque intérét a histoire de notre pro- vince et aux origines de la langue francaise, de nous en signaler les lacunes et les inexactitudes. En corrigeant Vorthographe qui ne représenterait pas fidélement: la prononciatien habituelle , en modifiant les interpréta- tions qui ne conviendraient pas a certaines localités (2), et en nous indiquant de nouveaux mots , qui ne soient pas une simple corruption du francais, ils nous fourni- (1)1 serait bien a désirer que le Ministre de I'Instruction publique usat d’un moyen si facile, qui ne cotterait rien A personne, pour faire recueillir les vo- cabulaires de tous les patois dela France ; Napoléon en avait senti la néces- sité ef ne put en venir a bout. (2) Pour rendre ce controle plus facile et plus sérieux » nous mention- nons soigneusement la provenance de chaque mot: nous n’avons négligé cette indication que pour les mots qui sont d’un usage général dans plu- sicurs départements, ' . —e SUES ts raient les moyens d’élever a la mémoire de nos ancétres un monument qui, moins encore par son sujet que par la multiplicité des auteurs, appartiendrait a la province tout entiére : nous ne réclamons pour nous que l’hon- neur de tenir la plume et le plaisir de leur en adresser nos remerciments. EDELESTAND pU MERIL. EE ER I a Czen.—Imp. de E. Poisson.—1$49. ar ds be ao iat oad ¥o ae: CE aby fet . a ‘ DICTIONNAIRE DU PATOIS NORMAND. ABA ApaissE, s. f. (arr. de Mor- iain) Table basse, Buffet de ser- vice. Et plures alios pauperes quos ad terram sedere faciebat, et super unum basse¢éwm map- pam ponebat seu extendehat ; Acta Sanctorum ; Mai, t. IV, p. 554. Abace et Basset avaient la méme signification en vieux- francais; voyez Roquefort, Glos- satire, t. I, p. 3, et du Cange, Glossarium, t. 1, p. 642, col. 3, édition de M. Henschel. A- BAISSE signifie aussi une As- siette en terre cuite, soit parce que les Latins disaient déacus soli, soit parce qu'une assictte sert de base & ce que l'on man- ge; c’est en ce sens que l’on dit une Abaisse de patisserve. Axpat,s.m. (arr. de Bayeux ) Désordre; de Mettred bas, Ren- verser. Dans larrondissement de Caen, la plure d'abat est une pluie abondante, et un homie Wabat, un homme qui dérange tout. Quelquefois cette derni¢re expression se prend en bonne part et signifie quelqu un qui abat Vouvrage, qui travaille vi- te et beaucoup. Le vieux-fran- cais donnait un sens analogue ABE a abattre: Pour savoirla verite, la main de justice avoit este mises aux dittes queus (de vin) et fait defienses qu’elles ne feus- sent meues; aye depuis elles avolent este abattues et embo- tees ; Lettres de grace, de 1385, citées dans du Cange, Glossa- rium, t. 1, p. 8, col. 1. ABATER, V. a. (arr. de Bayeux) Raccrocher, Embaucher. Voyez ABETER. ABAVENT, Ss. m. (arr. de Caen) Contrevent, Cequi abat le vent: on le prend a Valognes dans l'acception de Auvent. ABAUBER, V. a. Etonner , on dit aussi EBAUBIR. | ABAUMIR, V. a. (arr. de Caen) Affadir ; de Baume. ABELIR, V. a. et n. (Orne) Trouver beau, Plaire. Mes la dame n’abelist point Ce qu’ele en voit son fis aler, Qui de li part sanz retorner. De Venfant de neige, B. R. n° 7218, fol. 242, recto, col. 1, V. 16. Li rois a cui molt abeli Les regarda molt bonement. ApENEZ, Ducheval defusi, dans KELLER, Romvart, p.107,V. 23. 2 ABL L’Italien a fait aussi Abbel- lure, quiale sens de notre Em- bellir. Abert, s. m. Amorce; de l’is- landais Berta, nourriture. Le vieux-francais avait formé de la méme maniére Aeschier (amorcer) d’ Fnescare: Li deable a getey por nos ravir Quatre amecons aeschies de torments. Poésies du roi de Navarre, t. 1, p. 150. Dans le Dictionnaire roman de dom Francois, Abec se trou- ve aussi avec la signification de Amorce, Appat. ABETER, V. ‘a. Amorcer; At beita aungul signifiait en islan- dais Mettre de la nowrriture a un hamecon; de la le sens de Tromper, Attrapper, qu ont pris Abater et le viewx-francais Abé- ber : Lui ne peut-il mie guiler Niengigner ni abeter Fabliaux et contes anciciis, {. Il, p. 366. Le vieux-francais en avait fait Béter, chasser; voyez De monacho in flumene perrclita- to, v. 643, publi¢ par M. Fr. Michel; Chronique rimée de Benors, t. UH, p. 529. — ABIENER), Vv. a. (Orne) Amé- hiorer ; ilse dit particuliérement dun terrain : Bene et Bone, Bien et Bon sont pris souvent dans la méme acception : Eu vos 0 dirai ben e bon. Troubadour anonyme , SENIOR VOS. ABLET, Ss. m. Piége. On ap- pelait en vieux-francais Ablere, Ablet, un filet pour ta péche des ables et des autres petits pois- sons; Ordennances des rois de France, t. 11, p. 42. ABO ABLETER, V. réil. (arr. de Vi- re) Se laisser aller. _ ABLO, Ss. m. Merceau de bois que les charpentiers mettent sous les piéces quwils travail- lent pour les lever de terre; ce mot existe aussi en rouchi. Axo, Ss. m. Morceau de bois que Von attache au pied des chevaux pour les empécher de passer d'un champ dans un au- tre. Saint Jéréme disait déja : Fac tibi vincula et catenas (sive xAotous, qui hebraice appellan- tur Mothoth, et sermone vul- gari Boras vocant); In Miere- miam, |. V, ch. 27, et on lit dans la vie de sainte Fides d’A- gen: Jubet compedibus cons- tringi quos rustica lingua Boias vocat; Acta Sanctorwin, Octo- bre, t. IIT. C’est le radical du vieux-francais Buie : Vos ne nos poez pas fuir ; Kar nos vos faimes or sentir Que buie peisent, ne s’est liez Cil qui les traine od ses piez, Benois, Chronique rimee, \. U1, Vv. 2905. C'est probablement aussi le radical du vieux-francais A- buisser : ‘ A la planche vint, sus munta;_ Ne sai dire s'il abuissa, U esgrilla, u meshanea; Mais il chai, si se neia. Roman de Row, Vv. 5532. Lesquels trouverent emmy la court de lostel dudit tavernier ledit Vigor qui se dormoit au- quel ’un d’iceulx exposant se heurta ou abuissa, ou par Pun diceulx fut feru en soy heur- tant ou abuissant a lui; Lettres de grdce, de 1397, dans du Cange, t. I, p. 749, tol. 4. En rouchi Abou sienifie Pei- ; a a ABR ne, Embarras; dans le patois de la Vendée une autre méta- phorea fait appeler Abo une pe- tite digue en terre qui arréte un courant deau; Talbo y si- enifie grandes entraves, Tall veut dire Grand en anglais. ABOFFRER, Vv. a. (arr. de Bayeux) Déprécier; de Ab-of- ferre, offrir loin de ce que l'on demande; comme Surfaire, faire, demander au-dessus. Azpominer, v. a. Détester, Avoir en abomination. Ta fureur perd et extermine Finalement tous les menteurs: Quant aux meurtriers et decepteurs Celui qui terre et ciel domine Les abomine. Clément Manor, Psaume V,Vv. 3. Le francais n’a conservé que Abominable et Abomination. ABOTTER , V. a. Mettre un Abo. ABOULER, V. a. Jeter ou Ap- porter vite; de Boule, globe de plomb qu’on lancait avec une fronde, ou de Bowlon, trait d’arbaléte. ABOULEZ-CI-GaU ( loc. de Parr. de Valognes), Apportez- ici-vite. Voyez cau. Nous ne savons d’apreés quel renseigne- ment Roquefort a dit dans son Glossairede la langue romane, t. [, p. 259, que crgaw signi- fiait De mon chef, D’aprés ma téte. ApRiER, v. a. Abriter; du vieil allemand Ad-di-rihan, couvrir: ce mot n’avait point de t dans le vieux-francais ni dans le provencal; voyez Ro- quefort, Glossaire, t. 1, p. 9, et Raynouard, Lexique roman, t. Hf, p. 47. Tl pourrait aussi venir d' Arbor , en patois nor- ACA 3 mand Abre. Vo. lart. suivant. Apro, s. m. (arr. de Valo- gnes) Petit arbre enduit de glu pour prendre des oiseaux. Le vieux francais disait Adre , comme le patois normand: Quand il ot lotiet le paien, A cei abre, bien fort et bien, Mouskes, Chronique rimée, v. 7790. Pour Vamour du buisson va la bre- bis a Vabre. Proverbe du xv siécle, cité par M. Leroux be Lincy, Proverbes Jrangais, t.1, p. 97. Aca, s. m. Il pleut d’aca, Il pleut beaucoup; de Vislandais Haf, inondation; Kafa-rekia signifie, comme pluie d’aca, une pluie abondante. Nous ne croyons done pas qu il faille écrire Aga, de Gaster, Détruire, Ravager, guoiqu’on dise dans le patois du Berry Un agas d'eau, et que le vieux-francais employat Agaste dans le méme sens. : Acamet Cam, prép. Avec. On dit plus souvent Acamté, Avec toi; lerégime a fait corps avec la préposition comme en fran- cais, ot.ab dans le sens de eum, et hoe sont devenus avoque , aveugue , avec. Combien treuve je plus natu- rel et plus vraysemblable que deux hommes mentent, que je ne fois qu'un homme en douze heures passe quant et les vents dorient en occident...Montai- ene, Essais, |. TI, ch. 44. Dansle patois du Berry Quant et signifie aussi Avec, En méine sa he ; mais on donne dans la Vendée a cet assemblage de sons, quialors il faudrait or- thographier autrement, le sens h - ACE de A cété, Aupres de, et le mot quien est formé pourrait venir de Vislandais Kant, cdté, com- mel italien Accanto. Voyez aus- SI CANTER. ACANCHIER, v. a. (Manche) Reéussir, Avoir bonne Chanee , que l'on prononce canche, de Cadentia. On dit aussi: Hladu hasard; EH] est bien tombe. Acar. Ce mot nest employé ue dans la phrase: fl pleut ‘acar ; Veau tombe avec au- tant de force que des cailloux. Acarer signifiait en vieux-fran- cais: Jeter des pierres,et l'on en a fait Acaridtre. AcaTer, v. a. Acheter; du latin Ac-captare : Sa mie en a a soi menee Que par sa peine a acatee. Roman de Brut, Vv. 2643. Le second a s est conservé aussi-dans Acabit et Achat ; on trouve Acapée dans le Nouveaw coutumier général, t. IV, p. 904, col. 2. ACAUCHIER, V. a. (Orne) Ap- peler, Causer a. ACCABASSER , Vv. a. et réil. Accabler, Se replier sur soi- méme; dans le patois de I'Ese- re, Accapa signifie Accroupt Caché. Accipgn, v.a.(arr. de Bayeux et de Vire) Escroquer, Chiper. Aceiper avait le méme sens en vieux-francais. AccLampgrr, v. a. (Orne) At- tacher , fixer; de lVislandais Klampr, Agratie, Cheville. _ Acciasser , v. réfl. (arr. de Vire) S’assoupir, Fermer les yeux, de Ac-claudere. En pro- vencal Aclusar signifiait Fer- mer les yeux. ACC La nuoich quan lo sons m/’aclusa. GinAup DE BorneiL, Cuan la bru- na. Le vieux-francais lui donnait sans doute un sens différent : Mais, qui chaut, par tu les ensiut E les dechace et les consiut, Cum funt le chien le cerf alasse - Qui del tut estanche e aclasse. Benois, Chronique rimeée , 1.1, v. 847. AcCCOINTER , Vv. a. Connai- tre particuli¢érement. Il s’‘em- ploie ordinairement, comme en vieux-francais , dans un sens érotique : Ma demoisele vos volra accointier. Raoul de Cambrai, p. 221, v. 12. Coindar signifiait en vieux- provencal, oy ler, Caresser, et le patois de l’Isére se sert d’ Ac- condo dans le sens de Fran- carlles. AccorpEerR , v. a. Promet- tre. Le vieux-francais Grant, Greanter, Creanter, Accorder, avait aussi quelquefois la signi- fication-de Promettre ; Cil Turnus, qui ert ses voisins, Rices hom ert, sot que Latins Sa fille a Eneas donot ; Tries en fu, grant dol en ot, Car il Pavoit tostans amee E ele li fu creantee. Roman de Brut, v. 53. Accorps, s. m. pl. Fiancail- les. Ce mot signifiait aussi en vieux-francais Convention ct par suite Drovt. tis Clotan deust tot avoir, Car Von (n)'i savoit si droit oir; Mais cil qui estoit (sic) plus fort Worent cure de son acort. Roman de Brut, V. 2253. Es vos Ogier et le ro? acordes; oO ? ACH C’est une acorde que comparont [Eseler. | Rampert, Chevalerie Cgicr de ’ [Panemarche, v. 12801.| Accourter, Y. réfl. (arr. de Vire) Fléchir le genou en se haissant. Accoursé , part. pass. (Or- ne) Achalandé. Le francais dit dans le méme sens Une bouti- gue bien courue. On lit dans une lettre de grace de 41383: Ledit exposant estoit miculx accoursez, ¢ est assavoir miculx achalandez. Accour, s. m. (arr. de Vire) Appui; du normand p- 4. FUESLON , FULON et FURON, S. m. Taon; de Frélon. Fumer, v. n. (arr. de Valo- gnes) Etre vexé, Rager ; comme en vieux-francais : | Qui que s’en marrisse ou s’en fume, Pour l’honneur de vostre personne, Joseph, Jesus le corps vous donne. JEHAN MicuEL, Mystére de la Pas- sion, journ. Iv’, sc. 12. Ce mot a sans doute été fait par analogie & S’enflammer ; la contrarvété précede la colére , commela fumée précédela flam- me. FurLucus, part. passé. (arr. de Rouen) Hérissé, Irrité: Furluchés ainchin que des cogs. FERRAND, Muse normande, p. 27. FURLUFFER, V. a. (arrond. de Rouen) Facher, Pousser a bout; Chest pour nous faire furluffer. Ferranp, Musenormande, p. 26. Peut-étre le méme mot que le précédent. : Futé, part. passé. (Calvados) Rempli, Rassasié , Blasé. Futer, v. réfl. (Calvados) Se mettre en colére, Se rassasier et par suite Dépenser. — = GaBEGiE, S. f. Ruse, Trom- perie (voyez GABER), et par suite GAD Intelligence, Menée secrete; ce mot a la méme signification en rouchi et dans le patois du Berry. GABELOU, S. m. Sobriquet in- jurieux donné aux douaniers et . aux préposés de la Gadelle, que Yon retrouvedans presque tou- tes les langues ; Gabelot en ca- talan , Gabellador en proven- eal, Gabelliere en italien, etc. GABER, V. a. etn. Plaisanter, Se moquer; Gabéa en islandais: Dame, dites-le-vous a gas? De gaber, dist-ele, n’ai cure. Fabliaux anciens, t. m, p. 6. GABERIEN (de Couanettes) s. m. (arr. de Bayeux) Sot ; mot- a-mot, Trompeur de femmes. GABLE, Ss. m. (arr. de Vire) Pan de mur, Pignon; Ga/fl en islandais. GABOTTER, v. n. (Orne) Se balancer en dansant. GACHARD,S. m. (arr. de Saint- Lo) Malpropre; de Gdcher , en vieil-allemand Waskan, comme Gachis. Gacue, s. f. Galette , Gros pain de sarrazin , Pain mal fait, gaché, comme on le dit en francais dans le style familier. Gabe, s. f. (Orne) Vase de bois dont on se sert dans les pressoirs ; Gadde en languedo- cien et Jede dans le patois de la Vendée ; probablement de l’is- landais Jata, jatte. GADES, s. f. pl. Petites gro- seilles ; dans l’arrondissement de Mortagne on dit Gadelle. Vovez GRADES , GRADILLES. ADOLIER, S. m. (arr. de Bayeux) Mauvais sujet , Garne- ment ; en breton Gadal signifie libertin , débauché. GAL Ait Garrke , s. f. (Seine-Infe- rieure) Morsure de chien ; en provencal, en catalan, en es- pagnol et en portugais Gafar signifie mordre. y Garrer, V. n. Mordre & em- porter le morceau , Manger en glouton, comme wun chien. Voyez le mot précédent. Dans le patois du Jura on dit Jaffer; mais il ne s’emploie que dans la seconde signification. GacrE, s. m. Avoir, Ce qui appartient ; en vieux-francais Gach : a Biaus sir, por Dieu merci , fet nous render nos gach. Privilege aux Bretons, dans Ju- binal, Jongleurs et Trouveres, p. 53. Gacier, v. a. (arr. de Valo- enes) Parier ; i] signifiait sans doute d’abord Assurer en don- nant un gage de sa parole , car le bas-latin Gagiare signifiait S’engager : Quod gagiabit no- bis emendare ad voluntatem nostram et de hac nobis dedit Guillelmum de Hoctentot ; Eu- des Rigault, Regestrum visita- tionum Archieprscopt rothoma- gensis , p. 225, éd. de M. Bon- nin. GALAFFRE, Ss. m. (arr.deCher- bourg) Glouton. Voyez LUFFRE ; ce mot existe aussi dans le pa- tois du Berry ; en rouchi on dit Galafe. Le diable est appelé Goulaffre dans les Miracles de la Vierge, par Gautier de Coin- sy, suivant du Cange, t. Ill, p. 593, col. 3. GALAIGNIE, S. f. Tout ce que lon peut porter dans ses deux mains réunies : de Gallon, me- sure, en bas-latin Gelo, Gilo, qui vient probablement de l’hé- 412 GAL breux Gula. GALAPIAN, © S. m. (arr. de Bayeux) Vagabond, Mauvais sujet ; il a mieux conservé la signification et la forme de l’is- landais Galapin que le Galo- pin du francais, le Ganipion de P Orne et le Galapiot du Berry. (FALATINE (€tre en) s. f. (arr. de Bayeux) Garder la chambre; Galetas del arabe Calata,sedi- sait en vieux-francais Galatas. (ALE, part. passé. Maltraité, Contraint : Je suis bien galée Et de prés_ contrainte, Farce des Pates-Ouaintes, p. 22. Gass, s.f. pl. Joies , Réjouis- Sances : Avec les gales bon temps. BASSELIN, Vaua-de-Vire, p. 167; éd. de M. Travers. On le trouve aussi en vieux- francais : Nl y aura beu et galle, Chez moy, ainsque vous en aillez. Farce de Pathelin. Dans lc patois de l'Isere Gal- libourda signifie furre bom- bance. Ce mot vient sans doute de lislandais Gala , chanter et par suite se réjouir ; le francais ena fait aussi Gala et Régaler. GALETER,V.n.(arr.de Bayeux) Trembler de froid; en islandais Kaldi signifie froid. GALETIERE, S. f. (Orne) Pla- teau en fonte, & rebords, ou lon fait des Galettes. Voyez HAITIER. GALIMAFREE , s. m. Ragoit copieux ; peut-étre pour Gali- safrée Voyez GALES et SAFRE. GaLimor , s. m. (Orne) Ga- Jette de sarrazin. GAL GaLINE, Ss. f. Jeu qui consiste aabattre avec des sous un bou- chon sur lequel on a mis de Targent; on l’appelle aussi Bow- chon , Galoche et Quilleboche ; son nom vient sans doute de lislandais Gala, se réjouir , s’a- muser; il se trouve dans le patois du Jura. GaLirn, v.n. (arr. de Cher- bourg) Jeter le sarrazin sous le fléau ; du breton Gwalen, fléau, Gwialenna, battre avec le fléau. Ce mot signifiait jeter en vieux- francais : super: Et moult se plainst del roi Ricart, Le felon cuviert, le gagnart, Qui sen boin ostel li toli Et ses banieres fors gali. MouskEs , Chronique rimée , v. 19805... GALLET, s. m. Levier; du bre- ton Gwalen , gaule , baton : on dit aussi Galon. GALLoIS , adj. Gaillard, Ga-_ lant : | Je suys bon vivois Et compaignon gallois. BassELin, Vaux-de-Vire, p. 125; éd. de M. Travers. Probablement de! ’islandais Ga- la, se réjouir, s’amuser; de la le vieux-francais Galloises , réjouissances : Et puis s’en vont pour faire les gal- , loises Lorsque devroient vaquer en oraison. Leroux , Dictionnaire comique, t. I, p. 560. Et le sens primitif de Gail- lard : But let them be such as they were, by : chaunce Our banquet doone , we had our musicke by And then, you knowe, the youth must -needes goe daunce. GAM First galiards, then larous and hei- degy. . Nicholas Bretons, Woorkes of a young wit , cité par Ritson, Ancient songs and ballads , t. 1, p. Li. GALMIN , S. m. Petit-valet ; probablement!’origine du fran- cais Gamin est la méme. GaLocueE, s. f. Voyez GALINE. GALon, s. m. (arr.de Bayeux) Mesure de quatre litres , encore en usage en Angleterre; en rouchi Galot signifie un broc. Gatop (donner un), Ss. m. Reprimander, Gronder forte- ment; on dit dansle méme sens farrealler et donner une danse. Quelquefois on se sert aussi du verbe : Puisque pour toy suis ainssy galopee, Oretargentf, de Dien soys-tu mauldit! Farce des pates ouaintes, p. 24. Dans le langage trivial Gallé signifie battu, rossé. Voyez le Dictionnarre comigue de Le- roux. GALOTTER; V. n. (arr. de St- Lo) Carillonner ; ce qui n’arrive que dans les réjouissances. ‘Voyez GALE et. GALLOIS. ALUE, adj. Qui louche ; Voyez EGALUER. ALVADAIRE, S. m. (arr. de Bayeux ) Vagabond, peut-étre signifiait-il d’abord Mauvais ouvrier ; voyez le mot suivant. GALVAUDER, V. a. et n. Tra- vailler vite et mal ; Gacher ; A- battre des pommes avec une gaule. , GAMACHES, Ss. f. pl. Grandes guétres en toile que l’on met sur ses culottes, cest une cor- ruption de l’allemand Kamas- chen qui se trouve aussi dans pa) GAR le patois de Rennes. GAMBET, Ss. m. Croc-en-jam- be ; on disait en vieux-francais Jambet : Mult li a tost fait le jambet: Trebuche a le moine al pas. Benois, |. W, V. 25569. 4A3 GAMBETTE, S. f. (arrond. de Bayeux) Petit couteau a man- che recourbé; ce mot existait aussi en vieux-francais (Cam- GAMBIER, Ss. m. Qui a de mauvaises jambes ; Gamby si- gnifie bovteux dans les patois du Berry et du Jura. Le patois de Bayeux prend ce mot dans une autre acception ; il désigne ainsi un Morceau de bois au- quel Jes bouchers suspendent la viande. Game, s. f. Ecumequi vient alagueule d'un animal; Kahm signifie en allemand la moisis- sure blanche qui vient sur le vin et sur la bierre ; mais peut- étre ne doit-on pas s’attacher a cette étymologie, Game signifie Accés de rage dans le patois de la Vendée, et lislandais Gram signifie Fureur. GamME, s. f. Forte remon- trance et par suite Soufflet. GANDOLER, v. n. Balancer , Remuer ; en vieux-francais Gandiller ; le provencal Gan- cillar signifie chanceler. Voyez GUENCHIR. Gapas, Ss. m. (Orne) Balles d’avoine; en vieux-francais et dans le patois du Berry Gapier. Voyez LIMAS. ARCE , S. f. Féminin de gar- con; on Je prend presque tou- jours en mauvaise part, comme en francais : 8 144 GAS Mais je ne veux tant boire; J’aime mieux entre mes bras La grosse garce noire , Couchée entre deux draps. Chansons normandes, p. 226, éd. de M. Dusois. Dans les arrondissements d’Argentan et de Mortagne, on dit Garcette. Garcu, s. m. Jupon (Garde- cul): Il ne nous reste pu que le garcu a ma tante; Farce des Quiolards, p. 30. GARDEHEDR, Ss. m. (arr. de Bayeux) Borne, de Heurter. GARGACHE, s. f. Culotte. Javais une belle gargache D’un fin coutil, Passementée avaud les jambes D’un beau nerfil. Chansons normandes , p. 233, éd. de M. Dubois. Le vieux-francais disait Gar- gaisse qui s’est conservé dans le patois du Jura; le fran- eais Grégues semble avoir la méme origine. Garot, s. ny. (Orne) Petit pain de ble. GARREAU , S. f. (Orne) Levier; ee mot qui vient sans doute du latin Quadratus, comme Car- rel, signifiait en vieux-francais gros baton. GARSONNIERE , S. f. (arr. de Valognes) Fille trop libre, qui imite ou aime trop les garcons. Gas, s. m. Garcon ;,proba- hlement une abréviation de Gars : il se prend en mauvaise part dans l’Orne. GasE, s. f. (Orne) Bourbier, Vase ; peut-étre de lislandais Vatn, eau; le v s'est aussi ehangé en 6 dans le patois du Berry ; Gaujer y signifie En- foncer dans la boue. GASPILLE (jeter &la),s. f. GAT (arr. de Valognes) Jeter des dragées ou des sous 2 une troupe d’enfants qui se battent pour les ramasser ; du francais Gaspiller ou de YVislandais Gafa , Don et Sprlla, Gater , Perdre. GaTER (de Peau), v. a. ~~ de Vire et de Mortagne). Uri- ner ; on dit ailleurs Ldcher de Veau, c'est la locution islan- daise At hasta af sér vatni. GaTon, s. m. (arr. d Argen— tan et de Mortagne) Baton ; on trouve-aussi en vieux-francais Gaston , suivant Roquefort , t. 1, p. 674: Gite signifie soleve en rouchi. | GATOUNER, V. a. (arr. de Mor- tagne) Employer un gaton pour serrer la corde qui tient la char— ge d'une voiture; Frapper for- tement. GatTe, s. f. Marelle, jeu ot les enfants tracent une figure qui ressemble a une grande porte , en anglais Gate; la rue de Gedle, ’ Caen, se nommait autrefois Gatte-hole, porte creuse, ou plutét passage creux, parce qu’a l’exemple du’ grec IlvAn, portes avait ce sens en francais: le passage étroit qui est al’est de l’embouchure de la Dive, s'appelle encore mainte- nant Houlgatte. Il y a aussi a Carentan une rue Holgate. GATTECOFVE, 8S. f. Sorte de gateau en forme de jatte fort creuse (Cava), que l'on faisait autrefois & Dieppe, suivant Brieux (Origines de coutumes anciennes , p. 65), et qui peut. signifier seulement Gdteau- Goffe. xATTES, Ss. f. pl. (Orne) Es- GAU pace resserré, ou tourne la meule d'un moulin. Voyez GATTE. Gau, s. m. (arr. de Bayeux) Coq (Gallus); sa forme latine s était conservée dans le vieux- francais : Ainceis que li gal fust chantant Vindrent a Corci dreit errant. Benois, 1. 1, V. 14057. Mais on y trouve aussi cette forme: Devant le jor, ains que gaus ait cante. Chevalerie Ogier, v. 7605 Voyez JAU. Gaud, adj. Niais, aphérése - de Nigaud. GauprioLes, s. f. pl. (arr. de Mortagne) Cabrioles de joie; la signification que lui donne le francais indique aussi que la racine est le Gaudiwm des La- tins. GAUNETER, V. n. (arr. de Mortagne) Bavarder au_ lieu de travailler. GAUPAILLER, V. n. Manger avec avidité; de Tislandais Gapa, Engloutir : dans larr. ug Hy deene il signifie Gaspil- er. GAUPLUME, adj. (arr. de Ba- yeux) Mal peigné; Aussi mal arrangé qu un cog sans plume ; le vieux-francais avait aussi cette expression. GauRE, Ss. f. Grosse femme sans souci ; probablement du vieux-frangais Gore (xotpos). Gaurer, V. réfl. Se pavaner; de yaupes Orgueilleux. GausanT, adj. (arr. de Mor- tagne) Désagréable. Voyez SOSER. Gaut, s. m. (arr. de Bayeux) GEG M15 Bois, comme en vieux-francais : Adont recorna une fois, Qu’aucuns n’en fust remes el bois, Si durement et si tres haut, Qu’en retentirent bos et gaut. Mousses, Chronique rimée , Vv. 7816. Du vieil-allemand ou vieux- saxon Wald, qui avait conser- vé sa forme primitive (Gualt) dans la Chanson de Roland, str. CLXXxI, v. 21; quoique Altaserra ait dit Rerum aqui- tanicarum p. 134: Bagaudae dicti quasisylvicolae; Gawenim lingua gallica sylvam sonat. GaAvuTIER, s. m. (Orne) Oie male, Jars ; en patois normand et en breton Gars; en islan- dais Gassv. GAVAILLER, V. a. (arr. de Bayeux) Gaspiller. Voyez Gau- PAILLER. Gavast, ad. (arr. de Bayeux) Brutal ; Gavache avait aussi une signification injurieuse en vieux-francais : Tl vous traiteroit de gavaches , Vous me faisiez tant les bravaches. Scarron , Enéide travestie, I. v. Peut-étre ce mot vient-il du Gavascho puerco que les Espa- gnols appliquent aux Frangais. Gaver, v. réfl. Se bourrer , Se gorger, S’en mettre jusqu’au gavion. Gavienon, s. f. Ivresse gaie. Voyez le mot précédent. GavILEEux , adj. (arrond. de Vire) Périlleux, Dangereux ; en breton Gwal signifie mau- vais , nursrble. Giaicne , s. f. Ventre; peut- étre de Gignere, Engendrer , ou une corruption de Gésine, ui nous semble venir plutét e lislandais Geta, Con¢eyoir, 416 GIL ue du latin Jacere , en vieux- rancais Gésor. : Guir, s.m. (arr de Bayeux) Creux gui se forme dans un arbre & moitié pourri ; il signi- fie en francais: Un arbre fendu par la gelée. | GénottTEs, s. f. pl. Racines bulbeuses , bonnes a manger, du Burnium bulbocastanum , du Bunium denudatum, de ! OEnanthus pimpinelloides et du Neum tuberosum ; dans la Seine-Inférieure on les appelle Jarnottes , et Anotes dans le Berry ; Vovyez Boreau, Flore du Centre, n° 534. GENSER, Vv. a. et réfl. (arr. de Valognes) Se déranger, Mettre de cété, en islandais Kanta ; comme on se dérangeart pour un but quelconque , Genser avait en vieux-francais le sens d'arranger , agencer : Recognoissez les dictz de nostre pil re Et vous gencez pour lou remede y mettre. BovapiGne, Légende de Faiifeu,p. 4. C’est le sens qu’on lui donne a Vire, et, ainsi gu’ Arrangé, il a pris aussi la signification e vétu. Gerce, s. f. Brebis qui na pas encore produit ; on dit aussi Viewlle gerque ( Vervex). GirFE, S. f. (arr. de Valo- enes) Soufflet; a Bayeux on it Gif e; de lislandais Hef , Querelle. I) s’est conservé aussi dans le patois des Vosges. GIGALER, Vv. n. (arr. de Mor- tagne) Se divertir a l exces. Vovez GINGLER. GicoRNE, s. f. Bache mal taillée, Cornue. Vovez GITE.. GILER, v..n. (arr. de Mor- GLA tagne) Fuir, Couler.; en islan- dais Gilia signifie Lancer de l'eau, et Giler a conservé le méme sens dans les patois du Berry et de la Vendée. GiLtorrE, s. f. (Orne) Se- ringue; dans Je Jura on ap- pelle les seringues en sureau Grieles. GimeR, v. n. (arr. de Valo- nes) Pleurer, Se plaindre , émir (Gremere). GINGLER, v. n. Rire, Badi- ner; il signifie s'amuser en rou chi. : GInGuE, s. f. Urine des ani- maux dans le fumier. GINGUER, v. n. (arr. de Mor- tagne) Jouer en montrant son adresse ou sa force. GipouTRER, v. n. Folatrer. GiriEes, s. f. pl. Grimaces, Affectations hypocrites ( Gi- rare). GIROT, Ss. m. Qui fait des grimaces, Qui se plaint ridi- culement , Béte; on dit aussi Girotin. Dans le Calvados Gilles se prononce encoreGrre. Gite, s. f. Soliveau ; on dit AUSSI GIETE et GITRE ; en vieux- francais, selon D. Francois , Dictionnaire roman, p. 134. on appelait les chantiers GETTES et GITTES. jae Gras, s.m. pl. Réjouissances; de Pislandais Glad, Joyeux, qui se trouve aussi en anglais. Gratin, v. n. Aboyer, Crier: Se forment bret , si haut glatist. Méox, Nouveaux fabliaux, t. IT, p. 5t Sarrazins comme chiens glatissent. Guiart, Branche des royaux li- gnages, t. IT, p. 38. En islandais Glefa signific GNI Poursuivre , Harceler. GLEUMER, v. a. Engloutir; nous ne connaissons ce mot que par le Coup-d’ail purin , p. 62. Giorer, v. n. (Orne) Dor- mir mal. GLot, s.m. Ver blanc qui se trouve dans la viande gatée; Glete signifiait en vieux-fran- cais Ordure, Corruption. Voyez GELOUTE. GLot, adj. (arr. de Bayeux) Terre glotte, mal labourée, qui n’a pas été émottée. Voyez le mot suivant. GLouTe, adj. Perdu, Cor- rompu, Gaté; Glata signifie perare en islandais. GNiaF, S. m. Savetier. Vingt anes attelés, trottant d’un pas égal, Trainent le fier Raulin, des gnafs le coriphée : Cent faisceaux de tranchets lui ser- vent de trophée. Latteman, La Campénade, cn. Wi. p. 33. GNIAQUEE, s. f. Morsure ce chien ; on dit a Bayeux Gnaffée; mais Gnae signifiait en vieux- frangais coup de dent, suivant Roquefort ,t.1, p. 693. NIAS, s. m. (arr. de Mor- tagne) Enfant a la mamelle. Gnizu, s. m. OEuf couvé qu on laisse dans le nid (Mden- sis); on dit aussi Gniat, et dans les patois du Berry, do Jura et dela Vendée Gniau. GNIioLE , s. f. Niaiserie. Voyez le mot suivant. “GNIOLER, v. n. Niaiser, Dire ou Faire des Niaiseries ; peut-éire de Genolrus, petit-. esprit. GnioT, s. m. Niais ; voyez GOB 417 le mot précédent ; dans le Ber- ry on dit Gniogniot. Go, v. n. (arr. de Valognes) Ce verbe n'est usité qu’a Pimpé- ratif. Pour donner le signal du départ , les enfants disent Go , du francisque Gahen, Se hater; de 1a le sens du provencal Gav, Elan ; on lit dans le Gerar de Rossilho : Passet sotz Rossilho del prumier gau. Le vieux-francais employait Go dans le méme sens: J en- trerai tout de go (d’emblée) dans la taverne ; Don Quichotte (trad. d’Oudin), p. 2. Gosant , adj. Gourmand; de Gober, manger avec avidité. GOBELIN, Ss. m. Lutin, Es- prit-follet ; on connaissait ce mot en Normandie dés- le xm siecle, car on lit dans Orderic Vital, |. v, p. 556: Daemon enim, guem de Dia~ nae phano expulit ( sanctus Taurinus) adhuc in eadem urbe (Evreux) degit et in variis fre- quenter formis apparens. ne- minem laedit. Hunc vulgus Go- belinwin appellat. Ce nom vient sans doute du breton Godilin , Lutin, du grec Ko6aheg ou de Vallemand Kodold. GoBrT, s. m. Morceau que l’on gobe, comme dans le style familier, et par suite Fragment. Gosinr, s. f. Repas, Bonne chére. Voyez GOBANT. GoBIneR, v. réfl. (arr. de Vire) Se rengorger, Faire le fat ; en vieux-francais Gobe si- gnifiait vaniteux : La terre meismes s’orgoille Par la rousee qui la moille, Et oblie la poverte Ou ele a tot l’yver este ; Lors devient la terre si gobe 418 GOH Qu’el velt avoir novele robe. Roman de la Rose, VY. 5a- Goce (étre asa) s. f. (arr. de Bayeux) Etre a son aise ; l’is- landais Gots signifie richesse. Gopan (donner dans le) s. m. x? de Valognes) Guépier; probablement del'anglais God- dam, Donner dans la damna- tion de Dieu. Voyez GODONNER. Gopencgs, s. f. pl. (arr. de Mortagne ) Contes improvisés pour amuser (Gaudere). GODENDA, s. m. Scie de ma- con; c était autrefois le nom d’une espéce d’arme usitée en Allemagne, ainsi que nous l’ap- prend Guiart dans sa Branche aux royaux lignages, t. Ul, Vv. 5428. A granz bastons pesanz ferrez, A un lonc fer agu devant ‘Vontceuzde France recevant. Tiex bastons qu’il portent en guerre Ont nom godendac en la terre. Goden-dac, c'est bonjour a dire Qui en francois le veust descrire. Dans l’Orne on dit GovEn- DARDES. GopicHE , adj. Ridicule, Gauche ; il se trouve aussi dans le patois de Langres. GODONNER, V. n. Jurer, Mur- murer ; de l'anglais Goddam. GoGaILLE, s. f. (arr. de Ba- yeux) Sot, Niais, Qui amuse les autres (Joculart) ; on se sert encore en francais dans le style familier de Goguenard et de Goguettes. Gocon , adj. Doux, Mignon; Gogeer signifie en breton fowr- be, trompeur. GoGue (en) expr. adv. (arr. de Mortagne) Etre en joie; de Jocus comme Goguetie. GOHANNIER, S. m. (arr. .de GOR Caen) Celui qui va chercher a la ferme le repas des mois- sonneurs. Peut-étre vient-il du vieil-anglais Goon, Aller, et signifie-t-il seulement Celui qui va, Qui fait les commis- sions ; voyez The vision of Piers the plougman, v. 4192. Cependant Hynes employait autrefois avec la. signification de Domestique, Laboureur : And if my neghbore hadde any hyne Or any beest ellis Moore profitable than myn. Vision of Piers the ploughman, v. 8755. Gohannier aurait alors si- enifié primitivement Labou- reur-commissionnaire et on sen sert encore maintenant dans la méme aceeption. Gouke,, s. f. Joie bruyante , Eclat de rire. Voyez AGOHEE. Goto, s. m. (arr. de Ba- yeux) Buveur; en breton Goulléi signifie vider, mais une corruption de Goulu sem- ble aussi probable. Gomer, s. m. Palais; de l’is- landais Gomr; il existait aussi en vieux-francais : Quar il boivent a granz gomers. Henri v’ANDELI, Bataille des sept arts, Vv. 10. GorER, v. n. Regarder man- ger avec envie d’en faire au- tant ; le vieux-francais Goret signifiait pauvre , guewx. Goror, s. m. Ulcere; du bre- ton Gér, Abees, Tumeur ; Ic francais en a sans doute dérivé Goitre et le vieux mot Gourre, en patois normand Gorre; ce- pendant Gorriére signifiait en vieux-francais Prostituée; on appelait Isabeau de Baviére la Grand Gorre, et nous lisons GOU dans la Moralité de |’ Enfant prodigue : La GORRIERE. Allez , villain! Fincver-Dovx. Allez, maraut! Venez-vous chercher les gorrieres, Faire banquetz et bonne chere Et vous n’avez de quoy fournir? GoseR, v. a. (arr. de Mor- iagne) Rassasierexcessivement et en métaphore, Ennuyer. OssE, S. f. (arr. de Valo- gnes) Mensonge innocent, pour rire, pour ce Gausser ; dans le patois du Berry on dit Gausse. GossIER, S. m. Paille de sar- razin. GOUAILLER , v..a. Plaisanter; il se trouve aussi dans le patois du Berry. Voyez le mot sui- vant. GousPeR, Vv. a. (arr. de Va- lognes) Plaisanter; Goapaer en breton. Voyez GABER. GOUBELIN, s. m. Fantéme, Revenant ; probablement le Ko- bold des Allemands. Dans un ms. du xur‘ siécle, dont quel- ues extraits ont été publiés ans le tome second I’ Altdewt- sche Blatter, on lit déja p. 75: Quidam in archiepiscopatu de Wyuelin, cum una die arcam suam plenam denariis aperiri , invenit super eos simiam se- dentem et dicentem : Noli tan- gere pecuniam quia est Cole- win, id est dyaboli. GOUBELINE, p. pas. (arr. de Valognes) Qui a des visions, Qui voit des Goubelins. GOULAYANT,adj.(arr. de Mor- tagne) Qui se mange avec fa- cilité. Voyez le mot suivant. GouLe, s. f: Bouche; cor-_ ruption de Guewle , qui se trou- GOU 419 vail aussi en vieux-francais : A teus i fist les poinz trencher Et des goules les denz sacher. Benois, 1. 11, Vv. 26823. Le francais a conservé Gou- lKée, Goulu, Engoule-vent, et le patois normand en a fait Goulard , Gouliban et Gouli- maud, Gourmand. GouLER, v. n. Vomir; pro- bablement pour Dégouler, commme Dégobiller de Gober. Goutias, s. m. (Manche) Mauvais plaisant, Farceur ; du bas-latin Goliardus, devenu en vieux-francais Gouliardois et Golias dans Jes poésies attri- buées a Walter Mapes. GouLinE , s. f. Petit bonnet de nuit qui serre exactement la téte. Voyez MARGOULINE: GouNELLE, Ss. f. Jupon; ce mot existait aussi en vieux- francais, ainsi que le Gown des Anglais : Finz devendroie noune E veitroie goune. Lai del Corn, Vv. 534. Dante adit dans le Paradiso, ch. xxvi, v. 72: Allo splendor che va di gonna in gonna. Gouras et Gouraup, adj. Gourmand ; tous ces mots vien- nent probablement du vieil- allemand Geren, Désirer avide- ment. Gourcir, v. a. (Orne) Eera- ser par une violente pression. Voyez GOURFOLER. GoureR, v. a. (arr. de Ba- yeux et de Mortagne) Trom- per; (arr. de Vire) Vexer ; Gour signifie en breton ma- lice couverte, méchanceté. Les pharmaciens appellent les dro- sues falsifi¢es des goures , ct 120 GOU le francais emploie Goureur dans le sens de Trompeur. , GOURFOULER, Vv. a. (arr..de Bayeux) Presser dans la foule, et par suite Meurtrir ; Pierre Larrivey l’a employé dans le premier sens : nies Dun hiver englacé tout roidy de froi- dure, Et qui gourfoule tout d’un pas auda- " creux. Dans le patois du Berry on dit Garfouler.. | GOURGOUSSER, V.: nh.» Com- mencer a bouillir, et au figuré Murmurer ; on le trouve aussi en vieux-francais. | GOURMACHER, V. n. (arr. de Mortagne) Manger malpropre- ment. ; | GOUROUFFLE, S. m. Insecte gui se trouve dans les fours (Blatta orventalrs). GOUSPILLER, v. a. Houspil- ler, Traiter comme un Gous- pin; onle trouve aussi en vieux- francais : Cest. fort. bien fait sil vous gouspille ; Nazssance d’ Amadis dans Gherardi, Thé- dtre italien, t. v, p. TA. GOUSPIN , 8S. m. (arr. de Va- lognes) Gamin , Petit polisson. Gousson, s. m. Fruit de l¢- glantier. Voyez COCHONNET. GOUVILLER, Vv. n. (arr. de Mortagne) Se moquer de quel- qu’un en face. Govuvitzon, s. m. Espéce d’anneau ; de Copula . comme Goupille ; c'est probablement le méme mot que le Govion du vieux—frangais : Ne l’puet tenir aniaus ne govion. Chevalerie Ogier, v. 400. GoOuYERE, s. f. (arr. de Pont- Audemer ) Mesure pour la GRA creme, qui était deja en usage au milieu du xv° siecle; voyez M. Alfred Canel, Histoire de Pont-Audemer , t, 1, p. 404. GRAANTER, v. a. Accorder, en anglais Grant et dans la basse-latinité Graantare ; ilse trouvait aussi en, vieux-fran- Catsiriuct coup ob Svs wh ae Et que lor femmes sunt donees , Otreiees e graantees. eee | Benois, !. u, ¥. 15594. On dit également Granter , comme en. vieux-frangais ; vo~ yez Bs quatre livres des Rois, ; GraBoTrTeE, s. f..(Orne). Téte de graine de lin. Risks RACES), S. f. ph. (arr. de Va- lognes) Amabilités , Coquette- ries; de Grace ou de Grati- tude. 308 GRACIER, V, a. (arr. de Va- lognes ) Remercier, Rendre graces, (Gratart), comme en vieux-francais : qe Li dux le voit, Deu prist a gracier. Chevalerie Ogier, Vv. 6285. GRADELIER, Ss. m. (arr. de Bayeux) GRabDILLiER (arr: de Valognes) Groseiller non épi- neux. Voyez le mot suivant. Graves, s. f. ph GRAaDILLES, Petites groseilles, parce qu'elles sont disposées. par gradation le long des grappes. GRADILLE, $. f: (arr. de St- Lo). Oseille, dont l’acidité est proverbiale comme celle des petites groseilles. Voyez le mot précédent. — Mer GRAFFINER, Vv. a. Gratter lé- gérement; en breton Arafina signifie égratigner. Ce mot existait aussi en provencal (Grafinar) et en vieux-franeais. mais ayee le sens du breton: Il GHA leur mordoit les aureilles ; ils luy eraphinoient le nez; Ra- belais, 1.1, ch. 44. GRAILLONNE, adj. (arr, de Mortagne) Sale, Malpropre, Qui sent. le graillon. GralLLor, s. m. (Orne) Miette ; selon Leroux, Diction- naire comiguc, t. 1, p. 590, Graillon aurait signifié en vieux-francais un reste de nian- de, une bribe. GRANGETTE, s. f. (Orne) Pe- tite cage pour prendre les oi- seaux. ) | GRANMENT, adv. Grande- ment ; cette crase se trouve aussi en rouchi et en vieux- francais. Grappe, s.f. (arr. de Ba- yeux) Crabe ; cette corruption a sans doute été amenee par le mot suivant. Graprern, v. réfl. (arr. de Bayeux) S’attacher fortement ; en breton Krapa signifie Sai- sir avec un grappin ; Cram- ponner. GrassET, GRESSET, S. Mm. (Manche) Lampe en fer; Gra- set signifiait huile en vieux- francais. De malheur je n’avions ni gresset ni candelle. FEeRRAND, Muse normande, p. 4. GRATTER, Vv. a. (Manche) Prendre ; Kreista signifie ex- torquer en islandais, et nous serions tentés d’y rattacher le francais Regrattier , Reven- deur. ) Grave, adj. (Manche) Mar- qué de petite vérole ; en islan- dais Grafa signilie creuser , trouer ; et Roquefort donne a Graveure le sens de fente , ou- verture. GRE 424 Grec, adj. (arr. de Bayeux) Avare. Arabe; comme le fran- cais Grigow ; il signifie aussi Rusé, Fourbe, et on lit dans saint Jéréme Epistolax ad Fu- riam : Impostor et Graecusest; le Grickr des Islandais a le méme sens que le Pwnicus des Romains. Grick, s. m. (arr, d’Alen- con) Grenouille verte. GRECQUERIE, S. f. (arr. de Bayeux) Trait d’avarice, Jui- verle ; VOyeZ GREC. GREDOLLE, s. f. (arr. de Mortagne ) Branche d’arbre seche qui tombe naturellement; peut-étre du latin @radi qui devient Gredi dans les compo- sés aggredi, ingredz, etc. Grice, s. f. (arr. de Saint- Lo) Affinoir. Grice, s. f. (arr. de Valo- snes) Personne tombée d'une osition brillante dans le mal- ae Voyez le mot suivant. Grete, p. pas. Marqué de petite vérole; on la dit du visage comme d’un champ que la gréle a empéché de realiser l'attente que les apparences avaient fait concevoir. Gremi, v. a. Ecraser, Bri- ser; Grem signifie en islan- dais blesser , attaquer. Onena fait le fréquentatif Grémller et le substantif Grémillon ; probablement la racine de gru- meau et de gruau est la meme. Grenons, s. m. pl. Mous- taches, Favoris (crenis): Si li coupa la barbe a touz les gre- nons; Recueil des historvens de France, t. U1, p. 227. On trouve plus souvent en vieux- francais Guernons : Nunt mie barbe ne guernons, 122 GRI Co dist Heraut, com nos avons. Roman de Kou, t. II, p. 174. GreTTE, s. f. (Orne) Ché- nevotte. GRiBICHE, Ss. f. (arr. de Va- lognes) Vieille femme méchan- te dont on fait peur aux en- fants ; peut-étre de l’islandais Grim, attaquer, et Bita, mor- dre. Voyez cependant GricuE. GRIcHE, s. f. (arr. de Ba- yeux) Grimace de méconten- tement. Voyez GRICHU. _GrIcHER, y. n. Etre de mau- vaise humeur. Voyez cricuv. GRICcHEUX, adj. Moqueur, Qui fait Gricher. Voyez GRIcHU. Gricair, v. n. (arr. de Cher- bourg) Pleurer. Voyez cricav. Gricuu , adj. Qui est de mau- vaise humeur ; en breton Gri- siaz signifie emporté, méchant; cest probablement la racine du vieux-francais Engres et de Griesche qui s'est conservé dans Pve-Grieche et Ortie- griesche. GRIFFER, y. a. Egratigner comme avec des Groffes; ce mot existe aussi en rouchi. GRIGNE, S. f. Crodite de pain, en vieux-francais Grignon ; Krina signifie en breton Ron- ger avec les dents et nous a- vons encore Grignotter. GRIGNER, V. n. (arr. de Ba- yeux) Etre maussade; on le trouve aussi dans le patois du Berry ; en breton Grinouz si- ghifie hargneux, querelleur. GRILLER, Vv. n. (arr. de Va- lognes) Glisser; probablement parce que les clous que les paysans portent sous leurs sou- liers tracent des lignes: pa- ralléles, qui ressemblent. aux barres de fer d'un gril; on dit GRI aussi Dégriller et le vieux-— francais donnait le mémeé sens a Esgriller : A la planche vint, sus monta; Ne sai dire s’il abuissa, U esgrilla, u meshanea, Mais il chai; si se neia. Roman de Rou, v. 5532. GRIMELIS, S. m. Mélange. GRIMELU, adj. Marque de petite vérole. GRIMER, V. a. Egratigner ; probablement de Tislandais Grem, Blesser, Attaquer, I’é- tymologie de Grommeler sem- ble la méme. Voyez EGRIMER. GRINCHER, V. a. Egratigner; uand il est neutre il signifie ligner. GRINGALET, Homme sans consistance; en breton Gra- galer signifie Piailleur , Cri- ard; selon Roquefort, t. 1, p. 715, il se disait en vieux-fran- cais d'un cheval mavgre et a- lerte ; dans le Berry et-dans le Jura on lui donne. le méme sens quen Normandie. GRIPER, v. a. Grimper ; pro- bablement le normand est plus fidéle & son étymologie que le francais, car la voyelle n’est pas nasalisée dans Gravir,etles montées se nomment dans la Haute-Sadne des Graps. GRISON, Ss. m. Quartz; de Vislandais Griot Pierre, qui s'est conservé en francais dans Grvottes , nom que !’on donne a une cerise dont le noyau (Caillou dans le Calvados) est fort gros, ou de sacouleur gri- se: Yuet, pren celle pierre bise, Sy l’esboche a ton grant martel. Miracle de Ste-Géneviéve, dans Jubinal, Mystéeres inédits , t. I, p. 265, 'v. 14. GRO Comme le grison est la plus dure des pierres , cette derniére étymologie pourrait expliquer celle de Biseau, mal taillé , taillé comme une pierre bise. Gnosis, adj. Important, Fier (Bis grossus). ll existait en vieux-francais : Sa, Maistre, ne rebellez point; Faictes vous icy du grobis. Mystere de la Résurrection, scén. Iv. et La Fontaine a appelé le chat Rominagrobis. Groc, Groc, s. m. (Orne) croc (Calvados) Aspérités de la boue gelée, qui rendent les chemins raboteux : on dit pro- verbialement d'une boue assez eelée pour ne pas céder sous le pied les crocs portent. Groin, s. m. Nom de plu- sieurs petits caps marécageux de la céte d’Avranches et du Bessin , qui se conservent plus verts que tout ce qui les en- foure; en-islandais Groin , Green en anglais, signifie ver- doyant. Le vieux-francais avait aussi Gronelle et le bas-latin Gronna et Gronnia. GROLER, Vv. n. Tousser; de Yislandais Arulla, Remuer, S’agiter, la racine de crouler et de grelotter, gruler en vieux- francais. Le bas-latin Grollare et le vieux-francais Croller s employaient au propre comme lislandais ; ainsi on lit dans une citation du Roman de la Rose dans Charpentier, t. If, p. 570, col. 4: Ainssy comme un ymage mue, Qui ne se crolle , ne ne mue, Sam pie, sans mains, sans doi croller, Sans ex mouvoir (sic) et sans parler. Grouies, s. f. Vieilles sa- vattes ; en languedocien Grou- GRO 423 le ; on trouve aussi en vieux- francais Groules et Grolles. GROMENCHIER, V. D. (alr. de Cherbourg) Grogner, Grom- meler; Gram en islandais et Grimm en allemand signifient furteux, méchant. GRONEE, S. f. (arr. de Ba- yeux) Une certaine quantité , Ce qu'on peut porter dans un tablier; on dit aussi Grenée. En breton Grown signifie a- mas, monceau , réunion. Mais comme dans |e second livre des Miracles de la Vierge, Gautier de Coinsi appelle le giron ou des poches Grons : Tout en ourant l’erbe a cuellue..... Ses grons en a la dame emplie. une autre origine (du latin @re- mium) ne serait pas impossi- ble. GROSSET, Ss. m. Parement de fagot, plus gros que les petites branches qui s’y trou- vent ordinairement. Grou, s. m. Eau épaisse et puante ; on dit aussi Grau. Ce mot peut venir de l'islandais Grotta, Lie d’huile de poisson; de l’allemand Grube, Cloaque; ou du bas-latin Groua, Marais. Groucer, v. a. (arrond. de Cherbourg ) Remuer légeére- ment ; & Vire ilsignifie, comme en vieux-francais, Gronder ; Et, silianul qui en grouce, Ne doubtez que ne le courouce _ Tant que la vie li touldray. Mystere de Robert-le-Diable, p. 2. Mais on donne en Normandie a danse le sens de forte répri- mande et Groa signifie a la fois en islandais mettre en mou- vement et se mettre en colere. Une origine celtique ne serait 424 GUE pas non plus impossible, car le breton Aréza signifie mur- murer , gronder, GROUER, Vv. a. Abattre des fruits, Faire sortir le grain de sa capsule; rower signifie ervbler en breton. On le prend aussi quelquefois dans l’accep- tion de Se fdcher, ainsi qu’en vieux-francais : Amez le bien, je n’en grouz mie. Roman de la Violette, v. 3023. GROULONNER, V. n. (arr. de Saint-Lo) Renacler. GUANCHER, vy. n. Aller, com- me Ganga en islandais ; le vieux-francais Guenchir avait modifié sa signification primi- tive; i signifiait aller de cété , en arrvere , tourner : E Normanz sise tindrent, ke nuls d’els ne guenchi. Roman de Rou, v. 1532. Chancon, va-t-en pour faire mon mes- sage La ou je n’os trestourner ne guenchir, Que tant redoutla male gent ombrage. CHASTELAIN DE Coucy. Chanson xix. st..5, p: 71. Voyez aussi Les quatre l- ores des Rois, p. 153; Raoul de Cambrai, p. 118, v. 15; Chevalerie Ogier de Danemar- che, v. 5872 et Rutebeuf , OEuvres, t. 1, p. 290. GuE, s. f. Ruine; ce mota probablement quelque affinité étymologique avec Gueux. GuEDE, adj. Parsemé, Farci, Gonilé ; Geda signifie enrichi en islandais. On donne aussi & (ruédé le sens wi eh gor- gé de nourriture, qu'il avait en vieux-francais et qu’il conserve dans le style Pawaibier: GUEDINER, Vv. n. (arr. de GUE Pont-l'Evéque ) froid. GuEDoT, s.m. Cochon. Voyez GUEDE. we GUELOT, s. m. Moutarde blanche (sinnapis arvensis). GUENETTE, S. f. (arr. de Mor- tagne) Femme de mauvaises moeurs ; corruption de Geuine. GUENER, v. a. Crotter ; le patois de la Vendée lui donne la méme signification, peut- étre a-t-il quelque liaison éty- mologique avec Guenaux, qui, suivant Leroux, Dictionnaire comque, t. I, p. 604, signi- fie gueux , mendiant. GuENIvE, S. f. (arr. de Saint- Lo) Vilaine femme, Guenon; dans l’arrondissement d’Ar- gentan, on dit Guenuche. GuERBIERE, Ss. f. (arr.. de Bayeux) Grande bouche , qui pourrait avaler des gerbes. GUERDONNER, Y. a. Récom- penser ; Donner ce dont on est digne, en vieil-allemand Werd; ou peut-étre Donner beaucoup; au moins Werth a pris ce sens dans Werthschatzen. Fy de beanté ) ) Qui son amant de desplaisir guer- donne, Au lieu de bien qn’il avait mérité. © OLiviek BasseLin, Vaux-de-Vire, — ' p. 143, éd. de M. Travers. | Trem bler de Ce mot n’est plus d’usage en francais. GUERMENTER, V. 2. et refl. Se lamenter et par suite Se preoccuper, Se méler , Tour- menter ; en gallique Garm si- gnifie crt, plainte. Ce mot avail les mémes acceptions en vieux-francais, ainsi on lit au commencement du Romande la Rose: | A$ GUE Forment me pris a guermenter Par quel art et par quel engin Je peusse entrer dans ce jardin. et dans le Roman de Garin, Bibliotheque de l’Arsenal, n° 481, fol. 88, recto, col. 2, v. 30 : Sire Girbert , por l’amor Dieu merci, Ne soupirez ne vrs guementez Si. GuernE, Ss. f. Poule. Ils n’ont laisse porc, ne oue, Ne guerne, ne guernelier. Chansons normandes, p. 178, éd. de M. Dubois. Guernelier qui signifie sans doute coq n’est plus usité. GUERNOTTER, V. n. Grelotter. GuERVE, s. m. (arr. de Vire) Gruau. GuETRUER, V. 0. (arr. de Cherbourg) Gazouiller. GUETTER, v. a. Regarder ; cest une extension fort natu- relle de la signification du mot francais qui a conservé le sens delislandais Geti, Epier, Ob- server. I] s’emploie aussi avec la forme réfléchie et signifie alors Se procurer : Barbe rouge et noirs cheveux, Guette-t’en si fu peux ; dit un proverbe normand. GUEULARD, Ss. m. Qui parle haut et souvent , Qui est fort en gueule; il signifie aussi comme en rouchi : Qui mange sa for- tune. GUEULTON , S. Banquet. Laissez jusqu’au retour les tripes, les créions; Quand )’ennemi nous presse, au diable les gueultons. LALLEmaAN, La Compénade, ch. 1, p.9. m. Festin , GUI 425 GUEZETTE,S. f. (arr. de Caen) Fille étourdie, insolente; en breton Guwez signifie sauvage , grossver. GuIBOLLE, s. f. (Orne) Jam- be ; il ne se dit qu’en mauvaise part ; en islandais Vippa si- gnifie tourner, remucr. Guiprke, s. f. (arr. d Alen- con) Présent; de la foire de Guibray oi l'on achette beau- coup de cadeaux. On dit a Caen dans le méme sens: Don- nez- moi ma foire. Guicuon, s. m. Petite Tasse de bois. GuIpEAUX, Ss. m. pl. Sorte de filet. GUIGNER, V. a. etn. (arr. de Valognes) Lancer des pierres : on l’emploie aussi avec la si- nification qu'il a conservee en rancais dahs le style familier: probablement le _hollandais Guignar et espagnol Guinar ont été empruntés au francais. GuicnEux , adj. Moqueur , Qui regarde d’un air moqueur. GuILER, v. n. Crier d'une voix aigué (Gueuler ?). GUILVESSEE, s. f. (arr. de Bayeux) Prise de tabac ;_ pro- bablement un Rien, une Bille- vesée, qui se dit Gualvesée dans le patois de Rennes. GUIMBLET, S. M. Mortain) Vilbrequin. GUINCHER, GUINCHOTTER, V. n. Lancer des ceillades les yeux 3, demi-fermés ; de l’allemand Winken, Faire des signes avec Jes yeux. | Guitis et Guitus, s.m Go- sier. (arr. de 126 HAG Hacer, v. a. (arr. de Mor- tagnes) Détruire , Briser; peut-€étre une corruption de Hacher. Hacnetre, s. f. (arr. de Ba- yeux) Couteau qui ne coupe pas ; dans le patois de Rennes on appelle une serpette M- nette. Ce mot signifie aussi équille et vient sans doute de Pislandais Hagna , Servir, Etre nécessaire. Hacue, s. f. (arr. de Valo- gnes ) Fruit de l’aubépine , . s appelle Hégan en breton. est aussi le nom que !’on donne a l’extrémité du Coten- tin, ott les pirates normands s'étaient fortifiés au moyen d’un fossé dont les restes sont con- nus sous le nom de Haguedtk. C’était, comme on sait, leur usage: Normanni devastata ex maxima parte Hlotharici regni regione, prope fluvium Clyla, loco qui dicitur Lovonium, se- pibus (more eorum) munitione capta, securi consederunt ; Annales Fuldenses, année 891, dans du Chesne, Scriptores Normannorum, p. 18. Rous ne li suen qui od lui erent, Defenses firent e fossez Granz e parfunz € hauz e lez , Clos environ cume chastel. Benois , Chronique rimée, 1. u, V. 3442. -Voyez aussi Dudon de Saint- Quentin, |. 11, dans du Chesne, 1. cit. p. 77; Guillaume de Ju- miéges, 1. 1, ch. 10, Ibidem., HAI P 228 et le Roman de Row, t. , p. 64. Selon Thre, lislan- dais Hagi aurait signifié Haie, nous ne le connaissons qu avec le sens de Paturage , mais pro- bablement clos; au moins le vieil-allemand Hag et l’anglo- saxon Hacg nous portent a le croire. La racine de Have pour- rait méme étre celtique ; car dans le patois de l’Isére Agz si- gnifie Haie, Buisson ; dans celui des Vosges Haigis signi- fie Bosquet et le vieux-fran- cais Have avait le plus souvent la signification de Bois; la Haie de Valognes, la Haie d’'Ectot , Saint-Germain-en- Laye, etc. Har, s. m. Partie inférieure d'une porte coupée en deux; Treillage gqu’on y_ substitue pour empécher les enfants de sortir; voyez HaIsET. Ham, s. m. (arr. de Bayeux) Hamecon ; c’est le latin Hamus, avec la prononciation mouillée du patois normand, ailleurs on dit Ins. HAINGEUX, adj. (arr. de Ba- yeux) Remuant, Méchant, Haissable; du vieux-francais Hainge, Haine, ou plutét de Henger , Fatiguer (Angere). Harnere, adj. Maladif; c’est le latin Aeger, avec la forte aspiration du Nord, qui s’est aussi conservé dans le francais Malingre. Haion, s. m. (Orne) Bar- HAI riere en broussailles pour bou- cher une bréche, Petite have. Hain, s. m. (arr. de Vire) Chevelure ; en islandais Har eten anglais Hair. Hatre, adj. De mauvaise humeur ; il se dit surtout des enfants, Voyez AIRER. Hatset, s. m. Partie infe- rieure d'une porte, coupée en deux ; du bas-latin Harsellus, en vieux-francais ainsi que dans !Orne Haise : Comme Pierre Playart.... vouloist met- tre en une cour de Ja maison ouildemeurait, une haise qu'il avoit faite pour obvier que le bestail de la ville n’entrast en sa court ; Lettres de grdce de 1371, citées dans du Cange , t. Ill, p. 616, col. 4. On dit proverbialement des amoureux: S’ils n’entrent par le haiset, Ils entrent par le viquet. Ce mot signifiait sans doute originairement Une petite porte comme |’Huiselet du vieux- francais. Haisier, s. m. (arr. d’A- vranches ) Ridelle , du bas- latin Hava. Voyez HAISET. ‘Harrer, v. n. (Haute-Nor- mandie) Plaire, Etre agréable; du breton Heta dont la signi- fication est la méme : Vous autres, dittes, s’il vous haite, Voz nons, et vous venes offrir. Farce des pates-ouaintes, p. 6. Cette origine semble d’au- tant plus probable que HAITER signifiait aussi en vieux-fran- cais Désirer, et que le mot bre- ton se prenait dans. la méme acception ; le francais Souhaiter appartient certainement a la méme racine. HAL 427 Haitigr, s. m. (arr. de Va- lognes) Petite poéle & rebords dont on se sert pour faire la ga- lette, qui figure dans toutes les réjoutssances ; ce quexprime le breton Heta, comme l1slan- dais Gala. HALaBReE, s. m. (arr. de Ba- yeux) Garnement; probable- ment de Helluo que l'on re- trouve sous son ancienne forme en vieux-francais ; voyez aussi Hellir dans Roquefort, t. I, p. 746. Haaser, v. n. Respirer difficilement ; de Halitare, ou de son dérivé francais. Harpi, s. m. Mélange égal de cidre et de poiré; Halb en allemand et Half en islandais signifie movtré. Voyez MITOYEN. Hater, v. a. Tirer ; de l’is- landais Hallda, Tenir , Tirer i soi; cette origine est d’au- tant plus probable que le sué- dois Halla a aussi rejeté le p, et que Haler appartient aussi a la langue de la marine, qui, comme on sait, a emprunté une tres grande quantité de mots & l’islandais. HALIPRE, Ss. m. Gercures des lévres , qui les desséchent et les durcissent, comme si elles étaient hdlées ; a Valognes on dit HALITRE. HALiTRE, s. m. Grand air sec qui gate la peau, qui la hale. | HALLEFESSIER, Ss. m. Terme de mépris , Qui ¢zre le derriére. HatvemecueE , s. f. Dispute , ou l'on finit par se prendre aux cheveux et se haler les méches. HaLLorer, v. n. (arr. de Caen} Remuer le crible, le Tirer doucement de droite a 428 HAN gauche pour amasser la’ paille sur le devant. Hao, s. m. (Orne et Cal- vados) Petit valet qui conduit les chevaux par la bride. qui les tare. On trouve Hillot, en vieux-francais, avec un sens a peu-prés-semblable : Ce vénérable hillo fut adverti Ce quelque argent que m/’aviez dé- parti. Leroux, Dictionnaire comique , tI, p.: 205 Mais nous ne croyons pas comme l’a dit Roquefort, t. I, p. 754, qu'il vienne des Jlotes des Lacédémoniens. Ham, s.m. Hameau. Ce mot ne se trouve plus que dans quel- ques noms de communes. Le Ham dans |’arrondissement de Valognes , Ouwistreham dans larrondissement de Caen ; il vient certainement des langues du nord ; en islandais Heim si- gnifie mazson et Ulphilas l’a em- ployé dans le sens de village. HAMBOUINER, V. n. (arr. de Valognes) Trainer Ja jambe, probablement pour Gamboui- ner : dans les Vosges Cambiner signifie Boiter. HamMEE, s. f. (arr. d’Ar- entan) Cépée; ailleurs on onne ce nom a une forte haie de saules , probablement parce quils poussent beaucoup de jets. HAN, s. m. ie de Bayeux) Fantéme dont le nom vient pro- hablement del’allemand; voyez Grimm Deutsche Mythologie, p. 524. _ Hanap, s. m. Coupe, Verre a boire. Remplir nos hanaps. BASsELIN, Vaux-de-Vire, p. 173, éd. de M. Travers. HAN Ce mot se retrouve en bre- ton avec la méme signification; if existait aussi en vieux—fran- cais : Grans vesseaus d'argent ne hanaps d’or ; Ordonnances des rois de France (4332), t. I, p. 86. Hanne, s. f. (arr. de Ba- yeux) Vieille femme; Hanne signifiait en vieux-francais une Vieille cavalle ruinée; plutdt du latin Hinna, Mule, que du gallique Anner, qui signi- fie Une jeune vache , comme le veut Huet dans ses Additions aux Origines de Ménage ; mais en breton Hena signifie Trés+ Vieux. HANNEQUIN, S. m. Enfant dé- sagréable, Petitmulet (Hinnus). HANNEQUINER, V. n. Faire une chose avec peine, avec hans ; Voyez ENHANNER ; c'est probablement la méme idée qui avait fait appeler en vieux- francais les laboureurs Han- neers. Il signifie aussi Taton- ner, Hésiter. Hannes, s. f. pl. (arr. de Valognes) Culottes; le patois de Rennes l’emploie dans la méme acceplion; ailleurs il signifie Coeffe, Hennin , -en vieux-francais, et on lui donne quelquefois dans |’Orne la si- gnification de Veste. aye? HANNELLE, Ss. f. Menu bois ; Heniau en vieux-francais. HannocuE, s. f. (Orne) Gros morceau de bois. Ce mot et le précédent se rattachent sans doute & un radical commun qui signifiait Bots; leur différence tient & leur terminaison , qui indique l'une un diminutif et Pautre un augmentatif ; voyez aussi HANNOT. HAR HANNONER, V. n. (arr. de Va- lognes) Parler en s’arrétant et se reprenant & chaque ins- tant, peut-étre comme un dne. Iceluy avec sa bouche d’asne ne fait qu’asnoner ; Balde ne peut entendre son langage as- nin ; Histoire macaronique’, t. i, p. 276. ; patie a Hannor, s. m. (Orne) Petit vase en bois. | we ~ Hants, s. f. Manche d'un fouet ou d'une faulx; probable- ment de Hasta, car on appelait en vieux-francais les lances des hanstes et on lit dans le Roman du Saint Graal : Le hanste de la crois estoit toute vermoille. ‘Hanrigr, ss. f. Butte de terre. HAQUETER, v. n. ‘(arr: de Mortain) Jaboter , Parler a tort et & travers ; en breton Ha- kein signifie Bredonitler, et Ha- quier ale méme sens dans le patois des Vosges. Hanassorre, s. f. Poéle per- cée de trous pour faire cuire des marrons que l’on se harasse a remuer. ‘HaArveEt (ceuf), adj. (Calva- dos) du bas-latin Hardellus ; voyez'du Cange, t. 11, p. 625, col. 3. Les ceufs hardelés n’ont pas de coquille ; ils sont pon-— dus par des coqs et quand on les met dans du fumier de che- val, il en sort des serpents dont Phuile est excellente pour composer des filtres ‘et trans- muer les métanx : voyez.la re- ‘cette de lor espagnol dans Théophile, Diversarum artium schedula, p. 180. Dans l’Orne on dit Hardé et Hardré. “HARDELLE, s. f. Jeune fille complaisante > Si j’en beuvois byen soubvent , | HAR Fauldroit la hardelle: Vaux-de-Vire, p. 198, ¢d. de M. Travers. / . 429 HArvER, V. a. Troquer. Oh! que de bon cueur mes livres har- derois Pour les escots ou tu serois! | Gentil breuvage, ah! tu m’es trop amy Pour te boire a demy. ‘ Jean Le Hovxi (Olivier Basselin), - - Chanson inedite. \ - Harpouin, s. m. (Orne) Né- gociateur de mariages ; on dit aussi au féminin Hardouine. Il ne se prend qu’en mauvaise part, ainsi que les autres mots qui se rattachent a. la méme idée ; le vieux-francais Har- deaw signifiait Coqguin, Vau- rien. Harge, s. f. (arr. de Bayeux) Pluie de peu de durée ; Harne signifie Ondée dans le patois du Berry; en ‘yieux-francais on disait Horée: — Veit les tuneires , e les venz, e.les giels, yy E les orez, les merveillus tempes. Chanson de Roland, st. cLxxx1, v..9. .En basque Uria- signitie Pluie. ’ Harer, v. a. (arr. de Vire) Exciter. _ Nas-tu pas ouy ce truant, , Que je Vavois dit cy-devant, Que de ma porte tu. chassasses - Et que les chiens tu lui harasses. Moralité du Mauvais riche et . du Ladre. L’anglais To hare a la méme signification, et une racine cel- tique est assez probable; en breton Harz signifieAbovement. Harcorer, v--n. Quereller. On le trouve aussi en vieux- francais : Ycelui Mahilet se leva 9 430 HAR de la table: et print cedit Gilet par la poitrine, et ledit Gilet lui semblablement, et tenoient, et hargotoient Pun l’autre for- ment; Lettres de grdce , de 4380, dans du Cange, t.1, p. 390, col..3. Dans. le patois des Vosges Hargot signifie Se- cousse , Cahot. Haricorer, v. 0. (Orne) Con- duire des chevaux quon est oblige de fouetter & chaque ins- tant; Voyez HARER et le vieux- francais HARIER : Je change tout, je tourne, je varie, Je faiz cheoir, relever et abbattre Sans aviser qui saigement charie ; Je mors, je poins, j'argué et puis harie. Danse aux Aveugles, p. 37. {l signifie aussi Trouver a redire (Voyez HARGOTER), et Faire toute sorte de mauvals - métiers. Voyez le mot suivant. HanicoTiek, s. m. (Orne) Qui vend et achéte des bes- liaux ; Voyez HaRIN. Il signifie aussi, peut-étre par extension, Chicaneur , De mauvaise foi ; voyez cependant HARGOTER. HaricacnEr, v. n.(arr. de Bayeux) Disputer. Voyez HaR- GOTER. | Harin , s. m. Mauvais che- _ yal, Haridelle ; probablement de quelque dialecte germani- que ; en anglo- saxon si- gnifie Cheval, Harsa jument et nous avons encore Haras. Lislandais Hros, Cheval, est également devenu Rosse. Dans V’Orne on dit HoURIN. _ Hariverier, s. m. Marchand de bestiaux. , Hartan, s. m. (Seine-Infé- rieure) Qui marchande, Qui nest pas franc en affaires ; ‘tive. HAT . Voyez HARICOTIER @t HERLAN. ARMONER, (arr. de Bayeux) Gronder, Sermoner, que l’on prononce en patois normand, Sarmoner. | HarovssE, s. f. Mauvaise ju- ment, corruption de Carousse; voyez ce mot. ¥ HARQUELER, V. a. (arr. de Mortagne) Tracasser , Chica- ner, Faire toutes sortes de métiers malhonnétes ; on em- ploie dans un sens analogue le substantif Harquelier. Harracnes = s. f. pl. (Orne) Tiges brisées dé chanvre, qui sont arrachées. o4 Harr, s. f. Grosse branche ; peut-étre dérivé du. vieil-alle- . mand Hart, Forét, comme Boiselaétéde Bois. Hasrer, adj. (arr. de Valo- genes) Maigre, Chétif. Hastivet, s. m. Orge ha- L’on dict hastivet s’eschaulda. Chansons normandes, p. 161, édit. de M. Dubois. HaTEL, s. m. Bois coupé et fendu (voyez ATELLE) : Icellui prestte tenant en sa main une usche de bois qui se nomme au pais (en Normandie) une ” Hastelle ; Lettres de grdce de 4525, citéés dans du Cange, . t. m1, p. 633, col. 2. #y HatELeT, s. m. Cédtelettes de lard quel’on meta la bro- che, en vieux-francais Haste (Hasta) que le patois lorrain et celui du Nivernais ont conserve dans cette acception. Comme maintenant Broche, Haste semployait avec le sens d’une chose que l’on mettait ala b70- che. € HAV ~ Et quant j’avoie, o le verjus, Mon haste en la broche torne. Fabliaux anciens, ‘t. tv, p. 447. Quant a la terminaison qui indique un diminutif, elle ex- prime une idée qui se trouve aussi en vieux-francais : Ou- quel ostel ilz eussent fait cuire et appareiller une hatemenue de pore ; Lettres de grace de 4392, citées dans du Cange, t. m1, p. 633, col. 4. ' Hatr, s. m. Haine; en islan- dais Hata signifie Hair, et le vieux-francais Ahaty, Enhats se rattache probablement a la méme racine. Hatiwyz,s.f.(Orne) Intérieur des animaux ; ce mot se trouve aussi dans la langue populaire des autres provinces, car les Bénédictins ont dit au mot HASTA 4 : Recentis suillae frus- tum unde rusticis nostris: Je vous enverrat de la hastille et du boudin. r . Haute, s. f. Fosse; de l’is- landais Hol dont la significa- tion est la méme : nous necon- naissons ce mot que dans quel- ques noms de lieu ; la Haule .de Surrain, la Haule de Saint- Laurent-sur-Mer. | Hautmat, s. m. Epilepsie ; Orre-mal- en vieux-provencal. On regardait pendant le moyen- age l’épilepsic comme une vé- ritable possession ; voyez AVER- SAT. | Havet, s. f. (arr. de Vire) Femme malpropre’; c’est une figure, Havet signifie en vieux- - francais un ustensile de cui- sine, qui était sali par la fu- mée. | Ung svilh, ung havet tout entier HEC Et une grande lechefrite. Inventaire des biens de l’'amant trépassé de deuil, dans Kel- ler, Romvart, p. 182, v. 7. 434 C’était probablement la eré- mavllere; voyez le mot suivant, Haver (Béte) s. f. (arr. de -Valognes) Béte imaginaire dont on fait peur aux enfants pour les empécher d’approcher de Yeau. Havet signifiait en vieux- francais Crochet. Se dit ’en que ce sont les diables A tout leurs grantz crocz et leurs chables, ‘i A leurs ongles, a leurs havetz. Roman de la Rose, v. 18684. ‘Ila conserve cette significa- tion en rouchi. Havron,s. m. Folleavoine: Hafrar en islandais ; Habaro en. vieil-allemand; Wild Haber en allemand moderne; C’est hayroa et pois percé, est une locution populaire qui signifie Lun he vaut pas micux.que Vautre. Hazk, s. m. (Orne) Marais , Tourbiére. Hesralt, s. f. (arr. de Va- lognes) Cri percant ; probable- ment une corruption de Haut: bravt que le vieux-francais avait formé de Braire : 3 Mort me faindreiz; mais de noz genz Ne seit petit li pluremenz, Li braiz, i criz ne la merveille. Benois, Chronique rimée, l. 1, Vv. 1635. ~ Herc, s. m. Moitié inférieure d’une porte. Ce mot avait la méme signification en vieux- francais : Le suppliant estoit a son huis appoié sur son hec ; qui fait aussique demi closture d'un huis ; Lettres de grace de 1367, 432 HER dans du Cange, t. 1, p. 642, col. 4. Dans-l’Orne il signifie aussi Barriere de champ. On donne le méme nom a une piece du pressoir. Hacguet, s. m. Ridelle, Par- tie d'une charrette en forme de barriére, de Hec, qui sert a retenir la charge ; nous avons déja remarqué le rapport entre HAISIER et HAISET. Ce mot exis- tait aussi en vieux-francais et a été, comme une foule d’au- tres, mal expliqué par Roque- fort, Supplément aw Glossaire, p. 483... ; Hacer, v. n. (arr. de Saint- Lo) Bégayer. oyez ACTAIGNER et HAQUETER. Hepat, adj. Sali, Chiffonné. Voyez: ROUDRI. bitte Heeurr, v. n. (arr. d’Avran- ches) Hair; Heugi en breton. Hermes, s. f. Bruit. Et ientouimes la hemée. Feranp, Muse normande, p. 21. Hinu, s. m. (arr. de Cher- bourg) Maladie des oiseaux qui les fait tourner sur eux-mémes comme sils avaient des con- vulsions épileptiques. Ge mot signifie dans l’arr. de Bayeux un Brouillard épais. Hénuer, v. n. Tergiverser, Hésiter, tournoyer comme un oiseau attaqué du Hénw. HepincEr, v. a. Oter l'eau, Eponger.. Hénasser, V.n. Faire un ou- vrage avec peine, Vivre diffi- cilement; il s’emploie aussi avec un sens actif et signifie alors Chicaner. Sa racine est probablement celtique car le breton Harza a la triple signi- fication d’Etre arrété, d’Ktre _ HER embarrassé et d’Aboyer... HeErBiers, s. m. pl. (arr. d’A- lencon) Mauyaises herbes. — Hercana, adv. (arr. de Mor- tagne) Vis-a-vis , Nez-a-nez. Herpre, v. a. Garder ; peut- étre de Haeres, Possesseur , ar la méme idée que le bas- atin Herdimentum et le fran- cais Héritage. LRH Je leur lerray prendre, ravir et herdre Ce qu'il vouldront; j’en suis bien re- th | Bol, _ Farce des Pates-ouaintes, p. 26. HerpreE , adj. Avare, Inté- ressé. Voyez le mot précédent. Hine, s. f. Peau de loup dont sont couverts les loups- garous ; pour les en délivrer , il faut leur porter trois coupsde couteau au front , ou, suivant quelques autorités , leur tirer seulementtrois gouttesdesang. La Haire est en francais une chemise de crin (en islandais Har), qui par conséquent est fort incommode. Hon Hire , adj. De mauvaise hu- meur, Colére ; probablement d’/ra: en vieux-francais Jre était aussi devenu Hevrer.; -voyez Roguefort, t.1, p. 746. Herr, s. m. Lievre; c’est le nom islandais, comme Hase est le nom allemand. © HERLAN, adj. Tracassier ; en breton Herr signifie emporte- ment. ! ; HERMONER, V.n. (arr. de Cherbourg) Remuer sans cesse, et par suite Se tourmenter ; ‘en breton Herruz signifie Ra- pide, Bouillant. ° -* HERNUvER, V. n.(arr. de Morta- gne) Remuer ; on dit aussi au fi- guréle temps hernue pour signi- fier quilyase mettre a la pluie. HEU Herren, V. a. (arr. de Vire) Saisir, comme avec un Harpon; il s’emploie aussi neutralement et signifie & Mortagne Lutter our s’'amuser, et a Bayeux rendre au fond de la casse- role, Cuire trop vite ; il se dit 4 Caen de l'eau et de la terre qui commence a geler. Hxerquetow , adj. (arr. de Valognes) Petit , faible ; peut- étre de l’allemand Herr qui se renden mauvaise part , méme orsqu'il n’a pas la terminaison des diminutifs; nous avons — déja cité panceLeT, diminutif . de Dard. Herouette, s. f. (arr. de. Vire) Rateau, petite Herse. Heru , adj. (Orne) Malpei- ené, Qui ales cheveux comme du crin, Har en islandais ; on dit aussi Hérupé. Voyez aurE. Her, s. m. Joie, Bonne vo- lonte. . Volluntiers je laboureroie D’accort, de het, sans estriver. Chansons normandes, p. 163, édit. de M. Dubois, Voyez HAITER. | Heupes, s. f. pl. Liens qui attachent ensemble la téte et les pieds des hestiaux pour les empécher de brouter; Herd signifie en breton Liens, En- traves. HevuLarp, adj. (arr. de Vire) Faible, Maladif. Heuer, Hucer, v. a. Huer; Heulen en allemand moderne. Peut-étre malgré Vaspiration vient-il du latin Ululare. Heumat, adj. (Orne) Entété, Quia la téte dure comme un Heaume. : Heung, s. m. (Orne) Teéte ; HIN 433 c'est une corruption de Hewme (Voyez le mot précédent); car ce mot ne se dit que par mépris et signifie qu’au lieu d'une Téte onaun Heawme de fer. - -Heuse, s. f. Botte , Guétre, Cruralia, vulgo Hueses , disait déja Jean de Garlande dans son Dictionnaire, Paris sous Phi- lippe-le-Bel , p. 587.' Le radi- cal se trouve également dans les langues celtique et ger- manique : Heuz en breton , Hoés en gallois , Hosa en islan- dais et Hosan en gothique. On dit aussi Houszas et le francais a conservé dans le style fami- lier Houseaux. Hipre , adj. (Seine-Infé- rieure) Malheureux, selon le Coup-d eilpurin, p. 54. Hirt, s.f. Joie, Rire ; c'est probablement une onomatopée ou une apocope de Hilarité.: Hizrre, s.m. Lierre: Joyeux quand ma veue Regarde ta branche pendue, Belle hierre, que je suis. Vaux-de-Vire, p. 100, édif. de ~ —£M. Travers. En francais larticle s'est confondu avec le nom et le x de Hedera a disparu ; cela es arrivé aussi dans le patois nor mand, mais il est resté dans, beaucoup dendroits une sorte d’aspiration gutturale , GLIER- RU. Estar Himer, v. n. (Manche) Pleu- rer , Gémir. --Voyez GIMER. ‘Comme le c et le u sont deux articulations produites, par le méme organe de l'appareil vo- cal, il y asouvent permutation entre eux. Hincuge, s. f. (arr. de Vire et d’Argentan) Haine. 434 HOG HoctassEr, v. n. (Orne)Tra- vailler.avec, courage, Se fati- guer beaucoup; |’allemand Hoch a dans Ja plupart des composés la valeur d’un super- latif. Hopinkr, v. a. (arr. de Ba- eux) Remuer ; dans-l’arr. de ire et dans l’Orne il est de- venu intransitif et a restreint sa signification : Remuer la téte ; on dit proverbialement : Les saints du paradis en ho- dinent Ja téte. - HogELLAND , s. m. Bas-fonds, del'islandais Hol et Land dont — la signification est la méme ; © ce mot est maintenant hors d’usage, mais on trouve dans de vieux actes le Hoelland du Val de Ver et le Hoelland de Molles. Voyez HAULE. Hocus, adj. (Calvados) Fort, Fier; probablement du vieux- francais Ahogue, Haut, Grand, ou plutdt de sa racine : - Tloc si fu teus sis esgarz, C’un bel chasteli fist drecier Od tor de pierre e de mortier, Bien clos de mur e de paliz, E de riehes ponz torneis Od hericons e od fossez Ahoges e parfunz e liez. Benois, Chronique rimée, 1. ut, - Vv. 28131. Voyez Je mot suivant. HocuE, s. m. et f. Hauteur , Colline; de l'islandais Haug , Monticule. On ne Il’emploie plus guére que dans les noms de lieu, Saint-Vaast-la-Hougue; les Hogues de Baucy, d’Isigny; le Heugue de Jobourg; la poin- te du Hogue & Grand-Camp; la Hoguétte ; etc. Le vieux- francais s’en servait dans un sens plus général : E] sumet de une hoge, Livre des Rots, |. HOR 11, ch. 2, v. 25, p. 427, dele - dition de M. Leroux de Lincy. Hocuicnetes , s. f. pl. Ca- deaux qui se font encore dans quelques endroits la veille du jour del'an ; on dit a Caen Ho- urlanno et a Saint-Lo Hogui- anne. Voyez AGUILANLEU. De Brieux nousa conservé unesorte de chanson sans gime que l’on -chantait encore de son temps en demandant les hoguignettes (Hoc vn anno) : | Si vous veniés ala depense, A la depense de chez nous, sis Vous mangeriés de bons choux, On vous serviroit du rost, Hoquinano. Donnez-moy mes haguignétes — Dans un panier que voicy, Je Vachetay samedy : D’un bonhomme de dehors, Mais il est encore a payer Haguinelo. Honer, v. n. Chanter entre ses dents ; peut-étre une cor- ruption de Canere ; il signifie aussi se plaindre, mais la vé- ritable prononciation est alors HOUINER. | Hori, adj. (arr. de Caen) Qui est arrivé a son point, a son heure (Hora) ; i] se dit des récoltes: Ce blé nest point horé. Peut-étre cependant doit- - on écrire Oré d’Aureus et si- enifie-t-il Jaune. , ' Horene, s. f. Coup de poing sur les yeux ou sur la téte , c’ést le méme mot que le vieux- francais Horvon. ) Horener, v. a. (arr. de Mor- tagne) Donner une Horgne. - Horton, s. m. (arr. de Mor- tagne et de Bayeux) Gros rhume), Epidémie ; c'est le nom que !’on donnait en vieux- francais a une maladie qui ré- HOU gna au commencement du xv* siecle. Si advint (en 4444) par le plaisir de Dieu qu'un mau- vais air corrompu chut sur le monde, qui plus de cent mille personnes a Paris mist en tel. estat quils perdirent le boire, le menger et le reposer... et avecques ce, qui pis estoit on perdit tout le povair de json corps, que on n’osait toucher a soy de nulle part que ce fust, tant estoient grevés ceux qui de mal estoient atteints; et duroit bien sans cesser trois sepmaines, ou plus; et com- menca a bon escient a l’entrée du mois de mars audit an, et le nommait-on le tac:ou le ho- rion; Journal d'un bourgeors de Paris, dans les Chronaques d’ Enguerrand de Monstrelet , t. xv, p. 496, éd. de M. Bu- chon. Honigug, s. f. (arr. de Ba- yeux) Maladie régnante. Voyez - HORION. Horsain, s. m. (arr. de Ba- yeux) Etranger, Homme’ du dehors, comme Forain. Voyez la chanson citée au mot HOGUI- GNETES. Hostier, S.gn. Homme pau- yvre, Mendiant, du latin Hos~ tis, ou plutét d’Ostewm ; on dit & Valognes d’un mendiant i trache aux portes. Selon oquefort Hosé aurait signifi en vieux-francais Paysan. Hovsixe, s: f. (arr. de Mor- tagne) Veste, Vétement. Howc, s. m. (arr. de Bayeux) Poussiére acre qui s éléve de la graine du chanvre; c était d’abord probablement une in- terjection. Howuprt, adj. (arr. de Bayeux) ‘ voquer ; HOU 435 Taché, Moisi ; en breton Hu- dur signifie Sale, Malpropre , et le vieux-francais en avait aussi probablement dérivé le verbe Heudrir. Hoviner, v. n. Crier, Se plaindre, Pleurer ; on dit aussi dans le méme sens Higner , Hinner, Honer, Ourner, et ces différents mots semblent déri-. ves d'une langue germanique. Au moins Vislandais Veina, le vieil-allemand Weinan,le saxon Veinan ontla méme significa- tion et anglais Whine, ainsi que ledanois Hvine aégalement pris l’aspiration ; une origine latine (Hinnire) ne serait cependant as impossible: on dit prover- ialement: [1 houine comme un petit poulain. Houvet, s. m. Sobriquet ue lon donne aux habitants u Bocage; le Huvet était une espéce de coiffe que portaient les femmes élégantes ; peut- étre Houivet voulait-il dire un homme qui s’atiffe comme ‘une femme , un Faraud ; mais nous y verrions plutét le meme “nom que Hobereau ; en basse- latinité on appelait les proprie- tés rurales Hofa, Hovra (de l'al- lemand Hof, Cour) et leurs pro- pristaires Howbari ct Hoba- ri. Houten, v. a. Exciter, Pro- il ne se prend quen mauvaise part. La principale cause de sa mort fust pour sa male renommee qu'il avoit d’es- tre noiseux , ivrogne, houiller et composeur de. gens; du Clerg, Mémozres, }. iv;’ch. 42. Dans le Mystere de Bien-ad- visé et mal-advisé, 2° partie , Houlerie est le nom de la pro- “136 HUA vocatrice au mal; en breton Houlier signifie Agent de dé- bauche. Ce verbe s’emploie aussi avec un sens réfléchi et signifie S’enfoncer dans un’ trou : maux. : 3 Houvet, s. m. Bréche, Ou- verture (Croulet?), : HOouLETTE, s. f. (arr.de Caen) Entrée du terrier par laquelle les lapins se Houlent. _ Hovguer, v. a. (arr. de Bayeux) Voler , Prendre avec un Hoc, qui signifiait en vieux- francais Crochet, en anglais Hook. : HourEr, s. m. Homme comme un Gorret. il se dit surtout des ani- Hourticot, s: m. Petit Ane. - Houstas, s. f. (arr. de Ba- yeux) Femme hommasse, E- tourdle. Hourer, v. n. (arr. de Vire) Appeler ; Haten en saxon. Ces deux mots semblent formés du: cri dont on sesert dans la cam- pagne pour appeler les. per- sonnes qui sont trés- éloignées ; le terme de chasse Houper a été formé de la méme maniere. Houve , s. f. Houe, en vieil- allemand Howvva. vi oH Houveur, v. n. Piocher, Tra- vailler avec une Howve ; il si- gnifie aussi probablement par métaphore, Donner a regret. Hu, s.m.(arr. deValognes)Ce mot qui nest employé que dans la phrase Faire le hu, si- gnifie Avoir ou Faire mauvaise mine et semble une apocope de Hubi; voyez ce mot. - Huant, s. m. Hibou ; pro-. hablement une aphérése de Chat-Huant. Huanps, s.f. pl. Farfadets sale HUR que l’on suppose oceupés cons- tamment ase moquer des hom- mes et ales Huer ; le nom'des Lutins,: du latin Ludere, et celui. des Goubelins, de kis- lJandais_ Gabba, expriment Ja méme idée. fist Hust , adj. Il ne se dit que des oiseaux et signifie Triste, Malade, Qui a les plumes hé- rissées ; il vient sans doute de Vislandais Ybdinn , Heérissé. Peut-étre Ahubir en est-il aussi dérivé , quoique nous ayons déja reconnu la possibilité. d'une autre origine. Husir, v. a. (arr. de Mor- tagne) Huer, Honnir. Voyez AHUBIR. er Hucner , Hucnrer, v. ns et réfl. Monter, Jucher ; il signi- fie-aussi Frapper & Ja porte, comme en vieux-francais, par- ce que c'est une manieére trés- usitée d’Appeler, de Hucher ; voyez cependant Hus. Turk, sm. (arr. de Mor- tagne) Petite distance. Voyez JUPEE. | . Hur, Huer, Heurqug, s. m. Pointe de terre contre laquelle les vagues viennent se briser en mugisssanty la partie la plus avancée dans la .mer de la falaise de Jobourg s’appelle Le. grand huer. Hurr. signifie Bruit. en islandais, mais Hur peut aussi exprimer la méme idée que Brise-lame et venir du vieil-allemand Hurt, d'ou est dérivé le vieux-francais Hurter, Heurter. . . it Hur, adj. Hérissé, Qui a la téte comme une Hure. Ce mot qui peut étre une syncope de Hurepé, existait aussi en vieux- francais: TAN Sil a grant toup, il est hures; S’il est cauves, il est peles. Ruihote du monde, publiée dans de Roman de la Mane-kine, p. Vill. ; Voyez HUREPE. UREPE, adj. Hérissé; comme en vieux-francais : La pénssiez voir tant viez d raps de- _ panez Et tante grande barbe et tant ciez hurepez. Romande la Conquéte d outre- mer, cité par Fauchet, Langue . et Podsie francoises, p. 37. Ce mot vient peut-étre de lislandais Har et Op, Cheve- lure en haut. : Hurir, adj. (arr. de Morta- gene) Hatif, précoce. - Huron, s. m Sauvage, E- tourdi qui ne respecte ni les usages ni les convenances, Qui’ J,v.n. Hl mest usité qu’a la seconde personne du singulier de Vimperatif; Va, Marche ; c'est le mot latin qui s’est aussi conservé dans le patois du Jura. Tans, adv. Dedans ; le vieux- francais disait Ens. Je pleure ens et me ry par dehors. ALAIN CHARTIER, Giwvres, p. 532. C’est probablement une corrup- tion d’'/ntus, dont la premicre voyelle s est nasalisée et modi- fiée comme dans le francais En, Dans ; \a prosthése de I'1 avait sans doute licu aussi en vieux- francais; car on y trouve Lavens qui signifie La dedans.: Laiens IGR est toujours huré. | Hus, s. m. Porte. // ne trou- | vera pas le cog a Vhus est une locution proverbiale qui signi- fie : Ul arrivera trop tard, quand les poules seront cou- chées. C’est probablement une corruption du .vieux-francais Huis qui se trouvait aussi dans le patois normand : 437 Et qu’on jette les ennuys Derriére Phuys. Oxtvier Bassetin, Vaux-de- Vire, p. 181, éd. de M. Travers. On dit aussi HucHE. Sans cha, je n’érions jamais eu de sergent a notre huche; Farce des Quiolards, p. 29. Hur, s. m. Chapeau; -c’est probablement le vieux mot al- lemand, en saxon Het et en anglais Hat. avoit quarante chevalier; Ville- hardouin , Mémoires, p. 192. lau DE Mourer, s. f. (arr. de Coutances) Eau de fumiere: TauLous , adj. (arr. de Vire) Rempli d’ Law , qui se prononce Jaw dans le patois normand. Icuin, ady. (Manche) Ici. _ Into, adv. (arr. d’Avranches) On ne Pemploie qu’avec la par- ticule de, Dici, De 1a. Voyez ILAU. i leper, s. f. Gale des. chats. Ienau, adv: (arr. de Mor- tagne) Sans facon , Uniement. Ierr, s. m. (arr. de Valognes) Ongle, Ergot. Peut-étre est-ce la racine d’Mgratigner ; on dit rae : 438 INE | ailleurs Egrin, Ingre, Ingrat. Inau, Ivev, adv. La, Ici; en vieux-francais Illec, Illoc , Illuec (Ilic). La ou Nativite dit-l’on Illuec diras, Coneepcion; Conception illuec diras La owl’en dit Nativitas. © Wace, Elablissement de la féte de la Conception, p. 8, V. 7. Inve, adj. Noiratre , De cou- leur sale. En provencal I’ Indi était suivant] Elucidario de las proprias : Bela mixtura de color cerulenca et purpurea, et mal- eré le sens vague que l'on don- nait aux noms des couleurs , il devait en étre de méme en vieux-francais, car on lit dans le Roman de la Rose, en par- lant du soleil : Adonc prent ]’Air son mantel inde, Qu’il vest trop volentiers en Inde; et on lit dans le Roman de la Violette : Et voit sor sa destre mamiele Une violette nouvielle, Inde paroir sor la car blanche. En francais l'Inde est bleu. InpITER, v. a. Enseigner, Elever ; du latin Indicere; il existait aussi en vieux-fran- cals. InDUQUER, V. a. Voyez EDUQUER. [néte, adj. (arr. de -Mor- tagne) Vif; Leste; du vieil- allemand Snel ou de lislandats Sniall, dont la signification est la méme. II existe aussi-en vieux-francais : - | Elever ; Puis serrai si legers e ignals e ates. Voyage de Charlemagne, v. 613. Qar fortune, ki sa roiele ISL Tourne comme la plus isniele. Chose ki soif. | vai * Mouskss , Chronique rimée ‘ v. 24431. bi InteL, Inr#, adj. Pareil ; de Talis ou peut-étre d’ Unitus ; car le vieux-francais Onmer , Egaliser venait d’Unire et On- niement signifiaitPareillement. Voyez ENTEL. INTERGAUDE, adj. (arr de Mortagne) Troublé, Intimidé ; probablement du latin Inter gaudere , Plaisanter au milieu , comme Interloqué d’Interlo- Un. : InvectiF , adj: Eveillé , Ma- lin ; probablement une corrup- ~ tion d’Inventif. Iorp , adj. Sale, Dégodtant; du latin Horridus ; le vieux- francais se rapprochait davan- tage dé'sa racine’s "+. Entre eus avoient fait une ordre, — Si orrible, si vil, si orde. Roman de Fauvel, cité par M. Paris, Manuscrits francois , t. 1, p. 311. Mais le gupneaatie Ordée si- egnifiait Souillure: D’ordée et de mauvestie Se gardera et de pechie. Wace, Etablissement de la féte de la Conception, p. 19, V. 2. On dit aussi Enordir , Sa- lir. : Istet, s. m. (arr. de Valo- gnes) Paté de maisons, entoure de rues de tous cétés ; en vieux- francais Islet signifiait Une _ ~petite isle: Ce fu tout droit a Pinkegni, En un islet de Sainne iqui. Mouskrs, Chronique rimée ,* ‘Vv. 14327. “JAL Irou , ady. Aussi; quelque- fois l'1 ne se prononce presque pas et on pourrait croire que cest le mot anglais 700; mais, comme il se trouve aussi dans le patois du Jura , une origine latine semble plus vraisembla- JacassE, s. f. (arr. de Ba- yeux) Femme bavarde, peut- étre une corruption d’ Agasse ; en francais Pie s’emploie avec Ja méme. signification. Voyez cependant le mot suivant: JACASSER, V. n. Bavarder ; il ne se dit en francais que de la Pie ; Jagg signifie Jargon en islandais. - | JACQUET, S. m. (arr. de Ba- yeux) Ecureuil ; dans presque toute la Basse-Normandie. Dés le pétron Jacquet signifie. A la pointe du jour. Jape, s. f. (arr. de Vire) Grande écuelle ; en vieux-fran- cais Jadeau. En aultre, cent formes de yoyrres a pied, et voyrres a cheval, cuveaulx, re- tombes, hanaps, jadeaulx, sa- lernes, tasses, goubelets, et telle semblable artillerie ba- chique ; Rabelais. |. v, ch. 34. Voyez GADE. Jarre, Jirre. s. f. Soufflet ; Javedad en breton. JALET, S. f. Bavardage; Jula. signifie en islandais Pousser des vagissements, des cris confus et continuels, et Jala en breton Agacer , Impatienter. Jator, s. m. (arr. de Mor fagne) Petit cuvier; du bas- JAR 139 ble: /taa dans quelques phrases la signification d’Auss?. —Txe, s.f. (arr. de Valognes) Machine en forme d’ixe, qui supporte le bois & briler que Yon scie. o3 5K latin Galo ; on disait en vieux- francais Jale. JANGLER, v. n. (Seine-Infe- rieure) En imposer ;. Coup d@il purin, p. 44. En vieux- francais Jangler de Jongleur , Jaculator, signifiait Mentir. Janni@re, s. f. Champ d’a- jones ; Voyez BOIS-JAN.. JanoT, s. m. (arr. de Va- lognes) Imbécile, Nigaud ; en vieux-francais Jan et Janin signifiaient Un mari trompe: Ci-git maitre Antoine Guillin, Qui de trois femmes fut janin, Et sila mort ne ]’edt grippé, Sans cess¢ janin eut été. . Jap, s. f. Babil ; ce mot qui ala méme signification en rou- chi, est sans doute une figure, car en provencal il signifie Aboiement , Cri. Voyez le mot suivant. Jaren , y. n. Aboyer; a Coutances Ejaper. Voyez Jvu- PER. oy . Jarp , s. m. Ecaille de pois- son; d’ou Ejarder , Ecailler. Echarde. signifiait en vieux- francais Petit éclat de bois et nous avons encore Escarre : ces deux mots semblent venir du gree éayapa. AAO JER Jarnicoron, Jurement usité dans l’arr. de Valognes qui se trouve aussi en vieux-franeais : Jerni-cotton, je métais bien ‘douté que vous étiez | un finet : Aventures ded’ Assouct., dans Leroux, Dictionnaire comique, t. ul, p. 38. JAROUSSES , JARROSSES, Ss. f. pl. Espéce de vescé; en breton Jarons. JARRETER, V. n. (arr. de Mor- . fagne) Se heurter en marchant Jes chevilles, les Jarrets. _ JASPINER, Vv. n. Bavarder , Causer a tort et a travers, Contredire sans raison; | ce mot’ se trouve aussi en rouchi- et en vieux-francais ; ‘voyez Roquefort, t. 11, p. 25. JASTOISER, V. n. (arr. de Vire) Bavarder , fréquentatif de Jaser. Voycz JOsTER. Jau, s. m. Coq; Rabelais disait aussi dans son Panta- gruel: Et les foisoit. danser comme jau sur breze. Laforme latine (Gallus , dou Geline et Gelinotte) s'est mieux conser- vée dans le patois lorrain : _ C’ato, mafrique, rouge sens mentie Com’ nov jala qu’al a fechi. NoEL, publié par M. Grille de ‘Beuzclin, Rapport au mi- nistre de UInstruction pu- blique, p. 130... Dans le patois de la Lozére on dit Jal. | JAUNET, S. m. Ranunculus acris, plante champétre qui fleurit jaune; il est ainsi pro- hable que Roquefort's’est trom- pe en Jexpliguant par Nénu- phar, t. 11, p. 26; il semble au reste avoir reconnu lui- méme, Supplément,, p. 190. JERCIR, ¥. a. (arr. de Cou- JOS tances) Sarcler ; la forme latine Sercire s'y est mieux conser - vée que dans le francais ; c'est probablement Ja racine dunom que!’on donnait & livraie en -vieux-fran¢ais, Jergerve. Voyez du Cange, t. m1, p. 756, col. 3 \ JESUET, s.m. Hypocrite, Qui affecte un air dévot ; Petit Jésus se prend a Valognes dans le méme sens. | JEUNESSE, Ss. f. Jeune-fille ; le vieux-francais l’employait dans le mémesens:. Dis que je fus couplé sous le joug d’hyménée Avec une jeunesse 4 toute vertu née. : VAUQUELIN DE LA FRESNAYE. Il est resté dans Je langage populaire de plusieurs autres provinces. . Jos, s. m. Ce mot n’est em- ployé que dans la locution ‘Battre le Job qui signifie Ne rien faire, Perdre son temps ;’ c'est un souvenir de la Bible : on dit aussi proverbialement : Il faudrait-avoir la patience de Job. fi a Jocer, v. n. Niaiser, Se mo- quer ; ce mot qui vient du la- tin Jocari se retrouve plus rapproché de son étymologie dans le Jocquer du rouchi, qui a la méme signification. ; JoDANE, S. m. (arr. de Ba-. yeux) Sot, Ganache: Jopu, adj. Sourd ; probable- ment de J’o du qui signifie encore maintenant J’entends ferme. Li a Jojo , s. om. Cheval; ‘c'est sans. doule une de ces rédu- plications si fréquentes dans JOU te langage des enfants, car Jo signifie Cheval en breton et Jor, ala méme signification dans la langue. poétique des anciens Scandinaves. | JoLET, s. m. (arr. de Mor- tagne) Jeu, Mouvement. “JONFLER, V. n. Respirer for- tement, Ronfler en parlant d'une toupie ou d'un diable ,. Souffler; probablement une corruption de Sufflare. JONQUETTE, S. f-(arr. deCacn) Fleurs que l’on jonche dans lesrues le jour de la Féte-Dieu ; le francais dit dans le méme ‘sens Jonchée. | _ JORER, V. imp. Se parer avec recherche ; ce mot quia Sans doute la méme racine que le vieux-francais Gorrer , Magni- ‘fique dans.ses habits, semble avoir aussi quelque liaison é- tymologique’ avec Mi-jaurée. * JOSTER, ¥. a. etn. Plaisan- ter ; il signifiait en vieux-fran- cais Se battre, Jouter : ~ Dovtr’a Gauvains par nom semons Qwil de'recief trestornaissent,, A un des encalcans jostaissent. _, Gauvains lor dist et il le firent; Trois Romains sempres abatirent. ‘Roman de Brut, v. 12244. “On disait dans le méme sens Jouer del épée, etl’on dit encore maintenant Jower des couteaux. Le patois normand a conservé Ja signification primitive de Focus. | JouBsEOT, s,m. (Orne) Tasse de café. © ) *JouceT , s. m. (arr. de Mor- tagne) Soufflet, Tape. “Jour, ady. Pas assez. Jousts, Jouxte, Prép. Au- JUT VA pres de, Aitenant a; cest le atin Juxta. Just. Ce mot latin qui sest conservé dans la locution En venir djubé, Se mettre a dis- . crétion, se trouvait aussi dans le langage populaire des autres provinces : Laissez-moi jouer mon personnage, je le ferai venir & jubé; Hauteroche , Les Bourgeowses de qualité. — Jurke., s. f. (arr. de Bayeux) Distance & laquelle la voix peut se faire ‘entendre. Voyez le mot suivant. La signification était la méme. en vieux-fran- cais: Ilz estoient en une cave pres, aussi comme d'une jupee ou huee de son hostel; Lettres de grace, de 1449, citées dans du Cange, t, 11, p..927) col.4. Super, y. n. (Orne) Appeler de loin; il signifiait en vieux- francais Pousser de grands cris. | Galies tierces et secondes é Se vont fuiant, fendant les ondes; Cil de France, qui apres jupent, ~Lentrée de Nilus occupent. Branche des royaux lignages , t. 11, Vv. 1017. Il a sans doute la méme 0- rigine que Japer. 3 Jus, adv. A bas, A terre; il ala méme signification dans le patois du Berry et se trouvait aussi en vieux-francais :" ‘Jus se mist, la tere baisa, Et mainte fois s’ajenoilla. Roman de Brut, v. 14219. ‘Le bas-latin disait Josum : Pausant arma sua josum: Lex Alamannorum, ch. XLv. JutTer, v. n. Rendre du jus. Ah LAI | Lapiter, v. imp. reéfl. (arr. de Cherbourg) Se lamenter. Lacon, s. m. Lacet pour prendre des oiseaux; cette forme de Laqueus se trouve aussi en vieux-francais : Jeo sui un hum de tel mester, D’oiseus prendre me sai aider; Une huchie desuz Karliun, Pris un cisne od mun Jacun. Marie DE FRANCE, Lai de Milun., Vv. 185. ay Lacue ,s. f. (arr. de Bayeux) Espéce , Qualité; de Vislandais Lag, Ordre , que le patois nor- mand emploie dans la méme acception. Lairer ou plutot Larre, v. a. Laisser; il n’est guére em- ployé gu’'au futur et au con- ditionnel; mais. quoique ces’ deux temps fussent aussi plus usités en vieux-francais.: _Si, te demande que ten dis : Sil est bon de Ja lapider Ou si nous la lairons aler. Mystere de la Passion, analysé dans la Bibliothéque del’ Ecole des Chartes, t. Vv, p. 51. Et moy de l’autre part feignant une 5 autre affaire, Seulet je vous lairrais dans ce lieu solitaire. VAUQUELIN DE LA FRESNAYE. on trouve aussi quelquefois les autres : L’en devroit l’'omme lapider Ke sa femme lait trop 'monter. Romans dcs sept Sages, v: 435. Sire, le dol laiez ester. Romans de Dolopathos. gees | | _Ce nest pas ici une simple apocope du verbe Laasser, mais un verbe indépendant dont la - racine est peut-étre méme dif- férente ; l'un semble venir du latin Linquere et. l'autre de -VPallemand Lassen. Laiton, Lairron, s. m. Veau ou Poulin qui téte encore; ce dérivé de Lavé se trouve aussi dans le patois du Berry. LANCRET, S. m. (arr. de Ba- yeux) Mauvais sujet, Garne- ment; malgré la prosthése du L qui a lieu dans. plusieurs autres mots, Lendit, . verre, Luette, Lambris, Lendemain, ce mot est sans doute une cor- ruption d'Antechrist. Lanpon, s..m. (Haute-Nor- mandie) Discours trainant et ennuyeux (Basse-Normandie), Corde. trainante,. Guides des chevaux ; ces deux significa- tions «si différentes “peuvent ainsi que:le \Landewr du pa- tois de. Langres, Homme qui ne fait qu’aller et venir, se rattacher au breton Landar; Paresseux. Voyez LANDORER et LANIER. LANDORER,. Vv. n. (arr.. de Valognes) Lambiner ; le. subs- tantif, Lendore dont la signifi- cation est analogue. existait aussi en Vieux-francais et s’est conservée dans le langage po- ulaire ‘des autres provinces. oyez le mot precédent. Lanrats, Lanrols, s. m. Fi- \ LAR lasse ; ce mot qui vient sans doute du breton Lanfez, étoupe grossi¢re de chanvre ou de lin, se trouve dans une locution populaire que nous a conservée de Brieux dans ses Origines de coutumes anciennes: Ila bien d’autre lanfais a sa que- nouille. | | .. LANFRONER, v. n. Laver du linge. ; LANGUET, S.) Chenétde cuisine; ila la méme signification dans le patois du Berry. | LANIER , ‘il signifiait habituellement en vieux-francais Lache : » Car je ne sui trop coart ne lanier. Chevalerie Ogier de Danemar- che, V. 2375. mais» on, le prenait aussi dans l’acception du patois nor- mand : Garde que tu sois de cheus Qui lanier sunt et perecheus. Distique de Caton, cité dans du Cange, t. Iv, p. 20, col, 3. et l’on donne encore le nom de Lanier a une espéce de fau- con qui est moins courageuse que les autres. Larct, s. m. (arr. de Mor- tagne) Sieste ;,il ne s’emploie qu’avec. le verbe Faire et_ ne prend pas d’article. Larmer, v. n. Pleurer, Ver- ser des Larmes ; on dit aussi Lermer : L’ceil qui lerme tou- jours. C’était la forme du vieux- francais : Ly rais ‘cel saintuare en lermaunt regardait Et argent saunz noumbre sur l’au- ter cochait. PrerRE DELANGTOFT, Chronique dans M. Michel , Chroniques anglo-normandes , t. 1, Pp. 139. ° m. Landier, . “gm. Paresseux ; . LEC 143 Lauper, v. a. (Orne) Battre avec une baguette, Charger de coups; en anglais Load, en vieil-allemand Laden et.en is- landais Hlada signifient Char- ger ; on dit aussi une Laudeée. Laurrrés, s. f. (Orne) Repas copieux d’un animal; ce mot vient sans doute du vieux-fran- cais Luffre , Goinfre , Glouton. Premier assailleux leur prieux, Qui estoit fort et vigoureulx, Puis frere Jean de Tournay ; Sot est et luffre bien le scay. _»» Le triumphe des Carmes, v.279. De la Je nom de Lifrelofre que Rabelais donne aux Suisses et aux Allemands dont Ja glou- tonnerie était proverbiale. Laumer, v. n. (arr. de Mor- tagne) Regarder sournoisement _et impertinemment. »Launer, v. n. (arr. de Ba- yeux) Radoter, Repeter tou- jours la méme chose. | LAUSENGIER, S. m. Flatteur , Complimenteur; c’était la si- enification primitive du vieux- francais (Laudator): Li faus ami ki de losenges servent en liu de cunseil, n’entendent qu’a decoivre en blandissant ; Mor- talités citées dans du Cange, t. Iv, col. 274, éd. des Bénédic- tins. ' LAVECHINER ,'V. a. et n. La- ver mal ; c’est un diminutif du verbe francais. | Laveriz, s. f. Endroit ott lon Lave la vaisselle ; le rou- chi l’emploie dans Ja méme ac- ception. ey . Lavier, s. m. Evier; il se dit aussi dans le patois de Lan- eres et de Reims. Licneries, s. f. pl. (arr. d’Alencon) Patisserie, Frian- AAG LIA dises qui font se Lécher les bar- bes ; chon, Lécher. Liitcan, $.m. Benet; Tesein signifie en islandais Celui qui passe son temps a jouer. . Lemacrs, s.f. pl. (arr. de Bayeux ) Fourrages légumi- | neux ; en vieux-francais ‘Leum signifiait ‘Herbes ,° Legumes) suivant Roquefort, t. 1, p.:77. Leman, Lemau, s. m? Ban- dit ; en islandais Lemia signi- fie Frapper. Lenpratr, adv. (arr: de Va- Jognes) La,. A cet endroit., “LESANT,, adj.. (arr. désMor- 1 tagne) aapare Tardify, xisg ¥: Lézice,, s.f. Ame d’an ent fant. mort. sans baptéme, qui parail la, nuit.sous Ja forme d'un animal d-une> blancheur éclatante ; en islandais Leda signifie Fantome. Litisse, s. in. (Orne) Enfant espiégle, ° amusant ; dw latin Laetus, Gai, Amusant. | Leumien , ‘S10: Homme long et mince comme un Limier, Lice , s. m. (arr. de Cher- bour 2) Couverture en paille que l'on: (ve ; cependant on. appelle en breton Laach, les, pierres plates , nommeées ailleurs. Dol- men, sous lesquelles on estia Yabri. | Liais, s. m. (arr, de. Vire) Fléau ; ce mot vient sans doute du latin Liaculum , nom que, Suivant. Vitruve; if i) Chek), on donnait a un instrument qui servait a battre le mortier. Lian, s: m. Gland; on a dabord dit Glian , comme on le fait encore dans. beaucoup — d’endroits, et. l’adoucissement de la prononciation a fait re- du vieil-allemand Lec-— ment une prosthése ; Mor taen gue, LIM jeter leg. A Saint-Lo, on dit Lion. *LIANNE, s. f. (Manche) Glane: le @ du francais est évidem- le bas- latin disait Liena, et ‘la: ‘Tacine est. le verbe PEL OEs sos Linoupeux , adj: Gluant. Licur, v. n. Faire aie Ce mot qui existe aussi dans le patois de Reims, vient sans doute de_ Tallemand’ ‘Lecker , Friand, ou du’ vieux-trangais Léchierre. HBO HONG Ainsi comfait di bons lophiot es _ Qui des mor siax es est congnoissieres. -, Roman, eg, la Rose. -LicHoANER vimsofarre de ne) “S'embrasser * sou- vent, Se leche es Licuorre, $. f. Bouche; page Faconde : ‘il ne se. prend qu en mauvaise part et vient . sans doute de I’ islandais Leika, Jouer} Plaisariter.’ LIDER, Y.. 0. ae te Vire) Glisser ; ‘Lida a la méme si- gnification en islandais. . Lierre, s: f. Tiroir d'une table, Layette: ce nest pas sans doute une corruption du mot francais;; car on trouve dans la vieille langue Ihéton, — dont la signification était ana- logue: en islandais Leyna si- enifie Cachette. LietrE signi- fie aussi Ruban de fil, Bande de toile qui serta Lier. : Licocug, s. f. (arr. de Lisieux) Petite limace. : Lime, s. m. (arr. de Cher- hourg) Fossé plein d'eau , qui sert de borne, de limites( Limes). Limer, v. n. (arr. de Pont- Jévéque) Pleurer ; peut-étre une corruption de Gimer. LIT Limonire, s. f. (Eure) Or- niere profonde. Limousine, S. f. Surtout en poil de chévre et en grosse laine dont se servent les rou- liers; il a la méme significa- tion dans le patois du Berry. Probablement les Limousines ont été portées d’abord par les voituriers du Limousin. Lincarp, adj. Efflanqué, Qui n’a pas de ventre ; il ne se dit que des bestiaux. Lione, s. f. (arr. de Vire) Chevre-feuille quij se Lire autour des arbres; la méme idée a fait donner un nom ana- logue & la Lianne. Lior, s. m. Glui que lon Lie pendant lhiver autour des ruches. LiquEerét, adj. (arr. de Ba- yeux) Friand; en vieux-fran- cais Licherie signifiait Gour- mandise, et on lit dans le Ko- man dela Rose: Ensi com fait li bons lechierres Qui des morsiax est congnoissieres. Linon, s. m. (arr. de Vire) Morve. Lirot, s.m. Mauvais couteau. LinoTer, v. n. (arr. de Mor- tagne) Essayer de couper avec un mauvais couteau, un Lirot. Litt, adj. (arr. de Valognes) Mal levé, il ne se dit que du pain; Litt signifie Mauvais en islandais. Liroine, adj. (arr. de Caen) Lache , Paresseux ; Lite signi- fiait Esclave en vieux-francais, et la paresse des esclaves était proverbiale. Voyez cependant le mot précédent. LITTRANTAN, Ss. m. (arr. de Vire) Balivernes ; cest sans LOC 145 doute un composé delislandais Litt, Petit et du mot populaire Trantan. LivarDEvx, adj. Gluant, Hu- mide , peut-étre est-ce le méme mot que Liboudeux. LIVERNAGE, S. m. (arr. de Caen) Fourrage quon fait manger en vert au commence- ment de l’hiver ; c’est une cor- ruption d’ Hivernage, auquel le patois normand donne en quelques endroits la méme si- enification. Loper, v. n. (arr. de Mor- tagne) Fermer les yeux sans étre endormi ; probablement du vieux-francais Lober, Trom- per: Et plusieurs en ira lober Pour les despoiller et rober. Roman de la Rose. Loset, s. m. Morceau ; pro- bablement du grec )o6e¢ par lintermédiaire du bas-latin Lobus ; le francais Lopin a la mémesignificationetsansdoute la méme origine. LocuER, Vv. a. Secouer dou- cement, Remuer; peut-étre est-ce une corruption de Ho- cher, qui vient de lislandais Hossa, Secouer doucement ; quoique Loc ha signifie en bre- ton Mouvoir, Remuer. Locher se dit en francais du fer des chevaux qui nest pas bien attaché et qui remue ; mais il avait autrefois la signification que lui donne le patois nor- mand ; voyez Roquefort , t. 11, p. 90. : LOCLASSER , V. nN. Se donner de la peine a travailler; c’est probablement une corruption de Hoclasser ; voyez LIVERNAGE et LOCHER,. 10 146 LIR LopE, p. pas. Mouillé, Trem- pe; il avait le méme sens en vieux-francais et semble venir du latin Lotus, Lavé. LopEr, v. n. Remuer, Mar- cher; du bas-latin Lodia ou Lobia, nom que !’on donnait a la galerie dans laquelle les moines se promenaient ; voyez du Cange, t. Iv, p. 438, col. 2. Peut-étre Chorer (voyez ce mot) signifiait-il aussi d’abord Marcher dans le cheeur. LopieR, Lowupier, s. m. Courte-pointe , Couverture pi- quée ; ce mot que l’on trouve en vieux-francais vient du latin Lodix ou du vieil-alle- mand Lodo. Locane, s. f. (arr. de Ba- yeux) Cabane; du bas-latin Loga ou du vieil-allemand Lau- ba (Laubja). Loiser, v. imp. déf. Etre permis; on ne sen sert qu’au présent de lindicatif: I] ne loise pas a weve fame a vendre les bois qui sont en son doere; Etablissements de Normandie, p. 7. Ul vient du latin Licere dont le francais a dérivé Loi- sible. Loriner, vy. a. Diriger, Con- duire avec les rénes, en latin Lorum et en vieux-francais Loren : Le jour de lan, étant en fantaisie, Devant su quai je lorine mes pas. Muse normande, Cant royal. LorioT, s. m. Gros bouton qui vient sur les paupiéres. Ce mot que |’on trouve aussi en vieux-francais et en rouchi sem- ble dérivé du bas-latin Lorum se signifiait une blessure dont il ne sortait pas de sang; LOU Voyez le Gesta abbatum Lo- bienscum, publié par d’Ache- ry, Sprceleyium, t. Vi, p. 603. Lorioug, s. f. Chiffon; c’est probablement une corruptionde Loque, en islandais Lokr. LorigueTTE, s. f. (arr. de Mortagne) Petite portion, Petit lopin ; voyez le mot précédent. Loser, Exosur, v. a. Louer; cette corruption de Laudare se retrouve dans le francais Los ; voyez LAUSENGIER. Le vieux- francais disait Aloser : Dans Renaut de Pompone qui mout fut alozez. THEOBAULT DE MALLI, cité dans Fauchet, Poétes frangois, p. 95, 6d. de 1581. Voyez ALLOSER. Lostre, adj. (arr. de Mor- tagne) Sale, Malpropre. LoucHE , LoussE, s. f. (arr. de Cherbourg) Cuiller & pot. Ce mot qui existait en vieux-fran- cais s'est conservé aussi dans les patois de Rennes , de Nan- tes et de la Vendée ; il vient du bas-latin Lochea, dont la signification était la méme ; voyez les Actes de saint Cy- rique, Vitae Sanctorum, Juin, t. 10, p. 30. Loucuer,s. f. (Calvados) Bé- che. Cemot qui existaiten vieux- francais, vient sans doute de la forme en cuiller que l’on donne encore maintenant aux petites béches. Voyez le mot précé- dent. Lovipiaux, s. m. pl. Goitres ; du latin Lobus, comme le fran- cais Loupe. LourpeEr, v. n. Etre idiot; Parler , Agir comme un Lour- daud; du bas-latin Lurdus. LUB Lounge, s. f. Cornemuse , Grosse musette : du latin Lyra; il signifie aussi Gros ventre et vient alors de Lura; on dit aussi proverbialement de quel- qu'un gui a un gros derriére : Ilaun cul de loure, et cette locution se rattache peut-étre 4 l’outre dont on se sert pour jouer de la cornemuse. Louner, V. n. (arr. de Vire) Pleurer comme un lache; en islandais Lure signifie Lache- té. : Lousr, Lousse, s. f. (arr. de Valognes) Mensonge ; (arr. de Bayeux) Tromperie, Finesse. Ce mot existait en vieux-fran- cals : Par leusse e par voisdie prendre Roman de Row, v. 10160. Dans le patois du Berry Alouser signifie encore main- tenant Induire enerreur, Trom- per. Ce mot vient sans doute de quelque dialecte germani- que ; car dans le patois des Provinces rhénanes Lus signi- fie Ruse, Artifice ; en allemand, Liigen signifie Mentir et Lose Folatre. LousseE , s. f. Vesse; en bre- ton Low ; l'anglais Loose signi- fie S’affranchir de toute con- trainte ; voyez aussi le mot suivant. LoussER, Vv. a. et n. Souffler. LoussrT, s. m. Soufflet. LousTeEr, v. n. (arr. de Mor- tagne) Se glisser adroitement, S’msinuer ; on dit aussi Lows- ser, ce qui fait croire a des rapports étymologiques avec Louse. Lupin, s. m. (Orne) Porc ; probablement ce nom d’hommie a? LUR 147 donné a un animal se rattache a quelque branche populaire du cycle satirique , connu sous le nom de Romans de Renard. Lusins, s. m. pl. Espéce de loups-garous qui rdédent en troupe autour des cimetiéres et crient quand on en approche : Robert est mort. Ce mot vient sans doute du latin Lupus dont le vieux-francais avait fait aussi Lubin ; voyez Roquefort, t. 1, . 100. Lusre, adj. Compacte, Diffi- cile & remuer ; il ne se dit que de la Terre. En islandais Lub- baz signifie Etre roulé lente- ment. Lucan, s.m. {arr. de Cou- tances) Trainard ; dans larr. de Bayeux ce mot est adj. et gnifie Bizarre. LuMELLE, s. f. Lame de cou- teau, Petite lame; Voyez atu- MELLE. Luner, LEuNER, v. a. Re- garder ; peut-étre de Lunette comme Lorgner de Lorgnon. Luguer, Lougurer, ReEtu- QUER , V. a. Regarder avec at- tention, Dévisager. De nos drapiers luquant ses zalma- nacs. Muse normande, Cant royal. Le vieux-francais disait aussi Relouquer, et Hrlouquer s'est conservé en rouchi. En vieux- saxon Luegan et en anglais To look signifient Regarder. Lurasser, v. n. Chanter bas et sur le méme ton; cest un fréquentatif de LURER. Lurer, v. n. Rahbacher, Chantonner , Répéter le méme son ou la méme parole ; pro- bablement de Zoure dont les ménétriers tiraient toujours 148 MAF lesmémes sons. II signifie aussi dans |’Orne Conter des sor- nettes, des Leurres; Parler beaucoup au lieu de travailler; il pourrait venir dans ce der- nier sens du breton Lure, Pa- resse. Ma, s. m. Tamis. Macare, adj. (arr. de Mor- tagne) Lourd, Stupide ; dans ie patois languedocien Mdchou ala méme signification, ainsi que l’espagnol Mdchoca: peut- étre de Machon, Mulet. Macuin, s. m. Mot par le- quel on désigne un objet dont on ne trouve pas le nom; il a la méme signification dans le patois du Berry. Macnurer, v. a. Décrier ; Le chaudron machure la poéle est une locution proverbiale ci- tée par de Brieux, Origines de coutumes anciennes, p. 79; c'est une métaphore, car Ma- churer s’emploie Se ie au propre comme dans le style familier, avec le sens de Noir- cir, et Macher signifie Noir en patois Bourguignon : Le tier pu macherai, Qu’ein roi d’Etiépie, Prezauti po son plai De Vancan d’Airaibie. La Monnois, Nai Borguignon. _ Dans le patois du Tarn Maca -signifie Noircir. MAarFonceE, int. (Calvados et Orne) Ma foi; dans la Hague on dit Mafinguette. MAH Lunes, Luretres, s. f. pl. Sornettes ; en rouchi Lurette signifie une chose sans durée ou sans consistance. Lurier, s. m. Diseur de riens, Ennuyeux ; voyez LU- RER. Macnan, s. m. Chaudron- nier ambulant ; ce mot existait aussi en vieux-francais : Pour le maignen , pour avoir repare deux poelles de fer, deux po- elles d’arain et une poillette a queue, le grant chauderon, la grantleschefrite et ung bassin, virs. vi d.; Comptes de U Hétel- Dieu d Evreux, de 1459. On trouve aussi Magnan dans le Livre des mestiers d’Estienne Boileau, p. 40. Il y avait au- trefois & Fermanville, dans arr. de Cherbourg , une pierre druidique appelée Pierre-au- Magniant; M. de Gerville, Ar- chives de la Normandie, t. 1, p. 159. Ce mot vient sans doute du latin Manuarvus, Qui tra- vaille avec la main (maneuvre), car en rumonche Magnin si- enifie aussi Chaudronnier , et Magner a dans le patois du Berry la signification de Fati- guer. Macuk, s. f. Gros ventre. Manon, adj. (arr. de Mor- tagne) Bégue; on donne un sens analogue au verbe Ma- honner : probablement du bas- latin Mahaniwm. Voyez ME- HAIGNER. MAI Maixant,s. m. (Orne et Cal- vados). Ferblantier nomade ; VOVeZ MAGNAN. Marnier, s. m. (Orne) Petit enfant; c'est probablement une corruption du vieux—frangais Mainsnes,Puiné, qu’ona forme par opposition’ Ainsnes, Avant né. Meyna a la méme signifi- cation dans le patois du Dau- phiné, et Mainrée signifie ser- vante dans le patois de Nancy. Maintatn, s. m. (Orne) Man- che du fléau que lon tient dans la main. Maintien, s. m. (arr. de Cherbourg) Pain , moitié orge et moitié froment (arr. de Va- lognes) Cidre mélé d'une moi- tié d’eau. Voyez MITAN. Maire, s. f. Tache naturelle sur la peau. (Manche) Depot gluant du cidre. Mais, adv. Plus; du latin Magis, comme Maistre de Ma- gister: il avait ce sens en vieux- francais, et l’a conservé dans Jamais, Désormais, et dans quelques phrases ou se trou- vent le verbe Pouvoir et une négation. Mais (que), conj. Pourvu que ; le vieux-francais lui don- nait le méme sens: Il nechaut a plusieurs qui tiegne la sei- eneurie; mais quils’ soient prochains des: prouffitz : Alain Chartier ; OEuvres, p. 425, éd. de du Chesne. La Fontaine s’en est encore servi dans ses Fables ; |. 1x, fable 14. Marist, ady. (arr. de Valo- genes) Presque ; on ne l’emploie ue suivide plus et il signi- fait sans. doute d’abord Dé- sormais, Maishui; le vieux- francais. renyersait les deux MAL 149 syllabes : Huimais n’esteut parler d’acordes. Branche aux royaux lignages , t. I, p. 217. Les troubadours disaient ¢- galement Hueymais. Mairre, s. m. Titre hono- rifique que l’on donne aux fer- miers. Ce mot nous semble dé- river plutétdelislandaisMes¢r, Le plus grand, Le premier, que du latin Magister : la pre- miére signification convient beaucoup mieux a Mestre-de- camp et surtout au nom de la Mestre de camp que l'on don- nait autrefois a la premiere compagnie de tous les régi- ments. Le sens du vieux-fran- cais Maistre s'explique d’ail- leurs bien plus naturellement par une origine islandaise ; ainsi, par exemple, les envoyés de Guillaume-Longue-épée di- sent a Riol, le chef des révol- tes : De tote Vonor que iba Ne que il tient ne qu’il aura, Vos fait-il od soi parconier , Seez li maistre e conseillier, Sor toz les autres excellenz E comandere de ses genz. Benois, Chronique rimée, }. u, V. 9146. ’ Maxanpre, s. f. Pustule, Ul- cére ; du bas-latin Malandria (mauvaise lepre):il ne se dit plus en francais que d'une maladie qui attaque Je genou des. che- yaux. Parbleu , la vostre (mine) est plus ridicule que la mienne; je n'ai ni surot, ni malandre ;) Dancourt, Les. vendanges de Suréne. Voyez MALON. Maxarr, s. m. Canard male; il ne se dit-en frangais que du male des canes sauvages, et 150 MAL avait ordinairement la méme signification en vieux-francais : Lez un estan uns maillars li sailli, Prant son faucon li damoisiax gentis. Chanson du vilain Hervi, Ms. B. R. fonds de St-Germain fran- cais, n° 1244, fol. Iv, verso, col. I, v. 26. On trouve cependant dans le Roman de Renart : Moult i ot gelines et cos, Anes, malarz, et jars, et oes. Tea, Pp @, ¥. 1273. Marr, Matais, s. m. Fu- mier ; probablement du latin Masculus, parce que le fumier féconde la terre. Une idée sem- blable avait fait imaginer aux payens le mariage de |’Aether et dela Terre ( ispog yauos, éoptn AtoguatHpas), que dans le cinquiéme livre de son traité Adversus gentes , Arnobe leur reproche si vivement : Vos Jo- vis et Cereris coitum imbrem dicitis; dela ce passage du Perviligium Veneris : Vere concordant amores, vere nubunt alites Et nemus comam resolvit de maritis imbribus. Quoique dans le patois de Rennes Marni, Mani, signi- fie Fumier , nous pensons donc que Huet's’est trompé dans ses Additions aux Origines de Meénage et'dans ses Origines de Caen; p..319, en voyant dans ce mot une corruption de Marne, dont on se sert en cer- tains endroits pour féconder la. terre. Selon Roquefort, t. 11, p. 128, le vieux-francais disait aussi Malleys. MALEMENT, adv: (arr. de Cou- tances) Mal, Méchamment : MAN . il se trouvait aussi en vieux- franeais : Trop malement vous meschay. Nativité de Notre-Seigneur , dans Jubinal, Mystéres iné- dits, t. 1, p. 11, v. 18. et s'est conservé dans le patois du Berry. MAL-EN-HIE, adj. Mal-en-- gaité (Voyez HIE), Souffrant. MAL-EN-TRAIN , Pa Souf- frant; le francais dit aussi Bout-en-train. Mauevrete , s. f. Malheur: Les bons yront en beneurte Et les mauvaiz en malheurte. Conversion de saint Denis, dans Jubinal, Mystéresinédits, t.1, p- 46, v. 29. Comme en vieux-francais on dit aussi Malheuré au lieu de Malheureux. | Ma.izre, s. m. Lieu oulon dépose le fumier ; voyez MALE : on dit aussi Fumiere. MALLE, v. a. (arr. de Vire) Fatiguer, Mettre Mal; ilsi- gnifiait en vieux-francais Mal- traiter, Frapper. Maton (Manche) Escarre; du Jatin Malum. Malan avait une signification analogueen vieux- francais : Le col fut de bonne moyson, Gros assez et long par raison; Si n’avoit tache ne malan. Roman de la Rose, v. 553. Voyez aussi MALANDRE. Mancon, MANOUETIN, Ss. m. Bras de charrue; de Manica , Manche, ce qu’on tient dans la main; par une idée semblable le vieux-francais appélait Ma- mete \’Anse d’un: vase. On lit dans le Commentaire du dic- tionnarre de Jean de Garlande: Stiva (aratri), ‘inferior pars , s Y Mabe ‘ MAN uam rusticus tenet in manu et icitur gallice Manchon ; Pa- ris sous Philippe-le-Bel,p.598. ManpaLE, S. f. Soufflet; peut- étre du bas-latin Mendum , Dommage. MANEAUX, S. m. pl. (arr. de Bayeux) Clochetons de la ca- thédrale ; comme ils sont trés- ouvragés, leur nom pourrait venir du bas-latin Manobrium, en vieux- francais Manwwore , Travail, Main-d’ceuvre , quoi- ue nous le dérivassions plutét Ju vieux-francais Moineaucz, Petites cloches. MansussEr, v. a. Manger ; le patois s'est moins éloigne de Manducare : le vieux-francais disait aussi Manjusse au sub- jonctif : fl ne faut plus contrargiier S’il vit, boive et manjusse et voise. Martyre de saint Pierre et de saint Paul, dans Jubinal, Mys- téres inédits, t. 1, p. 66, V.- 10. Dans l’arr. de Valognes on dit Moujuer , et nous lisons dans le Roman d’ Auberz, cité dans du Cange, t. Iv, p. 393 , col.3: A tant manjuent aus deus la miche alise. Manse., s. m. Habitation ; du latin Mansio dont la signi- fication est la méme. Voyez MESNIL. Mansmre , adj. (arr. deCher- hourg) Déguenillé, Vétucomme un Mansarius, espéece de co- Jon tributaire fort pauvre: Vo- lumus, ut pullos et ova, quos servientes vel mansuaril red- dunt ; Charlemagne , Capitu- lare de Villis, ch. 39. Mant, s. m. (Calvados) Larve de hanneton. MAR ~ ADSI Marcau, Marcou, s. m. (Orne) Gros chat male; Scar- ron a dit dans son Virgile tra- vesti : Les gros marcous s’entreregardent , On de leurs griffes ils se lardent. A Reims on dit aussi Mar- cou. Marcutoue , s. f. (arr. de Caen) Le vingt-cing de Mars ; il avait la méme signification en; vieux-francais : le jour de !Annonciation que lon dit la Marcesche ; Charte de 1407, citée dans du Cange, t. Iv, p. 278, col. 3. Marea, s. m. (arr. de Vire) Ordure ; suivant Roquefort, t. i, p. 444 Margoillover signi- fiait en vieux-francais Rouler dans la boue; voyez MARGOUIL- Ler. Nous savons par Pline, l. xvut, ch. 6, que les Gaulois appelaient la marne Marga. Mareane, s. f. (arr. de Cou- tances) Seche ; en breton Mor- aden. Marco, s. f. Petite fourche ; — du latin Merga, dont la signi- fication était la méme. Marcoualts, s.m. (Orne) Fond de carriére, Argile ; de l’an- cien celtique Marga, en bas- latin Margilla. MarcouiLter, v. a. (Orne) Salir ; le francais Margouiller a la méme racine; voyez le mot précédent. Dans le Calya- dos et dans la Manche ce yerbe est neutre et signifie Mal pro- noncer, Manger malpropre- ment ; peut-étre vient-il alors de Male et de Gula. Mancourerre, s. f. (arr. de Valognes) Bouche qui Mar- goulle ; a Reims ce mot signt~ 152 MAT fie le Bas du visage. ManrcouLine, s. f. (arr. de Valognes) Bonnet , Mauvaise goulrne. MarincortTe, s. f. Charrette légére, et, par extension, Mau- vaise voiture. ManJOLLE , s. f. Morceau de chair rouge qui pend sous le bec des cogs; dans I’Orne il signifie un Monceau de poires que l’on met sur la paille: en bas-latin Margerius signifie Monceau. MARONNER, Vv. n. Grogner, Murmurer ; du latin Moerere , Etre marri. Marovav, s. m. (Orne) Chat male ; dans le patois du Berry onl’appelle Maraw. Voyez Mar- CAU. MARQUE-A-LA-VIELLE, 8. f. (arr. de Coutances) Arc-en-ciel. MARUBLER, v. a. Tourmen- ter, Ennuyer ; Marrire signi- fiait dans la basse-latinite Af- fliger. MascapPiz, s. m. Confitures trés-noires, faites avec du cidre et des pommes. Massa, s. f. Masure; c'est le bas-latin Massa, Maison. Massér, s. f. (arr. de Cher- bourg) Mélange d’argile et de foin dont on se sert pour batir aprés l’'avoir longtemps Massé vattery ; il ne serait pas non plus impossible que ce mot vint de Macon ou du vieil-alle- mand Mazzo. Mastas, s.m. Homme replet. Masure, adj. (arr. de Li- sieux) Bati; il n’est employé que dans l’expression Cour masurée. Voyez MASSA. Marte (enfant de la) Filou , Escroc ; la Mate était une place MAU de Paris ot les voleurs se réu- nissaient ; de Brieux, Origi- mes de coutwmes anciennes, p. 15. Marrs, s. f. pl. Lait caillé; en islandais Mat signifie Ali- ment (Mets); le vieux-francais disait Maton: Le lait, le maton et la craime Redoubte qui sante aime. Eustache Descnamps, Giuvres , p. 168. En rumonche on dit Motta: L’on volu fer tranzi la motta Devan qué l’usson mi aria. Ranz des Vaches. MATRASSER, V. a. Assommer, Rouer de coups; ce mot était aussi usité en vieux-francais : Le bruit que vous aviez... été porte par terre, saboulé et pé- tillé aux pieds des cheveaux.... matrassé et charpenté de tant de coups ; Mémoires de Sully, t.1, p. 124. Il vient sans doute du vieux-francais Matras , sorte de dard & grosse téte qui ne percait pas, selon Roque- fort, mais que nous croyons plutét un baton de guerre, comme le Matras proveneal : Mas un paya lay venc que porta un matrat. Ferabras, v. 268. Mautt, s. f. Méchancete ; il avait la méme signification en vieux-francais : Bien li semble de cruaute De felonie et de maute. Traduction @ Ovide, citée par Borel. . On dit aussi Mauvaiseté - Mais tu es tout plain de pechie; Si n’est de toi fors mauvestie. Martyre de saint Pierre et de saint Paul, publié par M. Ju- binal, Mystéres inédits, t. 1, p- 65, ¥. 18. MEG Mauture, adj. (arr, de Cher- bourg) Malin, Espiegle, De probité suspecte ; voyez le mot précédent, Maxis, adv. (arr. de Bayeux) Méchant; en vieux-francais Macquer signifiait Frapper for- tement d’un coup de poing. Me, adv. (arr. dAlencon) Maintenant. Mecwant, adv. Pauvre, Mal- heureux. Il a la méme signifi- cation en vieux-francais ; dans le Mystere de la Conception de Notre-Seigneur Jésus-Christ , sc. 34, Joas refuse de recevoir Marie et Joseph dans son hé- tellerie , en leur disant : Ce n’est pas ici Pospital , C’est logis pour gens de cheval Et non pour gens si meschans; Allez loger emmi les champs. C’est méme la certainement la signification primitive de Méchant (mescheant); dans toutes les langues que nous connaissons La pauvreté est un vice. Mécuer , v. a. (arr. de Vire) Pocher ; peut-étre est-ce une corruption du vieux-frangats Macquer, Assommer, qui vient de Massue , Machue en patois normand. Mepin, s. m. (arr. de Mor- tagne) Mauvaise couche. Mrcaucier, v. a. (Orne) De- sappointer ; peut-étre une cor- ruption de Me-Gaudovr, Ne pas amuser. Mécur, s. m. Petit-lait 5 il avait la méme signification en vieux-francais et vient peut- étre dulatin Macer ; cependant Mesga avait un sens analogue dans la basse-latinité : Mesga, jiquor scilicet qui ex recent MEL 153 caseo profluit ; Thesaurus no- vus latinitatis, dans M. Mai, Classicorum auctorum e Vati- canis codicibus editorum, Vill, p. 524. MEHAIGNER, V. a. Blesser, Estropier. Ce mot était fort souvent employé en vieux-fran- cais : Se li uns freres ocit l’au- tre ou lune suer l'autre par felonie, il en sera livrez a mort; et se ille mehangne, il l’espeneira par les membres ; Etablissements de Normandie, . 26. En breton Mece’hana si- enifie Mutiler, et Mécaigne dans le patois de Langres, Ma- lingre. Mézau, s. m. (Orne) Enfant au Maillot ;c’est probablement une corruption de ce dernier mot. Mite, s. f. Flocons mucila- eineux qui se trouvent au fond des bouteilles de cidre ; on dit dans quelques endroits Marre. Mé.ier, s. m. Néflier; cette syncope de Mespilus avait lieu aussi en vieux-francais ; Ron- sard a dit : Un meslier nouailleux ombrage le portail. Le fruit s'appelle Meéle , comme en vieux-francals : Je ne doute mie Francois tout qui sont une méle. Pais aus Englois, dans Jubinal, Jongleurs et trouveéres, p.1738. Méui-wiLo, s. m. (arr. de Bayeux) Mic-mac ; a Bayeux on donne ce nom a la Mercu- riale qui s’appelle en provencal Mellilot. MeLLE, s. m. (arr. de Valo- ones) Merle ; c’était la pronon- ciation du vieux-francais : 154 MER Jou voel avoir des oiseax ¢’aves pris, Pincons et melles, aloes et perdris. Chevalerie Ogier de Danemar- che, v. 11305. MELLE, s. f. Anneau dans lequel on passe un bouton ou une agraffe ; c’est une corrup- tion de Maille qui avait lieu aussi en vieux-frangais : Des haubers e des broignes mainte mele faussee. Roman de Rou, v. 4014. MELO, s. m. Paquet de laine ou de fil Mélé. MELTON, s. m. Petite prune; corruption du bas-latin Welum, Fruit. MrENom, s. m (arr. de St- Lo) Surnom; si ce n’est pas une corruption de Bénom , il vient sans doute de Mé, parti- cule négative, et de Nom; ilsi- gnifierait alors un nom qui nen est pas un. MENTECHE, part. int. (arr. de Pont-l’Evéque) Comment ; cest une aphérése et une cor- ruption de Comment est-ce. MENUISE, s. f. (arr. de Va- lognes). Petit plomb; de Menu. Le vieux-francais donnait le méme nom au petit poisson : Sy pescheras a la menuise. Martyre de saint Pierre et de sainé Paul, dans Jubinal, Mys- téres inédits , t.1, p.87, Vv. 7. Merc, s. m. Borne de pierre qui sépare les terres. Ce mot qui se trouve dans presque toutes les langues germaniques avec une prononciation plus ouverte Mark, vient sans doute, plus ou moins directement , du sanscrit ot Mare signifie Sé- parer. MERELLE, 5. f. (arr. de Ba- en bas-latin Mezellus , MEU yeux) Petit cidre ; c'est un di- minutif du latin Merus, Pur. MERIENNE, S. f. Sieste; syn- cope de Méridienne qui avait lieu aussi en vieux-francais : Méseau, Mtze., s. m. La- dre, Léprenx : Je suiz la fille d’ung mezeau De cella vous advise. Chansons normandes, p. 190, édit. de M. Dubois. Il avait la méme significa- tion en vieux-francais : Lisainz rois demanda audit chevalier lequel il voudroit miex ou avoir fait un pechie mortel ou estre mesel, et li chevaliers respondi que il yodroit miex avoir fet trente pechiez mortex ue ce que il faust mesal ; Vie 2 saint Louis, a la suite de L’Mstoire de Joinville, p. 335. Ce mot vient sans doute du latin Misellus, Misérable, Lé- preux. MEROLLE, Ss. f. (arr. de Mor- tagne) Brebis; peut-étre une corruption de Mérinos. — MesniL, s. m. Maison ac-~ compagnée dun champ; en bas-latin Mesmlum. Ce mot se trouvait aussi en vieux-fran- cals : N’i a meson, ne borde, ne mesnil. Roman de Garin le Loherain, ci- té par du Cange, Observations sur Vhistoire de saint Louis, p. 63. MESSIONAL, adj. (arr. de Saint-Lo) Qui se tient ou se juge pendant les vacations qui avaient lieu autrefois au temps de la Mozsson, en latin Messvo. Met, s. m. Pétrin; ila le méme sens en breton et en vieux-francais : MIC Quachez le dessoubz vostre met. Mystere de la Nativité, dans la Bibliothéque de VEcole des chartes, t. ui, p. 471. Probablement, comme on l’y a prétendu , ce mot ne signifie pas Bahut , Coffre a pain, car en Dauphiné Matta signilie Pétrir, et Rabelais a dit dans son Gargantua: Et croissoit comme pate dans le met. Nous devons cependant reconnaitre que par extension , ce mot si- enifie dans le patois du Berry Huche au pain. Meusa, s. f. Provision de ommes pour Vhiver; du bas- atin Meiza, qui signifiait une Certaine quantité, une Masse ; voyez du Cange, t.1v, p. 345, col. 2. Mrartton , s. m.:Enfant ; en vieux-francais Mion signifiait plus petit. Voyez mio et mio- CHE. Mranper, v. pn. Miauler de faim. Mranpoux, s. m. Hypocrite, Homme qui fait le chat ; voyez le mot précédent. Micamor, s. m. (Orne) Tasse de café. -Micne, s. f. Petite fille; voyez miocHE. — Brioche, comme en vieux-francais : Cil qwil ateint acoup dessus son has- terel, Jamais ne mangera de miche ne de gastel. Combat des Trente. C’est une extension de si- enification, car ce mot signi- fiait autrefois Pain blanc: Prix du bled froment litte (d’ Elite, Col-lectus) dont se fait le pain blanc appelé miche; Reégle- ment pour les boulangers de MIL 155 Bourges, du 7 mai 4597. Il vient en ce sens du bas-latin Mica, Micha, Petit pain. Micuer, v. n. Pleurer ; Faire la Miche, la petite fille ; selon Cotgrave Michon aurait signi~ fié en vieux-francais Zmbécvle. Mizre, s. m. Médecin; se- lon un proverbe populaire : Qui court aprés le miére, Court aprés la biére. Le vieux-francais disait Mr- re. Ne savoie trouver mire De ma douleur ne de mon ire. Roman de la Rose, Vv. 4325. MicauT, s. m. Fruits que l'on conserve pour l’hiver ; ce mot n’est employé que dans la phrase Poires ou Pommes de Migaut. Quoique dans le pa- tois de Rennes Anijot signifie Pommes de réserve, ce qui semble indiquer une racine cel- tique corrompue, on ne trouve pas de mot analogue dans au- cun des différents dialectes celtiques , et nous serions ten- té de faire venir Migaut du has-latin Migeria, Mesure. Les pommes de migaut seraient alors des pommes communes quel’on achetterait a la mesure pour en faire provision, et c'est précisément le sens que lon donne a& cette expression. Mittaup, adj. (arr. de Mor- tagne) Gueux , Mendiant. Mittoraine, s. f. (arr. de Valognes) Fantéme tres-dan- cereux & rencontrer ; en vieux- francais on appelait une es- péce de loup-garou Mille- groux. Mitsoupier, adj. (arr. de Bayeux) Extrémement riche, 156 MIS Qui a Mille sous. MinaBLE, adj. Deguenillé, Qui fait pitié; le patois du Berry lui donne le méme sens. Mince, s. f. (arr. de Morta- gne) Petite corde que l'on met au bout du fouet ; comme il se trouve aussi dans le patois de Langres, ce n’est pas proba- blement uue corruption de Meche. Mincen, MINcHIER, V. a. Briser , Mettre en petits mor- ceaux ; ce mot existait en vieux- francais , et lon dit encore, mais dans un sens fort res- treint, Emincer. L’anglais To mince et le hollandais Menken ont la méme signification. A Nancy Meunchir signifie Cou- per. Voyez mior. MINET, s. m. Petit garcon ; Minette, Petite fille; en rou- chi on dit Minette et Nina, Ninetta en espagnol. MINGRELIN, adj. Chétif, Maigre; il avait la méme si- gnification en vieux-francais. Minots, s. m. pl. Fourru- res ; probablement de Minet , Chat, car le peuple de plu- sieurs autres provinces dit Minets ; voyez MITON. Mio, s. m. (Orne) Dernier éclos d’une couvée ; en vieux- francais Mion signifiait Plus petit. MiocueE, s. f. Enfant; voyez le mot précédent. Mior, s. m. Petit morceau , Miette; Un miots’emploie aussi adverbialement avec le sens dun peu: Baille m’en z’un miot. A Nancy on dit Mion. MIoTEE, s. m. Pain mis en moots dans du cidre. Mrover, v. a. (arr. de Ba- MOC yeux) Ajuster, Mirer. MisERABLE, S. f. (Orne) Pe- tite mesure d’eau-de-vie; en vieux-provencal Misirapa si- gnifiait Cruche, Pot; voyez Raynouard, Lexique roman , t. Iv, p. 242. Misreavu, Ss. m. (Orne) Jeune homme Miran, s. m. Milieu, Cen- tre ; en vieil-allemand Mitte. I] avait la méme signification en vieux-francais et l’on trouve encore dans Brantéme: Le boufon qui vint, cela dit: Et moi je voudrois estre au beau mitan. Miran, s. f. (arr. de Valo- gnes) Moitié; voyez le mot préceédent. Miter, v. a. (arr. de Mor- tagne) User ses vétements comme s'ils étaient mangés par les mutes et , par extension , Gater , Tacher. Miron, s. m. Chat comme en vieux-francais, Manchon; il ala méme signification dans le patois du Jura: La vendu tant qu’a notis fiaux, ~ Ma croix, mon miton, Pou les boire a Lion. Chanson populaine. Miroucue , s. m. Hypocrite ; selon de Brieux, Origines de coutumes ancrennes, p. A541, cest une corruption de Saint n'y touche. ! g Mirreux., adj. Chassieux. Mirron, s. m. Morceau ; probablement de Miette. MocuE, s. f. Mogugton, 's: m. (arr. de Vire) Caillot, Ag+ glomération ; peut-étre del’an- glais Much, Beaucoup; Moce signifiait en vieux-francais Colline ct en patois breton MON . Moche signifie Peloton et Mo- chon. Monceau ; Voyez le mot suivant. Mocut-Mora, adv. Pas trop; ce qu’on exprime ailleurs par cette autre locution normande Comme si comme ca. Ce mot est sans doute Ja réunion de deux adverbes anglais Much , More qui signifient Beaucoup déja, mars encore davantage. Morne, s. m. Panter pour chauffer les lits, Toupie, Jouet. Dans la premiere acception ce mot est sans doute une cor- ruption de Manne; peut-etre cependant est-ce une allusion aux mauvaises moeurs des moines. Motsson, s. m. Moineau ; il vient du vieil-allemand fez dont la signification était la méme : Miex aimeroie deus malars, Voir deus bien petis moissons , Que toutes lor confessions. Dit du Barisel. Dans l!’Orne on appelle le Pincon Moisseron. Mo.uir, v. n. (arr. de Va- lognes) Diminuer; Le 6lé a molli; on dit également Le blé a flécha. Mon (c'est); il faut proba- blement sous-entendre Avis ; cette locution existait aussi en vieux-francais : C’est mon! c’est bien sonder au puits inépuisable Ve Valme vérité, la lampe vénérable, Chetifs veufs de bon sens , orphelins de raison. Du Monin, Uranologie, 1. 11. Dans l’arr. de Mortagne, elle s’emploie aussi adverbialement comme une sorte d’expleétif , et Yon en trouve également des MOR 457 exemples en vieux-francais : ENTENDEMENT. Tu ne peux sans moy comprendre la signifiance de cette danse. L’ ACTEUR. Ce ne fais mon. Dance aux aveugles, p.8. Monn, Mounke, s. f. Grain qui va au moulin ; Farine que le Meunier , autrefois Monmer, en rapporte: ce mot existait aussi en vieux-francais ; voyez Roquefort, t. 1, p. 203, et Raynouard, Lexique roman, t. Iv, p. 245. Monstgur, s. m. Cochon; antiphrase qui se retrouve dans les patois du Vendomois et du Berry, ot cet animal est ap- pelé Un noble. Dans V’arr. de Cherbourg. on dit Un mon- sieur de Tréawville et dans presque toute la province Un vétu de save. C’est sans doute une allusion satyrique, faite par la classe des travailleurs 4 la vie oisive des gentilshom- mes et des habitants des villes. MoguE, s. f. Tasse sans anse. Méovue, s. f. Mouche, A- beille que l’on appelle dans quelques endroits Méque a mié ; cette corruption de Wusca se trouvait déja dans le fran- cais du x1 siecle : Et tel plente de mosques crut, Dont mainte gent d’engrot morut. Roman de Brut , v. 2173. Moque signifie aussi Guim- barde; probablement parce que cet instrument imite le bruit d’une grosse mouche qui vole. Moouvet, s. m. (arr. de Cou- tances) Lumignon. Moraniré, s. f. (Eure) Haine, 158 MOT Rancune ; peut-étre un sou- venir de l’obligation ot lon était de venger ses injures et celles de ses parents. More, s. m. (Orne) Sentine. Moret, Movrer (arr. de Bayeux) Fruit de la ronce; (arr. de Valognes) Fruit de l'airelle myrtile (Vaccinium). Ce mot vient sans doute de la couleur noiratre de ces fruits, car le vieux-francais donnait un sens analogue a More : Et plain un pot de vin more, Et li autre de fort vin blanc. Roman de la Charetie, dans Keller, Romvart, p. 458, Vv. 13. De la Morel, le nom des che- vaux noirs ; voyez le Tournor de Chauvenct, v. 3475 et le Roman ad’ Agolant, v. 320. On dit encore proverbialement dans le patois de Rennes: Ca m’est égal, taupin vaut bien morette ; c’est-a—-dire une chose noire en vaut bien une autre. MorriLer, v. n. (arr. de Valognes) Déchoir, Décliner ; littéralement avoir le Mor fil. Monine, s. f. (arr. de Ba- yeux). Ruche vide et, par ex- tension, Ruche abandonnée. Morine signifiait en vieux- francais Un animal mort de maladie. Si ne maungerez pas les chars de ices , et tu eschiveras mortes morines; Léviteque , cht ee Morosir, adj. peu ouvert, Morose; la méme forme se trouve en vieux-francais; voyez Roquefort, t. 1, p. 208. Morte, s. f. Gazon. Mortigr, adj. (arr. de Vire) Matériel , Grossier ; sans doute de Motte. MOU Mortin, s. m. (arr. de Cher- « bourg) Pain; probablement Une motte de pain. Mou, s. m. Poumon, par opposition au foie et au coeur que l’on appelle le Dur ; il se trouve aussi dans le patois de Reims. Moucuet, s. m. Moncean. Mourriner, v. n. (Orne) Re- muer les lévres; il ne se dit que des lapins. Voyez',Mour- FLER. MourFLe, s. m. (arr. de Va- lognes) Gros gant fourré sans autre doigt que le pouce , dont on se sert pour couper les broussailles ; on le trouve aussi en vieux-francais : La sarp a mon caintur et mon mouf- fle en ma mains. Privilége aux Bretons, dans Jubinal, Jongleurs et trou- veres, p. 53. MourrLer, v. n. Faire la moue, Allonger le Muffle, Bouder. Mouerrr, v. a. (arr. de Va- lognes) Manger. MouLineR, v. n. (arr. de Valognes) Remuer toujours comme un Moulin. . Movtt, adv. Beaucoup. Une compaigne moult belle. OLivier Bassetin, Vaux-de-Vire, p. 216, éd. de M. Travers. C'est le latin Multum; il était fort souvent employé en vieux-francais. | Mourmatp, s. m. (arr. de Valognes) Songe creux, Mo- rose. ) Mouron, s.m. Salamandre: probablement elle doit ce nom asa couleur (Voyez MorET) , puisqu’on Vappelle dans quel- MOU ques localités Lézard noir. C’est peut-étre la ressemblance de ce nom avec celui des Mau- res, qui fait croire qu’en tuant un mouron on gagne cent jours d'indulgence. Mouronnté , adj. (Orne) Rayé de jaune et de noir comme un Mouron. MousrTTE, s. f. (arr. de Caen) Petite fille impertinente. Moute, s. f. Chatte, peut- étre femelle du Matow; Farine, ce qui est A/oulu (Molitus), en vieux-francais Movte: Il com- menda que se aucuns voloit avoir moite de novel, ou que ilalassent a son molin, ne ti hom ne paiassent moute (Mou- ture), ne il nalassent au mo- lin; Ktablissements de Nor- mandie, p. 44. Mouton, s. m. Grosse pou- tre mobile qui écrase les pom- mes ; en francais c’est encore une grosse piéce de bois qui sert a enfoncer les pieux, et on donnait autrefois ce nom & la machine de guerre gu’on ap- pelle &élier. Truies, multons ferrez e durs Firent assez hurter as murs. Benois, Chronique rimée, 1. u, Vv. 29963. Tous ces noms viennent de Vhabitude quont les moutons de heurter. Mouver, v. a. et n. Remuer; du latin Movere ; par contrac- tion on dit aussi Mower. Ce mot élait fort usité en vieux- francais;Ronsard disait encore: Ils apaisent les flots, ils mouvent les orages. Il est resté aussi dans le pa- tois de Reims, et lon dit au moral Emouvoir. MUE 159 MoovvetteE , s. f. Cuillére de bois pour remuer les sauces. On s’en sert aussi au figuré et il signifie alors Une personne qui remue toujours. Mucuer, Mucuigr, v. a. et réfl. Cacher , Se cacher, comme en vicux-frangais : Mais Kallemaine le sot bien foervoier, En une cambre et fermer et muchier. Chevalerie Ogier le Danois, v. 3197. Cil n’avoit pas de sens plente; Por co se cremoit et doutoit, Et en ses cambres se mucoit. Partonopeus de Blois,t. 1, p. 15, v. 415. En breton Moucha signifie Se masquer, et en islandais Massa, Chaperon ; c'est pro- bablement de ce dernier mot que vient Aumusse, nom que lon donne a la fourrure avec Jaquelle les chanoines se cou- vrent la téte. Mucuerte , s. f. Cachette ; on Je trouve aussi en vieux-fran- cais; voyez Li Romans de Berte att grans pres, St. XXXVII, V. MucreE, adj. Humide, Moi- s! ; il se trouve aussi en vieux- francais : Qui souef flaire et n’est pas mucre. Martyre ‘de saint Pierre et de saint Paul, dans Jubiual, Afys- téres incdits, t. 1, p. 89, Vv. 19. Maleré Vanglais Muck, ce mot vient sans doute de Muci- dus, comme Acre d’Acidus ; car on disait en vieux-francais Ramucrir pour Rendre moite. Mucreur, s. f. Humiditeé. Mug, s. f. oe Cage ot l'on met les volailles & engrais- ser ; il existait aussi en vieux- francais , et La Fontaine sen 160 NAL est encore servi dans la Fable dela Souris et du Chat-huant, l. u, fable 9. Voyez Musss. Mucat, s. m. Mauvais su- jet : Che fut les muguats d’arrogants. Muse normande, p. 26. C’est sans doute une cor- ruption de Muguet. Murarp, s. m. Entété, Bou- deur : Vaut mieux qu’un vieux mulard Qui toujours est en ire. BASsELin , Vaux-de-Vire, p. 38, éd. de M. Travers. Voyez le mot suivant. Mouer, v. n. Bouder, Etre entété; quoique 1’allemand Maulen aitle méme sens, la si- gnification primitive de ce mot Narre, s. f. Coup, Blessure; levieux-francaisemplovaitaus- si Nafres dans le sens de Bles- sé : Des morz ki par li pais jurent, Et des nafrez ki puiz morurent. Roman de Rou, v. 7889. et Navrer est resté au figu- reg init g signifie encore Balafre dans le patois de I'I- sere. Tous ces mots semblent venir de lislandais Data , en allemand moderne Naber , qui signifie Foret, Percoir. Nau, sorte de juron. (arr. de Vire) Parbleu , Certainement. Naim, s. m. Hamecon ; c’est une corruption de Haim. NAM nous semble étre : Ressembler &’une mule: on dit encore pro- verbialement : Entété comme un mulet. | Mutette, s. f. Gésier des oiseaux, ou ils broyent leurs aliments comme sous une pe- tite Meule. Muton, Mutor, s.m. Meule de foin; ce mot existe aussi dans le patois du Berry, et lon trouve dans Orderic Vital Foe- ni mullonem. MussE, s. f. Argent, Loge pour les oies, Chenil ; malgré ces significations différentes , c'est probablement un seul mot qui vient de Mucher et signifie Ce que l’on cache et |’Endroit ou l’on cache. . _Namps, s. m. pl. Gage, Nan- tissement : Bons beuveurs ont dispense ; Sergent pour namps ne doibt Prendre par violence Les vaisseaux ot l’on boit. BASSELIN, Vaux-de-Vire, p. 98, édit. de M. Travers. Ce mot, dont le francais a fait Nantir et Nantissement , vient sans doute dusaxon Nam, Gage, Namfeoh, Bétail qui sert de gage. C’est en ce sens qu il était le plus souvent em- ployé autrefois. L’en doit savoir que celui qui tient namps, ne leur doit pas donner a manger, mais il doit pourvoir de les mettre en NAR- iieu convenable, qu ils n’empi- rent par la raison des lieux ou ils sont; ‘Vieille coutume de Normandie , ch. 7. | Il y a encore a Caen une Rue aux Namps. Ce mot se dit maintenant plus particuliére- ment des habits ; c'est une preuve bien facheuse que l’a-_ mélioration des fortunes n'est pas aussi grande qu’on se plait ale dire. i Narin, s. m. (Orne) Petit garcon ; Anapz en islandais. _ NAQUETER, Vv. n. (arr. de Cherbourg) Claquer des dents, Trembler defroid ; Gnaka si- gnifie en. islandais ‘Rendre un bruit aigu, et Nagues dans le patois deReims, Dents. Levieux- francais disait dans le méme sens Voqueter. - Si fesoit grant froit et nei- geoit continuelment , il ne.sa- voit que faire et voyant la nuit venue, tremblant et noquetant les dents ,.commenca regarder ca et la pour veoir aucun logis; Le Cameron de Bocace, cité par Roquefort, t..11, p. 244. -° Naguets, s. m. pl. (Orne) Yeux, terme familier. — Nar&, adj. (arr. de Vire) Ru- sé; probablement de Vislan- dais Hnar, Hardi, Intrépide: ce changement de signification a été naturellement ameneé par la difference. des moturs ; la finesse est pour les paysans normands ce que le courage était pour les pirates scandi- naves. Naren, v. a: Attendre long- temps, comme unhomme mort; en islandais Nar signifie. Gada- wre., * : Narniau, s. m. Mouchoir de NER 161i poche; de Nares, Narines.. Nasse, s.’f. Instrument qui sert & nétoyer le four ; au figu- ré Femme sale. Voyez le mot suivant. | . Naver, v. a. Nétoyer; du vieux-francais Nat, Pur, Pro= pre : Bien aureit, dist-il, sunt li nat de cuer, car il varunt Deu; Sermon de saint Bernard , B. R. fonds des Feuillants, fol. 37.. Dans l’arr. de Mortagne on dit Nettir. . . Natre, adj. (arr. de Vite) Avare ;il-avait la méme signi- fication en vieux-francais : Dieu het avers et vilains natres, Et les dampne comme ydolatres. Roman de la Rose, cité par du _ Cange. PEt N&cHE , adj. (arr. de Caen) De couleur foncée ; probable- ment de Niger ; voyeg NERCHI- BoT oi le'G s'est Bement change en CH. . Nerize , s. f. (arr. de Valo- genes) Ruban de fil ; en islandais Trefil a la méme signification. ELLER, V.a.Calfeutrer; peut- étre de lislandais Nela, Cou- dre. ° | : Neéouter, NETIER, v. a. Ba- layer 3 crase et corruption de Nétoyer. , Nercuror. s. m. Homme noir ou brun ; il ne se prend qu’en mauvaise part : Nowrcir se prononce Nerchir comme en vieux-francais, et Nebewt qui semble la forme primitive de Nabot signifie en breton Une petite chose ; le vieux-frangais disait ausst Nainbot. Neérer, 8. m. (arr. de Cher- bourg) Petit corps noir ;-¢ était le nom que lon donnait autre- fois & une petite monnaic de 44 162 NIC | cuivre. Ce mot s’emploieé aussi comme adjectif et signifie Un peu noir. | NERFIL, s. m. (arr. de Ba- yeux) Cordonnet noir ; c'est pro- ablement la signification que lui donnait Olivier Basselin : Parsementée avaud les gambes D’un biau nerfil. Chansons normandes, p. 233, édit. de M. Dubois. Nerpin, Ss. m. Noir et petit;. probablement de Ne, pronon- ciation normande de Noir, et de Pion; voyez ce mot. | NERVENT ,.S.m. Temps som- bre et venteux ; le francais dit dans le méme sens Froid noir. Netou, Nirou, adv. Non plus ; c'est une crase. de Non et d'Itou. | NeucHer, v. a. Noyer; le patoisnormand s est bien moins écartemi® Ia racine commune Necare; on dit aussi, par une nouvelle contraction du fran- cais, Mer. Niair, Nizru, Nor, s. m. OEuf qui reste toujours dans le nid. Ge mot dont ‘toutes les formes-se retrouvent en vieux- francais, vientsans doute de Nidus, Nid, car on disait aussi Nichet, Nicheuf, et nous avons encore deux formes semblables Niche et Nichée, dont l’origine est certaine : ainsi le Niew es lOEkuf du nid — : NicHot, s. m. Vétilleur ; n1- jor, s. m. Lambin ; NIGEON, s. m. Nigaud ; tous ces mots ont Ja ménie origine et. viennent sans doute du latin Nugator , Qui -s'amuse a des riens, Le -vieil-anglais Nygard-avait la méme signification ; voyez The vision of Piers Plowman , v. NOC 9898 ; mais une origine romane semble certaine. ss NIGER, v. a. (arr. de Mor- tain) Cacher dans une Niche. NuoTER, v. n. (Orne) Pa- resser, S’amuser a des riens ; du latin Nugari, peut-étre par ‘lintermédiaire de Nigaud. Nio, s. m. (Manche) Niais , probablement une syncope du Jatin Nedensis, Qui.n’est ja- mais sorti de son nid, voyez NialT. Le féminin est Niolle. NIQUEDOUILLE, s. m. Niais ; ce mot qui se. trouve aussi en rouchi et dans le patois du Ju- ra, vient sans doute du Jatin Nescvus ,.ou plutot du. francais Nice qui en est dérivé ; voyez Estienne, Apologre d’ Hérodote, l. 1, ch. 4. > NIQuET, adj.-Délicat , Nice. NIVELER, Vv. n. Niaiser > pro- bablement de Jean de Nivéle , dont le souvenir est resté po- pulaire en Normandie ; on dit encore d’un niais: C’est un Jean de Nivéle. ’ Noc, s. m. Dalle, Gouttiére en bois , Canal qui apportel’eau sur-la roue d'un moulin. I avait la méme signification en vieux-francais : Sera tenu le- dit héritage vendu, souffrir et recevoir les eaux qui descendent du canel et nocquiére de I’héri- tage dudit Andrieu ; Contrat. de vente (1540) cité par Ro- quefort, Supplément, p. 60 I] vient sans doute diceh ique; car en breton Waoz signifie un Canal par ot l’eau passe et Noed une Gouttiére. Par exten- sion de signification, Noe si- gnifie Pale'd’un moulin dans rOrne et dans la Hague ow le ‘Cnese prononce pas; dans l’arr. NOU de Bayeux, il désigne l’espace forme par l’auge circulaire d’un pressoir, Noceur, s. m. Homme de plaisir, Qui vit comme ‘s'il était toujours & Noce ; le peu- ple de plusieurs autres provin- ces l’emploie dans la mémeac-. ception. | ) Noe, s. f. Prairie humide , Lieu marécageux couvert de bois ; il avait la méme signifi- cation en vieux-francais : Une noe contenant journee a deux hommes faucheurs de pre: laquelle noe est joignant a la riviere d’Arve ; Testament (1382). cité par Meénage , Preuves de Uhistoire de Sablé, p. 390. Le Dictionnarre de U Acadé- me donne encore Noue. NomMANCE, s. f. (Manche) Baptéme d'un enfant, ou on lui donne son nom. Nonral, ady. (arr. de Caen),. Nowurrat (arr. de Vire), Non- FRAL (arr. de Af panes} Non, je ne veux pas ; Je ne le ferar pas; cest une crase dont le germe se trouve en vieux-fran- Cals : Et li rois dist que non fera. Brut, Vv 7251. NoguE, s. f. Fléche de voi- ture.: : Nove, s. f. Rigole naturelle, Source. On dit aussi Noe; dans larr. de Vire, on appelle la source de la Sienne, Noe de Sienne: Ce mot vient sans doute ‘du bas-latin Noda, Torrent, Ruisseau ; l’abbaye de Notre- Dame du@autel , prés Paris, s'appelait Malenoue, a cause du NUI 163 -voisinage d’un torrent nommé en latin Malanoda. Nouer, v. n. Passer un fil de fer dans le groin d’un co- chon, pour l’empécher de fouir; se mot signifiait en vieux-fran- cais Nouer et l’on dit encdre de uelqu’un qui ne peut se servir de ses membres, qu'il ést Noudé. NovguE , adj. Impair ; C’est peut-étre une corruption de Non, car on dit aussi Nonque, et Non, sous entendu Pair , remplace souvent Jmpazr : Pair ou non. - | Nourritune , s.’f. Bétail que ‘Ton éléve,que l’on Nourrit. Nutritura ale méme sensdans une charte de Charlemagne . rapportée par Adam de Bréemes, ch. 9, et on lit dans un docu- ment de 1238: Ad pascua a- nimalium, equarum, porcorum et aliorum nutrimentorum ; Lo- —bineau , Histoire de Bretagne, t. u, col. 299. NourTuRIAU, NOTUREAU; S. m. (Orne) Petit cochon de lait ; dans le Berry on donne le méme sens & Nourrin ; Voyez nour- RITURE. . Nuite, Nreuxe, s.f. Nielle, Maladie des plantes. céréales _ qui est souvent. causée par le Melanthiwm , que l'on appelait en bas-latin Nigella; voyez Valois, Notitia Galliarum , 375, col. 2: On dit aussi Nuzl- lé, Attaqué de la Nuile. NUISANCE, S: f.. Préjudice , Chose Nuzsible; on le trouve aussi en Vieux-francais : Ni out kil’en feist destourbier ne nui- n Se sance. Roman de Rou, v. 4296. 164 O, pr. Avec. ie .. Les tonneliers sont main nant bien yes ie requis, Ils sont plus rogues que marquis; Les pgessouriers o leurs sabots de | 5 PE ; a e bois Sont plus rogues que rois. - OLtyier Basse.in (Jean Le Houx), ‘Chanson inedite. . i Cemottres commun envieux- _ francais vient sans doute de 4b qui avait pris dans la basse-la- tinité le sensde Cum, le B s'est change en Vv, parceque Ges deux lettres. ont un son si. sembla- ble que beaucoup de langues , lespagnol par exemple, ne les distinguent pas. Le change- ment de la voyelle est certain , puisqu’on . trouve en. vieux- francais Ovec jet Avec, et le v etant. presque muet! devant les consonnes a fini par se perdre si complétement que !’écriture nen a plus tenu compte. OsicnE, s. f. Adresse, Ta- lent. Probablement ce mot a quelque liaison d’origine avec Obiter du bas-latin que du Cange, t. Iv, col. 4270, éd. des Bénédictins, explique par Ce- lercter. | Ocuez, s. f. Entaille ; ce mot se trouvait aussi en vieux- francais , et.on en avait fait le . verbe. Ochter: . Son brant d’acer, tint tot nu trait, Ensanglante, oschie et trait. Benois’, Chronique rimée, 1.11, Vv. 18922. A Lyon les boulangers. ap- pellent encore Ouche le mor- ceau de bois sur lequel ils font leurs comptes avec des entail- les. Le francais a conservé Dé- cocher, lancer de l'oche, de % Yentaille que l'on faisait aux arcs pour empécher les fléches. de glisser. Probablement ce mot vient du celtique, car Ask a la méme signification en breton , et Osko en provencal. Ont, s. m. Défaut , Malheur; ce mot qui avait la méme signi- fication en vieux-francais sem- ble venir delislandais Oheilt, Valétudinaikes #517 Wd tide es, Oicne, s. f. Facherie, Mur- mure :). (EE 2 Je leur montrerai sans oigne - De quel poisant sont mes doigtz. Chansons normandes , p. 177, éd. de M. Dubois. Peut-étre le vieux-francais Oingnace que Roquefort ex- plique par Action de faire ou de commettre des choses in- décentes a-t-il la méme ori- gine. : gi | Ores, adv. Maintenant, A présent, de Hora ; ce mot qui était fort usité en vieux-fran- cais (Voyez ORntERE) et qui se trouve dans les Vaua-de-Vare d’Olivier Basselin, p. 37, de l’édition de M. Travers, est resté dans le francais Désor- mais. : ais Orranté, adj. Fatigué, Bri- sé ; httéralement Rendu orphe- lin, Orfante en'vieux-franeais. Onisus,s. m. Chandelle de résine. Oe eee _ Orntkre, s. f. Bord, Lisiére; d’Ora comme le francais Orée: on le trouve.aussi dans la vieille langue : eee [ Or fu Geris lez Poriel del bos. Raoul de Cambrai, p. 139}v. 10. Oricne , 8. f. (Orne) Espéce, PAT Origine ;on luidonnait la méme signification en vieux-francais: Li preudome, li ancien, Ont.leenz un fusicien Qui tant parest de franche orine, Quw’il garist sans veoir orine. Fabliau de la voye de paradis. ~ ORINER,v. a. (arr. de Vire) Ecouter, Se. servir deses. O- reilles; il s emploieaussicomine verbe neutre et signifie alors Roder, Aller dans ‘les. Orées. » Ortptas, ‘s.) f. pl. Maladie doreille, causée par une’ flu- xion des glandes parotides. On Ja nomme aussi: Ouripias a Caen, et Owiepas a Cherbourg: PAI 165 Oro. Ce mot ‘n’est usité que dans la phrase : N'avoir ni re- pos ni ore , il signifie Temps et vient d’ Hora. | QOuicse, ady. Oui, dans un sens ironique. | | Ourn, adv. « (Orne). Non; Voyez OUICHE. | ba UINCHER, ‘v.. n.. (arr. de Vire) Grogner ; ailleurs’ il si- gnifie.. sans doute par exten- sion, Frapper du pied. QOuiverTTE, s. f. (arr. de Cher- bourg) Jeune fille étourdie. [1 signifiait sans doute ‘d’abord Elégante, Qui aimela toilette ; voyeZ HOUIVET. | nya = PADOUE, Ss. f, ace de Li- sieux) Ruban de fil ; peut-étre est-ce une-abréviation de Ru-_ ban de Padoue. Parr, v. a. (arr. de Cher- bourg) Balayer ; probablement une corruption euphonique de Parer ;dans,le patois de Reims, Paler,signifie Nettoyer une é- curie. | Paciz, s. f. Cloison ; peut- étre du Jatin Paries dont on a vouluadoucirla prononciation, comme pour le mot précédent. © PacnanT, adj. Lourd , Gros- sier ; de Paganus dont ona. fait aussi le vieux-franeais Pa- cant et Paysan. — : Pacno.ke, s.-f. (Calvados) Tréfle qui sans doute a été im- porté d’Espagne ; la variété a -fleurs incarnates s’appelle mé- me encore maintenant Tréfle d Espagne. ~ Patcre, adj. (arr. d’Avran- ches) Aigre ; du latin Acer , a- vec un.Paffixeiis wists’) ine PAILLETOT, Ss. m. Sac. rem- pli de parlle d’avoine sur le- quel on couche les petits en- fants ; il se trouve aussi dans le patois de Ja. Meuse. Parre, adj. (app. de Morta~ ene) Pareil ; du ¥a#in Par , ou du francais Paire’; en vieux- francais on donnait la méme signification & Patr. -Patrer, v. n. (arr. de Mor- tagne) Bouger, Changer de place ; du latin Pascere , Pat- tre, parce. que les animaux qui paissent sont obligés. de changer a chaque instant de place. Selon Roquefort , tou, p. 289, Parteler signifiait en vieux-francais Remuer les | pieds. | Paitts, s. m.-Lieu ot |’on attache les bestiaux, et qu’ils foulent. avec leurs pieds ; du latin Pascere ou de Piétiner qui signifie en patois normand A466 PAN Fouler sous les pieds. Pathe, s. f.. Ce qu’on peut porter sur une Pelle: voyez le’ mot suivant... — Parztre., s. f. Pelle a feu ; diminutif de Pelle: on. lui donne le méme sens dans le patois de Reims. Pane, s. f. Vanne d’un mou- lin; on lui donnait la méme signification en vieux—francais et il s'est conservé aussi dans le patois. de la Meuse : dans - quelques localités on dit Panne. -PAaLLetor, s. im. (arr. de ' Bayeux) Habit large et. gros- sier que portent les matelots ; (arr. de Cherbourg) Veste lon- gue. Ce mot existait aussi en vieux-francais : Je ne vettray en (1. un) palletot Pour l’abiller sans dire mot. . L’an des sept Dames, cité par Borel. : | Il vient du latin Palliwm ou d'un mot celtique;.car l’es- pagnol Palletoque ala méme significationget on le retrouve dans le pat@ig*de plusieurs pro- vinces. PALMAN, Ss. m. (cant. des Pieux) Pan ; de la longueur de la main, en latin Palma, - comme Empan; le provencal disait Palm et Palmat: . Lalmiran fo pus grans que Karle un eee A palmat. Roman de Fierabras,, v. 4788. Un palm de la gonela blanca Li trenget el polpil de Vanca. Roman de Jaufre, dans le Lexi- que roman, t. I, p. 73, col. 1. — PaneTTE, s. f. Tache de rousseur, qui resSemble a de la graine de Panais. _ PaNLERE, adj. Lache, Sans courage; mot-a-mot, Double PAQ . voleur ; du vieux-francais Pan, Vol et Lere (latro) Voleur. _ Pannas, s. m. Plumeau ; du latin Penna qui s'est conservé — sous une autre forme dans dif- férents patois ; dans celui des Vosges Panneur signifie Ba- lai ; c'est Pannoure dans celui de Nancy ; dans le Jura Pan- ner signifie Essuyer , et Pana ‘Nettoyer dans l'Isere; le fran- cais a encore Empenné et on lit dans les Chroniques de Saint-Denys : Nous ne poons souzescrire ne seigner la pre- sente chartre, pour la penne qui tremble en -nostre main our la maladie; Recuerl des istoriens de France, t. 11, p. . Foo | PannE, adj. Ruiné ; mot-a- mot ‘Saisi : du vieux-francais Panner : Saisir et panner sour les hommes : de. fief; Titre (1324), publié par Carpentier , t. 1, col. 446. 7 PANNET, S. m. Selle rasé sans étriers ni fonte; dans l’arr. de Saint-Lo il signifie par exten- sion Bat; du datin Panellum. Le vieux-francais disait Pen- nel: Nus seliers ne puet cou- dre basane avec cordouan, ne nule autre maniére de cuirs, si ce n’est en pennel que l’en apele Bastiere; Estienne Boi- ° leau, Livre des mestiers, p. 208.0" i PAQUERET, S. mn. Orne) _OEufs que l’on donne & Paques,. et par extension Cadeau. » Par apris, loc. adv. Ensuite; elle était aussi employée en . Vieux-francais : Les vers que leurs joinglours, leurs contours et chanterres Rechantoient par aprés PAR disait Vauquelin de La Fres- naye, et elle s'est conservée dans le patois du Berry.Comme en provencal, on disait aussi quelquefois en vieux—-francais En apres (en suite): En apres le- roi, la reine et leur fils... ~vinrent au dit liew ; Monstre- let, t.1, fol. 83. Peut-étre ce- pendant Par est-il ici un signe du superlatif,. comme dans Parfait ; au moins la locution Par expres semble favorable & cette conjecture : ‘a Choisir faut-du bon par expres; Car le mauvais porte dommage. Louis Cuoguret, Mystére de V'A- pocalypse. ParavirE, s. m. Soufflet; la méme idée a fait former le mot Chatourne. PARCHONNIER , PARSONNIER., s. m. Associé, Qui ne forme & deux qu'une. seule Personne. Il se dit dans: Farr. de Mor- tagne des petits cultivateurs qui se prétent réciproquement leurs chevaux pour labourer. On emploie aussi ae Personnerie dans le sens de Société. Comme Parchon et Parciere signifiaient en vieux- francais Partage, Part, Por- tion, il ne serait pas impos- sible.que la racine {it Partira; voyez le mot suivant. ARCIE, s. f. (arr. de Bayeux) Diner que l'on donne aux per- sonnes qui ont Partagé les tra- vaux dela moisson ; a Cher- bourg on, dit Percie ; Roque- fort, t. 11, p. 302, cite aussi le vieux-francais Parcye. Part, adj. Délivré, Prét, Préparé ; du latin Paratus ; on le trouve’ aussi en vieux-fran- cals : PAR Une codre trencha par mi, Tute quarreie la fendi; Quant il ad pare le bastun, De sun cutel escrit sun nun. Lai du Chevrefoil, v. 51. Dés le xvi? siecle Préparer avait remplacé Parer dans tou-. tes ses acceptions : Ou je trouvai une grant dame belle, Noble et plaisant de drap d’er prepa- “$e ree. Jean Jonet, Jardrin salutaire, st. IX. , Parer se dit le plus souvent AGT . du cidre assez fermenté pour étre bon 3 boire: Les sildres a peine parez On faict boire aux gens alterez, . Et n’enssent-ils denier ny maille, - Pour remplir bientost la futaille. Ouivies Basseuin (Jean Le Hous), Chanson ineédile. On lui donnait la méme. si- gnification en vieux-frangais : . Et de l’eaue simple buvoient, Sans querir pigment ne clare; N’oncqueés ne burent vin pare. Roman de la Rose, v. 8670. On Vemploic méme encore. quelquefois avec ce sens. - Parner, s. f. Muraille, Cloi- on; on le trouve aussi en vieux-francais. : Voluntiers Vonur fuiroit ; La parei qui pres li estoit , — Empeint tant com il pot arrere. Ms. B. R. 7024, fol. ci, verso, geo). i, Vv. 4. | Gi aussi Paroit, comme en Vieux-francais : ; Jehans estoit a la paroit, Dedenz sa meson apulez. Fabliaux anciens, t.1v, p. 416. Ce mot vient du latin Parzes et se trouve das toutes les langues romanes.; c'est Paret en vieux-provengal ; Pared en ~ catalan et en espagnol; Parede 168 PAR “en portugais et Pareteen italien. Parvin, s. f. Fin deérniére ; cette forme augmentative exis- tait aussi.en vieux-francais : |. La rose a la parfin devient nu grate- cu. -Ronsarp, Guvres, t. 1, p. 164. PanFinin, vy. a. Finir tout- a-fail, Rendre parfait. PaRrFonD, s. m. Extrémité _ du Fond.; Par ajoute ici sans doute a la signification natu- relle de Fond , comme en vieux- francais : > Qui me mettroit en une tour moysir Et elle fust au parfond d’Ytalie, Sans moy bouger, je luy tiens com- pagnie : Elle et mon cueur vont ensemble ge- : sir. Chansons nouvelles, fol.a. 11, : recto, éd. de Silvestre. Peut-étre cependant est-ce une corruption de Profond qui existait aussi en vieux-fran- cals : id hth J’ay plain povoir ef auctorite pure ‘D’anctoriser humaine creature ie Ou la plongier en doleur tres parfonde. ‘Micwavtt, Dance aux avert lesa Pay tiri) p. 36. Par.acE, s. m. Paroles inu- tiles ; le vieux-francais disait Parloge: — | Si les vous voel dire briement Sans lonc parloge metre avant. Des set sages de Romme, Ms. B. R., n° 7595, fol. 336, v pies PARLOCHER, Vv. n. (arr. de Valognes) Parler avec affecta- tion; dans Tarr. de Mortagne on dit Parloyer et on en fait un verbe réflechi.. Voyez le mot suivant. - PAROLER,'v. n: Parler avec affectation, c’ est ’ancienne for- me du véerbe Parler : PAS L’abe parole a toz ensanble. Fabliaux anciens, t. wv, p. 131. Alain Chartier disait encore: Quant ainsi ensemble parol- lent ; OEuvres , p, 663. : PaRoLes, s. f. pl. Copeaux formés. par la yarloppe, quand on Pare une planche; dans quelques localités on dit Parot- es. © eS PaRonne, s. f. (Orne) Col- lier de grosses tresses en ro- seau dont on harnache les chevaux que l’on pare pour la charrue ; probablement Roque- fort s’est trompé en ‘disant, t. Il, p. 307, que ce mot signi- fiait en vieux-francais Timon. Partig, s, f. (Manche) Ac- tion de se Séparer, Départ ; le vieux-francais disait Dépar- tie: KEES pis La trompette m’appelle Sous les drapeaux de Mars; Cruelle départie! — iad > ee eae ' Henri IV, Charmante Gabrielle. Le patois est resté plus fi- - déle ala forme étymologique Partie (en) , v. n. (Manche) Venir de le faire; voyez le mot précédent : le francais dit - dans le méme sens En sortir, et on lit. dans la Mort de Ga- rin, pi Bes ie _ Si qe l’ensangne qi d’Alexandre fut, Li bangne on cors a force et a vertu, Et dautre part en part li fers agus. Pas, s. m. Marche’ d’esca- lier ; le francais donne aussi ce nom a!’espace qui se trouve d'un pied a l'autre quand on marche. La vieille langue em- ployait Apas dans lemémesens — que le patois normand ( Voyez PAT Roquefort, Supplément, p. 22), et ce mot a conserve cette si- gnification en rouchi. Pas pLurér, loc. adv. (Man- che) Au contraire. PASCARADE, S. f. (arr. de Vire) Carotte; corruption du latin Pastinago ou du bas- breton Pastounadez; le R s'est introduit aussi dans le langue- docien Pasternago. PasNacE, s. m. Droit de paisson dans une forét de ché- nes: Il fu jugie que li abes de Ses ait quitence del pasnage de ses porciaus as propres u- sages de sa meson, en la forest del Bur; Htablissements de Normandie, p. 157. Il-y a en- core a Valognes un quartier quis appelle Le Pasnage. PasreT, s. m. °{Manche) ‘Marche d’escalier ; corruption de Pas 10¢d@e oe. is PassacER, adj. Passant ; il ne s’emploie en ce sens qu’avec - Rue et se trouve aussi dans les patois de Reims et de Langres. PassiEr, s. m. (Orne) Pail- ler ; endroit ot l'on Passe, Pastou, s. m. Berger, Pas- tre ; dans quelques localités le S ne se prononce pas ; du la- _ tin Pastor , qui s’est conservé dans Pasteur et Pastoureau: Ce mot signifie aussi Parc, Clé- ture, Endroit ot l'on met les hestiaux & paitre; en vieux-— francais Pastis signifiait Mur , Muraille, suivant Roquefort, t. il, p. 314. vee ta . Patactan, s. m. (Orne) Bruit d'un corps qui tombe dans Peau ; cette. onomatopée se trouve aussi dans le patois Bres- san, mais avec un sens plus général. PAT 169 Pararaup, Ss. m. Coureur , Mauvais sujet ; le -vieux-pro- vencal donnait ‘aux’ sectaires Vaudois le nom de Pataris. PATARET, S. nm. (arr. de Ba- yeux) Soupe aux pommes ; en vieux-francais Pastanade -si- -gnifiait Soupe aux légumes. PATEGAUD, s. m.° (arr. de Mortagne) Secret ; on dit aussi Patigaud ; peut-étre du latin’ Pati, Souffrir, parce que les secrets coutent beaucoup & ‘garder : Rien ne pése tant qu’un secret.. Larontaine, Fables, 1. vin, fab. 6. PATIGOUSSER , V. n. (arr. de Mortagne) Remuer l'eau pour s'amuser ; ce mot. a été formé de Patte, comme le francais Patauger et Patrowuller. Patrras, s, m. Souffre-dou- leur; du latin Puéc, Souffrir. Patécuer, v. a. Maniergros- siérement, Toucher .avec. ses mains, comme si c’était des Pattes ; le vieux-franeais disait dans le méme sens Patojer : Si laidement Ie rebouloit, Et patojoit a lui ses pates Qu’avoit plus noires que savates. _ Gautier be Coinst, Miracles de. la Vierge, 1. r, ch. 33. ° Patrour, s.’m. Gros lour- daud ; ila laméme significa- tion en rouehi: le Pataud du francais est bien moins expres- sif, PATOUILLER, v. n. (Orne) Agiter l'eau, Marcher dans les mares; dans le patois de la Meuse ‘Patowillat signifie une Petite mare ott Peau croupit , et Roquefort, t. 11, p. 346, cite 170 BAe , le vieux-francais Patoweil au- quel il donne Je sens de Bour- hier , Chemin boueux ; il semble ainsi que le R s'est introduit par corruption dans le francais Patrowiller ; la forme primi- tive s'est conservée aussi dans _ le patois du Berry. iy PaTRAILLEE , 8. f. (Orne) Mul- litude, Grande quantité; voyez le mot suivant. Ane PATRAILLER, V. n. (arr. de Cherbourg) Travailler avec ses. mains, Se donner beaucoup de peine. Parrasser , v. réfl. Tomber tout de son long,’ Faire pa- tatras ; a Rennes on dit Dé- pétrasser. Peut-étre ce mot si- gnifiait-il originairement Tom-, ber sur les pattes, car-on em- ' ploie dans lOrne avec le méme sens Povgnasser. Dans quel- ues localités on.se sert aussi u substantif Patrasse , Chute violente. - , Patron-Jacguet, loc: pop. Qui ne semploie que dans la phrase Se ever dés le patron Jacquet, &la pointe du jour ; on dit dans le patois du Berry, Se lever a Petron Jacquet et dans celui de plusieurs autres localités Au patron ou potron- minette. Peut-étre cette loca- tion vient-elle de saint Jacques, Ic patron des voyageurs , qui , pendant le moyen-dge, étaient pour la plupart des pélerins: Cette expression pourrait ve- nir aussi del’écureuil, en patois Jgogueet, qui passe pour le plus vif des animaux, et par consé- quent pour le premier éveillé. PATRONNER, V. a. etn. Tou- cher avec: les mains , les ‘pat- bes. voyez le mot PEC PATROUILLE, -S. «f. Ecouvil- lon ; voyez le mot précédent ; le patois de l’Orne n‘a pas non plus admis le x dans ce mot, il dit Patowille . Paucue, s. f. Chaussée. - Il avait la méme signification en vieux-francais : -Avoit gens pour nous adober les chemins, pons et pauches ; Bibliotheque de [Ecole des chartres, t. 11, p. 494. | Paupitye, s. f. (Orne) Sour- cil ou plutét Cil; du latin Pal- petra, Paupiére, auquel on a donné la terminaison -de Ci- lium. . She PAUPILLER, V. n. (Orne) Cil- ler, Fermer les yeux de peur ; recédent. | Pause, s. f. Instant, Letemps de faire une pause: Je la regardai une pose. Chansons normandes, p, 195, _ 6d. de M. Dubois. Ce mot existait aussi vieux-francais : Dine N’ert de Rome adont nul(e) cose, ‘Ne ne fu puis de mult-grant pose. Roman de Brut, v. 27. en Pavat, Ss. m. Collier de che- val, fait avec les feuilles sé- chées de l’iris des marais (Pseu- do-acarus) qui s’appellé en pa- tois Pave. TOE Pzc, s. m. (arr. de Bayeux) Point de départ, But ; proba- blement de Podium , Petite é- minence; au moins ce mot était-il devenu en vieux-fran- cais Pic, Puech et Pec. ae Pec, adj. Méchant, Sot ; il est plus usitéau féminin Pecque, et vient sans doute de Pecus , comme le francais Pécore. Pecainve,s. f. Fretin ; du ~ PES Jatin Pecus. {bse dit par mé- taphore de toute espece de mau- vals poissonet s’emploie comme terme de mépris dans un sens beaucoup plus général. - PecaupER, v. n. (Orne) Mettre les mains dans le plat; Se conduire comme une béte (Pecus 2). , Péiot , s. m. {arr. de Ba- yeux) Ligne dormante ; voyez PEQUER. / PELAUTER, V. a. (arr. de Mor- tagne) Enlever et secouer par la peau (Pellis); ilexistait aussi en vieux-francais et y avait pris par métaphore le sens de Battre , Etriller. PELETTE, s. f. Petite peau de mouton que |’on met sur les sabots; diminutif de Pells ; la forme latine s'est conservée aussi dans Pelletier et- dans Pelleterie. ; PeLovg, s. f. Grosse houe ; mot composé sans doute de Pelle et de Houe. PENER, V. a.et réfl. Tour- ‘menter, Faire dela Peine ; il existait aussi en vieux-fran- cals : . Car trop nos vuet cist rois pener et i travailler. Chanson des Saxons, t. 1, coupl. 16. : PéQuE, s. f. (arr. de Bayeux) Chiffon ; il ne s’emploie guére qu’au pluriel ; on disait en vieux-francais Pesse, proba- blement de Préce , morceau de linge. Ce mot existait aussi en vieux-francais : Bien ert cheus en males mains, Quar si cheveil contre mont tendent, Et les pesques contre val pendent De son sorcot et de sa cote. Fabliau ad’ Aloul. -PEQ 174 Péquer, v. n. Désigner un but, Jeter son palet pour ser- vir de but, comme Buter ; il signifie aussi par métaphore Arréter, et lon donne par ex- tension:le sens d’Attendre a la forme passive Etre péqué. PéoutereE, s. f. (arr. de Ba- yeux) Femme qui ramasse des chiffons ; en patois -normand PEQUE. . PERCETTE, Ss. f. (arr. de Mor- tain) Vrille, Petit outil qui Perce. : sie. PERCcHOUX, adj. Nal de Saint-Lo) Oisif , Immobile comme une Perehe ; dans l’arr. de Bayeux il signifie Frileux , parce cha froid’ trop vif em- péche de sortir. PRRICAUGHEE, Ss. f. (arr. de Bayeux) Paresse ; voyez PER- - CHOUX. isc PERRETTE, S. f. Terme de mépris dont on se sert en par- lant des femmes; le francais dit Péronelle’; c’est le diminu- tif féminin de Pierre. — Penney, s. f. (arr, de Bayeux) Lieu rempli de galets ou de Pierres ; ja méme raison a fait donner le nom de Chemin per- ré aux anciennes vores ro- maines. Carpentier nous sem- ble ainsi s’étre trompé en expli- quant le vieux-francais Per- roy par Rivage de la mer; il avait probablement le’ méme sens que le mot normand , comme le francais Pétrée. PERSOUX, S. m. (arr. de Vire) Pressoir; probablement une métathése. : 5a -Pesas, s. m. (arr. de Cher- bourg) Tiges séches. de pois, en latin Pisa ; il existait: aussi en vieux-francais : 172 PET On avoil jales pois so'es Et IL pesaz estoit loies. | Romande Renart, t.1, p. 20. PEsNOUETTE, S..f. (atte de Vire) Petite fille dissipée.' PESTER , V. n. (Orne) Cou- rir; om ena formé Padjectif Epestoui, qui signifie Etourdi. PETER, Vv. a: (Seine-Infe- rieure) Mesurer. | Petit, adv. Peu; - ils'emploie le plus souvent avec Un, comme en vieux-francais : Sire, dist-ele, un petit m rentendéd, Chanson de Hervi,; B. R. Ms. de Saint-Germain, n°'1244 4 fol. 95 recto, Col. 2, Wit. ' Ce mot est surtout usité avec une forme duplicative : Un pe- tit peu, Un petit mot. La Fon- taine a encore dit dans le frag- ment du Songe de Vaux. Ne lui donnez plus rien. qu’ un petit de panade. Pirocus , S inchels chandelle qui pétille.. Prrouin, s,m. (arr. de Ba- yeux), Ecorcheur , Qui enleve (en vieux--francais: Poult). la peau, que le patois nonnand prononce pe. Perra, s. m. Homme gros- sler ; Paysan ; ilala méme Si- gnification : a Rennes : |’ origine est la méme que celle du vieux- francais Péteux : Et Vautre ew fut chassé comme un pé- teux d’église. ° REGNIER; satire xiv... On donne aussi & ce mot la signification de Derriére. ‘Pirre , adj. (Manche) Pares- seux, Immobile comme une pierre, en latin Pétra. PETRELLE | s. f. Etincelle ac- rompagnée le plus souvent de Mauvaise : \ PIA pétillement's la méme raison leur fait donner en rouchi le nom de Péte. Prurvk, Peurrre, s. f. Frip: perie ; de l'islandais Pelf , De- pouilles ; ; dl avait, conservé sa signification esta en vieux- francaiss. aime) gla) he Chargez s’en vont en loi ‘pais - De la pelfre as. cheitifs. GEOFFROD Gamar, Chronique ri-. mée,publiée par M. Francisque Michel, Chr oniques anglo- normanites, t: I, p. 4. oudue | ‘vieux-francais. donnait aussi & Peufferie; Je Sens du patois normand Peuffe. Pruri, adj. (arr. de Morta- gene) Flétri Fanné, comme i francais Frippé. Mod yor 4 PEUFFIER , Ss. m. “Bripier Vovyez PEUFFE.. 9. Prucis , adj: (arr. de Vire) Maladroit ; littéralement Peu Joyeux , Mal en trains yas ‘PEZET, s..mi Etou y PuEse, s. m. Pécule Blan’ peut- -étre dee Vislandais . Fe, Troupeau , qui avait pris la’si- gnification d’Argent, , © parce qu’on ne conhaissait pas d’au- . tre richesse. Prancue , s. f. et Prancuon , Ss. m. (arr. “de Bayeux) Fille , Enfant; dans l’arr. de Mor- tain , il est devenu adj. et si- © enifie Malin , Espiégle. PIANNER , Vv. 0. (arr, de Mor- tagne) Il se dit du cri-du din- don et signifie .littéralement Crier comme. un Paon ; voyez PICOT. PIAUcE, adj. (arr, de Bayeus) Couche. Piaucer, v..n.., Pleurer , Crier sans cesse comme un poulet; c'est probablement une PIC corruption de Piauler qui vient | du latin Pullus ; cependant on lit dans les Extraits de Festus par Paulus Diaconus, p. 242; Pipatio clamor plorantis lin- gua Oscorum, et Chaucer a dit dans son Canterbury tales , WATT: ae He gave not of the text.a pullid hen, ce que Bellenden Ker ex- plique par Malade, Qui a la pépie ; Archaeology of popular phrases , t. 11, p. 74. PIAUFFRER, V. a. (arr. de Mortagne) Embrasser souvent — et avec force. PiaumE, s. f. (arr. de Va- lognes) Pivoine, en latin Peo- nid. , Pic, (arr. de Bayeux) Il ne s’emploie ‘que dans la locution adverbiale Par pic et par mic, qui signifie Par petites por- . tions, Par intervalle. Proba- blement cette expression aune origine celtique ; Pie signifie en breton Une chose pointue, et Mic fbas-latin Mica) Une-pe- tite chose. | -PicHET,s. m. Vase en terre, md potaboire. = , bras sont armés de tasses, de bss Bae pichets. Latieman , La Champénade, ch. Ne Di. 2 Ae Cemotexistait aussi en vieux- francais: Le suppliant eust gaigne dudit Dominique un pot, ou pichier de vin ; Lettres de grace (1397), citées par Car pentier , t. 11, col. 272, et s’est -conseryé dans le patois Ven- -déen : De l’déve frede en in pichaé, Dau paé, et raé pre lo gressder. Chanson citée dans les Mémoires. de V Académie celtique, t. 1, p. 380. PIE 173 Malgré l'anglais Pitcher et le breton Picher , ce mot vient sans doute du vieux-latin Ba- car que.Festus explique par Vas vinarium, on de lislan- dais Bikar (allemand de Becker) qui ala méme signification que le patois normand,, car on ap- pelait autrefots Bichet un vase qui servait de mesure et nous lisons dans Li treisveme livres des Revs, ch. vit, v. 45: Hyram fist vaisselle de mainte baillie, poz, chanes e pichers.. — Picots, s. m. Espécede houe, Pic ; il existait aussi en vieux-- ‘francais: E ces de Israel ve- neient as Philistiens pur agui- ser e adrecier € le soc, et le picois (Ligonem), e lacuignee, ela houe; Li primiers livres des. Reis, p. 44. On trouve en vieil-anglais Pykovse : Eche man fo pleye with a plow, Pykoise or spade. Vision of Piers the Ploughman, v.. 1987. Picor, s. m. Dindon; .de l'anglais Peacock, Paon; sans doute parce que le dindon fait la roue comme le paon ; par suite de la méme idée, on a dit pour exprimer son cri qu il prannart. -’ Pictrrig, s. f. Ce mot nest employé que dans la phrase Etre dans la pictrie, qui signi- fie Etre ivre. Preca, adv. Depuis long- temps ; c'est l’explication (Du- dum) qu’en donne un glossaire francais-latin, écrit dans le xiv’ siécle, qui est conservé a Ja Bibliothéque de Conches, et on le trouve avec ‘cette signi- fication dans une foule de pas-. sages. . A74 PIG Ysaies pieca pramist Et en sa prophecie dist, Que de la rats Jesse istra . -Une verge qui flourira. Wace, Ltablissement de la féte de la Conception, p. 34, v.15. Ce mot est sans doute une ~ contraction de Peéce al y a et vient du latin Spatiwm, Es- pace ; Petier est employé avec lesens de Spatiarc dans Frois- sard, Chronique, J. 1, ch. 176. | PiEcE, adj. Aucun, ou. plu- tot adv. de négation, comme Brin, Point, Pas; il vient eut-Ctre de Species; car on it dans Optatus Milevitanus , ]. vi: Calicum (fractorum) spe- cles revocastis in massas. Il semployait aussi en vieux- francais dans le sens. d’Espa- Cer Une grant piesce remcist la chose en- Si. Raoul de Cambrai, p. 21, v. 1.. Dans l'arr. de Mortagne on. prononce Preve. | Pir, s. m. Grand et gros nez ; il a la méme signification dans le patois du Berry.. Peut- étre signifiait-il d’abord Le nez bourgeonné d'un ivrogne ; car le vieux-francais Pifre si- gnifiait Gourmand, et le style familier a conservé le verbe Empijjrer , Faire manger avec exces. de PivFETTE, s. f. (arr. Mortagne) Jeune fille qui aime. la toilette, Qui cheérche & faire praffe. ‘i Picacne, s. f. (arr. de Ba- yeux) Pointe de terre ; on don- nait ce nom en vieux-francais a une sorte d’ornement que les femmes portaient aux manches PIG de leurs robes. - a eke PIGEONNER, V. n. (arr. de Bayeux) Germer, Pousser comme un pignon. PIGLER, Vv. n. (arr. de Mor- tagne) Jeter des cris percants , Crier sans pleurer.; en anglais Pog signifie Un petit cochon. Pienarp , s..m. Pleurer ;. il signifie dans le patois de Ren- - nes Un-homme qui gronde pour la moindre chose; voyez le mot suivant. ; oh PIGNER, v. n. Geindre, Se laindre a. voix» basse; dans ‘Orne il se dit aussi du bruit que. fait une manivelle ou une roue mal graissée, et le vieux- francais s’eén servait dans le meme sensu! sh Auer ee PicnocuE, s. f. (arr. de Vire): Cheville ; (arr. de Saint-Lo) Fausset ; voyez EPINOCHE. PiGnoL_e , s. f. Ce mot n’est employé que. métaphorique- ment dans |’expression Trous- ser ou Retrousser pignolle, qui signifie Se sauver, S’en aller : cest sans doute une ¢orrup- tion du vieux-frangais Pign ceau, Banniére longue dante que l'on relev. marcher avec plus de facilite : Bruient banieres, plus en i ot de mil, Et pignonciaus k’el front devant sont ; ae é mis. Garins li Loherens, Ms. B. R.. 9654 5a, fol. 80, recto, col. 1, Weds . — Cé mot s’employait aussi au figuré en vieux-francais , mais avec une acception différente ; il signifiait Peine, Embarras ; voyez Roquefort, t. m1, p. PIGNONNER, V a..(Orne) Per- cer; Pignon signifiait en vieux- PIN francais Un morceau de lance. Picras (a), adv. (arr. de Mor- tagne) En abondance, En quan- trté. . Picrat, s.m. Endroit battu comme un champ de foire ; dans l’arr. de Mortagne, il a pris le sens de Bourbier ; on dit au figuré -Mettre le pied dans le pigrat ; voyez pivar. PIGUENETTE, Ss. f. {Orne) Petite fille méchante; dans le patois du Berry on appelle les pie-griéches Prquerede. Pinout, s. f- (Seine-Infé- Yieure) Femme de mauvaise vie. | PILAUDER, V. a. (arr. de Mor- tagne) [] ne s’emploie qu’avec les boues et signifie Marcher dans un bourbier.. Pitz, s. f. Volée de coups; ce mot qui se trouve aussi dans Ie patois du Berry vient sans doute du vieux-francais Pil, Espéce de massue, ou du verbe Piler , Brover , Ecraser. Pinicue, s. m. (arr. de Saint- Lo) Gruau, Grain prlé. Piter, v. n. Pressurer des pommes comme avec un pr- fon ; il a la méme signification dans le patois de Rennes. Piverte, s. f. (arr. de Va- lognes) Fleur de l’Arum qui ressemble & un petit Prlon. Pimper.orteE , adj. (arr. de Mortagne) Taché de_ petits points de diverses couleurs ; probablement ‘une corruption du vieux-francais Pipelotté , -Extrémement orné suivant Ro- quefort, t. 1, p. 356. PINELLES, Ss. m. pl. (arr. de Rouen) Bas , Chausses. Pince,, adj. (arr. de Morta- gne) Qui a le poil lisse. PIQ 175 *Pincé, adj. Mouillé ; voyez le mot suivant.- PincEr, v. a. Plonger ; dans l’Orne il signitie Puiser, et dans la Vendée ‘Etre submergé. PinckT, s. m. Rond que fait une pierre sur l’eau ;-c’est pro- bablement Je méme mot que Pingeot auquel on donne dans l’'arr. de Mortagne Ja significa- tion de Ricochet sur l'eau. Pion, s. m. Ivrogne, Un peu gris; il vient sans doute du grec [livery , Boire, ou du vieux-francais Pion, Soldat : Mes gens d’armes, mes archiers, mes pions. Pierre MicHatLtt , Dance aux aveugles, p. 13. e Piot, s. m. Boisson, Vin: Cy gist quia bien aimé le piot. Vaux-de-Vire , p. 57; éd: de M. Dubois. Ce mot existait aussi vieux-francais : La vigne dont nous vient celle nectaricque, delitieuse , preticuse , celeste, joyeuse et deificque liqueur, qu'on nomme le piot; Rabelais, |. 11, ch. 1. Ce mot qui se trouve égale-_ ment dans les patois de Il'Isére — et dans celui de Rennes, vient sans doute du latin Potus ; il s’emploie aussi comme adj. et signifie alors Jvre ; dansl’Orne, on dit quelquefois Prow. Pioter, v. réfl. S’enivrer ; Voyez PIOT | | Pivet, s. m. Fétu par lequel on aspire un liquide ; corrup- tion de Pipeau. PIQUERAY, Ss. m. (arr. de Ba- yeux) Terrain couvert de ga- lets roulés. PIQUEROLLE, S. f.- Rougeole, en 476 PIT qui ‘marque la peau de taches rouges comme des prqires. Prguette, s. f. Mélange de lait caillé et de créme; dont Tacidité est prquante. Pinti, s. .m. (Orne) Petit baton qui sert & jouer ; voyez BAGULO. Piro, s. m. Petite lessive ;_ probablement. une corruption de Puro} voyez PURER. + Prrotre, s. f. Oie femelle ; dans le patois de Rennes on dit Pirette: ’ Cherbourg on donne ce nom ada femelle du dindon. _ Pis,, s. m. Mamelle de va- che; ¢estame extension de ia signification du vieux-fran- gais Pis, Poitrine : Et cil qui tindrent les costiax, Parmi capes, parmi mantiax ,’ Parmi pis et parmi boeles Firent passer lor alemeles. Roman de Brut, v. 7433. | Nous. donnons encore le méme sens a Sein et.da Poi- trine, et le vicux-franeais Pect, du latin Pectus, avait pris aussi la signification de Mamelle : La vache avec gros pect que son yeau -tendre tire. — HEGEMON, p. 7. PiscaLe, Ss. f. (Orne) C’est un terme de mépris ‘pour dé- signer Une femme ; ailleurs on dit Pisseuse. ike) PitancuieR, v: réfl. (arr. de Bayeux) S'impatienter. PITER , v. n. (arr, de Mor- tagne) Il se dit du fil. et-de la toile qui blanchissent mois en certains endroits que dans d'autres. j ~ Pirou,s. m. (arr. de Bayeux) Putois 511 signifie aussi Meé- chant et vient peut-étre.en ce dernier sens du vieux-francais PEA ! Pitaus., Hypocrite, Faux-dé- vot, selon Pasquier, Recher- ches dela France:\. vu, ch. 2, col. 759. Pivat, s. m. (arr. de Rouen) Boue délayée ; en Basse-Nor- mandie il signifie Urine ‘PivoLeTTE, s. f. (canton des Pieux) Papillon. ih -PLaceBo,.s. m. Eléve qui pour plavre & ses maitres leur rapporte les fautes de ses ca- marades. Hl était aussi usité en vieux-francais, mais dans un sens un peu différent: Si les ora nic savoient plutét em- rasser les utiles conseils que les passionnés et déguisés de leurs ministres qui vont, comme on dit, toujours a Placebo ; de Villars, Mémovrres, |. vi, p. 560. Ce mot est tombé en dé- suétude. — | _' PLANCHON, S. m. Sauvageon; il existait aussi-en vieux-fran- cais: . VY GNg es Avint que el bos de Glancon U ila maint jovene plancon. | — Mouskes , Chronique rimée, v. 24543. oo he On dit aussi pour désigner de jeunes arbres de la Plante, et le francais se sert dans le méme sens de Plant. PLANITRE, S..m. (arr. .de * Valognes) Esplanade , Place ott lon se reunit ; dans le patois de ’Isere on dit Platro. — Prangus, s. f. Pont de bois, jittéralement Planiche.. PLANT, S.m. Pommiers plan- tés; c'est en Normandie ‘le plant par excellence. PiantE (a) loc. adv. En a- bondance ;.ce mot qui vient du latin Plenitudo, Abondatice, nest-plus usité; mais il se PLE trouve dans la chanson popu- laire que les enfants chantent la veille du jour des Rois : Guerhe au boissey, Pipe au pommier, Bieurre et lait, Tout a planté. G. Mancer et Ch. Wornez, His- toire de la villede Caen; p. 42. I] existait aussi en vieux- francais : Arbre trop souvent transplante Rarement fait fruict a plante. LE Rovx be Lincy, Livre des pro- verbes francais, t.1, p. 37. Probablement méme on I’em- ployait aussi substantivement, car on lit dans un poéme an- glais qui fut certainement écrit avant 4300 : All his clerks and barouns Were set in their pavylouns, And served with grete plente Of mete and drink and each dainte. Richard Coeur-de-Lion,v.1775. Le francais Plantureux sem- ble avoir la méme origine, quoique Plantados signifiadt en rovencal Fécond et vint du atin Plantatus. PLANTIERE, s. f. Ficelle avec des nceuds coulants en crin, pour prendre les oiseaux de mer. PLaTine, s. f. (arr. de Va- lognes) Paténe; du latin Pla- tina. PLiGER, v. a. Défendre , Fa- voriser ; c’est une extension de l’ancienne signification Cau- tionner en justice: Se aucuns pese home qui soit pi de a mort a aucun ou d’aucun crime; Etablissements de Nor- mandie, p. 36. Il signifie Garantir , Assu- rer, dans le vieux proverbe : PLO {77 Février qui donne neige Bel été nous plege. et semble avoir été pris quel- quefois dans l'acception de Tenir téte, Faire raison: A vous, Monsieur de céans, Plégez-moi, je vous prie. OLIVIER BasseELin, Vaux-de-Vire, p. 192, éd. de M.i. Travers. PLEIN (Tour) loc. ady. (arr. de Valognes) Beaucoup ; cette expression est empruntée aux mesures de capacité; on idit aussi dans le patois du Jura - Cette planche a tout plein de trous. PLzssE, s. f. (arr. de Mor- tain) Bois taillis, Forét: Ples- sier et Plesses avaient laméme signification en vieux-francais: Parmi un plesseis de saus. Roman de Renart, t. II, p. 323. et on donnait le méme sens au Paws Plais et Plaissat. es deux foréts de Saint-Say_ veur-le-Vicomte S’appelaient la Petite et la Grande-Plaze. Voyez le mot suivant. PLESSER, V. a. Plier, Cour- ber; du latin Plectere. Dans larrondissement de Mortagne, il signifie Garnir une haie. de branches couchées et coupées aux trois quarts; c’est ainsi sans doute que l'on plantait autrefois les bois taillis. Prtacoux, adj. Humide et compact ; il ne se dit qu’en parlant du sol. PLotrer, v. a. Battre, Frap- per, comme avec des Pelottes de neige ; ce mot qui se trouve dans la langue Populaire de presque toutes les provinces est sans doute le méme mot que le vieux-francais Ploder dont la 12 478 POI signification est semblable ; vovez cependant PELAUTER. PLoUFRE, adj. (arr. de Rouen) Enflé. Su gros ploufre de Vinchent. Muse normande, p. 34. Ailleurs on dit Pow/fe. PLougue, s. f. Perruque de laine ; corruption de Peluche. Piuc, s.m. Ce que l’on peut éplucher ; ce mot existait aussi en vieux-francais : Il n’y ane pluc ne pasture, Allons ailleurs fourrer nos bouges. Histoire de V Evangile en vers. On dit aussi Pluquette pour Epluchure et Plucoter , Plu- choter pour Eplucher. Un oisel qui cherche a plucoter du feure; Farce des Quiolards, p. 34. PLurer, v. a. Peler, Oter la Pelure. Pocuarp, s. m. Ivrogne ; peut-étre de Poisson, mesure de vin , qui s’appelait en vieux- francais Poche, Powchon : Frere Gille, dit le prieux, Nous ne sommes cy que nous deux, Or nous donne par courtoisie Ung peu de frommaige de Brie Et-plain poichon de vin d’Ausoire. Triumphe des Carmes, Vv. 135. On dit aussi Se pocharder , S'enivrer. Pocras, s. m. Gachis. Pocrassier, s. m. (Orne) Malpropre ; littéralement, Qui se met dans le Pocras. Porene, s. f. (arr. de Va- Jognes) Main; du latin Pugnus: il signifie aussi au figuré H- treinte. POIGNIASSER, v. a. (Orne) Manigancer ; voyez le mot pré- cédent. Poison, s. m. (arr. de Va- POQ lognes) Terme injurieux; le francais emploie Peste dans la méme acception ; cette locution n’est sans doute pas fort an- cienne, car Poison est resté fé- minin jusqu au milieu du x1v° siécle. PoxacrE, s. f. (arr. -de Vire) Gillet; on sen sert comme d’un terme de mépris a Caen, mais c'est alors une corruption de Pouacre. Po.eETTE, s. f. (arr. de Vire) Courroie. PoLuLEeT, s. m. Nom d’un fau- bourg de Dieppe et d’un grou- pe de maisons sur le rivage a Port-en-Bessin ; selon Roque- fort, t.1, p. 373 , Polet signi- fiait en vieux-francais Le bas- sin d’un port. PomEROLE , Ss. f. (arr. deCou- tances) Primeveére ; voyez PRI- MEROLLE. Pommace, s. m. Espéce, Na- ture de Pommes.. PonceR, vy a. Presser!, Ex- primer ; dans l’arr. de Vire on dit Ponger et cette forme se trouve aussi en rouchi : proha- blement du breton Punsa, Ti- rer de l'eau. PoncEux, s. m. (arr. de Va- lognes) Petit pressoir en plein air que lon démonte quand Jes pommes sont pilées.’ Pong, s. f. Ventre ; voyez APONE.. : Ponicuer, v.n. (arr. de Mor- tagne) Mal arranger, Mal ajus- ter ; il se dit le plus souvent des choses de toilette et vient du Jatin Ponere. PoguER, v. a. (arr. de Va- lognes) Porter des fruits dans sa Poche. Poguss, s. f. pl. Grosses POT mains; dans le patois de Ren- nes on dit Pocres. PogurTon, s. m. Homme qui se sert maladroitement de ses mains, littéralement quia de grosses mains , des Poques ; a Rennes on en a formé aussi le verbe Poganner , Manier sale- ment, maladroitement. Porte, s. f. (Orne) Gros bou- quet que les enfants portent a la messe, le dimanche des Ra- meaux, et quiest ordinairement composé de Porions ; voyez ce mot. Porton, s. m. Narcisse des rés, qui fleurit de tres-bonne eure : Je n’ay pilus amy ne amye, En France et en Normandye, Qui me donnast ung porion. Oxtvrer BASsELin, Vauxr-de-Vire, p- 158, éd. de M. Dubois. Le Poireau s'appelait en vieux-francais Porvon,et a con- serve cette forme en rouchi ; la ressemblance des feuilles a fait donner le méme nom au Nar- cisse des prés. PORMAISQUE , conj. Lorsque; cette conjonction existait en vieux-francais, et les trois mots qui la composent ont exacte- ment le méme sens que Alors- que (a l’heure que). PorguERiz, S. f. Etable des cochons (Pores); il se trouve aussi en rouchi et s’emploie quelquefois par métaphore pour désigner Un lieu sale. Potin, adv. (Calvados) I ne s emploie qu avec le verbe Par- ler, et signifie alors Parler fa- miliérement , comme des ména- géres qui regardent bouillir le Pot-au-feu. Il est aussi subs- tantif et signifie par extension POU 179 a Vire, Fadaises, et & Rouen, Babil fatigant ; Coup-d’ail purin, p. 49. PotineE, s. f. Chaufferette en terre, littéralement Petit pot. Potrz, s. f. (Orne) Petite fosse. Pou, s. m. (arr. de Cher- bourg) C’est une corruption de Podium, Montagne, qui s’est conservée dans le Pou de Fla- manville. Donavimus po- dium sive montem vulgariter appellatum de Champinac ; Chartre citée dans du Cange , t. v, col. 595; voyez aussi Valois: Galliarum notitiae , p. 452, et Huet, Origines de Caen, p. 322. Pouas, s. m. (arr. de Bayeux) Noyau. Pour, s. m. Ornement de toi- lette dont le nom se trouve aussi dans le patois de Lor- raine. Jen’ maitions, ni pouf, ni pouffons, Ni be ribons, ni ceinturons; Nos cotiilons et nos corsets Valeont bin to sos affiquets. Noél Lorrain, publié par M. Grille de Beuzelin dans son Rapport au Ministre de Vins- truction publique sur les monuments historiques de Nancy et de Toul, p. 129. PoucEa , s. m. Brai, Poix noire. PoucEaT, Ss. m. Tiges de pois séches. PoOUILLARD , s. m. Vaurien , Homme méprisable ; peut-étre n’est-ce pas une corruption du francais Pourllewx quise prend quelquefois dans un sens méta- phorique , car on lit dans le roman manuscrit d’Athis : Es busches sont les chevaliers Et es galees les archiers, 180 POU Et les esnesques et les nez Portent les tentes et les trez, Les sergens et la poulaille Et gens qui servent pour vitaille. Voyez aussi POvILLv. POUILLER , V. a. Passer une manche , Mettre un habit ; ce inot qui se trouve aussi dans Je patois de Rennes n’esi peut- étre pas sans rapport étymolo- sique avec le francais Dépourt- ler, que l’on fait cependant ve- nir généralement du latin Spo- liarr. Voyez le mot suivant. PouiLLor. s.m. (Orne et arr. de Saint-Lo) Brassicre, Corset; dans quelques localités on dit Apollon. ~ Poulxtu, adj. Indolent, lache; VOYeZ POUILLARD. POULET, Ss. m. (arr. de Saint- Lo) Noyau. PouLetTte. s. f. (arr. de Va- isgnes) Ampoule. Pou.tEr, v. a. (arr. de Mor- tagne) Klever avec une poulie. Poutort, s. m. Jeune enfant ; du latin Pullus, que |’on em- ployait quelquefois avec cette signification : Strabonem Appellat:-paetum pater et pullum male parvus Si cui filius est. Horace, Satyrae, 1.1, sat. m, v.45. Pouts, s. m. pl. (arr. de Va- lognes ) Bouillie d’avoine a eau, (arr.de Saint-Lo}, Bouil- lie d’avoine au lait , ( arr. de Cherbourg) Bouillie de sarrasin a l’eau.Les Normands faisaient autrefois un si grand usage de bouillie qu’on les appelait par sobriquet Boulieux , et que Ravisius Textor dit dans une de ses élégies, Dialogi, fol. 227,v°: Saepe rogare soles, qua tandem tem- poris hora POU Cessabit nostrae zelus amicifiae.... Junge lupis agnos, fac recte incedere cancrum, Fac noctis tempus clarius esse die.... Arvernis rapas, Normanis tolle polen- tam, Hypocrisim claustris; tolle jocos pueris ; Flamingos populos fac uti nolle bu- tyro; Sint simul atque semel partus et in- tegritas.... Quando feceris hoc, vel factum vide- ris illud, Cessabit nostrae zelus amicitiae. Ce mot qui vient du latin Pulsum est restédans le patois de la Bresse avec une forme un peu différente : Ell’ amossi la rosura De la casseta de peu. Noéls Bressans, p. 87. PouLtreE, s. f. ( arr. de Mor- tagne ) Jeune cavale de vingt- cing a trente mois qui n’a pas encore porte ; ce mot qui exis- tait aussi en vieux-francais , vient du latin Pullitra. Poumon, s. m. (arr. de Valo- gnes) Terre fangeuse. PoupineEr, V. a. (arr. de Va- lognes ) Parer avec recherche , Manier sans cesse comme un Poupon ; Poupin signifie en francais Habillé avec affecta- tion, et on lit dans Vauquelin de la Fresnaye: Son crin estoit noué en un neu simpile- ; ment Et frisé par devant assez poupine- » ment. Foresteries , fol. 22, verso. PouguE, s. f. Sac. Quand il pleut le jour saint Marc, Il ne faut ni ponque ni sac. Proverbe normand. Ce mot vient plutdt de Pis- landais Poki, Sac, que du francais Poche; car on lit dans le Vaston of Prers the Plough- man, V.. 9392: li ~ GPR For poverte hath but pokes To putten in hise goodes. Pour Mendier le peuple dit encore souvent en Normandie Prendre un bissac. Pouguetrs, s. f. Poche ; lit- téralement Petile pouque, en anglais Pockett. A Pont-Aude- mer les enfants qui ne sont pas contents de ce quon leur a donné, suivent le cortége des baptémes,en criant: Pouquettes cousues. PourE, adj. Pauvre ; voyez apgur. Langlais a conservé Poor, et on lit dans le Miserere du Reclus de Moliens, str. 11: As riches est espoantans_ £t as poures reconfortans. Pourrnis, s. m. (Orne) Pla- tras , Enduit sur les murs. Pourrrisseur, s. m. Plafon- neur ; voyez le mot précédent. PouRGUILLER, V. a. (arr. de Mortagne) Promener un enfant ou un animal pour le dissiper; voyez POURJOLLER. ~ ¢ Pounset, s. m. (arr. de Mor- tagne) Bucher. PourRsOLLER, V. a. (arr. de Bayeux) Porter d'un leu @ un autre. Pous, s. m. pl. (Orne) Peéta- les sees du sarrasin, qui se dé- tachent du grain quand on le vanne. Pras, s. f. (arr. de Bayeux) Béte pourrie ; il s’emploie aussi au figuré et signifie Homme ou Femme digne de mépris. PrecHER, y. n. (arr. de Va- lognes) Parler; c est un chan- gement inverse de la significa- tion de Sermon, Prédication, qui signifiait seulement en la- tin Discours. Prict, adj. (arr. de Bayeux) PRU 484 Pourri, Creux; il ne se ditqu’en parlant du bois. Précime&, adv. (arr. de Mor- tagne) Trés prés, Bientét; du latin Proaxume. Presse, s. f. Armoire. PRETINTAILLE, s. f. Attirail; c’est une extension de la signi- fication du francais. PRIMEROLLE, S. f, (arr. de Valognes) Primeveére ; a Cher- bourg on dit Promenolle ; al semble employé dans cette ac- ception par Chaucer, Canter- bury tales, v. 3268, et par Gower, Confessio amantis, fol. 448, et on lit dans une chanson de Gilles le Viniers : Beaux m’est prinstans au partir de _ fevrier, Ke primerole espanit el boscaige. Dans Roquefort, Etat de la poe- sie francoise, p. 75. Mais dans un glossaire du X1Ve siécle , qui appartient a la Bibliotheque de Conches, et dans un autre du XV°, conserve ala Bibliothéque de Lille, et marqué E. 36, Primerole est expliqué par Zagustrum , pro- bablement parce que le trocne est un des premiers arbres qui poussent des feuilles. Princg, s. f. (arr. de Vire) E- cluse; littéralement Prise d’eaw. PrINCEUX, Ss. m. (arr. de Va- lognes) Pressoir. Princimi, ady. (arr. de Mor- tagne) Promptement ; du latin Proxime. PROGNER , V. a. Elaguer ; voyez KPROGNER. . PruLer, vs. a. Oter Pécorce d’un arbre; probablement une corruption de Plurer, par. me- tathese ; voyez ce mot. PRUNELLE, S. f. Fruit de lé- ® a nd ye ae 8 482 QUA pine noire, qui ressemble & une petite prune: Meures mangtentet ceneles, Boutons, cornelles et pruneles. CHRESTIENS DE Troyes, Dict du roi Guillaume @ Engleterre. Pucuer, v. a. ‘arr. de Valo- gnes),Pucher la lessive, Couler la lessive ; primitivement ce mot signifiait sans doute Epui- ser , parce qu'on verse la les- sive sur le linge pre ce qu'elle soit presque entiérement épuisée : c était au moins la si- gnification que l’on donnait au vieux francais E'spucher : Ewe en viver u en estanc Est plus legier a espucher Qe n’ert son beivre ne son manger. Grorrroy Gaiman, Chronique dans M. Michel, Chroniques anglo-normandes, t. 1, p. 34. Couler la lessive semble une aphérése.d’écowler qui confirme cette étymologic. Une origine celtique neserait pas cependant » impossible; Buga signifie en breton Fouler, Presser avec les mains, et on ena formé Ru- gadi, Faire la lessive. 9 Q Qualre, v. n. (arr. de Cher- bourg ) Tomber, Cheoir ; c’est une contraction du latinCadere, QuairE, s.f. (arr. de Bayeux), Corde nouée a un pieu qui sert a attacher les bestiaux dans les paturages ; dans I'arr. de Cher- bourg ce mot signifie ]’Ani- mal attaché. QUANT ET QUANT, loc. adv. Ensemble, En méme temps ; elle était aussi usitée en vieux- francais : Quand on dira: César fut maitre de % l’Empire, QUA * PucuET, s.m. Petite cruche avec laquelle on puehe (épuise); peut-étre cependant est-ce un dérivédel’anglais Putcher dont Ja signification est la méme , ou une corruption du normand Prchet. PuERveE, s. f. Poulpe; au fi- guré Femme méprisable. Purr, s. m. Bouchon, Galo- che, Galine; voyez ces mots ; littéralement Ce qui éleve , du vieux-francais Puech, Hauteur, Hlévations Putte, s. f. Mauvaise petite chandelle , ordinairementyen poix-résine qui pue beaucoup. Puru, s. m. Huppe; du latin Upupa, qui se trouve déjadans Pline, Historiae naturalis.1. X, ch. 36. Ce mot existait aussi en vieux-francais ; Rabelais a dit dans son Pantagruel: Ou me munir de langues de puputzou de coeurs de ranes verdes. Purer, v. n. Couler, Egout- ter; l'anglais Topoure se ratta- che probablementala méme ra- cine, ainsi que le francais Purée. me ie Qu’on sache quant et quant Brute le sut occire ; Quand on dira: César fut premier empereur, Qu’on dise quant ef quant Brute en # fut le vengeur. GREvIN, cité par La Harpe , Cours de Littérature, Part. II, 1. I, ch2. Kant signifie en islandais Coté: peut-étre a-t-on dit d’a- bord Quant dquant ; le fran- cals emploie dans Ja méme ac- ception Céte a céte. QUARQUELOT, adj. ( arr. de Mortagne) Maigre. QuarreE. s. f. Angle d’un ob- * € = " QUE jet carré,et,par extension, Toute espéce d’angle; il se dit aussi dans le patoisdu Berry et dans celui du Jura. Voyez Carré. QUARSONNIER, S. m. (arr. de Mortagne ) Mesure de grains ; corruption du vieux-francais Quartonnier , qui signifiait la Quatriéme partie du boisseau. Quas, s.m. Félé; il ne s’em- ploie que dans la phrase ; Il sonne le quas, et vient du latin Quassare ; il avait conservé cette forme en vieux-francais : Il fut semons, li prestres vient ; Venuz est, respondre convient A son esvesques de cest quas, Dont li prestres doit étre quas. Testament de I’ Asne, Vv. 91. QuASIMENT , adv. Presque ; cest le latin Qwasz, auquel on a ajouté la terminaison ordi- naire des adverbes francais. QuEDALE, s. f. Horloge. QUELOT, S. blanche (Sinapis arvensis) ; on Vappelle Jotte dans le Berry ; Boreau , Flore du Centre de la France , n° 459. QUENELLE, Ss. f. (arr. de Cou- tances ) Chantepleure: peut- étre le méme mot que Chi- gnole. QUENIOT, QUENAILLE , S. m. Enfant ; voyez CAIGNOT. _ QUENOLLE, s. f. (arr. de Mor- tagne ) Gosier; voyez CHE- NOLLE. Quenottes, s. f. pl. Dents ; probablement de Tislandais Kenni , Machoires ; le vieux- francais avait Quennes. Et neporqant qatre des pennes L’en remestrent entre les quennes. Roman de Renart, Vv. 7343. QUEOLLES, QUIOLLES; S. f. pl. (arr. de Mortagne) Jambes cro- chues , mal faites; probable- m. Moutarde. QUE 183 ment une corruption de Quil- les, que le peuple de plusieurs provinces emploie dans la méme acceptlion. | QuéEras,s. m. Sort, Guignon; VOyeZ ENQUERAUDER. QuERAULT, s. m. (arr. de Vire) Résine. Quirée, s. f. (Orne) Person- ne ou Animal maigre ou sale ; voyez CARI et CARNE. Querir, v. a, (arr. de Vire) Trépanner; on dit aussi Quer- sir , cest probablement une métathése de Cressir qui vient du latin Cruciarz. Quergue , Ss. f. (arr. de Bayeux ) Mélange de foin et d’argile pour batir, Pisé. Quernay, s. f. (arr. de Cherbourg) Traces que lais- sent les Charrettes en pa- tois Quérettes) qui ont la méme voie ; selon Roquefort. t. 11, p. AAT, Querroy aurait signifié en francais Une grande route. QUERRIER , S. m. (arr. de Cherbourg ) Morceau de boeuf pres de la queue. QuERTER, V. a. (arr. de Mor- tagne) Arranger, Atiffer. QuETILLER, V. a. Battre, Ros- ser; on dit aussi Quatiller : VoyeZ CASTILLER. Qutrings , s. f. pl. Pommes qui tombent avant la maturité; ‘probablement parce qu'on les quéteau lieu de les abattre : on les appelle en Haute-Norman- die Grouée. QuevE .s. f. Pierre & aigui- ser, Affiloir; il était aussi em- ployé en vieux-francais. Mais moy n’estant poéte, une queux je seray. Qui le fer des esprits plus durs aigui- serey: * # 484 RAB Car bien que la queux soit a cou per inutile , Elle rend bien coupant tout Pacier qu’elle affile. VAUQUELIN DE LA FRESNaYE, Poé- Si€S, Pp. 94. . QUEULEE,S. f. (Eure) Famille; littéralement Ce que I’on tratne apres sol, qui est attaché Asa queue. | QuEuTRE, s. m. (Orne) Mau- vais couteau ; du latin Culter, comme le francais Coutre. QUIBOLLEs, s. f. pl. Jambes; YOYeZ QUEOLLES. Quitrue, s. f. (arr. de Valo- gnes) Charrue; cette pronon- ciation remonte au moins au milieu du XIV, siéele, car on lit dans les Comptes de Phépi- tal des Wez de 1350: Huit muis, SIX rasieres , deus coupes d’a- vaine pour les kievaus de kie- rue doudit hospital ; dans Ro- quefort, Supplément au Glos- satire, p. 197, Quicnocue , s. f. (arr. de Vire) Béquille ; voyez criocue. QUILLEBOCHE, Ss. f. (arr. de Valognes) Bouchon , Galine littéralement Quille bossue : Rapatrre , v. a. Supprimer; littéralement Mettre a bas : on lit dans le Registre au Consaux (22 juin 1527) : Se fud conclud que en mectant l’amande con- tenue es esdicts , jus. RABAUBINER, V. n, (Orne) Ré- peter ironiquement les paroles de quelqu’un. RaBette, s. f. (arr. de Valo- gnes) Espéce de choux dont la graine contient de l’huile: lit- “teralement Petite rave. as RAB on en a faitsle verbe Equille— bocher, Asticoter quelqu’un, Le prendre pour but... QUINQUEUX , adj. Mal vétu , Déguenillé; le vieux-francais employait avec la méme accep- tion Chinceux, et on dit encore Requinquer. | oe » Sy Mm. afarr. de Rouen) Tout ce qui est chétif. Quol, s. m. Poignée de fi- lasse ou de lin apprétée ; on disait en vieux-francais Quo- quillon. Quoi a aussi quelque- fois le sens de Fortune, Argent: cest le Quid des latins qui si- gnifiait Quelque chose. Quor, adj. Tranquille > du latin Quietus , comme le vieux francais : | Pire est coie iave quela rade. ADaM DU SuEL, Distiques de Ca- i ton, 1. IV, dist. 30, v. 4. On dit encore Se tenir coi. # Quoudne ,"'s.. -f. (arr, de Saint-Lo) Gazon. . QuovANNE, adj.(arr. de Caen) Béte, Poltron ; on disait en vieux-frangais Quoyon; voyez Roquefort, t. m1, p. 424. ® 4 & oe RaBILLEUX , 8S. m. Grognon, Qui revient sans cesse sur la ‘méme chose; en vieux-francais - Rabiller signifiait Polir. Rais, s.m. pl. (arr. de Vire) Salutations; c’est un souvenir des paroles que J udas adresse au Christ dans le jardin des Oliviers: Ave, Rabbi. On a cru que le mot hébreux avait la méme signification que le latin, el il signifie Grand , Savant ; Maitre. * RAF RaBLet, s. m. (Orne) Petit ef mauvais couteau; ce mota sans doute une origine celti- que, car les macons se ser- vaient pendant le moyen-dge d'une sorte de Rabot ; appelé Rable, et l'on donne encore le méme nom a un instrument de chirurgie. RABOUDINER, V. N. (arr. de Mortagne) Se raccourcir , Se détériorer par les extrémités. RABUQUER, V. a. et n. (arr. de Bayeux) Remuer, (arr. de Cher- bourg) Tourmenter, Boulever- ser ; ilsignifiait en vieux-fran- cais Faire beaucoup de bruit , Frapper avec force. RAcLER, v. a. Battre & coups de verges; on se sert aussi souvent du substantif Raclée. RAcoOQumiLier,v. réfl. Se res- Serrer comme dans une co- uille; il se trouve aussi dans e patois de Reims. Racovet, s. m. Chaume de graminées. Racourct, s. m. (arr. de Va- lognes) Chemin de traverse qui raccourcit les distances. Racrort, Recror, s. m. Suite won donne a une féte le len- hese ou le jour de son octave. C’est la noce avjourd’hui, c’est de- main le récrot. LaLLeman, La Campénade , ch. Il, p. 28. Rapas, s. m. pl. (arr. de Mortagne) Guenilles. RADOUBLER, V. n. (arr. de Mortagne) Revenir sur ses pas, Faire deux fois la méme chose. Raraits, s. m. pl. (arr. de Lisieux) Ramassis de choses de peu de valeur ; littéralement De vieilles choses raccommodées, du _vieux-francais Rafaire. RAI Voyez RAFUS. Sire Hains savoit bon mestier, Quar il savoit bien rafetier Les coteles et les mantiaux. Fabliau de sire Hains et dedame Anieuse. RaFrouER , v. a. (arr. de Caen ) Chasser , Poursuivre , Gronder. RaFovErT,s. m. (arr. de Vire) Feu-follet. RAFOUGUER, Vv. a. Examiner en détail. Raros ,'s. m. pl. (arr. de Caen ) Vieilleries, Amas de chiffons; dans le patois del’ [sere Rafoulon signifie Revendeur. RAGACHE , adj. Qui menace et querelle toujours ; voyez AGASSER. Racot, s. m. Conte, Bavar- dage ; en vieux-francais Ra- gote signifiait Un reproche of- fensant suivant Roquefort , t. Ir, p. 428. RAGoTTER , v.n. Rabacher ; voyez le mot précédent. Racutn, adj. ( arr. de Vire) Vif; de lVislandais Hrokr, Or- gueilleux , Insolent. RaicHEer, v. n. (Orne) Faire tomber les pommes. Rare , s. f. ( arr. de Vire ) Raie; du latin Regula: dans arrondissement de Saint-Lo, on appelle lArc-en-ciel La ratle-Saint-Martin. On disait en vieux-francais Reule : Quant ses houres avoit chantees A la reule de moinage. M. Tresutien, Du Roi Souvain, fol. B. i, v°. Rates , s. f. pl. Branches ropres a faire une haie ; pro- hanlenrent une contraction du vieux-francais Rapatlles, Haie, Broussaillcs , ou un dérivé de Vanglais Rail, Barriére. 185 186 RAI RAIMBINIER, S. m. ( arr. de Mortagne ) Fainéant , Mauvais ouvrier ; littéralement qui s'a- muse avec des batons , Rains en vieux-francais. Rarnciz, s. f. Collation ; du Jatin Ratio ou Recoenare ; car dans le patois de Langres et dans celui de Nancy, Réciner , Récergner, signifie Faire média- noche , Souper une seconde fois, et Festus nous apprend que dans le vieux-latin Coena signifiait seulement Repas. Le vieux-francais donnait & ce mot le sens du patois: nor- mand : [| n'est ressiner que de vignerons ; Rabelais , 1. rv, ch. 46. Raine, s. f. Grenouille; il se trouvait en vieux-francais : Par lieux y eut cleres fontaines Sans barbelotes et sans raines. Roman de la Rose, v. 1885. Voyezaussi la ballade d’Eus- tache Deschamps, intitulée La grenouille et la souris , OF u- vres, p. 196. Ce mot vient pro- hablement du latin Rana, quoi- que en breton et en erse Ran ait la méme signification. Rainsk&g, s. f. (arr. de Valo- gnes) Volée de coups; du vieux- francais Rainser , Battre avec un rains (ramus), un baton. RAISONNER , V. a. fey de Valognes ) Gronder ; il signi- fiait d’abord sans doute Parler raison, comme en vieux-fran- cals : Li quens Reinouz hastenc raisone, Tote l’ovre li mustre e sone: _ Tu veiz, fait-il, cum faitement Nos a requise ceste gent. BENoIs, Chronique rimée, 1.1, Vv. 3383. Mais il a fini par prendre le RAM sens de Mettre 4 la raison. On donne aussi au substantif Rav- son, le sens de Reproche, Gron- derie, et une autre origine ne serait pas impossible: Re-son, Redite. Sour les heaumes out si fers glas Qu’as ruistes cops prendre e doner Les funt sovent estenceler ; De la tres tiere contencon E de la noise e del reson N’i quide rien aver duree. Benois, Chronique rimée, 1. II, V. 5283 | Le patois normand prend. aussi Bruit dans l’acception de Querelle , Dispute. RAMARRER, V. a. (arr. de Valognes) Raccommoder ; il ne se ditque des personnes brouil- lées ; VOyeZ AMARRER. } RAMENDER, V. n. Aller mieux, Etre moins malade ; il existait aussi en vieux-francais : Et cco qui esteit afole Malement feit e empeirie, C’a ramende e radrecie. Benois, Chronique rimée, 1. II, v. 10840. | Il signifie aussi par figure. Diminuer de prix: le blé ra- mende quand on le paie moins cher. Ramicuer, v. réfl. Regagner au jeu ce qu’on avait perdu ; littéralement Se réconcilier, Se refaire am avec soi-méme: on le trouve aussi dans le patois de Reims. Ramon. s. m. (arr. de Caen) Bruit, Fracas. Voyez le mot suivant. RaMONER, V. n. (arr. de Va- lognes) Rabacher ; c’est une ex- pression métaphorique. Ra- moner vient du latin Ramus , Branche; dans un glossaire latin-francais, écrit pendant HAN le xv* siécle. qui se trouve a la Bibliotheque de Lille, £, n° 36, Ramon est encore expli- qué par Scoba. RAMPONER, Vv. a. ef n. En- nuyer, Rabacher, et, comme en vieux-francais,Gourmander, Quereller : Les membres ramponerent Le ventre, et s’atainerent. Ysoret II, fab. 36, dans Robert, t.1, p. 174. Rampos signifiait en vieux- francais Rameaux : on appelait méme le Jour de Paques fieu- ries Dimanche des Rampos; peut-étre ainsi Rampéner si- enifiait-il littéralement Faire des fagots, Dire des choses inutiles ; mais une autre ori- gine n’est pas impossible ; on trouve. quelquefois en vieux- francais Ramproner: Et lors ont mult as messagiers Dit ramprones et reproviers. Roman de Brut, v. 11994. et cette forme semble le con- traire de Préner, et avoir été composée comme Ranceur. Ran, s. m. Bélier ; probable- ment de Vislandais Ram, Ro- buste, car on dit encore dans le Cotentin, Fortcommeun Ran, et l'on appelait le mouton en vieux-francais Marran, Mau- vais ran : peut-étre cependant vient-ildu grec dpony, quis est conservé dans le patois de Ca- hors, Arrénat ; en basque Arra signifie Male. Rancer, v. n. Ployer sous un fardeau ; en provencal Ra- ca signifiait Soulfrir, Languir. Rancoeur, s. m. (arr. de Va- lognes) Rancune ; cette forme existait aussi en vieux-francais RAP 187 Od dol, od ire ¢ od rancure En unt Franceis lor genz seyrecs. Benois, Chronique riméc, 1. I, v. 3972. Voyez aussi Roquefort, Glos- satire de la langue romane, t. Ii, p. 434. RaANDONNER, V. n. (arr. de Cherbourg), RANDOUILLER et RaNDOUINER (arr. de Valognes), RaNTOUINER (arr.de Vire) Boui!- lir trop-longtemps ; en pro- vencal Randar signifiait Ar- ranger, Préparer. RAnGEAIS ,s. m. (arr. deCou- tances) Premier labour ; pro- bablement d’ Arranger. RapaPILLoTER, v. réfl. (arr. de Mortagne) Améliorer ses af- faires ; littéralement Raccom- moder ses papillotes. RaparaT, s. m. (arr. de Ba- yeux) Revenant, Mort qui re- parait. RAPAREILLER, V. a. (arr.-de . Valognes) Assortir, Trouver le Pareil. RAPARPOINTER, V. a. (arr. de Bayeux) Raccommoder , Répa- rer avec des pointes. Rapiamus (faire), (arr. de Bayeux) Enlever tout; c'est la premiere personne du pluricl de Vimpératif du verbe latin Rapere, Enlever. Rapin, s. m. (arr. de Bayeux) Homme qui enléve tout ce qu'il peut dans les champs. Le vieux- francais donnait a Araper le sens de Prendre, Saisir: Le suppliant arapa ledit Pierre au col et lui donna de la canivete oucoustel qu’il tenoit ala main ; Lettres de Grace: (4456), citées par Carpentier, t. 1, col. 306. Nous avons encore Rapine, et dans le patois de la Vendée 188 RAT Raper signilie Grapiller apres la vendange. Ce mot vient sans doute du latin Rapere ou de l’'anglo-saxon Hrepan. RapoiLer, v. n. S’occuper de vétilles, littéralement de pov. RaQuitton, s. m. (arr. de Valognes) Trognon de poire ou de pomme, (arr. de Cherbourg) Rebut de foin que mangent les bestiaux. Probablement du vieux-francais Raquier, Cra- cher, qui s'est conservé dans le patois Picard. Rast, adj. Curé, Nettoyé, littéralement Rasé. — Rasiire, s. f. Mesure pour les pommes et les grains; pro- bablement parcequ’on ne l'em- plissait que jusqu’aux bords ; on dit encore en francais : Ven- dre & mesure rase. [I se trou- vait aussi en vieux-francais ; voyez Roquefort, Glossaire , t. I, p. 436, et Supplément, p. 260. On disait aussi Res: Deus res de son pour les pors, xxvit deniers; Comptes (mss.) de l’Hotel-Diew d'Evreux (41449). Rasserorer, v. a. Raccom- moder deux personnes brouil- lées ; du latin Serenus, comme le francais Rasséréner. RassOUATER, Vv. a. (arr. de Mortagne) Raccommoder un viell habit; littéralement le rendre agréable. Il signifie aus— si, par extension, Mettre des morceaux a une chose qui n’en vaut pas la peine. RATATOUILLE, s. f. Mauvais ragout ; il ala méme significa- tion dans le patois du Berry. Dans la Bresse Tatouya signi- fie seulement Ragoat : E dena lonze de viau RAV I fi na bena tatouya. Noéls Bressans; p. 4. Dans l’arr. de Mortagne il signifie un Mélange de diffé- rentes especes de viande, et il est pris en rouchi dans la méme acception. RaTiER, S. m. Ruisseau des rues ; le vieux-francais donnait le méme sens & Raz, et nous avons encore Raz-de-maree. Rati-miti, loc. adv. (arr. de Valognes) Tout-a-fait Ras; elle ne semploie guére qu’avec le verbe Tondre. Ratour, s. f. (arr. de Va- lognes) Détour, Chemin qui o- blige a se retourner. RattRoTeR, v. n. (arr de Cherbourg) Répéter , Rabacher; littéralement Revenir sur ses pas, sur son trot, RAVENET, S. m. ant de Va- lognes) Espéce de filet avec le- quel on prend les oiseaux quand il fait nuit; du latin Rapere : on dit dans le Calvados Have- net dont l’idée premiére est la méme; deVislandais Hafan , Saisir. bes RavILLeR, v. a. Tourner sens dessus dessous ; dans!’arr. de Cherbourg il s’emploie comme v. n. et signifie Baisser, Diminuer de prix; littéralement Redevenir vil, du latin Evi- liscere. Ravirees (par les), loc. adv: (arr. de Mortagne) De temps en temps ; littéralement Pen- dant qu’on se retourne, que lon vire. Ravirer, v. réfl. (arr. de Mortagne) Revenir sur son o- pinion ; littéralement Se re- tourner , Virer de bord. Ravision, s. f. (arr. de’Va- REB lognes) Nouvel avis, Action de se raviser. Ravouer, v. a. Réparer la vove, Remplir un chemin de cailloux ; c'est une corruption de Ravover qui signifiait en vieux-francais Retrouver la wore: Dame-Diex, dist-en lescripture , D’un peeheor a greignor joie Qui se reconnoist et ravoie. Que des justes soixante nuef. ' Cortois d’ Arras, V. 710. REBARBER, v. réil. (arr. de Valognes) Faire résistance ; littéralement Se faire rébarba- tif: il se trouve aussi dans le patois de Langres. Reirrer, v. refl. Se défen- dre, Riposter ; il existait en vieux-francais et s'est conservé en rouchi. REBINDER, Vv. n. Recommen- cer; il se dit surtout en par- lant de boire, et semble une corruption du vieux-francais Rebiner , Faire pour la seconde fois; du latin Bis. Nous avons encore Siner, Donner un second labour, et Dire deux messes. ReBInGER, V. réfl. ( arr. de Vire ) Se venger: ¢’est proba- blement une corruption ; on dit dans larr. de Valognes Se revenger. ~ Repoens (a), loc. adv. (arr. de Vire) A tatons ; voyez BONER. REBOULER. VY. a. Redonner ; littéralement renvoyer la boule; voyez ABOULER. REBOINSER, Vv. a. (arr. de Mortagne) Contrarier, Embar- rasser; en vieux-frangais Re- bois signifiait Opposition, Em- péchement. REBOUILLEUX, Ss. m. (arr. de Caen) Rejeton. REC 489 REBOUQUER, V. n. I] sedit au propre d’un outil dont la poin- te, le bowt, rebrousse, et signific au figuré Etre rassasié . Ne plus pouvoir manger : le Glos- saire de Conches l’explique par Hebere qui est formé de Hebes. On disait en vieux-francais Rebouter ; voyez Roquefort , t. MH, p. 442. Repoors , adj. (arr. de Mor- tagne ) Il ne s’emploie qu’avec le verbe substantifet une néga- tion, et signifie Etre malade , Convalescent. REBOUTER, V. a. etn. Rédui- re les fractures , Remettre les os ; littéralement Meitre bout a bout : on le trouve aussi en vieux-francais: Bien le cuidai lancier debout, Mais il ressort et ge rebout. Roman de la Rose, Vv. 21873. REBULET, Ss. m. ( arr. de Bayeux )Son d'un sac de ble ; il signifiait en vieux-francais la farine dont on avaitété la fleur; de Rebut. Recuper, v. a. (Orne ) Scier un morceau de bois ; littérale- ment Recouper. On le dit ail- leurs des arbres a moitié morts qu’on est obligé de couper pour leur faire repousser des cépées. Riciper, v. a. (arr. de Mor- tagne) Recevoir; du Jatin Reci- pere. Le francais a conservé aussi Récipé, Récupiendaire et Récipient. RECLER , V. n. (arr. de Bayeux) Ramasser les pommes oubliées dans les champs ; cor- ruptionde Racler. RECOMPERER, V, réfl. (arr. de Mortagne) Répondre avec fierté ases supérieurs ; littéralement se faire leur égal, leur pair. 190 REG ReEcorir , v. a. Recracher ; on l’emploie au figuré comme son synonyme francais : C’est son portrait tout récopi ; voyez ECOPIR. RECOQUET , s. m. Oiseau de la seconde ponte, dont la mére a ete re-cauquée ; voyez CAU- CHER. Recuir, s. m. Le blé qu’on n'a pas pu vendre est mis au recuit ; c est probablement une corruption du vieux-francais Recor, Repos, et par suite Ca- chette . Coin. Dans Varr. de Mortagne on dit Retuit , pro- bablement par corruption du vieux-francais Refur, Refuge , Asyle. Reps, adv. (arr. de Valognes) Tout-a-fait , Extrémement ; peut-¢tre de l'anglais Ready , Promptement , Tout. REDINGUER , V. n. (arr. de Valognes) Rebondir. REFAIRE, V. a. (arr. de Valo- enes) Attraper ; probablement de l’islandais Refiaz dont la si- gnification est la méme. REFAUX, Ss. m. (arr. de Caen) Regain, Ce que l’on fauche une seconde fois. Reroul, s. m. (arr. de Mor- tagne) Usufruit. REFREINDRE, V. 0. (arr. de Bayeux) Diminuer de prix ; ailleurs au contraire il signifie Augmenter; Le prix du bléa refreint apres avoir molli. Pro- bablement c’est le méme mot , dérivé du latin comme le fran- cais by segs et son change- ment de signification a été ~amene par la différence des in- téréts des acheteurs et de ceux des vendeurs: REGRACIER, Vv. a. Remercier, REM Rendre grdces; du latin gratia; il existait aussi en vieux-fran- cais : Moult devoutement en prist a regracier nostre sei- gneur; Grlion de Trasignyes, dern. chap. REGRATIER, S. m. Revendeur en détail ; ce mot qui n’est plus usité en francais , signifiait dans Ja vieille langue: Mar- chand de comestibles en détail: Nus ne puet estre regratiers de pain a Paris , c’est a savoir venderes de pain que autres fourniece et guise (I. cuise) ; Estienne Boileau , Livre des mestiers, p. 34, et on lit dans le Dictionnaire de Jean de Gar- lande: Aucionarii dicuntur gal- lice Regratiers; Paris sous Phi- lippe-le-Bel, p. 592: la méme explication est donnée par le Glossaire francais-latin de la Bibliothéque de Conches. RELEVER, V. a. (arr. de Va- lognes) Reprendre son contrat de mariage, en bas-latin Re- levium. ReLicuer, v. a. Savourer , Manger ; littéralement Re- lécher. 2 RELUQUER, V. a. (arr. de Va- lognes) Regarder attentivement en fermant un peu les yeux: il Se trouve aussi en rouchi, et vient sans doute, comme le francais Loucher , de l'anglais to Look. REMANCHER, REMANCHIER, V. a. (arr. de Valognes) Gronder, Reprimander. REMEMBRAME, S. m. (arr. de Mortagne) Reste, Résidu, et par suite Morceau. ’ RemEmprer, v. réfl. Se sou- venir: on le disait aussi en vieux-francais : REN Quant nous cest non Cernel oon, Savoir et ramembrer poon, Que Dame Dex li demostra. Roman de Brut, v. 14249. Il vient sans doute directe- ment du latin Memorari ou de Vanglais Remember : on se sert encore quelquefois en francais de Remembrance. REmEST, v. n. (arr. de Valo- genes) Reste; ce verbe qui n'est plus employé qu’a la 3e per- sonne du singulier de l’indica- tif présent,, est sans doute une contraction du latin Remanet : on trouve en vieux-francais Re- maneir (Benois, Chronique ri- mée, |. 11, v. 3492), qui faisait Remes au part. passe : Ainsi sunt li Saisne remes Et al sec ont traite lor nes. Roman de Brut, v. 6974. REMIER,V. 0. (arr. de Bayeux) Repasser de l'eau sur le mare de pommes ; littéralement Re- mettre le mare dans le maz: on se sert aussi du substantif Re- mirage. REMOULER, V. a. Aiguiser, Repasser sur la meule; on dit aussi Remoudre. REMOULETTE, S. f. (Orne) Pe- tite mewle sur laquelle on ai- guise. RENARD, s. m. Rapport, Rot; dans le patois de Nancy il si- enifie Vomissement; voyez le mot suivant. RENAKDER, V. n. Vomir; ila la méme signification dans le patois du Berry. ReNARE , adj. (arr. de Vire) Rusé comme un renard; le vieux-provencal Raynart et le catalan Ranart ont la méme signification. REY A9A RENCONTRE , s. f. (arr. de Caen) Coeffe dont les barbes sont faites de dentelles cousues par le pied, qui se rencontrent. RENFILER , v. a. (arr. de Bayeux) Affiler, Redonner le fil. RENTRAITE , p. pas. (Seime- Inféricure) Effrayé. Réquir, v. a. Frapper ; lit- téralement Devenir réche ; Ré- quir un pommier signifie le gauler pour en ramasser les pommes. Voyez RAICHER. Re&san, s. m. Air du soir. Resse, s. f. (Orne) Grand panier ovale sans anse ; il si- gnifie une Corbeille dans le patois du Berry. RESSOURDRE, Vv. a. (arr, de Mortagne) Réveiller , Activer ; du latin Resurgere : il existait aussi en vieux-francais. Par extension , il se dit de la pate qui Leve et des Iégumes qui Enflent en cuisant. RuEssuen,V. a. Essuyer; cette corruption dufrancaisse trouve aussi dans le patois du Berry et dans celui du Juras a Reims ce mot signifie Faire sécher et se rapproche ainsi dela signi- fication du francais Ressuyer. Retark, p. pas. (arr. de Va- lognes) Bien arrangé et par suite Bien habillé; c’est une extension de la signification du francais. Reux, adj. (arr. d’ Avranches) Surpris, Etonné; du latin Reus: En ma jeunesse celuy qui avoit. mal répondues classes s appel- loit Reus: Pasquier , Recher- ches de la France, |. v, ch. 5. Les écoliers le nommaient aussi Victus, et nous disons des con- damnés (Convicts en anglais) quils sont convammecus. 492 RIF REVALIN , .S. m. Bayeux) Reste. Rive, s.m. Rayon; un reve de miel. Riviers, s. m. pl. Nom de lusieurs localités situées sur € bord d’une riviére; du latin Ripuariae. IBALET , S. m. (arr. de Bayeux) Petit sentier sur le bord d'un ruisseau ou d’un fossé; du latin Ripa , Rive; il avait la méme signification en vieux-francais : voyez Roque- fort, Glossatre, t. 11, p. 483. RIBLE, s. m. (arr. de Bayeux) Vent froid ; dans beaucoup d'endroits on dit Rile; peut- étre a-t-il laméme origine que Rafale. Ric (rout) loc. adv. (arr. de Mortagne) Tout pres ; le fran- cais emploie encore Ric-a-ric, Avec uneexactituderigoureuse: on a dit d’abord Compter ric- a-ric, de clerc & maitre (Rik signifie en islandais Fort, Puis- sant), et cette locution a pris ailleurs la signification de Trop juste. RicHOINNE, S$. m. (arr. d’A- vranches) Homme gai. Ricnoter , v. n. (arr. de Mortagne) Ricanner , Rire en secret. RIFLE, 8. m. Gourme des en- fants ; il avait en vieux-fran- cals un sens plus étendu: J’ai rifle et rafle et roigne et taigne, Miracles de sainte Genevieve , dans M. Jubinal, Mystéres inédits, t.1, p. 288, v, 5. RIFLER, v. a. Prendre , Vo- ler ; il signifiait en vieux-fran- ¢ais Arracher , Ecorcher : Cil crierent a halte voiz, sige tren- chierent sicume fud Jur usa- (arr. de ROC ges de cultels , e riflerent la charn jesque il furent sanglenz; Livres des Reis, |. 11, ch. 48 : Vv. 28. Peut-étre est-ce une corruption du francais Rafler, ou de l'allemand Raffeln. RIGNALER, V. n. urmurer, Grognonner ; on dit Réner dans le patois de Langres : dans le patois du Berry Rignau si- gnifie Grossier, Déplaisant Ricoxet, s. m. (Arr. de Vire) Grand verre, RIGOLLER, v. a. Railler, Plai- Santer : 3 Ne venez plus ainsi m’y rigoller. Chansons normandes, p. 182, éd. de M. Dubois. Il existait aussi en vieux- francais. RILE , Rible. RinGarp, s. m. Fourgon pour remuer le feu dans le four ; peut-étre d’ Arranger. RINGLER, V. n. (Orne) Glisser sur la glace; peut-étre une corruption du vieux-francais Rigoler. : RrocueEn, v. n. (arr. de Vire) Rire a moitié. RIOLET, s. m. (arr. de Bayeux) Petit ruisseau. Rion, s. m. (arr. de Caen) Petit sillon tracé dans une planche de jardin ; contraction du francais Rayon. Roc, s. m. (arr. de Bayeux) Mouvement; il n’est employe qu’au figuré, Donner un roc , Reprimander : on dit dans le méme sens Donner un branle, et une danse; voyez le mot suivant. Rocuer, y. a. Lancer; litté-~ ralement Remuer ; il se prenait s. m. Hale; voyez ROU dans la méme acception en vieux-francais : E rochout pier- res encuntre lui; Livres des Revs, |. 11, ch. 16, v. 6, p. 478, ed. de M. Le Roux de Lincy. Il signifie Frapper dans le pa- tois du Jura : Prends-m’on trot de bos, Rouche su soun dos. Chanson populaire. Le francais a conservé Ro- quer, terme du jeu des échecs qui exprime le mouvement simultané d’une tour et du roi. RopeEor, s. m. (arr, de Valo- genes) Voleur ; dans le giossaire Jatin-francais de Conches Cir- cumforanus est expliqué par Larron de marche; Vagabond a pris aussi cette acception. ROINCER, V. n. Grogner ; dans l’arr. de Mortagne, il ex- prime le cri des chevaux qui veulent se battre. Roncevux, adj. Noucux; ce mot se trouve aussi dans le pa- tois de la Meuse, et on dit dans resque toutes les provinces, de ‘acajou ronceux. Ronssz, s. f. (Orne) Chéne dont on coupe la téte tous les ans pour |’empécher de donner de l'ombre; on dit aussi Rosse et Rousse. RogugEcaureE, s. f. (arr. de Bayeux) Houppelande. ROSELET, Ss. m. (arr. de Valo- gnes) RosExeu (arr. de Bayeux) Belette. Rote, s. f. (Orne) Petit sen- ier; i signifie aussi la Corde qui fixe la charge d'une voiture. Roton, s.m. (Manche) Tro- enon de chou, de pomme; on dit aussi au diminutif Rotellon. Rouaner, v.n. (arr. de Mor- ROU 193 tagne) Macher malproprement. Rovauper, v. n. (arr. de Mortagne); il exprime le cri des chats qui sont en rut. RovuE te, s. f. Petite roue + du latin Rota : il existait aussi en vieux francais : Lors est tournee la rouelle. Roman dé la Rose, v. 9829, et s'est conservé dans le patois de la Meuse. Rourte,s. f. iln'est employé qu avec le verbe faire et signi- fie Faire le gros ; littéralement Faire la roue, comme un paon qui hérisse ses plumes. RouGet, s. m. (arr. de Ba- yeux) Gale des chiens ; proba= blement a cause de sa couleur: on appelait Jes lépreux en vicux-francais Rouge-musei. ROUINASSER, V.n. Murmurer, fréquentatif de Roincer. Routng, Ss. f. Soliveau. RoviPeavx, s. m. pl. (Orne) Mal doreilles ; voyez ourrtas. Rouxke, s. f. Voléede coups; il se trouve dans le langage po- pulaire de beaucoup de pro- vinces, et M* Sand a dit dans Valentine, t. u,.ch. 18: Une roulée jusqu’a ce que mort s’en suive. Peut-étre ce mot vient- il du vieux-francais Roller, Ba- tonner,oua-t-il été formé comme son synonyme Pile; dans le patois du Berry, une Rowle de bois signifie un Amas, une Pile de bois. Dans l'Orne, Roulée signifie aussi ce que l’on peut rouler de fil sur un fuseau. RoupIL_er, v.n. (Orne) Pleu- rer, Répéter sans cesse la méme chose; dans le langage popu- laire du reste de la province, il signifie Avoir la rowpie. 13 AD‘ RUF Royau, s. m. (Orne) Fuseau sur leque! on fait la rowlée. RucueEnr, v. a. Lancer, Jeter: probablement une corruption de Rocher, qui se trouve aussi dans le patois du Berry. Rucui, s. m. Cheval quirue. Rupe, adj. Engourdi, Re- muant difficilement; Christine de Pisan a dit dans une de ses cent ballades : Depuis lors je n’entendi A mener soulaz ne joie; Sien est tout arudi Le sentement que j’avoye. Journal des Savants de Nor- mandie, p. 457. Rur, Rurrve, adj. Fort, Cou- rageux et par extension Fier ; peut-étre sa signification s’est- elle modifiée, car Vislandais Rufin signifie Hérissé, Gros- sier, et le patoisdu Berry donne a Ruf la signification de Bour- ru, Hargneux: voyez le mot suivant. RorFign, s.m.(arr. de Rouen) Mauvaissujet, Débauché; VOyeZ le Coup dail purin, p. 39. il existait aussi en vieux-fran- cals : | Li jeune enfant deviennent rufien, Joueurs de dez, gourmans et plains divresse. Eustacne Descuamps, Sur la dé- cadence de la Chevalerie, p. 97. Les dextres?ruffiants, les maquerel- les feintes. VAUQUELIN DE LA FRESNAYE, Poé- Ssies, p. 437. Il se trouve en italien (Ruf- RUS fiano), en provenc¢al (Ru/fia}, en espagnol (Rufian), en catalan (Rufia), en portugais (Rufido), en anglais (Ruffian) et méme dans la basse-latinité: Mani- festi peccatores, adulteri et a- dulterae.... ruffiani et meretri- ces.... non tolerentur absque poena ; Byzynius, Belli husse- tict diarvum dans Ludewig, Manuscriptorum reliquiae, t. v1, p. 1483. Il vient sans doute de Vislandais Rufin, Heérissé, Grossier : peut-étre cependant est-ce un souvenir du ministre Rufin, que la popularité dont jouissail Claudien pendant le moyen-age dut empécher d’étre oublié; au moins lit-on dans le Mystere de sainte Barbe: Maudit soit Mahom et Jupin, Le dieu Tervagant et Ruffin, Et tous ceux de la synagogue. Runcg, s. f. (Orne) Mémoire; voyez le mot suivant. UNGER, V. a. et n. Ruminer; on dit Ringer dans le patois de Nancy, et Rowng: dans celui du Jura. Rupin, adj.(canton des Pieux) Rusé. Ruprin, s. m. Il n’est em- ployé que dans la phrase Etre en ruppin, qui signifie Etre en gaite. Rvguven, y. n. (arr. de Rouen) Dormir &moitié; dansl’arr. de Vire on lui donne la forme ac- tive, et la signification de Pous- ser: Cest une corruption de Rocher. Russz, s. m Navet sauvage. SAF SaBik, s. m. (arr. de Vire) Pou. SaCCAGE, s. m. (arr, de Va- lognes) Grande quantité ; litts- ralement Plein un sac. SACOUTER, V. n. (arr. de Mor- tagne) Parler bas de maniére a ne pas étre.entendu. SACQUE-FEU, S. m. (arr. de Saint-Lo) Briquet ; voyez le mot suivant. SacgugER, v. a. Tirer brus- quement, comme en vieux-fran- Cals : Baucelicours saca l’espee Qu’en sa cape ot envolepee. Mouskes, Chronique rimée, v. 14339. Dans l’arr. de Mortagne, ila pris le sens de Chasser : Sa- chiez-mai les brebis du clos, et l’on trouve également en vieux- francais : Fors de l’estable a sacié le corsier. Chevalerie Ogier de Danemar- che, Vv. 6293. Nous avons encore Saccade. Ce mot vient sans doute du cel- tique, puisque le breton Sache signifie Tirer, Amener a soi quoique l’hébreu Chaka ait le méme sens, et que l’islandais Sekia signifie Apporter, Ame- ner. Sapo, s. f. (Orne) Vieille et mauvaise femme; peut-étre de Maussade. SAFFRE, adj. Glouton : Gourmand, 495 SAN Fallut encor sauller de vin ces lan- gues saffres. Muse normande, p. 130. Le vieux-francais lui don- nait la méme acception : Que ces ribaulx saffres, frians. . Roman de la Rose, v. 8807. et il est encore resté dans la langue populaire. SAINE, Ss. m. Filet de pé- cheur ; ilexistait aussi en vieux- francais. SAINTIR, V. réfl. (arr. de Va= lognes); il n’est_ employé que dans la phrase : Les mains me saintissent, qui signifie Les mains mouvrent. Sais, Sins, prép. (arr. de Mortagne) Chez, dont ce mot est probablement une corrup- tion. | SALEINE, S. f. Salaison, Ce qui est salé : C’est le chaut et la saleine, Ce n’est pas nous qui beuvons. OLIVIER BASSELIN; Vaux-de-Vire,; p. 167, éd. de M. Travers. SALLEBUTE, Ss. f. (arr. de Cherbourg) Petit baton de su- reau avec lequel les enfants lancent des balles de filasse : voyez CANNEPITIERE. SANGLE, adj. Pur; du latin Singulus ou de l'anglais Sin- gle dont la signification est la méme : Par les diversites des angles Sont le moyen compost ou sangles. Roman de la Rose, v. 19987. 196 SAR SANGMELE, adj. (Manche) Ex- trémement troublé; il existait aussi en vieux-francais, ainsi que d’autres expressions ana- logues : Li rois l’oit, toz li sans li mua. Gerars de Viane, Vv. 1534. Karles le voit, pres wait le san marri, Duel en ot et pesance. Ibidem, v. 1693. SANGUINEE, s. f. (arr. de Vire) Pus mélé de sang. 2 SANSONNET, S. m. (arr. de Bayeux) Maquereau; (arr. de Valognes) Etourneau; proba- blement une corruption de Chansonnet, parce que les 6- tourneaux apprennent tres fa- cilement a chanter. SAONNER, V. a. Reprocher ; il signifiait d’abord Reécuser, qui avait le sens de Reprocher; voyez la Coutume de Norman- die, ch. LXvII. SApas, adj. (arr. de Rouen) Crotté, Barbouillé, Sale ; pro- bablement une contraction de Salope, ou du vieil-allemand Salawer, dont la signification est la méme. SAPAUDER, V. réfl. Se salir’; voyez le mot précédent. SAPEE, s. f. (arr. de Bayeux) Régal copieux. 7 SARCET, S.m. (arr. de Vire) Gaule ; probablement le méme mot que le vieux-francais Sar- cel, Aiguillon pour piquer les beeufs. SARCHE, S. f. (arr. de ;Mor- tagne) Trépied sur lequel on éléve les cuves a lessive. SARCIR, V. a. (arr. de Morta- ene) Briler, Dessécher par le feu ; peut-étre le s est-il une prosthése et doit-on écrire Ar- sir, qui venait du latin Ardere SEI et signifiait en vieux-francais Briler. SARCLES, S. f. pl. (arr. de Bayeux) Mauvaises herbes, lit- téralement Ce que l’on Sarele. SARRER, V. a. (arr. de Vire) Meurtrir. SASSIERE, S. m. Marchand de tamis, de sas. SATROUILLE, s. f. Poulpe de mer ; au figuré Femme mal- propre ; dans le patois du Jura on dit Sadrowlle. SAUTELICOT, S. m. (arr. de Coutances) Sauterelle; dans quelques localités on dit Sau- tien. SAUTEROLLE, Ss. f. (arr. de Valognes) Piége pour prendre les oiseaux, composé d'un noeud coulant en crin et d’une ba- guette courbée qui se reléve brusquement quand il vient a se détendre. SAUTICOT, S. m. (arr. de Ba- yeux) Crevette. (arr. de Valo- gnes) Crevette grise qui se pé- che al’embouchure des riviéres; dans quelques provinces on dit Salrcoque. | SAVRIN, S. m. (arr.de Rouen) Bedeau ; nous ne connaissons ce mot que par le Coup dail purin, p. 34. SCIONNER, V. a. Frapper a coup de verges, de scions. Scior, s. m. (Orne) Petite *scie. . SECHE, S. f. (arr. de Bayeux) Sou marqué. | SECRAN, S. m. (arr. de Cher- bourg) Maigre, Sec; il ne se prend qu’en mauvaise part et ne se dit que des hommes. SEILLE, S. f. (Orne) Sceau; il existait aussien vieux-francais: En cel puis si avoit deus seilles , SER Qant l'une vient et l’autre vet. Roman de Renart, t. I, p. 245. C’est une crase du latin Si- tella , on trouve aussi en Ph vencal et en portugais Selha. SELIAIS, s. m. (arr. de Saint- Lo) Fléau ; c’est une corrup- tion, on dit.dans plusieurs lo- calités Fliais. SELIEUSET , s. m. (arr. de Saint-Lo) Sifflet. SELIOS, s. m. (arr. de Saint- Lo) Champ ; peut-étre une cor- ruption de Clos. SELIOUSIR, Vv. nN. Saint-Lo) Souffler ; LIEUSET. SENGLES, s. f. pl. (arr. de Bayeux) Petites rues qui étaient seules ( singulae ), ou qui en- (arr. de voyez SE- touraient la ville, comme des. Sangles. SENTE, 8. f. Sentier ; ce mot qui est resté plus fidéle que le francais au latin Semita exis— tait aussi dans l’ancienne lan- gue: Je te dy que hier par une sente Menay mez pourceaulz et mez truis. Miracles de sainte Genevieve, dans M. Jubinal, Mystéres ' inédits, t.1, p, 258, v. 3. SERAINE, S. f. (arr. de Ba- yeng) Vase de terre pour serrer a créme. SERENCE, S. f. (arr. de Ba- yeux) Soirée , autrefois Sérée : il s'est moins écarté que le fran- cais du latin Serus. SERGALE, Ss. f. (arr. de Vire) Fille étourdie. SERGE, s. f. Couverture de lit, dabord sans doute faite ordinairement en serge ; il avait déja recu cette extension de signification dans le XIII siécle, car on lit dans Odon SEU 197 Rigaut: Item, invenimus in dormitorio sargias, sive tapetia inhonesta, ut pote radiata; Re- gestrum visitationum, p. 81, ed. de M. Bonnin. Une ordon- nance de 1367 nous apprend que ces Serges étaient fabri- quées a Caen a grant foison. SERPER, V. a. (arr. de Bayeux) Interrompre brusquement. SERVIR, V. a. (arr. de Valo- gnes) Couvrir , en parlant des étalons et des taureaux : on lui donnait le méme sens en vieux- francais, mais ayec encore plus d’extension : Girbers la tient ef si la sert Gerins, S’en est richous Hernaudes li petis, Si en est cous Venpereres Pepins. Garins li Loherens , B. R. Ms. de St-Germain , n° 1244, fol. 229, recto, col. 2, v. 13. SET, s. m. (arr. de Bayeux) Tamis ; du latin Seta, parce que les tamis sont ordinaire- ment faits en soie. SEU, s. in. Sureau ; proba- blement ce mot vient du cel- lique , car on le trouve dans presque tous les patois ; c’est Sew a Nancy et dans I’Isére , Sou dans le Jura, Sawg en pro- vencal ; le vieux-francais disait Séu : La rose lesse por l’ortie , Kt Pesglantier por le séu. Du varlet qui se maria a Nos- tre-Dame; dans Barbazan, Contes et fabliaus, t. II, p.126. Le glossaire latin-francais conservé a Lille, E, 36, écrit méme Sehus; voyez lédition de M. Emile Gachet, Bruxelles, 1846, p. 46; et on lit dans le Dict de Merlin Mellot: Au bout de cestcourtil, droit dessous un séur , 198 SIL C’est un arbre qui est en septembre , méur. Dans JupinaL, Nouveau recueil de fabliaux , t. I, p. 131. SEULLE, s. f. Magasin pour les marchandises: il y avait autrefois a Caen unerueappelée la Rue des Seulles. En vieux- francais Seulle signifiait Cave, et Fond de navire qui servait de magasin : nous avons encore Cellier dont Vorigine peut étre Ja méme. Si Fair, loc. adv. (arr. de Valognes). Cette forme de né- gation est d’autant plus remar- uable que, dans les poémes ialogués de Roswitha, Sz est employé comme particule né- gative. SIDONE, s. m. Suaire , Drap mortuaire : Tendre sur nos huys des sidones. OLIVIER BasseLin, Vaux-de-Vire, p- 219, éd. de M. Travers. On le trouve aussi en vieux- francais : Plourait sainct Jehan assez pres delle , soustenant le milieu du corps sur le sidoine estendu sur son giron ; Olivier Maillard, Histoire dela Passion de J.-C., p. 67, éd. de M. Pei- enot. Ce mot vient sans doute du latin Sendon. — SIEKGETTE, S. f. (Orne) Sou- riciére. Voyez SURGETTE. Sizu, s. m. (arr. de Valo- genes) Graisse, Suif; cette for- me existait aussi en vieux-fran- cais ; on lit dans Le premiers livres des reis: Mielz valt a Deu obeir que le sieu del mul- ‘tun offrir. SILER, v. a. Frapper ; dans l’arr. de Mortagne il s’emploie aussi neutralement et exprime je sifflement de la couleuvre. SOL SIMENET, S. m. (arr. de Va~ lognes) Espéce de gateaux sans beurre ; 4 Rouen Cheminau, les Siminiaus de Blangi étaient trés-renommeés pendant le mo- yen-age et leur nom Se trouvait déja dans la langue du XII* siecle : Desus la table a trove le mengier, Bons semineaus et gasteaus et vins _ viés, Chevalerie Ogier de Danemar- che, v. 6059. Mais nous ne savons si ce mot désigne toujours la méme espéce de gdteau: car on lit dans le commentaire écrit pen- dant le XIIL* siécle sur le Dic- tionnaire de Jean de Garlande: Placentae dicuntur gallice si- meniaus ; Géraud , Paris sous Philippe le Bel, p. 593, et, a Reims, le simenet est un gateau de pate feuilletée qu’on ne man- ge qu’en caréme. | Sinas, s. m. Plancher d'une grange; en vieux-francais S1- nal et Sinaust signifiaient le dessus d’une étable. Sis, part. pas. (arr. de Va- lognes) Assis ; cette apocope se trouvait aussi en vieux-fran- cais : Sor une coute li dus Garins se sist. Garins li Loherens, t. Ill, v. 4480. SLIAQUETER , Vv. n. (arr. de Saint-Lo) Clabauder; probable- ment une corruption de Claque- ter , fréquentatif populaire de Claquer, Faire du bruit. SNESQUEUX, adj. Scrupuleux; peut-étre du vieux-francais Se- mes , Prudent, Sensé. SOLIER, s. m. Grenier, Plan- cher ; ce mot qui se trouve SOU aussi en breton , en provencal et dans presque tous les patois, vient sans doute du latin So- larium , qui avait déja ce sens dans Suétone: Neque multo post rumore caedis exterritus , pro- repsit ad solarium ; Claudius, ch. 40. Il existait aussi en vieux-francais : Du solier suis descendue a la cave. J. Marot, Guvres, t. v, p. 45. De dessu noutron solié D’é oui lous anze canta. Noéls Bressans, p. 131.4 SOMMIER, Ss. m. (arr. de Vire) Poutre ; probablement du latin Summus ; il existait aussi en vieux -francais et s’est conservé en rouchi. Sou, s. m. Chenil, Loge a pore : on dit aussi Soue, Sou- ette ; dans le patois de la Ven- dée Souque ; peut-étre du latin Sus, Souaner, V. n. (arr. de Mor- tagne) Prendre du tabac mal- proprement. SouaTER, V. n. (arr. de Mor- tagne) S’associer pour travail~ ler ensemble; Réunir ses che- vaux & ceux de ses Voisins pour un travail agricole. Soucer; v. a. etn. (arr. de Mortagne) Sentir, Flairer. Sour, adj. Doux, Agréable: O breuvage, ami souef! OLIVIER BasseELIN, Vaux-de-Vire, p- 80, éd. de M. Travers. Il existait aussi en vieux- francais : Tost fu li gorpil endormiz, Car moult estoit soef ses liz. Roman de Renart, t. 11, p. 304. Il vient du latin Suavis , Suave. ‘SOU 199 SOUFFAQUIER, Vv. a. Encom- brer, Peser sur ; du latin Suffo- care. Sout, adj. (Orne) Sale; lit- teralement Cochon; du latin Suillus, le francais dit aussi Souiller et Souwillon, et on lit dans l’Elucidario de las pro- proas , cité par Raynouard , Lexique roman, t. v, p. 288: Pore mari, dit comunament Swillo. Une origine germani- que ne serait cependant pas impossible: en gothique Saul- jan signifie Salir. Souiz, s. m. (Orne) Saleteé , Ordure; ie peuple dit par ironie: Hl est propre comme un Sow. Dans quelques localités on dit Souie. SOUIN, s. m. Homme caché, dissimulé : on dit dans leméme sens Cet homme est en dessous. Soucas, s. m. Consolation; et par extension de signification Gros soupir : Soulas de nos miseres. OLIVIER Basset, Vaux-de-Vire p. 98, éd. de M. Travers. Il existait aussi en vieux- francais : Nous aurions soulas et joye. MARTYRE DE SAINT PIERRE ET SAINT Pau, dans M. Jubinal, Mys- téres inédits, t. I, p. 75, Vv. 23. Ce mot vient sans doute du latin Solatiwm, comme le fran- cais Soulagement. SOULASSER, V.n. (Orne) Sou- pirer profondément ; voyez le mot précédent. Sout, s. f. Jeu ott deux par- tischerchent a s’emparer d'une halle et a Vemporter a un en- droit convenu. Ce mot existait aussi en vieux-francals , mais 200 SOU on écrivait ordinairement Sole: Autres par force entrer léans, Bruiant comme l’en court a solles. Guiart, Branche des royaux li- gnages, V. 1489. Tenez, mes petiz dragonneaulx, Mes jeunes disciples d’escole, Jouez-en ung peu a la solle Au lieu de croupir au fumier. ARNOUL GrEsBaN, Mystére de la Passion, dans M. Paris, Ma- nuscrits francois dela Biblio- théeque du Roi, t. VI, p. 307. Mais Rabelais écrivait Soule, et on lit dans les Mémoires de la ville de Douay , fol. 236 : Pour éviter aux désordres qui peuvent arriver par le ject de fa choulle qu’on est accoustu- mé faire le jour des caresmeaux (le mardi-gras) a esté desfendu de la jecter. Ce jeu brutal était aussi fort usilé dans le Berry (voyez un article de Lebeufdans le Mercure, du mois de mars 1735). Son nom vient sans doute du latin Solea, car il est appelé a Valognes La savatte : cependant lislandais Sul si- gnifie Mélée et par suite Com- bat. — SOULER, Vv. n. (arr. de Ba- yeux) Avoir coutume ; il vient du latin Solere et se trouvait aussi en vieux-francais : Les grevoit plus et apressoit plus que leur anemi ne_ soloient faire; Chroniques de Saint- Denis dans le Recuerl des his- foriens de France, t. i, p. 244. SourcEr, v. a. (Orne) Guet- ter, Surveiller ; par extension il signifie & Bayeux Surprendre et se prononce Sourguer. SOURIS-GAUGUE, Ss. f. (arr. de Bayeux) Chauve-souris. SUE Sousk , adj. Bien nippé ; lit- téralement Qui a un cochon. SouTon, s. m. Homme adroit et par suite dissimulé; le vieux- francais disait Sowtius : Lors traist ’empereres gentius Et li patriacles soutius. Motskes , Chronique rimée, v. 10454. | Du latin Subtilis. SPARSIER, S. m. (arr. de Mor- tagne) Estafier ; c'est comme le francais unecorruption du latin Staparius. | Spkctaurs, s. f. (arr. de Va- lognes) Beauté et par suite Ra- reté; il nes’emploie guére que précédé de la préposition Par; du latin Speciosus, Beau ; voyez ESPECIAUTE. STASERAN, adv. Ce soir; un hazard dont il ne faut sans doute rien conclure a singulié- rement rapproché ce mot de Vitalien Stasera. SUBLET, S. m. Sifflet + du la- tin Sibilare qui avait pris la méme forme en vieux-francais: Des perrocquets lesquels su- blent merveilleusement haut et s efforcent d’imiter la voix hu- maine ; Histoire Macaronique, t. 1, p. 44. Ce mot se trouve dans le patois de la Vendée ; dans celui de I'Isére il s'est rap- proché du francais (Sibla). On se sert aussi du verbe Subler qui s'est corrompu dans quel- (ques localités en Sudbier. Supovur, adv. (arr. de Mor- tain) Debout ; le vieux-fran- cais disait Sur bout. — SUCHES, s.m. (arr.de Bayeux) Chévre-feuille ; parce que les enfants Sucent le bout de la fleur qui est trés-sucré. SUEE, s. f. (arr. de Valognes) TAB Corvée, Crainte, Menaces, Tout ce qui fait swer de peur ou d’in- quiétude ; il se trouve aussi en rouchi : & Mortagne on dit Sucée. SUELLE, Ss. f. (arr. de Vire) Cigué, ailleurs on dit Chie. SUETINER. V.a. (arr. de Cher- bourg ) Epier, surveiller les actions de quelqu’un. Super, v. a. Humer, Aspirer; langlais To sup a la méme si- gnification. SURELLE, Ss. f. Oseille; parce qu on dit proverbialement Sur comme de Voseille ; on dit aussi Suret : en rouchi c’est Surcele. SureENGIES, S. f. pl. (arr. de Bayeux ) Rapports aigres de l'estomac. SurkT, Ss. m. (arr. de Valo- gnes) Sauvageon, Pommier non greffé dont le fruit est acide. SURETIERE, 8. f. (arr. de Va- lognes) Pépiniére de pommiers non greffés; voyez le mot pré- TaBIER, Ss. m. (Orne) Grande table a rebords, placée sous le fait d’un pressoir, sur laquelle on étend le mare des pommes pour en extraire le jus. Tapur, s. m. (arr. de Valo- enes) Vacarme, Bruit; il exis tait aussi en pravencnt (Tabust) et en vieux-francais : Je n’ay point peur de ses ribleurs de nuict Ne du tabut qui tant le monde nuyct. Cretin, Poésies, p. 211, éd. de 1723. TAC 204 cédent. SURGETTE, S. f. (arr. de a Souriciére; en patois picar Surquette et Sarquette; voyez le mot suivant. SURGUER, V. a. (arr. de Cher- bourg) Epier, Observer ; il se dit plus particuliérement des chats et se prenait en vieux- francais dans la méme accep- tion : Comme le chat scait par nature La science de la seurgeure. Roman de la Rose, v. $0343. C’est probablement une crase de Sur-guetter, formé comme Sur-veiller ; le vieux-francais employait aussi Surguet dans le sens de Guet; Roquefort, t. Hy Paovu: SURPETER, V. a. (arr, de Mor- ae Trouver quelqu’un que lon cherche et qui fuit quand on l’approche: dulatin Petere, Demander, Chercher. Probablement il vient du vieux-francais Tabur, Tam- bour, car Tabouler, Tabourner, signifiaient Faire un grand bruit, et Tabewrer semble avoir eu la signification de Frapper : Dessus leur pis des poing tabeurent Et eurent, pleurent, veillent , labeu- rent. Miracles de sainte Genevieve, dans M. Jubinal , Mysiéres inédits , t. Il, p. 277, v- 18. Tac, s. m. (arr. de Bayeux) Grosse chenille verte; voyez 202. TAL | Tas. Ce mot signifie aussi une maladie épidémique qui régna pendant le XY° siecle et a laissé un souvenir effrayant : JZ en meurt comme du tac est encore une locution populaire. En ce sens Tac vient sans doute de Vislandais Tak, Pleurésie. Tacoter,v. a. Tapoter, Frap- per a petits coups; c’est un di- minutif de Toquer. Tarr, s. f. (Orne) Peur. TAFFETINER, v. n. Marchan- der, Disputer sur le prix : il vient sans doutedu vieux-fran- cais Tafur, Fripon, Trompeur: Aincois querroit nn grant tafur. Roman de Renart,.t. III, p 310. TAIGNER, V. n. Tousser; vo- yez TEIGLER. TALANDER, V. a. Battre; Tal- ler dans le patois du Berry et dans celui de Langres, Taller dans le patois du Jura, Tala dans celui des Vosges, signifient Meurtrir, et l’on se sert encore Poppi bens de Taloche. eul-étre ce mot signifiait-il d’abord Coup de hache, car en islandais Telgia signifie Hache et onlit dans la Recollection de Chastelain : Depuis veiz en Escosse Le roy Jacques meurdrir D’espee et de talloce. Dans Ritson, Ancient songs and ballads, t. I, p. 446. Tatsot, s. m. Noir de la marmite; en provencal Tala signifie Défaut, Tache, et dans Je patois de l’Isére Tudo est le nom que !’on donnealafumée; peut-étre ainsi ce mot signifie- t-il littéralement Tache de fumée. TAN Ta.Bore, adj. Taché de noir, et par figure, Ivre. TALEvASsER, v. réfl. (Haute- Normandie) Se heurter rude- ment; il semble avoir signifié Combat en vieux-francais, car on lit dans le Roman de Rou, v. Q517: As talevas se sout bien couvrir e mo- ler. En rouchi Talvart signifie - But pour tirer a la cible; voyez TALANDER. TANcER, v. a. Gronder avec force, Disputer; le sens du frangais est beaucoup plus fai- ble, mais il avait la méme force dansl’ancienne langue; A vin de Lyon, c’est-a-dire quant a bien beu, veult tanser, noyser et battre; Calendrier des Ber- grers, fol. L, 1. b. Tl vient sans doute du latin Con-tendere, comme le prouve le francais Contention. | Taneue, Tanque, Engrais qui se trouve aux embouchures des fleuves. Tanné, adj. Accablé de cha- grin; probablement de T avace; Tané signifiait en vieux-fran- cais Tourmenté, Fatigué. Tanouts, adj. Clair-semé. Tantet, adv. Un peu; on s’en servait aussi en vieux- francais: Estuffes les en ce brasier Ung tantet pour mieulx les aysier. JEHAN MicueL, Mystére de la Passion, Journ. I, sc. 6. Du latin Tantum Seulement; on emploie aussi le diminutif Un tantinet, comme le latin Tantillum. TANTOUILLER, V. a. Tratner TAR dans l'eau, Plonger a plusieurs reprises, Salir extrémenent. Le vieux-francais disait Entoudl- ler : Souvent entouillé par meslure. Coquillard cité par Borel. Si le T n’est pas une affixe, ce mot signifiesans doute Beau- coup (tam) sowiller, en patois normand Towiller. Tanveg, s. f. Galette cuitea la gueule du four. Tavk&e, s. f. Grande quantité; il se trouve aussi en rouchi et dans le patois de la Meuse. Tarin,s. m. Tambour; parce qu il fape sur sa caisse. Tapin (A), adv. En secret, En tapinois ; il se trouve avec cette forme en vieux-francais : Lors saillent li baron desus un sous- terin Que Karles i ot mis coiement a tapin. Garin de Monglave, dans Kel- ler, Romvart, p. 353, V. 16. Taour, s. f. Pelotte ot l’on attache les épingles. Tagouet, s. m. (Orne) Jalon pris dans une haie; on lui a donné ailleurs d’autres signifi- cations qui se rattachent toutes >la méme idée; & Valognes , crest un Verrou; a Bayeux, un Morceau de bois qui sert a soutenir ou attacher différentes choses, et un Emplatre, peut- étre parce qu’on dit proverbia- lement Immobile comme un emplatre. Ces différentes significations se trouvaient aussi en pro- vencal : Apres a fah las portas Flotipar be tancar. Fierabras, V. 2593. Tar, s. m. Goudron ; peut- TAR 203 étre est-celemot anglais, quoi- ue la méme racine se-retrouve ans plusieurs langues ; en al- lemand c'est Theer, et Terque en rouchi, comme en vieux- francais. | TarRaLg, s. f. (arr. de Vire) Femme légére, étourdie; le vieux-provencal Tartalhar si- gnifiait Se trémousser, S’agiter sans cesse. TARGER, TARGIER, V. 0. Tar- der ; c’était la forme du vieux- francais : Tantot yray ; se je targoie Je feroye haulte folie. Vie de saint Fiacre, dans M. Ju- binal, Mystéres inédits, t. 1, p-. 529, v. 3. De l’asne et d’un chien sans targier Vous vueil un fablel comencier. De l’asne et du chien, Vv. 1- On dit aussi Tergier. TARIBONDIN, Ss. m. (arr. de Mortagne) Homme gros et court. TARINER, V. n. (arr. de Mor- tagne) Tarder, Muser. TARINIER, S. m. (Orne) Hom- me qui veille tard, (arr. de Ba- yeux) Employé des douanes et des contributions indirectes ; probablement de Zare comme Tarif, ou de Tarin, espéce de monnaie : c’est sans doute le méme mot que Tarinlier, dont Carpentier n’a pu déterminer la signification. TARLATANER, V. 0. (arr. de Mortagne) Parler bruyamment pour dire des riens, comme un charlatan. Tartu, adj. (Eure) Avarié, de Tare; il ne se dit que du blé. | TARovurLE, s. m. (Orne) Hom- me dont les sourcilsse joignent. 204 TAY Tasse, s. f. (Orne) Il n’est employé que dans la phrase Lasse de bois, Bouquet de bois: il avait la méme signification en vieux-francais. Tatin,s.m. Coup. Il signifiait en vieux-francais Embarras , Inquiétude : , Sourges me donne ce fatin Et a plusieurs de ma livrée. Poésies de Charles @ Orléans ‘ p. 342, éd. de M. Champollion. Voyez le mot suivant. TATINER, V. n. Chuchotter ; probablement on y rattachait d’abord quelque idée d'insulte; car fata signifiait en proven- cal Cri pour effrayer, et Tatin signifieen breton Railleur, Que- relleur. Taupion, s. m. (Orne) Indi- gent; Qui habite un taudis. TAULocuer, vy. a. Frapper a coups de poing, Secouer rude- ment ; de Taloche. TauniQug, s. f. (arr, de Vire) Femme insipide. Taure, s. f. (Orne) Vache, Femelle du tawreau. Tauraus, s. m. pl. (Orne) Gros sahots. Tavecé, adj. (Eure) Avarié ? littéralement Taché : il ne se dit guéres que du blé. TAYAUDER, V. n. Brailler; lit- téralement Crier tayaud comme les chasseurs. On Se sert aussi de Tayaud dans le sens de Braillard. Tayon, s. m. Ayeul; il se trouve aussi dans le patois pi- card et vient sans doute du grec Oztoc, Oncle; la méme liai- son existait en latin entre Avus et Avunculus. TEU Treor, s. m. (arr. de Mor- tagne) Tét de pot, pouvant en- core servir & quelque usage : peut-étre du latin Tegulum. TEIGLER, TEIQUER, Vv. un. Tousser. Tenre, s. f. (Manche) Filet que l’on tend avec des pietix sur les bancs de sable. Téque, s. f. Balle, Paume a peut-ctre de langlais Take, Prends, Recois, que les en- fants disent en se jetant les balles. Tepe, adv. (arr. de Bayeux) Peut-étre. | TERMER, V. a. et n. (arr. de Valognes) Convenir d’une chose, littéralement, Fixer un ferme ; du latin Determinare : il avait la méme signification en vieux-francais. TERPENNE, S. f. Dévidoire. TERQUER, TEURQUIER, Y. a. Tordre. Ne terque tant les croqs de ten muzel. Muse normande, p. 13. TERRAGE, Ss. m. (arr. de Mor- tagne) Enterrement. Tertous, adj. pl. Tous sans exception ; corruption par mé- tathése de Tretous ; Voyez ce mot. TETE DE CaprE, s. f. Grand capuchon noir que: les femmes mettent pour communier et pour suivre les enterrements : Cest aussi un bonnet imper- méable que l’on met sur sa téte quand il pleut. Trurouet, s.m. Manche de fouet, fait de bois tordu. TEuRQUETTE, s. f. Lien en paille ou en foin; Dorca en vieux-provencal : peut-étre de lislandais Dorga, Saisir , En- TIN tourer. A Caen on donne aussi ce nom a une sorte de gateau qui ala forme d'un gros lien ; le francais Tourte a eté crééde laméme maniére. | Tréz1, Tiézant, adv. Tout doucement ; littéralement en se tarsant. Tic, adj. (arr. de Vire) Im- pair; on dit ailleurs Tipe et Tiple ; peut-étre de Multiple. TrERCELET, s. m. Epervier ; parce que le male est un tiers plus petit que la femelle; on appelait en vieux-francais Ma- riage dépervier, celui ou la femme se mésalliait. A Valo- gnes on dit Etiercelet. Tiratt, s. m. (arr. de Valo- gnes) Croiite de lait. TienassE, s. f. Chevelure ;il ne se prend qu’en mauvaise part et vient sans doute de Teigne ; \e patois rouchi donne la méme signification & Te- " gnasse. TiGNoN, Ss. m. (arr. de Rouen) Querelleur, ou peut-étre Téte a perruque. Maugre z’en et bleu des tignons Qui trahissent leurs compagnons. Muse normande, p, 34. Le vieux-provencal Tinelh signifiait Querelle, Contesta- tion. TiINSONNER, Vv. a. (arr. de Mortagne) Activer, Presser ; peut-étre d’Attiser. TINTENELLE , TINTERELLE, S. f. Grosse sonnette que l'on porte en téte des processions ; du latin Tintinnabulum. Tintouin, s. m. Inquiétude , Embarras et par suite Manie. Qui nousa mis ces tintouins TOM Et ce mal dans la teste. Ottvien BAsseLin, Vaux-de-Vire, p. 186, éd. de M. Travers. 205 Peut-tre une corruption du vieux-francais Jatin dont la signification était la méme ; voyez ce mot. Trponer, v. n. (arr. de Va- lognes) Habiller, Atiffer. TirneEr, v. a. Traire; ce sont deux dérivés du latin 7rahere. Trrovux, adj. Lent, Tatillon. Tuer, s. m. (arr. de Valo- gnes) Tisserand , Toilier. ToatLte, s. f. Nappe, Ser- viette, KEssuie-mains; il se trouvait aussi en vieux-fran- cals : Mais cele fist avant covrir Les pastez soz une touaille. Du prestre et de la dame, v. 36. Il vient sans doute de Tela, dans la basse-latinité Tobalea , dont on a sans doute formé Tablier, ou de Vislandais Toa, Linge. Chaucer a employé To- waile dans la méme acception et Kuonrad von Wurzeburc Twehele. Le patois de la Haute- Auvergne a conservé aussi Touarlla. Tocarp, s, m. Tétu ; littéra- lement Homme qui se Toque ; voyez ce mot. Tocson, s. f. Femme dont les maniéres sont grossiéres et la parure de mauvais gout; lit- téralement Qui touche du son , Vachére: dans le patois de Rennes}, ce mot est masculin et signifie Un homme grossier, sans education. Torcn&E, s.f. Volée de coups, Peignée ; voyez TIGNASSE. Ton, s. m. Traitre.. TOMBER DE MAL (arr. de Va- 206 TOQ Jognes) Avoir le mal caduc; Symonet Harpin.. besgue, fol, lunatique, malade et cheant du mal d’avertin ; Lettres de grace de 1382. Avertin vient du laiin Adversarius , Ennemi , nom que l’on donnait au diable pendant le moyen-age ; il est fortremarquable que |’épilep- sie et la possession du démon solent exprimées en arabe par leméme mot ; voyez les Notices etextrarts des manuscrits de la Bibliotheque du Rov, t. x , p. 24. On dit encore en francais Tomber du haut mal. Tonprg,'s. m. (arr. de Cher- bourg) Amadou ; de l'islandais Tundr , Allumer : il existait aussi en vieux-francais : De venerie i a oustil Le quenivet et le fuisill , Et li tondres et li galet Et moult arme de maint abet. Partonopeus de Blois. Tundre ala méme. signifi- cation en breton. TontrEssE , s. f. (arr. de Vire) Voyez Tourniresse. Togus, s. f. Coup a la téte-— Vieille femme radoteuse; voyez le mot suivant. TogvE, part. pas. Un peu fou ; littéralement Qui a eu la téte frappée et par suite félée : il se trouve aussi dans le patois de Langres et dans: celui du Berry. Toguer, v. a. (arr. de Ba- yeux) Frapper , Heurter ; on le disait en vieux-francais, et il s'est conservé dans Toc-sin et Toucher un cheval , comme en provencal : Ab aquestas paraulas an lors sau- miers tocatz. Fierabras , v. 4011. TOT M. Hugo a méme dit dans Notre-Dame de Paris, \. vu, ch. 7: Sept heures vont Toquer. Mais Toquer signifie le plus souvent Frapper de la téte, et Yon en a fait le substantif Tocard , Entété, qui bat les murailles avec sa téte. | Togurt, s. m. (arr. de Ba- yeux) Bonnet, Toque. | Toner, v. a. et réfl. S’habil- ler, Ajuster; on dit aussi S’é- torer; probablement de Res- taurer. Toruiere , adj. f. (arr. de Coutances) [l ne s'emploie qu’a- vec Vache et signifie une vache qui ne peut se reproduire. TORNIOLLE, s. f. (arr. deVa- lognes) Soufflet qui fait Towr- mer la téte ; dans le patois du Berry on dit Torgnolle. Tort, part. pas. Tordu, Tors; cette forme se trouvait déja en vieux-frangais : i Qui sa glaive a arriere traite, Toute sanglante et toute torte. Robert le-Diable, fol. F, 41, recto, col. 2, éd. de M. Tre» butien. TorkE, s. f. Rotie. Furluchés ainchin que des cogs Qui ont mangé de: la totée. Muse normande, p. 27. I] se trouvait aussi en vieux- frane¢ais : | Se toute la lignee d’Adam estoit dam- nee Dieu n’y perdroit en soy une feve frasee : Tout ainsi je vous dy que s’elle estoit _Sauvee Mieulx ne luy en seroit en soy d’une totée. JEAN DE Meunc, Codicille, v..243. Probablement du latin Tos- tus, Roti ; dans le patois de Rennes Teutée signifie Ribote. TOU Toron, s. m. (arr. de Bayeux) Trognon de chou. TovuatLLon, s. m. Torchon; voyez TOAILLE. TOouicner, V. a. (arr. de Vire) Battre ; littéralement Traiter comme une chevelure en dé- sordre, Peigner ; il a la méme signification dans le patois de Langres. TOUILLER, V. a. Salir, Souil- ler; probablement de Touarl- lon; on dit encore proverbiale- ment Sale comme un torchon : il se trouve aussi en rouchi et dans le patois de Langres : & Nancy Touyer signifie Mélanger , Brouiller. Tourn, s. m. (arr. de Bayeux) Saligaud ; on dit proverbiale- mentSale comme une perruque; voyez le mot suivant. ‘OUINE, S. f. (arr. de Bayeux) Perruque , Chevelure sale. (Orne) Tabatiére ot! l’on ne peut mettre qu'un doigt. TouinTourn , s. m. (Orne) Trés-petit morceau. TountEux (arr. de Vire) Fai- néant, Vagabond; dans I’arr. de Bayeux on dit Towontous ; VOYeZ TOURNIRESSE. Tourtn, s. m. Sabot ; Toupie ue l’on fait tourner & coups de fouet. TOUPINER, V. n. Tourner sur soi-méme comme un Toupin ; le francais dit Toupiller. TOURNIOLLE, S. t (Orne) Es- péce de panaris. TOURNIRESSE , S. f. (arr. de Valognes) Femme sans con- duite, qui, au lieu de travailler, tourne de cété et d’autre. Tournous , Ss. m. (arr. de Saint-Lo) Rouet ; littéralement Outil qui towrne; en vieux- TRA 207 francais Tournerette. Tourp, s. m. (Manche) Petit village au bord de la mer ; il y a des Tourps a Anneville enSaire et aQmonville (Hague): on dit aussi Tourpelus. Ce mot qui vient sans doute de Vis- landais Thorp , Village, s'est conservé aussi dans quelques noms de lieu : ainsi, par exem- ple, Clitour vient certaine- ment de Klein Thorp , Petit village. TourteE, s. f. Pain de six ki- logrammes, auquel on donnait autrefois une forme circulaire comme au TJortillo du vieux- provencal et & nos Tourtes de patisserie. Ce mot avait le mé- me sens en vieux-francais : Se vilains ont escharcement Pour vivre de la tourte bise, C’est grant plante ; ce lour suffise. M. TresuTien , Du roi Souvain, fol. A. III, vo. TousEr, v. a. Couper, Ton- dre ; on trouvait la meme forme en vieux-francais : N’aux nopces du saint espouse N’entrast homme rez ne touze. JEAN DE MEuNG, Testament, V. 347 Tour DREIT, adv. (arr. de Va- lognes) A instant ; littérale- ment Sans se détourner ; ilse trouve aussi dans le patois bressan : L’Isabiau , to dray an antran Comanchi no bala féta. Noéls Bressans, p. M4. TourTrE, Vv. n. (arr. de Bayeux) Tousser. TRABUQUER, V. a. Traverser ; littéralement Mettre une bu- che, un obstacle en travers; il se trouvait aussi en vieux-fran- cals : 208 TRA Ef pour ce Dieu le trabucha. Nativilé de Notre-Seigneur Je- sus-Christ, dans M. Jubinal, Mystéres inédits, t. I, p. 25, Vv. 5. Le francais Trébucher a pro- bablement la méme_ origine quoique sa significatien soit fort différente. TRAcHiER, V. a. (arr. de Va- lognes) Chercher ; en patois vendéen Trecher ; on dit aussi Trucher, commeen vieux-fran- cals. Trapa, s. m. (arr. de Ba- yeux) Part, Portion.—(arr. de Cherbourg) Salaire. TralRE , v. a Tirer; nous avons déja vu qu’en patois Tirer avait la signification du francais Traire ; ces différences n étaient pas non plus respec- tees parl’ancienne langue : La verrez barbes traire e gernuns si peler. Vouvage de Charlemagne, v. 588. Tratves, s. f. pl. (arr. de Pont-l’Evéque ) Jambes; en vieux-francais Traller signi- fiait Aller , Courir: Laison a seurre cest traller. Tristan, t. I, p. 75, Vv. 1488. On dit encore dans le style familier Tréler. Tran, Train, Ss. m. Pis de vache, Ceque l'on tratt; voyez TRION. TraPINn, Ss. m. (arr. de Cher- bourg) Grand et gros panier rond a deux anses; du. latin Trabutus , comme le francais Trapu. _ _Traguette, s. f. (Orne) Cre- celle. TrasonzE , s. f. Dévidoir ; TRE on dit aussi Travonée, Tra- vourl en vieux-francais. TRAVERGUER, v. a. Embar- rasser ; corruption de Traver- ser ; dans l’'arr. de Mortagne on dit Traveucher. Travers, s. m. (Eure) Sillon de blé en sens inverse des ‘au- tres, de travers. Traviau, adj. (Orne) Turbu- lent ; littéralement Qui ¢tra- verse, ou travarlle, Incommo- de en vieux-francais : Trese, adv (arr. de Mor- tagne) Beaucoup; ¢’est proba- blement un mot formé de Trés- bien. Trepatne, Ss. f. (arr. de Ba~ yeux) Refrain, Fadaise; c’est probablement une corruption du vieux-francais Trudaine: Las ! fevez-vous, il est malade Passé deux moys, ou six semaines; Et s’il vous dit, ce sont trudaines, 1] vient d’avec moy tout venant. Farce de Pathelin. Trepame , s. f. (arr. de Ba- yeux) Ancre de secours pour les bateaux pécheurs. TREEPLEE , s. f. (Orne) Clo- porte. ) TRreF, Ss. m. Poutre; il se trou- vait aussi en vieux-francais : Porquoi vois-tu un festu en le oel toun frere, et ne veis-tu un treef en toen oel; Bible saint Mathieu, ch. xu, v. 3. On trouve encore dans le patois de Nancy Travette, Traivatte ; Solive, Poutrelle, et dans le patoisde Langres Travelot dont la signification est la méme. Il vient plutdt du latin Zrads, Poutre, que de lislandais Tre, Morceau de bois. TREFFEU, TREFFOUEL, Ss: m. Grosse buche qu'on met au feu TRE la veille de Noél et qui doit du- rer pendant les trois jours de féte ; il vient sans doute du mot précédent. (Poutre du feu) ou de Tres foci Trois feux. A Metz on appelle cette buche Treffan, dans le Berry Trouffiau, en Bourgogne Suche de Noél ; en vieux-francais elle était nom- mée Treffouel : Magnus truneus in capite ignis... dicitur Zetro- poficnium, vel Ligni ful- cium... gallice Treffouel ; Com- mentaire du dictionnaire de Jean de Garlande, dans Gé- raud, Paris sous Philippe-le- Bel, p. 601. Cet usage existait aussi en Angleterre : Come, bring with a noise My merrie, merrie hoyes, The Christmas log to the firing ; While my good dame, she Bids ye all be free And drink to your hearts desiring. Hernick, Ceremonies for Christ- masse. Probablement méme il re- montait aux temps payens, car on appelle cette buche en diffé- rents endroits Yule log et Yule clog (feu d'Tule). TREIZEAU, S. m. Monceau de gerbes ; d’abord sans doute on en mettait ¢recze afin que la dime qui était en quelques en-- droits du treizieéme fut priseplus facilement; mais on n’en met plus maintenant que dix. Trise, s. f. (Orne) Sentier tracé dans la neige : Travge si- gnifie dans le patois du Jura Passage, et le francais Trajet semble avoir la méme origine (Trajectus). Trio, s. m. (Orne) Tige de choux. Tremaine, s. f. (Manche) TRE 209 Tréfle qui se récolte tous les trois mois; ilsemble ainsi venir du grec Toinvacog plutdt que du vieux-francais Trémoie ; VOYeZ TREMEZ. TrEMEUR, Ss. f. (arr de Vire) Frayeur ; du latin Tremor : il Se trouvait aussi en vieux-fran- cais : Mais tant estoit la vieille haye par tout le pays, que, se pour double et tremeur de Ly- Slart ne fust, en puys ou ri- viere l’eussent gettée ; Roman de Gérard de Nevers. TREMEZ, s. m. Petit blé que Yon récolte trois mois aprés _Pavoir semé; ce mot se trou- vait aussi en vieux-frangais (Tromensis). Trémone, s. f. Grosse clo- che ; du latin Tremundus, qui fait trembler. TREMUER, V. a. (arr. de Vire) Effrayer ; du latin Tremere. TRESSAUTER, V. Nn. Tressaillir; il se trouve aussi dans le patois de Langres; le vieux-francais employait dans un sens analo- gue le substantif Tressaut. TRESSOIR, S. mM. Sceau. TRESSUER, V. n. (arr. de Va- lognes) Suer beaucoup ; il avait le méme sens en vieux-fran- cais : Que j’ai si caut que je tressu. Roman de la Violette, p. 165. En vieux-francais Trés s'a- joute souvent aux verbes, com- me aux adjectifs, pour renfor- cer leur signification, nous di- sons encore Trépasser et Tres- saillor. TrestouT, adj. Absolument tout ; c'est une forme superla- tive dont on a fait un seul mot comme en vieux-francais : 44 210 TRE Qui eut d Egipte la baillie Et trestoute la seignorie. Wace, Etablissement de la Féte de la Conception, p. 18, Vv. 6. Trev, s. m. (arr. d Avran- ches) Pétrin ; en vieux-francais il aurait signifié Blutoir sui- vant Roquefort, t. 11, p. 655. TREULER, V. n. Paresser, Fai- néanter ; c’est probablement une corruption de 7réler, Cou- rir ca et la. TREULIER, S. m. (arr. de Va- lognes). Fainéant, Homme qui parle au lieu de travailler. TREUNER, V. n. (arr. de Mor- tagnes) Il exprime le chant de la poule qui va pondre; on dit aussi quelquefois Traner. TREUTER, V. n. Peter. TRIAS, s. m. (arr. de Bayeux) Embarras; peut-étre de l’an- glais Trial, Accusation (Trier en vieux-francais signifie Plai- der) ou Zry, Eprouver ; au moins donne-t-on quelquefois ce sens au francais Epreuves; Trigas avait aussi cette signi- fication en vieux-provencal, et le francais Trigaud semble avoir la méme étymologie TREBAR, S. m. Collier formé de trots barres. de bois qu’on met aux pourceaux pour les empécher de passer au travers des haies. TREBARDER, V. Nn. (arr. de Mortagne) Aller de cété et d’au- tre, Chanceler comme un ivro- ene. TRIBOUILLER, V. a. (arr. de Vire) Troubler, Causer de la tribulation ; le vieux-francais ~ employait Je substantif T7r:- bourl dans un sens analogue : Dieu scait en quel tribouil et tourment ilest; Les quinzejoies TRI du mariage, p. 182. TRIBOULER, V. a. Troubler, Tourmenter, et par suite Déchi- rer, Mettre en mauvais état ; ces différentes significations se trouvent aussi en vieux-fran- cals : | Sy les triboulons pour savoir En qui doivent fiance avoir. Miracles de sainte Geneviéve, dans M. Jubinal, Mystéres inédiis, t. Il, p. 19€, Vv. 25. Puisqu’ensi voi mon pais triboler. Mort de Garin le Loherain, v. 3588. Dans l’Orne on dit que les has qui tombent sur les talons sont Triboulés. Ce verbe s’em- ploie aussi avec le pronom et signifie, comme en rouchi, Se donner beaucoup de peine; le vieux-francais semble s’en étre servi également avec cette ac- ception : Et tant ont quis et triboule Que de l’querre sont tuit lasse. Li Chevaliers au Lion, dans Keller, Romvart, p. 555, V.- 11. Il vient probablement del ’is- landais Trubla, Méler, Con- fondre. Tricon, Ss. m. (Orne) Brelan; on a tricon de bihourt quand on a dans sa main deux cartes de méme espéce et une qui les suitimmédiatement, comme deux rois et une dame: c'est aussi le nom du jeu que l’on appelle ailleurs Trion. TRICOTER, Vv. a. Battre avec un tricot; Remuer vite et sans cesse comme des aiguilles avec lesquelles on tricotte; il signi- fie aussi quelquefois a l’actif Manigancer, Mal arranger, comme dans le patois des en- virons de Paris: TRI Encore un coup si le Saint-Pare Tricotte tout ce biau mystere. Pieces et anecdotes intéressan- tes, t. I, p: Al. Tricousss, s. f. pl. (Orne) Bas de tricot sans pied; Gué- tres en toile qu’on appelait en vieux-francais Triquehouses. Ce mot désigne aujourd’hui en rouchi et dans le patois du Ber- ry des bottines en drap ; dans la Meuse on donne aussi le nom de Tricousses & une espéce de guétres. Trizrre, s. f. Petite poutre ; voyez TREF. Trirorre, s. f. Trirovet, sg. m. Grosse buche ; voyez TREF- FEU. TRIGNAC, Ss. m. (arr. de Ba- yeux) Sou-marqué excellent ; cest le nom d’un faux=mon- nayeur dont la monnaie valait beaucoup mieux que celle du roi, qui fut pendu sous la Ré- gence. TRIGOULLIS, s. m. Mauvais bas de tricot. TRILAIs, S. m. (arr. de Va- lognes) Cloison, Treillis; du latin Trilia, TRIMBOUELLER, y. a. Culbu- ter, Chanceler ; dans l’Orne on se sert aussi du substantif Trimbouelle, Culbute ; proba- blement c’est le méme mot que le francais Trimballer. Trinca_g, s. f.Bureau oull’on ercoit les droits de péage; pro- baptetiarit ces bureaux étaient d’abord composés de simples treilles en latin Trechila; selon Roquefortle vieux-francais Tri- gale aurait signifié, sans doute pour la mémeraison, Cabaret. Trincug, s. f. (arr. de Mor- tagne) Petit-lait. TRI 214 TRINGUET, Ss. m. (arr. de Vire) Moyen qui réussit. Ce mot signifie aussi, comme sur les berds dela Méditerranée, le mat de misaine : N’ayant plus rien sinon De trinquet qui soit bon. Chansons normandes, p. 52, éd. de M. Dubois, TRIOLLIER, TRIOLLY, s. m. Tribune d’église. Trion, s. m. Pigs de vache ; ce nest pas probablement une corruption de Trayon (ce que lon trait) car le vieux-francais avait Trian : N’aveit encore en sain ne trian ne mamele. Roman de Rou, v. 1343. Peut-étre ce mot vientzil de Vislandais Trioni, Bec, Bout, ou de 7reya, Gorge, Poitrine ; le vieux-francais Pis a subi un changement semblable. TRIPER, V. n. Danser; de Tripudiare; comme Trépigner; il existait aussi en vieux-fran— cals : Quant de ma biaute me souvient Qui ces vallez fesoit triper. Roman de la Rose, ¥. 13214. Dans le patois de I’Isére Trepasignifie Fouler aux pieds. Tripot, s. m. (arr. de Valo- -gnes) Marché; farr. de Bayeux) Halle au blé;a Pont-l’Evéque, ce mot a recu une nouvelle ex- tension de signification, on Im donne Je sens de Tumulte. TRIQUEFARER, Y. a. et n. (arr. de Vire) Déranger, Agir comme un étourdi. TRIQUENIQUE, 3. m. Querelle de peu d’importance ; peut-étre ce mot qui se trouvait aussi en 242 TRO vieux-francais vient-il du grec Tpryow vEerxos el signifie-t-il lit- teralement Dispute pour un cheveu. TRIQUER, V. a. et n. (arr. de Vire) Sauter; littéralement Jouer des ¢riques, nom que l’on donne aux jambes par une me- taphore injurieuse. Trocue, s. f.. (Orne) Foute- laie; Petit bois de hétres. Troeng, s. f. (Orne) Ventre. Trompe, s. f. (arr. de Valo- enes) Erreur; du francais Tromper. : TroncueE, s. f. (arr. de Vire) Téte. Trop a coup, adv. (arr. de Valognes) Trop t6t. Tros, s. m. Pétrin ; voyez TREU. TrovuiL, TrevutL, Trous, Ss. m. Espéce de dévidoir dont on se sert pour mettre le fil en e- chevaux ; elle avait différents noms en vieux-francais ; dans le dictionnaire latin-francais de la Bib. de Lille, marqué E, 36, on trouve Troul expliqué par le bag-latin traole, et on lit dans le Commentaire sur le dictionnairede Jean de Garlan- de: Trahale dicitur a Traho, gallice Traail ; Paris sous Phi- lippe-le-Bel, p. 606. Une autre origine ne serait pas cependant impossible, car en breton Tro ala méme signification et le vieux-provencal Trou ne sem- ble pas dérivé du latin. Cest peut-étre & ce mot que se rap- porte le vieux-frangais Trowet que nousn’avons vu employer, que dans un passage ot I! est pris dans un sens trop meta- phorique pour que sa significa- tion ne soit pas douteuse : TRU Sire, il veult filer au trouet Sus les cotez de cest apostre. _ Martyre ¢e-saint Denis , dans M. Jubinal, Mysiéres inédits, t. L, p. 129, Vos. On se sert aussi dans ce sens du verbe Zrowiller, Trewller. TROUILLER, V. a. Souiller ; il a le méme sens dans le patois du Berry,et Roquefort lui donne en vieux francais le sens de Chiffonner en pressant; Glos- saire dela langue romane, t. Il, p. 662; mais nous ne l’y connaissons qu’avec le sens de Séduire ; . Tant le truilla et le charma Que li lecherres s’en ala. Fabliaux ct contes anciens , t. LI, p. 83. Trouine, s. f.-(Orne) Peau .de eochon tannée ; du latin Trova ; dans \’arr. de Coutan- ces on dit Tromn. TROUSSEPIN, S. m. Enfant es- piégle ; peut-étre le méme mot que Goussepin. TrousSE, part. pas. (arr. de Vire) Chargé ; de Vislandais Truss, Paquet: il était’ aussi passé en vieux-francais : Trez mulez lor a fait d’or et d’argent troser. Parise la Duchesse, p. 69. On dit aussi au figure Un homme bien troussé, pour si- enifier Un homme agréable, bien fait. Trooute, adj. Caillé; il ne se dit que du lait; dans quelques localités on prononce Treuté. TRUBLE, S. m. (arr. de Va- lognes’ Béche; il se trouvait aussi en vieux- francais : O trubles et o forches les fierent main- tenant. Roman de Rou, v. 4280. US Truc, s. m. Il ne s’emploie guére qu’avec le verbe avoir et signifie Etre rusé, Etre adroit; il se trouve aussi en rouchi et semble venirdel anglais Trick, Adresse; mais, comme ce der- nier mot, il ne se prend pas dans un sens défavorable. Trucien,'s. m. (Orne) Instru- ment dont se servent les me- nuisiers pour tracer des para!- léles. ’ Trumutu, s. m. (arr. de Va- lognes) Bruit, Vacarme ; de Vislandais Thrumuw, dont Vidée premiére exprimait certaine- mentle drut, puisqu’il signifie 4 la fois Tonnerre et Combat : ce mot pourrait étre aussi une corruption du latin Tumultus. Tuite, s. f. Ardoise ; c’est la couverture habituclle des mai- sons riches, et le latin tegulum était devenu en vieux-proven- cal et en catalan Teulat, Toit —I]] signifie aussi Une poéle plate en fer qui sert particuli¢- rement a faire de la galette, Urres, s. m. pl. (arr. de Va- lognes) Yeux. Us, s. m. (Manche) Porte ; on le trouve aussi en vieux- francais : Vint a lus de la cambre u li reis Hugon gist. Entre-uvert l’ad trouved, si s’en est venuz al lit. Voyage de Charlemagne, V. 620. UVE 2413 que l’on appelle aussi, Havtier ; c'est probablement une corrup- tion du vieux-francais Tulreu que Roquefort, t. u, p. 668, explique par Certain ustensile de ménage. TurET, s. m. (arr. de Caen) Batte 4 beurre; en vieux-pro- vencal Turtar signifie Heurter, Frapper, Battre. TuRLUETTE, S. f. (arr. de Ya- lognes) Cornemuse et, par ex- tension, Tout instrument de musique ; il se trouvait aussi en vieux-francais : Quant el chef out le chaperon, EK la panere, e le baston, E la verge, e la macuette, Pendue al cou Ja turluette, Riens nesembla sos ciel meins sage. Benois, Chronique rimée, |. 11, V. 28530. On se sert encore en francais de Turelure, Refrain, qui acer- tainement la méme origine. Turne s. f. Cabane, Petite maison ; ila la méme signifi- cation dans le patois de Lan- gres. Mais la forme Huis a préevalu et s’est conservée dans l’ex- pression A Auis clos et dans le mot Huissier ; du latin Ostvwm. Usisie, adj. (arr de Morta- ene) Précoce, Avaneé; littera- lement D’usage, Qui peut ser- vir. ; Uver, v. a. (arr. de Vire Mouiller ; du latin Uvescere. 214 Vaca, adj. ind. En friche, sans culture; du latin Vacuus; le francais emploie Vague dans le mémesens et on disait autre- fois Vacque: Done les maistre d’hostel et fourrier dudict sei- gneur de Painensac, pour sca- voir si ailleurs en la maison estoient estables vacques sa- dressarent a Gargantua; Rabe- Jais, 1.1, ch. 42 VAGHICOTER, v. n. (arr. de Bayeux) Barboter. VADET, S_ m. Manche de chantepleure, gue va et vient (vadit). ' Vate,s. f.Chemin dans toutes ses acceptions , Vove. Cette cor- ruption du latin Via existait aussi en vieux- francais. Cist Josias fist co que Deu plout e tint les bones veies sun pere David, si que il ne guenchi ne a destre nea senestre; Livres des Revs, |. tv, ch. 22, v. 2, p. £23,éd. deM. Le Roux deLincy. Vain, s. m. Loupe. VAISSEAU, S. m. (arr.. de Mortagne) Pipe, ailleurs Ton- neau. VAISSELIER, s. m. (arr. de St-Lo) Buffet ot lon serre la varsselle. VALANDIER, §. m. (arr. de St-Lo) Pivert. VALENTIN, S. m. (arr. de Bayeux) Galantin; en anglais Valentine signifie Amoureux ; Futur époux ; le vieux—francais Valantn avaitaussicette signi- fication. VALETER, V. n. (arr. de Ba- eux) Courir ; fréquentatif du atin Vadere. Vanvo.e, s f. Chose légére ou inutile que le vent emporte; il se trouve aussi en vieux- francais : ®vimaut voit que il n’ia plus, Et que il tient tout a vanvole Certes son dit ef sa paro'e. Roman de Renart, t. 1, v. 3908. Vaguiz, s. f. (arr. de Ba- yeux) Soupe ou Bouillie aussi claire que le manger des va- ches. VARAND, S. m. Fainéant, Mauvais sujet ; voyez vARou. VareT, s.m. Guéret, Terre encore inculte : Je déméneray mes berbiettes Aux vuarets paitre. Chansons normandes , p. 166 , éd. de M. Dubois. Cette forme est restée aussi dans le patois normand ; pro- bablement du bas-latin Warec- tum. VaRIBOT, S. m. (arr. de Ba- yeux) Bourbier; on dit aussi Varabot et Varvot: Item une piece de terre qui a son entrée par le varabot de Cremelle ; Titre de 1645 rapporté par Pluquet, Contes et préjugés po- pulaires de larrondissement de Bayeux, p. 143. Vart-vara, adv. (arr. de Ba- yeux) En désordre ; dans le pa- tois de I'Isére , Vared signifie Embarras ; voyez le mot sui- vant. VAS Varou, s. m. Loup garou, Homme d’une sauvagerie gros- siére. Ce mot vient sans doute du norse Varg, Loup, qui se trouve déja dans la lov Ro- puaire, tit. LXxxxvit : Wargus sit, hoc est expulsus, mis hors la loi, ce que la loi anglaise -appelait Porter une tétedeloup. Une autre origine ne serait ce- pendant pas impossible car Marie de Francea dit dans son Lai du bisclaveret : Bisclaveret ad nun en bretan Garvall Vapelent li Norman. Poésies, t. I, p. 178. et on litdans l Ota amperialia de Gervasius Tilleberiensis, publié par Leibnitz, Rerum brunsvicarum scriptores, au chapitre De oculis apertis post peccatum : Vidimus in Anglia per lunationes homines in lu- pos mutari, quod hominum ge- nus Gerulfos Galli vocant, An- eli vero Wer-wlf: Wer enim anglice Virum sonat, WIf Lu- pum. VAROUAGE, S. th. Course endant la nuit, comme en font es varous. VAROUILLER, vy. n. Agiter de Yeau dans un vase, jusqu’a ce » quelle soit au moment de se renverser. Varvor, s. m. (arr. de Cher- bourg et de Coutances) Boue claire, Eau sale; on dit aussi Varva et Verva. VarvoOTER, V. n. (arr. de Ba- yeux) Marcher dans du varvot, Barboter. — Ilse dit aussi des chats en chaleur. VastTipousiinre, s. f. (arr. de Valognes) Femme sale, Servan- te de basse-cour; probablement VAU 215 du breton Gast, Femme débau- chée. Vaton, s. m. Baton. VATONNER, V. N. Serrer avec une corde au moyen d’un ba- ton ; voyez le mot précédent. VatTre, S. f. Boue, Fange; de lislandais Vatn ou de l'anglais Water, Kau. Vatrer, Vv. réfl. (arr. de Ba- yeux) Se couvrir de boue ou d’ordures; en rouchi Vatrowil- ler signifie Avoir continuelle- ment les mains dans l'eau : vo- yez le mot précédent. VauBOIRE, s. m. (arr. de Ba- yeux) Varec détaché des ro- chers que tout le monde peut prendre. : VaucreE, s. f. Avalaison ; probablement il signifiait d’a- bord Inondation, car le viewx- francais Vaucrer signifiait Er- rer, Courir ¢a et la; peut-étre de Vagarv. VaucrugR, vy. a. Echauder, Mal cuire. - Vauprés, s. f. (arr. de Cher- bourg) Chiffon attaché au bout d’un baton quisert & nettoyer un four; on dit aussi dans le méme sens Vatrowille; voyez VATRER. VaAULE, s. f. Gaule, du breton Gwalen. Vauier, v. n. (arr. de Ba- yeux) Chanceler, Marcher com- me un Veule; voyez ce mot: on donne un sens analogue au substantif masculin Vauliard. Vaupas, s. m. (arr. de Ba- yeux) Balle de toutes les cérea- les: ce mot a été formé comme le francais Vawrien. | Vaugurer, VAUTIER, adv. (arr. de Mortagne) Vraisembla- blement, Peut-étre. 216 VEN VavitE, s. f. Diarrhée, Cours de ventre ; ila été formé par la méme idée que |’expression francaise. VEILLATIF, adj. (arr. de Mor- tagne) Vigilant, Qui surveille ; en vieux-francais on disait dans le méme sens Vellier. VEILLERI, Ss. m. Etable ow l’on se réunit dans les campa- gnes pour vevller. VEILLON, S. m. Mélange de foin et d'argile, avec lequel on entoure les greffes; dans le Dauphiné Villon signifie Un petit lien d’osier. VELADE, Ss. f. (arr. de St-Lo) Blouse, Surtout ; du latin Ve- lare, en vieux-francais Veler. VELOPER, V. a. (arr de Va- lognes) Battre, Donner une roulée (voyez ce mot) ; du latin Volutari ; dans Orne on dit Flauper. VELOUSSEUX, adj. (arr. de Bayeux) Paillard; du latin Vil- losus. | VENAILLES, Ss. f. pl. (Orne) Mauvaises herbes qui viennent sans étre semées. Ce mot signi- fie aussi Rebut des grains; lit- téralement ce que le. van a re- jeté; dans le patois de la Haute- Auvergne Ventilla signifie Cri- blures, ce que le vent emporte. Ving, s. f. Vesse; en vieux- francais selon Nicot et en rou- chi. Venne. VENELLE, S. f. Dans le sens de Petit chemin, ce mot s’est aussi conservé dans une ou deux locutions francaises, mais on appelle en Normandie la ‘Ruelle, Venelle du lit. VENT, s. m. Haleine; il semploie alors sans article Prendre vent, Perdre vent; ces VER locutions sont. aussi usitées dans le patois du Berry. VENTRILLONS (A), loc. ady aie de Cherbourg) Couché sur e ventre, comme A genowl- lons, signifie Sur les genoux. VENvuE, s. f. (Orne et arr. de Vire ) Quantité ; il n’est employé en ce sens qu’avec lartiele indéfini. Vérg, s. f. (arr. de Bayeux) Guépe ; du latin Vespa qui a subi en francais le changement si fréquent du V enG. VEPRE, S. m. Soir. Beuvons tous du vespre au matin. OLIVIER BAssELIn, Vaux-de-Vire, p. 220, éd. de M. Travers. On s’en servait aussi en vieux-francais : Dieu vous doint benoiste journee Et bon vespres, Monseigneur doulx. Farce de Pathelin. Du latin Vespera. ViEPREE, S. f. Soirée, comme en vieux-francais : Pour ce m’avint que chargie de som- meil Je me trouvay moult fort une ves- pree. Poésies de Charles d’Orléans , p. 144, éd. deM. Champollion. Voyez le mot précédent.. VirassE, s. f. Mauvais lit ; peut-étre le lit d'un verrat. VERDAUT, Ss. m. (arr. de Mor- tagne) Faiseur de mariages. VERpER, v. a. (Orne) Frap- per a coups de verge; selon Carpentier Verdoter aurait si- gniiié en vieux-francais Provo- quer quelquun en duel, et Verder signifie Repousser dans le patois de Reims. Vire, adv. (arr. de Valognes) VER C’est vrai, Vraiment; du latin Vere que le vieux-francais avait aussi conservé : Mes pour chose que argens vaille, Non plus que ce fust une paille ‘De bleid, ne m’en change ne mue: Ii semble voir qu’argens me pue. woe Le dit dou florin, v. On y trouve également la forme du patois normand : Or voil savoir des altres si mencunge est u veir. Voyage de Charlemagne, v.734. Dans l’arr. de Valognes, les enfants jouent quelquefois a une sorte de jeu qui consiste a répondre a toutes les questions sans se servir des particules négatives et affirmatives, et iis disent en commencant: J’te défends de dire ni oul, ni non, ni vere, jusqua ce que j sois repassé de la feire. Nous nous servons encore de Vovre dont lorigine est certainement la méme. VERGANDIER, S. m. (arr. de Bayeux) Petit houx (Ruscus aculeatus). Verche, s. f. (Manche) Me- sure agraire de quarante per- ches; en breton Gwalen signifie Gaule, Verge, et Gwalenna, Arpenter ; le vieux-francais Verger signifiait aussi Mesurer. VERGONDER, VERGOUGNER, V. a. Gronder, Disputer ; littéra- lement Faire honte que lon emploie dans le méme sens ; ces deux formes se trouvaient aussi en vieux-francais : Cointement celez Que ne soit vergondez Le fet tun cumpaignun. EVERARD DE KiRKAM , Distiques de (Caton, fol. 203, ro, col. 2. ViS 217 Ses longs cheveux et ses sourcis en- core De leurs beautez font vergongner l’aurore. RonsarD , Qiuvres,t.1, p. 102. VERHAULE, S. f. (arr. de Ba- yeux) Cours d’eau, Courant de a riviére. VERILE, Ss. m. (arr. de Ba- yeux) Reptile ; du francais Ver auquel on a ajouté !a terminai- son de Reptile. VERMINE, Ss. f. (arr. de Valo- gnes) Rats et souris ; c'est une extension de la signification du francais, Insectes et par suite Animaux nuisibles. VERNAILLER, V. n. Remuer, Faire du bruit ; probablement une métathése de Frénailler ; voyez ce mot. ERNAS, Ss. m. (arr. de St- Lo) Verrat. EROUILLER, V. n. Labourer malproprement; on dit aussi Varouvller, ce qui fait croire que ce mot est dérivé de Va- rou. VeERQuoI, s. m. Petit homme sans force; on dit en francais dans le méme sens: C’est un ver de terre. VeERRINE, S. f. Verrede mon- tre ; il a le méme sens dans le patois du Berry; on donnait autrefois ce nom aux morceaux de verre que !’on mettait au- devant des chasses et des ta- bleaux. VeRTAU, S. m. (arr. de Ba- yeux) Bonde de tonneau ; il se trouvait aussi en vieux-francais et vient sans doute du latin Vertere, Tourner. VerveTTE, s. f. (Orne) Petit enfant espiégle. ViESINER, ¥. n. Faire des vi- 218 VES sites & ses voisins, que le pa- tois normand appelle Vésins. VESONNER, V. n. (arr. de Rouen) S’agiter, Devenir fou ; du latin Vesanus : Et Morpou (I. Maupeou) cheuxli qui vezonne Aveuc des Jesuitres qu’il a. Coup-d’eil purin, p 2t. Visou, s. m. Jouet ; littéra- lement Fou; du latin Vesanus : eest un souvenir des plaisirs du moyen-age. VESPASIEN, S. m. (arr. de Va- lognes) Mauvais sujet, Vau- rien : Les chouans sont sous vos murs, déja ces Vespasiens Devorent de leurs yeux vos substan- ces, vos biens. Latteman, La Campénade, ch. {, p. 9. Quoique les soldats de Ves- pasien alent pu commettre de grands dégats en Normandie, en allant réprimer les révoltés de la Grande-Bretagne, cette expression semble avoir été in- troduite par les Juifs en sou- venance de Ja part que prit Vespasien a la destruction de Jérusalem : Vaspaciens, c’or fuissies vos or vis Ens el voloir et en la signorie Ou vos esties quant vos de ces juis Trente a denier donaistes en Surie, Ne demoroit sabais ne jeverie; Se dame Deus ne les voloit tenseir A martire fes feries devieir. LA VOLENTEIS DONT MES CUERS EST RAVIS, dans Wackernagel , Altfranzoesische Lieder ,p. 65. _ Au moins cet empereur joue- t-il un réle fort honorable dans légendes du moyen-age; ainsi, les par exemple, on lit dans le Roman du Saint-Graal,v.2357: VEY Vespasyens ainsi venja La mort Jhesu qu’il mout ama. On dit aussi Vaspasven. VESSINER.V. n.Roder autour; VOYeZ VESINER. VEsTON, Ss. m. Corset ; du la- tin Vestes ou du frangais Veste. VESTONNER, VY. n. Courir de cété et d’autre ; fréquentatifde Voster ; voyez ce mot. VEULE, adj. (arr. de Caen) Gréle, Etiolé, Qui se tient mal; peut-étre du breton Goulia, Blessé, le son des voyelles y était bien peu fixe puisque la Grande mauve s’y appelle sui- vant le P. Grégoire Goulen et selon Legonidec Gwelan. VEULER, v. n. (arr. de Ba- yeux) Beugler ; littéralement Crier comme un veau, que le vieux-francais appelait Veel. Vey, s. m. Passage dans leau ; on le trouve aussi en vieux-francais, quoique la forme moderne y soit plus fré- quente : As guez, ou la grant mer parfonde S’estent e espant e sorunde, Passa li reis, qui mult se haite, Quant eu se fu anques retraite. Benois , Chronique rimée, 1. i, V. 35899. Il vient probablement du la- tin Vadum ou de Vislandais Grata, Sentier, Chemin ; cepen- dant Guet avait quelquefois la signification d’Kau rapide, Courant : | Les reliques sunt forz, granz vertus i fait Deus Que il ne venent a ewe n’en partis- sent les guet ; N’encuntrent aveogle ki ne seit relu- minet, Les cuntrez i redrescent e les muz funt parler. Voyage de Charlemagne. v. 256, VIE Il pourrait donc venir delan- glais Water ou de lislandais Vat, Eau; cette étymologie semble méme d’autant plus pos- sible que, comme litalien Gua- dare, le vieux-francais Guaer signifiait Inonder; voyez le voyage de Charlemagne, v. 550. Vi, s. m. Gui; lev du latin Viscum ne s'est conservé que dans le patois. VIAGE, s. m. (arr. de Vire) Fois; c'est une crase de Voyage et au lieu de La premiére fois que jirai, on a dit A mon pre- mier viage. Vico,s.m. (arr. de Valognes) Bécasse: A la saint Denis les vicos sont & Brix, dit un adage des chasseurs. Ailleurs on dit Viteco, comme en vieux-fran- cais: Un witecoq, vint deniers; Compte (ms.) de U Hétel-Dieu d Evreux (1370) ; et cette for- me se rapproche beaucoup plus de l’anglais Woodcock. Dans le glossaire latin-francais de la Bib. de Lille, marqué E, 36, on trouve Videeog pour traduction d’ Alex, probablement Ales, et cette forme est aussi indiquée par Roquefort, t. 1, p. 713. VIEILLE, Ss. f. Eau; ce mot qui ne se trouve plus que dans quelques noms géographiques, comme Coulibeuf, Quillebeuf, en latin Guellebotum (Weale- buh). vient sans doute du sa- xon Weal, qui s'est conserve dans l’anglais Well. Il y avait un canonicat de la cathédrale de Bayeux dont le titre était Saint Pierre de la Vieille (Sanc- tus Petrus de Vetula dans les pouillés du diocése), et ily a encore & Valognes un quartier VIN 249 éloigné quis’appelle Le pont a la vieille. VIEILLOTTE, VIELLOCHE, s. f. Grosse meule de foin ; le vieux- francais disait Vierlle. ViETTE, s. f. Petit chemin ; diminutif du latin Vea. VicneT, s.m. (arr.de Bayeux) Lieu planté de Vignons; voyez ce mot. Dans le glossaire latin- francais de Ja Bibl.de Lille , marqué EH, 36, Vanetwm est ex- pliqué par Vignon. VicNoNn, ViGNoT, s. m. (Cal- vados) Genét épineux : L’un dort sur le vignon, l’autre sur la bruyére. LALLemAN, La Campénade, ch. II, p. 13. VILEVAUQUER, V. a. (arr. de Bayeux) Balloter. VILLoNER, v. a. Mettre un veillon ; voyez ce mot. VimBLeT, s. m. Tarriére, Vi- lebrequin ; c’est le mot anglais Wimble dont la signification est la méme. VineTTE, Ss. f. Oseille; pro- bablement une corruption de Vignette, petite vigne, dont le fruit est ordinairement fort acideen Normandie: il se trou- vait aussi en vieux-francais, et s'est conserve dans le patois de la Vendée et le francais Epzne- vinette. VinuvET, s. m. (arr. deCaen) Nom que l’on donne au vin d’Argences, qui suivant Huet, sienifierait Vin blanc et vien- drait de l'anglais Wine white; mais ils’est certainement trom- pé en supposant que ce sontles Anglais qui apportérent de Guyenne des vignes en Nor- mandie, car on lit dans un do- cument du XIII* sitcle : Se 220 VIR aucune (suers) qui soit mariée a fet en son mariage boenes mesons ou planté vignes ou marlé terre, elle choisira son mariage que elle a amendeé ; Marnier, Etablissements de Normandie, p. 43. Viper, Vv. n.Crierd’une facon aigué ; littéralement _ siffler comme une vipere. VIPILLON, s. m. Aspersoir, Goupillon ; du bas-latin Vul- prlro, dont la premiére lettre s était conservée aussi en vieux- francais. ViQUET, Ss. m. Petite porte, Guichet ; en anglais Wicket et en hollandais Winket. La for- me normande se trouvait aussi en vieux-francais : Vils fous, fait-il, e senz valor, Qui menastes vostre seignor Fors la vile senz mon congie, Ceo ne vos sera mais ottreie. Ne trespassez mais les wichesz. Benois, Chronique rimée, |. IL, Vv. 13699. Vire, part. pas. (arr. de Ba- yeux) Disposé ; il ne s’emploie gueres. qu avec l’adverbe Mal; eest une extension de la signi- fication du francais. VireT, Ss. m. (arr. de Bayeux) Petit morceau de bois garni de plumes, avec lequel les enfants s'amusent; ce mot vient peut- étre du nom de Vire, Vireton, que l’on donnait aux fléches en vieux-francais ; voyez VIROUS- SER. Virousss, s. f. (arr. de Va- lognes) Diarrhée ; voyez le mot suivant. VIROUSSER, V. a. Lancer de Yeau; Virer signifiait en vieux- francais Lancer, Jeter; du latin VOL . Girare. On se sert aussi dans un sens analogue du s. f. Vi- roussée. VIRVOUSSER, VERVOUSTER, V. n. Tourner devant derriére ; probablement du vieux-fran- cais Vare-voute, Volte-face. Vis, s. m. Opinion, Certitu- de; il ne semploie guéres qu’avec le verbe substantif et la préposition A; Mest a vis que. Cette forme, trés-commune en vieux-francais, a été presque toujours mal imprimée, quoi- que la préposition manque fort — souvent : ! Nest pas dreiz, co m’est vis, mais lei a volente. Guernes , Vie de saint Thomas de Cantorbéry, p. 11, v. 10, éd. de M. Bekker. Voyez aussi le Roman de Brut, v. 10634. Ce mot vient sans doute de Vislandais Visa Certitude, ou de lallemand Wissen, Savoir. ViTOUARD, Ss. m. (arr. de Ba- yeux) Source d’eau vive sur le bord de la mer; peut-étre de langlais Whote water, Eau blanche ; on donne aussi quel- ueiois ce nom a des sources ‘eau bourbeuse. . VIVAGE, S. m. (arr. de Cher- bourg) Sol pierreux. VOIDERIL, S. m. Carreau grossier qui forme la premiére couche d'une carriére. Vorron, s. m. Morceau de bois propre a servir de lévier. Voet, s.m. Ruban; d’abord sans doute Ornement; dans le patois du Jura ce mot est reste plus fidéle au sens du latin Ve- lum, il signifie Fichu : voyez BAVOLET. VoLETTE, s. f. Tirasse. YOU VosTER, Vv. n. (arr. de Ba- yeux) Courir gaet la, Remuer; ce mot qui signifiait aussi en. vieux-francais Tourner, semble une corruption de Volter, qui s'est conservé dans Voilte -face; car un lieu vouté s exprimait quelquefois par Voste. Dans quelques localités on dit aussi comme en vieux-francais Vous- ter. Voucg, s. f. Croissant, Ser- pe; il se trouvait aussi en vieux-francais, et on donne le méme sens, dans le patois du Jura, a Vuage. Vouin, s. m. (arr. de St-Lo) Regain. VousoyEr, v. n. Ne pas ty- loyer ; on disait en vieux-fran- cas Vosoyer. Xabi, s. m. Cidre compose par moitié de pommes et de poires ; voyez HALBI. Xuru, s. m. (arr. de Cher- Yan, s. m. (arr. de St-Lo) Gland. Yerrz, s. f. Tiroir; voyez LIETTE. Yousoux, adj. (arr. de Cher- bourg) Fruits ou légumes a- YU 234 VRAG, S. m. (arr. de Bayeux)’ Amas confus; 11 est plus sou- vent employé dans une forme adverbiale Ln vrac, En masse. — C’est aussi une corruption de Varech, ainsi que Vraa, qui désigne toutes les espéces de fucus. VreEpA, Sorte de jugement qui signifie sans doute Vrai Dieu. VREDEAU, Ss. m. Fausset, Cheville pour donner de lair aux tonneaux. VRoNnpDngE, V. 0. (arr. de Cher- bourg) Bourdonner. Vnou, s. m. (arr. de Bayeux) Eau gui sort d'un rocher ou du sable en bouillonnant. — Par figure sans doute on donne le méme nom & la Diarrhée. bourg) Graisse pour faire de la soupe ; on le trouve aussi en vieux-frangais ; voyez SUEU. queux ; on dit aussi Yausaux, et ’ Eau s’appelle de l Yaw en patois normand. Yu, s. m. (arr. de Coutances) Vétement raccommodé avec un morceau de couleur différente. ZIGUER, V. n. Lancer del’eau avec une seringue; ce mot se trouve aussi dans le patois du Berry. On dit quelquefois Zz- gler. Zozo, s. m. (canton des Pieux) Bouffon ;peut-étre une corruption de Joujouw; litalien Zam, que l'on appelle en Nor- mandie Jano, semble venir d’Insanus. ERRATA. P. 20, col. 2: Arronce, lisez: ArroussE, et retranchez leg deux derniéres lignes de cet article. P. 32, col. 4, 1. 24, Dictionnaire comique de Lacombe, lisez: Dictionnaire du vieux langage francois de Lacombe, p- 60. P. 44, col. 14, BourssonneR... Mettre en discorde, lisez: en désordre. FIN, Caen.—Imp. de F. Poisson et Fils.—1847. Mav Pace avi) Sy > VITAL, histoire de. Wesske, publiée par | Guizot, 4 ane in-8". aes > e e SAPEFIGUB, ‘essa sur. les inva- sions des Normands, 4 yol. in-8°. MUCAREL, antiquités anglo- -nor~ _mandes, | " tinéraire de la Wonaandie, 1 vol 8 ph. - ree irch ives. de la Noraianaie. 2g vol. ; Fémoire de la Société des Anti- -quaires, 10) vol. in-8°, 120 pl. . Joyage de Dibdin en France et purticuligrement en Norwandic, — CWO IMSS tk einen ey Ces oe Idem, grand papier... + a Wormandie weparees Noa os Jollection de vues et dessins de ja Normandie, 50 environ, 50 cent. ob Ge Re! 5: BY ak sea Zostuimes des cing ‘départements -composant Vancicune Normandie, £05 planches in-folio.. - 2 Description de Pabbaye. de St-Van- drille, par Langiois, in-8° fin. : 3a d papier. Eon ih F Es ur acc adiccnient de Beats Audemer, par Canel, 2 vol, in- ; 8, atlas. seins Histoire de Ja gale de ack ‘depuis gon origine jusqu et nos jours, par OM. Vautier,im-12..0. 0.05% idem, m-8°. Essai sur Caen, par Vabbé De la Rue, 2 vol. WEES oes Bait ‘aux Egsais sur la ville de C: aen, ay l'abbé Dela Rue, 2vol. in-8°, ales militaires de la ville de Caen, mise 1 epetone a son fp aioe Wl me reste un ‘OURE, histoire ou duché a Normandie (LLAUME DE JUMIEGES, : 3 - = =~ us 3 | boa par Pabbe | Dela Roe. <3) “ritoire, publ par” chanssées, g grand a Recherehes et origin Bras, 1 vol. in-8". Visite an collége roya’ Mémoire de l’Académie d de la ville Caen, 3 ae dn- 49, : Essai historique sur re pores Bayeux, in-8e, par Pl Pelkerches sur eet tap her! 3 Bayeux, par Del amiay gra il Recherches sur la tapisserie Bayeux, i vol. grand in-8 land, 8 planches. .° . Idem, pat Duearel, grand in-8* Recherches | sur Ten Thermes Bayeux, in-8°. 2 + 0. Recherches sur Falaise, par Li Wilh, DUAR DS ue aa Nobiliaire on archives de li de Normandie, eontenan de 1,500 famil les, tels ~ tes, cartulaires généalogie, Les titres de chaque camille. vendent separément. Essais historiques sur tes bard * ‘trouveres ctles jongleurs m et anglo-normands, par labb De da Rue, 3 grands yol. in-g° dure civile, par, eo zure, 2 vole m-4°... Procbs de Lemaire de Clermo Mémoires éerits en prison, ‘el a de bonne ite a - ts a , oo i“ ‘ ise ITY OF ILLINOIS-URB 89284